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04/10/2016 | FRANCE | N°15PA03834

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 04 octobre 2016, 15PA03834


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SA Société Air France a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 17 octobre 2014 par laquelle le ministre de l'intérieur lui a infligé une amende de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 625-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un jugement n° 1430856/3-2 du 15 septembre 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire ampl

iatif, enregistrés le 19 octobre 2015 et le 10 février 2016, la société Air France, représenté...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La SA Société Air France a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 17 octobre 2014 par laquelle le ministre de l'intérieur lui a infligé une amende de 5 000 euros sur le fondement des dispositions de l'article L. 625-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

Par un jugement n° 1430856/3-2 du 15 septembre 2015, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire ampliatif, enregistrés le 19 octobre 2015 et le 10 février 2016, la société Air France, représentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Paris n° 1430856/3-2 du 15 septembre 2015 ;

2°) d'annuler la décision du 17 octobre 2014 ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- en l'absence de documents probants, elle n'a pas été en mesure de faire valoir utilement ses observations préalablement à la sanction prononcée ;

- les irrégularités relevées sur la micro ligne entourant la mention " WISA " sur le visa de la passagère en provenance d'Afrique du sud n'étaient pas décelables à l'oeil nu et ne constituaient dès lors pas une falsification manifeste susceptible d'être décelée par un agent d'embarquement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 9 juin 2016, le ministre de l'intérieur conclut au rejet de la requête ;

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu :

- la Constitution du 4 octobre 1958 ;

- la décision du Conseil constitutionnel n° 92-307 DC du 25 février 1992 ;

- la convention d'application de l'accord de Schengen, signée le 19 juin 1990 ;

- le code des transports ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 20 septembre 2016 :

- le rapport de Mme d'Argenlieu,

- les conclusions de Mme Oriol, rapporteur public,

- et les observations de Me A...pour la société Air France.

1. Considérant que, par une décision du 17 octobre 2014, le ministre de l'intérieur a infligé à la société Air France une amende de 5 000 euros, sur le fondement de l'article L. 625-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, au motif que la compagnie aérienne avait autorisé le débarquement le 8 décembre 2013, d'une personne de nationalité indéterminée en provenance de Johannesburg (Afrique du Sud) titulaire d'un visa manifestement contrefait ; que, la société Air France fait appel du jugement n° 1430856/3-2 du 15 septembre 2015 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 6421-2 du code des transports : " Le transporteur ne peut embarquer les passagers pour un transport international qu'après justification qu'ils sont régulièrement autorisés à atterrir au point d'arrivée et aux escales prévues " ; qu'aux termes L. 625-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Est punie d'une amende d'un montant maximum de 5 000 euros l'entreprise de transport aérien ou maritime qui débarque sur le territoire français, en provenance d'un autre Etat, un étranger non ressortissant d'un Etat de l'Union européenne et démuni du document de voyage et, le cas échéant, du visa requis par la loi ou l'accord international qui lui est applicable en raison de sa nationalité / Est punie de la même amende l'entreprise de transport aérien ou maritime qui débarque, dans le cadre du transit, un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne et démuni du document de voyage ou du visa requis par la loi ou l'accord international qui lui est applicable compte tenu de sa nationalité et de sa destination " ; qu'aux termes de l'article L. 625-2 du même code : " Le manquement est constaté par un procès-verbal établi par un fonctionnaire appartenant à l'un des corps dont la liste est définie par décret en Conseil d'Etat. Copie du procès-verbal est remise à l'entreprise de transport intéressée. Le manquement ainsi relevé donne lieu à une amende prononcée par l'autorité administrative compétente. L'amende peut être prononcée autant de fois qu'il y a de passagers concernés. Son montant est versé au Trésor public par l'entreprise de transport. / L'entreprise de transport a accès au dossier et est mise à même de présenter ses observations écrites dans un délai d'un mois sur le projet de sanction de l'administration. La décision de l'autorité administrative, qui est motivée, est susceptible d'un recours de pleine juridiction. / L'autorité administrative ne peut infliger d'amende à raison de faits remontant à plus d'un an " ; qu'aux termes de l'article L. 625-5 du même code : " Les amendes prévues aux articles L. 625-1, L. 625-3 et L. 625-4 ne sont pas infligées : / (...) Lorsque l'entreprise de transport établit que les documents requis lui ont été présentés au moment de l'embarquement et qu'ils ne comportaient pas d'élément d'irrégularité manifeste " ; qu'il résulte tant de ces dispositions, adoptées en vue de donner leur plein effet aux stipulations de l'article 26 de la convention de Schengen, signée le 19 juin 1990, que de l'interprétation qu'en a donné le Conseil constitutionnel dans sa décision susvisée du 25 février 1992, qu'elles font obligation aux transporteurs aériens de s'assurer, au moment des formalités d'embarquement, que les voyageurs ressortissants d'Etats non membres de l'Union européenne sont en possession de documents de voyage, le cas échéant, revêtus des visas exigés par les textes, leur appartenant, non falsifiés et valides ; que si ces dispositions n'ont pas pour objet et ne sauraient avoir pour effet de conférer au transporteur un pouvoir de police aux lieu et place de la puissance publique, elles lui imposent de vérifier que l'étranger est muni des documents de voyage et des visas éventuellement requis et que ceux-ci ne comportent pas des éléments d'irrégularité manifeste, décelables par un examen normalement attentif des agents de l'entreprise de transport ; qu'en l'absence d'une telle vérification, le transporteur encourt l'amende administrative prévue par l'article L. 625-1 ;

3. Considérant qu'un agent de la police de l'air et des frontières de l'aéroport Roissy Charles de Gaulle a appréhendé, le 8 décembre 2013, Mme B...C..., débarquée par la société Air France d'un vol arrivé le même jour en provenance de Johannesburg, munie d'un passeport nigérian comportant un visa " Shengen ", dont il n'est pas contesté qu'il avait été contrefait, de sorte que Mme C...était en réalité dépourvue de document de voyage ; qu'il ressort toutefois des pièces du dossier que le manque de définition du fond d'impression de la mention " WIZA " et notamment de la micro-ligne " EUR " située au dessus et en dessous de cette mention, permettant de déceler le caractère falsifié de ce document, n'était pas détectable sans recours à du matériel spécialisé et, par suite, ne constituait pas une irrégularité manifeste décelable par un examen normalement attentif d'un agent d'embarquement ; que, dans ces conditions, la requérante est fondée à soutenir que l'amende prévue par les dispositions précitées du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile lui a été illégalement infligée ;

4. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de se prononcer sur les autres moyens de la requête, que la société Air France est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 17 octobre 2014 contestée, et à demander l'annulation de ce jugement et de cette décision ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 euros au titre des frais exposés par la société Air France et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1430856/3-2 du 15 septembre 2015 du Tribunal administratif de Paris et la décision du ministre de l'intérieur du 17 octobre 2014 sont annulés.

Article 2 : L'Etat versera à la société Air France une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la SA Société Air France et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 20 septembre 2016 à laquelle siégeaient :

- Mme Hamon, président,

- M. Dellevedove, premier conseiller,

- Mme d'Argenlieu, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 4 octobre 2016.

Le rapporteur,

L. d'ARGENLIEULe président assesseur,

En application de l'article R. 222-26 du code

de justice administrative,

P. HAMONLe greffier,

S. GASPAR

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15PA03834


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA03834
Date de la décision : 04/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

65-03-04-02 Transports. Transports aériens. Aéroports. Police des aérodromes.


Composition du Tribunal
Président : Mme HAMON
Rapporteur ?: Mme Lorraine D'ARGENLIEU
Rapporteur public ?: Mme ORIOL
Avocat(s) : Malka

Origine de la décision
Date de l'import : 13/03/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-10-04;15pa03834 ?
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