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12/04/2016 | FRANCE | N°15PA02221

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 12 avril 2016, 15PA02221


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 20 octobre 2014 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a fait obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et a fixé son pays de destination, ainsi que l'arrêté du même jour ordonnant son placement en rétention administrative.

Par un jugement n° 1409189/12 du 24 octobre 2014, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure de

vant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 3 juin 2015, M. A..., représenté par MeB.....

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 20 octobre 2014 par lequel le préfet de la Seine-Saint-Denis lui a fait obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et a fixé son pays de destination, ainsi que l'arrêté du même jour ordonnant son placement en rétention administrative.

Par un jugement n° 1409189/12 du 24 octobre 2014, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 3 juin 2015, M. A..., représenté par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Melun n° 1409189/12 du 24 octobre 2014 ;

2°) d'annuler les décisions du préfet de Seine-Saint-Denis contenues dans le premier arrêté susvisé du 20 octobre 2014 ;

3°) d'enjoindre au préfet de Seine-Saint-Denis de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de deux cents euros par jour de retard à compter de la notification de l'arrêt ;

4°) de mettre à la charge de l'État les entiers dépens, ainsi que la somme de 2 000 euros à verser à MeB..., sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'obligation de quitter le territoire français est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il justifie de motifs exceptionnels et de considérations humanitaires résultants de sa présence en France depuis le 10 février 2009, qu'il y travaille et que son cousin réside en France ;

- le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 511-4.10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il souffre d'une hépatite B ;

- le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 313-11.7° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en raison des liens privés et familiaux qu'il possède en France ;

- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il justifie de son ancienneté de séjour en France depuis 2009, qu'il y est intégré et y déclare ses revenus.

La requête a été communiquée au préfet de la Seine-Saint-Denis, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

M. A... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 16 janvier 2015.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Dellevedove a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.A..., ressortissant malien, né le 6 mars 1985, a déclaré être entré en France le 10 février 2009 ; qu'à la suite de son interpellation le 20 octobre 2014, il a fait l'objet, par un premier arrêté du même jour, d'une obligation de quitter le territoire français assortie d'un refus de délai de départ volontaire et d'une décision fixant son pays de destination et, par un second arrêté du même jour, d'un placement en rétention administrative ; que M. A...fait appel du jugement du 24 octobre 2014 par lequel le magistrat désigné du Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ce premier arrêté ;

2. Considérant, en premier lieu, qu'indépendamment de l'énumération donnée par l'article L. 521-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile des catégories d'étrangers qui ne peuvent faire l'objet d'une mesure d'éloignement, l'autorité administrative ne saurait légalement prendre une mesure de reconduite à l'encontre d'un étranger que si ce dernier se trouve en situation irrégulière au regard des règles relatives à l'entrée et au séjour ; que, lorsque la loi prescrit que l'intéressé doit se voir attribuer de plein droit un titre de séjour, cette circonstance fait obstacle à ce qu'il puisse légalement être l'objet d'une mesure d'éloignement ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article L 313-14 " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7... " ; que, si M. A...soutient que, à la date de la décision contestée portant obligation de quitter le territoire français, il pouvait prétendre à la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement de ces dispositions en ce qu'il justifie de motifs exceptionnels et de considérations humanitaires, le requérant ne peut utilement se prévaloir de ces dispositions à l'encontre d'une mesure d'éloignement dès lors qu'elles ne prévoient pas la délivrance d'un titre de séjour de plein droit ; que, dès lors, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ne peut qu'être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays de renvoi, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé " ;

5. Considérant que, s'il ressort des pièces du dossier que M. A...est atteint du virus de l'hépatite B et qu'il est suivi par le service des maladies infectieuses de l'hôpital Saint-Louis depuis le mois de décembre 2013, le seul certificat médical qu'il produit, daté du 23 avril 2015, est insuffisamment circonstancié et ne suffit pas à établir qu'il ne pourrait pas disposer d'un traitement approprié, ni qu'il n'existerait pas de structures spécialisées susceptibles de le prendre en charge dans son pays d'origine ; que, dès lors, M. A...n'est pas fondé à soutenir que, en l'obligeant à quitter le territoire français, le préfet de la Seine-Saint-Denis aurait méconnu les dispositions précitées de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 313-21 de ce même code : " Pour l'application du 7º de l'article L. 313-11, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de la vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine " ;

7. Considérant que M. A...fait valoir qu'il réside et travaille en France depuis le 10 février 2009, qu'il y déclare ses revenus, que son cousin y réside et qu'il justifie d'une insertion dans la société française ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que l'intéressé est célibataire, sans charge de famille, et n'allègue pas être dépourvu d'attaches familiales dans son pays d'origine où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de vingt-trois ans ; que, dans ces conditions, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce, la décision obligeant M. A...à quitter le territoire français n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, dès lors, le préfet de la Seine-Saint-Denis n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions précitées du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

8. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de la Seine-Saint-Denis.

Délibéré après l'audience du 22 mars 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Even, président de chambre,

- Mme Hamon, président assesseur,

- M. Dellevedove, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 12 avril 2016.

Le rapporteur,

E. DELLEVEDOVELe président,

B. EVEN

Le greffier,

A-L. CALVAIRE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA02221


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA02221
Date de la décision : 12/04/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Ermès DELLEVEDOVE
Rapporteur public ?: M. CANTIE
Avocat(s) : GONDARD

Origine de la décision
Date de l'import : 26/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-04-12;15pa02221 ?
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