La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

07/04/2016 | FRANCE | N°15PA01855

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 07 avril 2016, 15PA01855


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 11 août 2014 par lequel le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 1418191/2-1 du 20 janvier 2015, le tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 7 mai 2015, M.B..., représenté par MeC..., demande à la Cour :
<

br>1°) d'annuler le jugement n° 1418191/2-1 du 20 janvier 2015 du tribunal administratif de Paris ;

2°) ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 11 août 2014 par lequel le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour et l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours.

Par un jugement n° 1418191/2-1 du 20 janvier 2015, le tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 7 mai 2015, M.B..., représenté par MeC..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1418191/2-1 du 20 janvier 2015 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 11 août 2014 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police, à titre principal, de lui délivrer une carte de séjour mention " vie privée et familiale " sur le fondement de l'article L.313-11 11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dans le délai d'un mois et sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande, dans le délai d'un mois et sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la commission du titre de séjour aurait dû être saisie en vertu de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il s'agissait d'un refus de renouvellement ;

- le préfet aurait dû recueillir un nouvel avis du médecin en chef des services médicaux de la préfecture, au lieu de statuer quatorze mois après celui-ci ; il n'a pas sérieusement examiné sa situation et pris sa décision au terme d'une procédure irrégulière ;

- le directeur général de l'agence régionale de santé aurait dû être saisi pour avis en vertu des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; faute de texte en ce sens, il ne peut lui être reproché de ne pas avoir fait valoir, de son propre chef, l'existence de circonstances exceptionnelles ;

- il remplit les conditions des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il justifie de circonstances humanitaires exceptionnelles au sens de l'article précité ;

- le préfet de police a commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences du refus de séjour ;

- l'avis médical était trop ancien pour permettre de décider d'une obligation de quitter le territoire français ;

- le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de l'obligation de quitter le territoire français ;

- la décision fixant le délai de départ volontaire à trente jours est insuffisamment motivée, le préfet de police a méconnu l'étendue de sa compétence et commis une erreur manifeste d'appréciation en fixant ce délai.

Par un mémoire en défense enregistré le 9 février 2016, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens de la requête sont infondés

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté ministériel du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Diémert a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.B..., ressortissant mauritanien né en 1983 et entré en France en février 2009 selon ses déclarations, a bénéficié du 15 décembre 2011 au 14 décembre 2012 d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par l'arrêté litigieux du 11 août 2014, le préfet de police a rejeté sa demande de renouvellement de ce titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français en fixant un délai de départ volontaire de trente jours ;

Sur la légalité de la décision de refus de renouvellement de titre de séjour :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis (...) à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police (...) " ;

3. Considérant, en premier lieu, que le médecin en chef des services médicaux de la préfecture de police a estimé le 6 juin 2013 que si l'état de santé de M. B...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, son séjour en France n'était pas médicalement justifié dès lors qu'il pouvait effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'état de santé du requérant, qui est stable, ou la situation de son pays d'origine aient évolué entre cet avis médical et l'arrêté litigieux ; qu'ainsi M. B...n'est pas fondé à soutenir que le préfet ne pouvait régulièrement se fonder sur cet avis pour prendre sa décision ; qu'il ne ressort d'aucun des éléments du dossier que le préfet de police n'aurait pas procédé à un examen sérieux de l'ensemble de la situation de l'intéressé ;

4. Considérant, en deuxième lieu, que selon le certificat établi par le médecin traitant de M. B... le 23 septembre 2014, et réitéré par son remplaçant en avril 2015, le requérant est atteint depuis 2011 d'un " asthme persistant obstructif de stade II " qui nécessite une prise en charge spécialisée en France et ne s'est pas amélioré malgré le traitement ; que si ce certificat médical liste cinq médicaments, ou classes de médicaments, qui constitueraient le traitement et ne seraient pas disponibles de manière régulière en Mauritanie ou alors " à un coût excessivement cher pour le patient ", il ne ressort pas des pièces du dossier que les médicaments figurant sur les ordonnances délivrées à M.B..., Ventoline, Aerius, Formair et Innovair ou Becotide, ou leurs équivalents, ne seraient pas disponibles en Mauritanie, alors qu'ils figurent notamment sur la liste des médicaments remboursés par la caisse nationale d'assurance maladie de ce pays ; que la Mauritanie dispose en outre de médecins ou services hospitaliers suffisamment équipés et aptes à assurer le suivi des cas d'asthme même sévère ; que M. B... verse lui-même au dossier un certificat, certes dépourvu de toute garantie d'authenticité, daté du 25 octobre 2008 et établi par le docteur Med Lemine o/Sidi qui serait spécialiste en pneumologie à Nouakchott et qui affirme que le requérant a été suivi pendant un an pour une crise asthmatique dont l'agent reste inconnu mais attribuée à la pollution ; qu'aucune pièce du dossier ne permet à cet égard de conclure, comme l'allègue M. B..., que son asthme serait dû à des facteurs environnementaux présents en Mauritanie et absents en France ; que compte tenu de l'ensemble de ces circonstances, et alors même que M. B... a été dans un premier temps admis au séjour sur la base d'éléments de même nature que ceux qu'il a fournis en 2013, il ne ressort pas de l'ensemble des pièces produites au dossier que le préfet de police aurait commis une erreur d'appréciation en estimant qu'une prise en charge adaptée au cas de M. B... était disponible dans son pays d'origine ;

5. Considérant, en troisième lieu, que le requérant se prévaut de la difficulté effective qu'il aurait à accéder aux soins en Mauritanie, compte tenu du mauvais état sanitaire général du pays et du fort trafic de médicaments qui y sévit, et soutient que sa situation relevait d'une circonstance humanitaire exceptionnelle au sens de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que cependant, d'une part, il n'appartenait au préfet de police ni de l'inviter à invoquer une telle circonstance, ni de solliciter du directeur général de l'agence régionale de santé un avis que celui-ci n'avait pas émis de son propre chef sur la base du dossier remis à ses services, d'autre part, les circonstances invoquées par M. B...ne saurait en être regardées, dans les circonstances de l'espèce, comme le plaçant dans une situation humanitaire telle qu'elle justifiait son admission au séjour alors même que la condition d'indisponibilité du traitement dans son pays d'origine prévue par les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'était pas remplie ; qu'ainsi les moyens tirés de l'irrégularité de la procédure suivie et de la méconnaissance sur ce point des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doivent être écartés ;

6. Considérant, en quatrième lieu, qu'il résulte des dispositions de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile que, lorsqu'il envisage de refuser un titre de séjour, le préfet est tenu de consulter la commission du titre de séjour des seuls cas de ressortissants étrangers qui remplissent effectivement les conditions prévues par les articles L. 313-11, L. 314-11, L. 314-12 et L. 431-3 de ce code, et non de tous les cas d'étrangers qui se prévalent de ces dispositions ; qu'ainsi, dès lors que M. B...se prévalait des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sans en remplir effectivement les conditions, le préfet de police n'avait pas à saisir la commission du titre de séjour, et ce alors même qu'il s'agissait d'une demande de renouvellement ;

7. Considérant, enfin, que si M. B...fait valoir, outre son état de santé, sa bonne intégration en France où il travaille depuis mai 2013 en qualité de plongeur dans la restauration, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police aurait, en refusant de lui délivrer un titre de séjour, commis une erreur manifeste d'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de l'intéressé ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

8. Considérant qu'il est constant que l'avis du 6 juin 2013 du médecin chef du service médical de la préfecture de police n'indique pas si M. B...peut voyager sans risque vers son pays d'origine ; que cependant une telle mention n'est pas obligatoire aux termes de l'article 4 de l'arrêté ministériel du 9 novembre 2011 ; qu'en l'espèce il n'apparait pas que l'état de santé de M. B... pouvait susciter des interrogations, tant en 2013 qu'en août 2014, date de la décision préfectorale, quant à sa capacité à supporter un voyage jusqu'en Mauritanie ; qu'en conséquence, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français aurait été prise au vu d'un avis incomplet ou au terme d'une procédure irrégulière doit être écarté ;

9. Considérant que, comme dit ci-dessus, M. B...pouvait bénéficier dans son pays d'origine d'un traitement approprié à son état de santé ; qu'ainsi il n'est pas fondé à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français aurait été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 511-4 (10°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

10. Considérant qu'il ne ressort pas du dossier que la décision l'obligeant à quitter le territoire français comporte pour M. B...des conséquences d'une extrême gravité ; que le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation doit être écarté ;

Sur la légalité de la décision fixant à trente jours le délai de départ volontaire :

11. Considérant en premier lieu, qu'en dehors de l'hypothèse, prévue au II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, où tout délai est refusé, ou du cas où a été expressément formulée la demande d'un délai supérieur à trente jours, la décision fixant le délai de départ volontaire n'a pas le caractère d'une décision devant être motivée au sens de la loi du 11 juillet 1979 ; que dès lors, M. B... ne saurait utilement soutenir que la décision fixant à trente jours le délai de départ volontaire qui lui a été accordé pour satisfaire à l'obligation de quitter le territoire français est insuffisamment motivée ;

12. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police se serait cru tenu de fixer à trente jours le délai dont il a assorti l'obligation de quitter le territoire français ;

13. Considérant, en troisième lieu, que M. B...qui avait demandé le renouvellement de son titre de séjour ne pouvait ignorer qu'il était susceptible de faire l'objet, en cas de rejet de cette demande, d'une obligation de quitter le territoire français assortie d'un délai que l'article L. 511-1 (II) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile fixe en principe à trente jours ; que le préfet n'était pas tenu, avant de prendre sa décision, de l'informer qu'il pouvait, s'il s'y estimait fondé, solliciter un délai plus long ;

14. Considérant, enfin, que si M. B...soutient que le délai qui lui a été accordé était insuffisant pour assurer la continuité de sa prise en charge médicale et notamment l'achat de médicaments, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en ne lui accordant pas un délai supérieur à trente jours pour organiser son départ ;

15. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation de l'arrêté du 11 août 2014 ; que doivent être rejetées, par voie de conséquence, ses conclusions tendant à ce qu'il soit fait injonction au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour ou à titre subsidiaire de procéder au réexamen de sa demande, ainsi que ses conclusions tendant à ce que l'Etat, qui n'est pas la partie perdante, supporte au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative les frais qu'il a exposés pour sa requête ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 17 mars 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, présidente de chambre,

- M. Diémert, président-assesseur,

- M. Gouès, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 7 avril 2016.

Le rapporteur,

S. DIEMERT

La présidente,

S. PELLISSIER

Le greffier,

E. CLEMENT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

2

N° 15PA01855


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 15PA01855
Date de la décision : 07/04/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Stéphane DIEMERT
Rapporteur public ?: M. ROMNICIANU
Avocat(s) : CABINET BOURG-ROCHICCIOLI

Origine de la décision
Date de l'import : 16/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-04-07;15pa01855 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award