La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/04/2016 | FRANCE | N°15PA02244

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 12 avril 2016, 15PA02244


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 10 avril 2015 par lequel le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et a fixé le pays à destination duquel il doit être éloigné.

Par un jugement n° 1505885/8 du 13 avril 2015, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requêt

e enregistrée le 3 juin 2015 et un mémoire enregistré le 15 mars 2016, M. B..., représenté par Me Sad...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A...B...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 10 avril 2015 par lequel le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et a fixé le pays à destination duquel il doit être éloigné.

Par un jugement n° 1505885/8 du 13 avril 2015, le magistrat délégué par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 3 juin 2015 et un mémoire enregistré le 15 mars 2016, M. B..., représenté par Me Sadoun, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris n° 1505885/8 du 13 avril 2015 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet de Police du 10 avril 2015 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la décision d'obligation de quitter le territoire français a été prise par une autorité incompétente ;

- elle ne peut légalement se fonder sur l'article L. 511-1-I-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il a été convoqué aux fins d'examen de sa situation administrative ;

- la mesure d'interdiction du territoire prise à son encontre en 2006 était illégale dès lors qu'il bénéficiait d'une autorisation provisoire de séjour ;

- elle porte une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale et méconnaît l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale sur les droits de l'enfant ;

- la décision de refus de délai de départ volontaire a été prise par une autorité incompétente ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale sur les droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense enregistré le 4 mars 2016, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B...ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Hamon,

- et les observations de Me Sadoun, avocat de M.B....

1. Considérant que M. A...B..., de nationalité algérienne, relève appel du jugement par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 10 avril 2015 par lequel le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire et a fixé le pays à destination duquel il doit être éloigné ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ; qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ;

3. Considérant qu'il résulte des pièces du dossier que l'épouse de M.B..., de nationalité algérienne, résidait en France de manière continue et habituelle depuis plus de dix ans à la date de la décision attaquée ; qu'à ce titre, et ainsi que l'a jugé définitivement le Tribunal administratif de Paris le 13 avril 2015, elle peut prétendre à la délivrance de plein droit d'un titre de séjour et ne peut légalement faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; que les quatre enfants du couple, dont trois sont entrés en France aux âges de 8, 6 et 4 ans et le quatrième est né en France en 2004, y sont scolarisés depuis lors sans interruption ; qu'eu égard à l'ensemble de ces éléments, M. B... est fondé à soutenir que la décision d'obligation de quitter le territoire sans délai prise à son encontre porte une atteinte disproportionnée à sa vie privée et familiale et méconnaît les stipulations précitées de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ainsi que l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant, et à en demander l'annulation ; qu'il est également fondé, par voie de conséquence, à demander l'annulation de la décision fixant le pays de destination pour son éloignement ;

4. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Considérant qu'aux termes de l'article L. 911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution. " ; qu'aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. " ;

6. Considérant qu'en vertu de l'article L. 512-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers, lorsqu'une obligation de quitter le territoire est annulée, l'étranger est muni d'une autorisation provisoire de séjour jusqu'à ce que l'autorité administrative ait à nouveau statué sur son cas ; que, par suite, les conclusions de M. B...tendant à la délivrance d'un titre de séjour doivent être rejetées ; qu'en revanche, il y a lieu d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de procéder au réexamen de sa situation dans un délai de trois mois à compter de la date de notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. B...et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 1505887/8 du 13 avril 2015 et l'arrêté du 10 avril 2015 par lequel le préfet de police a obligé M. B...à quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant son pays de destination sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer une autorisation provisoire de séjour à M. B... et de réexaminer sa situation dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. B...une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A...B..., au ministre de l'intérieur et au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 22 mars 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Even, président de chambre,

- Mme Hamon, président assesseur,

- M. Dellevedove, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 avril 2016.

Le rapporteur,

P. HAMON Le président,

B. EVEN

Le greffier,

A-L. CALVAIRELa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

''

''

''

''

3

N° 15PA02244


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA02244
Date de la décision : 12/04/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: Mme Perrine HAMON
Rapporteur public ?: M. CANTIE
Avocat(s) : SADOUN

Origine de la décision
Date de l'import : 26/04/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-04-12;15pa02244 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award