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08/02/2016 | FRANCE | N°15PA01089

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 08 février 2016, 15PA01089


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Airel a demandé au Tribunal administratif de Melun de condamner l'Union des groupements d'achats publics (UGAP) à lui verser la somme de 121 548 euros assortie des intérêts moratoires au taux légal ou au taux de 5,79 % à compter du 16 août 2009, en réparation du préjudice que lui a causé l'absence de commandes suffisantes sur le marché à bons de commande conclu le 2 décembre 2005.

Par un jugement n° 1209112 du 8 janvier 2015, le Tribunal administratif de Melun a condamné l'UGAP à

verser à la société Airel la somme de 78 843, 77 euros HT, augmentée des intérêts au ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Airel a demandé au Tribunal administratif de Melun de condamner l'Union des groupements d'achats publics (UGAP) à lui verser la somme de 121 548 euros assortie des intérêts moratoires au taux légal ou au taux de 5,79 % à compter du 16 août 2009, en réparation du préjudice que lui a causé l'absence de commandes suffisantes sur le marché à bons de commande conclu le 2 décembre 2005.

Par un jugement n° 1209112 du 8 janvier 2015, le Tribunal administratif de Melun a condamné l'UGAP à verser à la société Airel la somme de 78 843, 77 euros HT, augmentée des intérêts au taux de 5,79 % à compter du 16 août 2009.

Procédure devant la Cour

Par une requête enregistrée le 13 mars 2015, l'UGAP, représentée par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ou de réformer ce jugement n° 1209112 du Tribunal administratif de Melun du 8 janvier 2015 ;

2°) de rejeter la demande présentée par la société Airel devant le Tribunal administratif de Melun ;

3°) de mettre à la charge de la société Airel la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le préjudice invoqué par la société Airel n'est pas établi ; ni le tableau établi par

celle-ci ni les attestations de son expert-comptable ne présentent un caractère probant suffisant ;

- l'indemnité fixée par le tribunal administratif est manifestement disproportionnée au regard du préjudice réellement subi par la société Airel du fait de la non-atteinte du montant minimum du marché ;

- le bénéfice net retenu par le tribunal est manifestement erroné ; le taux de marge nette retenu est en effet très éloigné du taux de marge net moyen observé au cours des années précédentes ;

- la détermination du taux d'intérêt retenu par le tribunal administratif est inexacte ; seuls des intérêts au taux légal peuvent être accordés en l'espèce ; le taux légal en vigueur en 2009 n'est susceptible d'être appliqué que sur la période allant du 16 août 2009 au 31 décembre 2009.

Par un mémoire en défense, enregistré le 21 juillet 2015, la société Airel, représentée par MeB..., conclut au rejet de la requête, et à ce que, par la voie de l'appel incident, le montant de la condamnation prononcée en première instance soit porté à la somme de 121 548, 85 euros, augmentée des intérêts au taux conventionnel de 5,79 % ou au taux légal à compter du 6 octobre 2009, et à ce que la somme de 4 500 euros soit mise à la charge de l'UGAP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens soulevés par la requête ne sont pas fondés ;

- son préjudice correspond à la marge bénéficiaire qui aurait été effectivement réalisée sur la part non exécutée du marché ; ce préjudice s'élève à la somme de 121 548, 85 euros HT ;

- le taux des intérêts moratoires est celui prévu par l'article 96 du code des marchés publics et le décret du 21 février 2002, soit, en l'espèce un taux de 5,79 %.

Par un nouveau mémoire en défense enregistré le 30 novembre 2015, la société Airel reprend les conclusions de son précédent mémoire et les mêmes moyens.

Par un mémoire en réplique enregistré le 4 décembre 2015, l'UGAP reprend les conclusions de sa requête et les mêmes moyens ;

Une ordonnance du 6 novembre 2015 a fixé la date de clôture de l'instruction au 7 décembre 2012.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code civil ;

- le code des marchés publics ;

- le décret n° 2002-232 du 21 février 2002 relatif à la mise en oeuvre du délai maximum de paiement dans les marchés publics ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Petit, rapporteur,

- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,

- les observations de Me A...pour UGAP,

- et les observations de Me D...pour la société Airel.

1. Considérant que l'UGAP a confié à la société Airel, le 2 décembre 2005, un marché à bons de commande portant sur la fourniture d'appareils portables de désinfection par voie aérienne ; que ce marché, conclu pour une durée courant de la date de sa notification au 31 mars 2009, comportait un montant minimal total de commandes de 400 000 euros HT ; que la société Airel a demandé au Tribunal administratif de Melun de condamner l'UGAP à lui verser la somme de 121 548, 85 euros HT en réparation du préjudice que lui a causé le non-respect du montant minimal de commandes ; que par un jugement du 8 janvier 2015, le tribunal administratif a condamné l'UGAP à verser à la société Airel la somme de 78 843, 77 euros HT, augmentée des intérêts au taux de 5,79 % à compter du 16 août 2009 ; que l'UGAP fait appel de ce jugement ; que la société Airel demande à la Cour, par la voie de l'appel incident, de réformer le jugement en portant le montant de la condamnation à la somme de 121 548, 85 euros ;

Sur la responsabilité de l'UGAP :

2. Considérant que dans l'hypothèse où le montant minimal des prestations stipulées dans un contrat à bons de commande n'a pas été atteint, le cocontractant est en droit de prétendre à la réparation du préjudice subi du fait du non-respect, par l'administration, de ses engagements contractuels ; qu'en l'espèce, il est constant que le montant des commandes effectivement passées pendant la période comprise entre la notification du marché et le 31 mars 2009 ne s'est élevé qu'à la somme de 186 506,64 euros HT, soit un montant inférieur au minimum que les parties avaient fixé à 400 000 euros HT ; qu'ainsi, la société Airel est en droit de prétendre à la réparation du préjudice subi du fait du non-respect, par l'UGAP, de ses engagements contractuels ;

Sur le préjudice :

3. Considérant que dans l'hypothèse où le montant minimal des prestations stipulées dans un contrat à bons de commande n'a pas été atteint, le préjudice subi par le titulaire du marché correspond, sauf stipulations contractuelles contraires, à la perte de marge bénéficiaire qu'aurait dégagée l'exécution du montant minimal de commandes prévu au marché ; que s'agissant d'une indemnité, le préjudice subi doit être calculé sur la base du montant hors taxe de la part inexécutée des commandes ;

4. Considérant que la société Airel soutient qu'elle a subi, du fait du non-respect par l'UGAP de ses engagements contractuels, une perte de marge bénéficiaire ; que l'UGAP ne conteste pas sérieusement l'existence d'un tel préjudice ; que, toutefois, pour justifier ses prétentions indemnitaires, la société Airel n'a produit, tant en première instance qu'en appel, qu'un tableau faisant apparaître, pour chaque type de produit qui était susceptible d'être commandé dans le cadre du marché litigieux, le prix de vente ainsi que le prix de revient total, ce dernier incluant un coût de fabrication et le paiement d'une redevance ; que les attestations établies par son expert comptable se bornent à reprendre à l'identique ces données, qui aboutissent à des taux moyens de marge brute de 61,78 % pour les produits consommables, de 39,13 % pour les produits divers et de 55,98 % pour les machines, et à indiquer, sans autre précision, que la part des frais généraux était égale à 22 % du chiffre d'affaires en 2010 et inférieur à ce pourcentage pour les années antérieures ; que, contrairement à ce qu'ont estimé les premiers juges, ces éléments sont insuffisants pour déterminer la perte de marge nette et, par suite, pour évaluer le montant du préjudice subi par la société Airel ; qu'ainsi, il y a lieu d'ordonner une expertise aux fins énoncées ci-après ;

DÉCIDE :

Article 1er : Il sera, avant de statuer sur la requête de l'UGAP, procédé par un expert-comptable à une expertise.

Article 2 : L'expert sera désigné par le président de la Cour. Il accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative.

Article 3 : L'expert aura pour mission, après avoir pris connaissance des pièces du dossier et comptables de la société Airel, de définir la marge bénéficiaire (marge nette) qu'aurait réalisée cette dernière si le montant minimum des commandes (400 000 euros HT) prévu au marché avait été effectivement commandé par l'UGAP, compte tenu de la nature du contrat et des éléments nécessaires à sa réalisation et de donner tous les éléments servant au calcul de ladite marge bénéficiaire.

Article 4: L'expert accomplira sa mission dans les conditions prévues par les articles R. 621-2 à R. 621-14 du code de justice administrative. Il prêtera serment par écrit devant le greffier en chef de la Cour. L'expert déposera son rapport au greffe de la Cour en deux exemplaires et en notifiera copie aux parties dans le délai fixé par le président de la Cour dans sa décision le désignant.

Article 5 : Les frais d'expertise sont réservés pour y être statué en fin d'instance.

Article 6 : Tous droits et moyens des parties, sur lesquels il n'est pas expressément statué par le présent arrêt, sont réservés jusqu'à la fin de l'instance.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à l'UGAP et à la société Airel.

Délibéré après l'audience du 25 janvier 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs-Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président assesseur,

- Mme Petit, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 8 février 2016.

Le rapporteur,

V. PETITLe président,

O. FUCHS TAUGOURDEAULe greffier,

A-L. CHICHKOVSKY-PASSUELLO

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, de l'industrie et du numérique en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N°15PA01089


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA01089
Date de la décision : 08/02/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Marchés et contrats administratifs - Exécution financière du contrat - Rémunération du co-contractant - Indemnités.

Procédure - Instruction - Moyens d'investigation - Expertise.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: Mme Valérie PETIT
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : SYMCHOWICZ et WEISSBERG

Origine de la décision
Date de l'import : 19/02/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-02-08;15pa01089 ?
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