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09/05/2016 | FRANCE | N°15PA02388

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 09 mai 2016, 15PA02388


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé d'abroger l'arrêté d'expulsion prononcé à son encontre par le préfet de police le 3 novembre 2010.

Par un jugement n° 1412074/7-2 du 27 mars 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 15 juin 2015, M.A..., représenté par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annu

ler le jugement n° 1412074/7-2 du 27 mars 2015 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision implicite par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé d'abroger l'arrêté d'expulsion prononcé à son encontre par le préfet de police le 3 novembre 2010.

Par un jugement n° 1412074/7-2 du 27 mars 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 15 juin 2015, M.A..., représenté par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1412074/7-2 du 27 mars 2015 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté d'expulsion du 3 novembre 2010 ;

3°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision implicite du ministre de l'intérieur par laquelle il a refusé d'abroger l'arrêté d'expulsion pris à son encontre par le préfet de police le 3 novembre 2010 ;

4°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- les dispositions de l'article L. 524-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans le champ des exceptions desquelles il entrait, ont été méconnues alors qu'il était, au moment où il a présenté sa demande d'abrogation, assigné à résidence pour être détenu à la prison de Fleury-Mérogis ;

- il était au nombre des ressortissants étrangers ne pouvant faire l'objet d'une mesure d'expulsion qu'en cas de nécessité impérieuse pour la sûreté de l'Etat ou la sécurité publique par application de l'article L. 521-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'il est marié à une ressortissante française et père d'un enfant français à l'entretien et à l'éducation duquel il participe financièrement et affectivement ;

- la décision implicite de refus d'abrogation méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors qu'il réside en France depuis plus de dix ans et est père d'un enfant de nationalité française dont il s'occupe à hauteur de ses moyens ;

- elle méconnaît, également, les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant dès lors qu'elle porte atteinte à l'intérêt supérieur de son enfant à l'entretien et l'éducation duquel il établit contribuer effectivement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 18 février 2016, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. A...ne sont pas fondés.

Les parties ont été informées, en application de l'article R. 611-7 du code de justice administrative, que l'arrêt de la Cour était susceptible d'être fondé sur un moyen relevé d'office tiré de l'irrecevabilité des conclusions dirigées contre l'arrêté d'expulsion du 3 novembre 2010.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant signée à New York le 26 janvier 1990 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bonneau-Mathelot,

- et les conclusions de M. Sorin, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant tunisien, a fait l'objet d'un arrêté d'expulsion le 3 novembre 2010. Par une décision implicite, le préfet de police a rejeté sa demande présentée le 18 mars 2014 tendant à l'abrogation de cet arrêté. M. A... relève appel du jugement du 27 mars 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur les conclusions dirigées contre l'arrêté d'expulsion du 3 novembre 2010 :

2. Les conclusions tendant à l'annulation de l'arrêté d'expulsion du 3 novembre 2010, qui n'ont pas été soumises aux premiers juges, ont le caractère de conclusions nouvelles en appel et sont, par suite, irrecevables.

Sur les conclusions dirigées contre la décision portant refus d'abrogation de l'arrêté d'expulsion :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 524-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'arrêté d'expulsion peut à tout moment être abrogé. Lorsque la demande d'abrogation est présentée à l'expiration d'un délai de cinq ans à compter de l'exécution effective de l'arrêté d'expulsion, elle ne peut être rejetée qu'après avis de la commission prévue à l'article L. 522-1, devant laquelle l'intéressé peut se faire représenter ". Aux termes de l'article L. 524-2 du même code : " Sans préjudice des dispositions de l'article L. 524-1, les motifs de l'arrêté d'expulsion donnent lieu à un réexamen tous les cinq ans à compter de la date d'adoption de l'arrêté. L'autorité compétente tient compte de l'évolution de la menace pour l'ordre public que constitue la présence de l'intéressé en France, des changements intervenus dans sa situation personnelle et familiale et des garanties de réinsertion professionnelle ou sociale qu'il présente, en vue de prononcer éventuellement l'abrogation de l'arrêté. [...] ". Aux termes de l'article L. 524-3 du même code : " Il ne peut être fait droit à une demande d'abrogation d'un arrêté d'expulsion présentée plus de deux mois après la notification de cet arrêté que si le ressortissant étranger réside hors de France. Toutefois, cette condition ne s'applique pas : / 1° Pour la mise en oeuvre de l'article L. 524-2 ; / 2° Pendant le temps où le ressortissant étranger subit en France une peine d'emprisonnement ferme ; / 3° Lorsque l'étranger fait l'objet d'un arrêté d'assignation à résidence pris en application des articles L. 523-3, L. 523-4 ou L. 523-5 ". Enfin, aux termes de l'article R. 524-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit. d'asile : " le silence gardé pendant plus de quatre mois sur une demande d'abrogation d'un arrêté d'expulsion vaut décision de rejet ".

4. La demande d'abrogation a été présentée plus de deux mois après la notification de l'arrêté d'expulsion du 3 novembre 2010 alors que M. A...ne résidait pas hors de France. Si l'intéressé soutient que cette condition ne lui était pas opposable au motif que sa situation répondrait aux critères fixés par le 2° et 3° de l'article L. 524-3 précité, il avait purgé sa peine d'emprisonnement à la date de la décision implicite de refus d'abrogation, intervenue au plus tôt le 18 juillet 2014, quatre mois après sa demande, et il ne ressort pas des pièces du dossier qu'il aurait été assigné à résidence en application des articles L. 523-3, L. 523-4 ou L. 523-5 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet de police était donc tenu, en application des dispositions précitées de l'article L. 524-3 du même code, de rejeter la demande d'abrogation présentée par M.A..., qui n'a pas exécuté l'arrêté d'expulsion après avoir purgé sa peine d'emprisonnement.

5. En deuxième lieu, M. A...soutient que la décision portant refus d'abrogation a porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il ressort, toutefois, des pièces du dossier que M. A...a été condamné, le 26 juin 2007, à cinq ans d'emprisonnement dont un avec sursis pour des faits d'agression sexuelle ayant entraîné une lésion ou une blessure commis en 2006 et, le 23 mai 2013, postérieurement à l'arrêté d'expulsion prononcé à son encontre, pour des faits de même nature, avec administration de substances nuisibles à la victime, commis en 2012. Par ailleurs, M. A...est séparé de son épouse et en instance de divorce et n'établit pas contribuer de manière effective à l'éducation et à l'entretien de son enfant, dont la mère a la garde, par la production de chèques couvrant uniquement sept mois sur une période de trois années, de deux mandats de versement d'argent pour une année et de deux attestations rédigées par la mère de l'enfant. Par ailleurs, M. A... ne se prévaut pas d'autres attaches en France, alors que ses parents et sa fratrie résident en Tunisie, pays où il a vécu lui-même jusqu'à l'âge de vingt-quatre ans. Dans ces conditions, la décision en litige n'a pas porté au droit au respect de la vie privée et familiale de M. A...une atteinte disproportionnée au vu des buts en vue desquels elle a été prise. Le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et ne peut donc qu'être écarté.

6. En dernier lieu, ainsi qu'il a été dit au point 5 ci-dessus, M. A...ne démontre pas qu'il contribuerait à l'éducation et à l'entretien de son enfant. Par suite, la décision n'ayant pas porté atteinte à l'intérêt supérieur de l'enfant de l'intéressé, le moyen tiré de la méconnaissance de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant ne peut qu'être écarté.

7. Il résulte de ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 14 avril 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Luben, président assesseur,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 mai 2016.

Le rapporteur,

S. BONNEAU-MATHELOTLe président,

J. LAPOUZADE

Le greffier,

A. CLEMENTLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 15PA02388


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA02388
Date de la décision : 09/05/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-02-06 Étrangers. Expulsion. Abrogation.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Sonia BONNEAU-MATHELOT
Rapporteur public ?: M. SORIN
Avocat(s) : MARTAGUET

Origine de la décision
Date de l'import : 16/06/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-05-09;15pa02388 ?
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