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06/10/2016 | FRANCE | N°16PA01578

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 06 octobre 2016, 16PA01578


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...B..., veuve A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 3 septembre 2015 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite à la frontière à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1520841 du 6 avril 2016, le Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté contesté, enj

oint au préfet de police de délivrer à Mme B...un certificat de résidence algérien et mis...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...B..., veuve A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 3 septembre 2015 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite à la frontière à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1520841 du 6 avril 2016, le Tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté contesté, enjoint au préfet de police de délivrer à Mme B...un certificat de résidence algérien et mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 11 mai 2016, le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1520841 du 6 avril 2016 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de rejeter la demande présentée par Mme B...devant le Tribunal administratif de Paris.

Il soutient que :

- contrairement à ce qu'a jugé le tribunal, l'arrêté en litige n'a pas été pris en méconnaissance des stipulations du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- les autres moyens soulevés en première instance par Mme B...ne sont pas fondés.

La requête a été communiquée à MmeB..., qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de Mme Coiffet a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que MmeB..., ressortissante algérienne, entrée en France le 26 février 2012, a sollicité un titre de séjour sur le fondement des stipulations du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien ; que, par un arrêté du 3 septembre 2015, le préfet de police a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel elle pourrait être reconduite d'office à la frontière à l'expiration de ce délai ; que le préfet de police fait appel du jugement du 6 avril 2016 par lequel le Tribunal administratif de Paris, faisant droit à la demande de MmeB..., a annulé son arrêté, lui a enjoint de délivrer à l'intéressée un certificat de résidence d'une durée d'un an et a mis à la charge de l'État la somme de 1 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Sur le motif d'annulation retenu par les premiers juges :

2. Considérant qu'aux termes de l'article 6 de l'accord franco-algérien susvisé du 27 décembre 1968 : " (...) Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : / (...) / 7) Au ressortissant algérien, résidant habituellement en France, dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve qu'il ne puisse pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays (...) " ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que Mme B...souffre d'une neuropathie optique droite depuis l'opération qu'elle a subie au cours de l'année 2012 de deux tumeurs cérébrales et que des adénopathies médiastinales ont été découvertes sur un scanner thoracique en février 2015 ; que, toutefois, dans un avis du 16 avril 2015, le médecin, chef du service médical de la préfecture de police a estimé que, si l'état de santé de Mme B...nécessitait une prise en charge médicale, son défaut ne devrait pas entraîner de conséquences d'une exceptionnelle gravité et qu'elle pouvait bénéficier d'un traitement et d'un suivi médical appropriés dans son pays d'origine ; que ce même médecin a précisé, en observations complémentaires, que le traitement médical de Mme B...avait déjà été " effectué " ; que les certificats médicaux que Mme B...a versés au dossier, dont deux sont antérieurs d'un an et demi et de deux ans et demi à la décision en litige, se bornent à indiquer, dans des termes vagues et peu circonstanciés, que son état de santé nécessite un suivi médical en neurochirurgie et en ophtalmologie, que l'absence de soins pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité et que la surveillance ne peut être effectuée dans son pays d'origine, sans apporter de précisions utiles sur la nature de la prise en charge requise par l'état de santé de MmeB... ; qu'ainsi, ils ne permettent pas de remettre en cause l'appréciation du médecin, chef du service médical de la préfecture de police puis du préfet de police sur la possibilité pour Mme B...de bénéficier d'un traitement adapté à son état de santé dans son pays d'origine ; que le préfet de police établit, par ailleurs, que l'Algérie dispose des infrastructures et des médecins susceptibles d'assurer le suivi médical qui est actuellement dispensé à MmeB..., tant en service neurologique qu'en service ophtalmologique ; que, dans ces conditions, alors même que Mme B...s'est vue octroyer, le 16 juin 2015, une carte d'invalidité lui reconnaissant un taux d'incapacité au moins égal à 80%, le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont annulé son arrêté au motif qu'il avait méconnu les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

4. Considérant qu'il appartient à la Cour, saisie de l'ensemble du litige par l'effet dévolutif de l'appel, d'examiner les autres moyens soulevés par Mme B...devant le Tribunal administratif de Paris ;

Sur la légalité de la décision portant refus de titre de séjour :

5. Considérant, en premier lieu, que, si Mme B...fait valoir qu'aucun avis médical n'est joint à la décision du préfet de police, il ne résulte d'aucune disposition législative ou réglementaire, ni d'aucun principe général du droit que le préfet de police serait tenu, avant de refuser à un étranger la délivrance d'un titre de séjour pour raisons médicales, de communiquer à l'intéressé, en l'absence de demande de sa part, l'avis du médecin, chef du service médical de la préfecture de police ; qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressée ait sollicité la production d'un tel avis avant l'édiction de l'arrêté du 3 septembre 2015 ; qu'enfin, le préfet de police a produit devant les premiers juges l'avis du 16 avril 2015, par lequel le médecin, chef du service médical de la préfecture de police s'est prononcé sur l'état de santé de MmeB... ; que cet avis a été communiqué à l'intéressée par le tribunal ;

6. Considérant, en second lieu, que le moyen tiré de ce que la décision par laquelle le préfet de police a refusé un titre de séjour à Mme B...serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation, qui reprend les mêmes éléments que ceux développés à l'appui du moyen tiré de ce que la décision méconnaîtrait les stipulations du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien, doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux précédemment énoncés au point 3 du présent arrêt ;

Sur la légalité de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

7. Considérant, en premier lieu, que les moyens invoqués à l'appui des conclusions à fin d'annulation de la décision rejetant la demande de titre de séjour de Mme B...n'étant pas fondés, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision ne peut qu'être écarté ;

8. Considérant, en deuxième lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations du 7 de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux exposés au point 3 ;

9. Considérant, en troisième et dernier lieu, que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales est inopérant à l'appui des conclusions dirigées contre la décision d'obligation de quitter le territoire français, qui n'emporte pas, par elle-même, retour dans le pays d'origine ;

Sur la légalité de la décision fixant le pays de destination :

10. Considérant, en premier lieu, que les moyens invoqués à l'appui des conclusions à fin d'annulation des décisions rejetant la demande de titre de séjour de Mme B...et lui faisant obligation de quitter le territoire français n'étant pas fondés, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de ces décisions ne peut qu'être écarté ;

11. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants " ;

12. Considérant, en troisième et dernier lieu, qu'il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que les arguments tirés de l'état de santé de Mme B...ne sont pas de nature à établir l'existence d'un risque pour elle d'être exposée à des traitements prohibés par l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que, par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces stipulations doit être écarté ;

13. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a annulé son arrêté du 3 septembre 2015, lui a enjoint de délivrer à Mme B...un certificat de résidence et a mis à la charge de l'État le versement de la somme de 1 000 euros ;

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1520841 du 6 avril 2016 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme B...devant le Tribunal administratif de Paris est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur et à Mme C...B..., veuveA....

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 22 septembre 2016, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- Mme Coiffet, président assesseur,

- Mme Larsonnier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 6 octobre 2016.

Le rapporteur,

V. COIFFETLe président,

S.-L. FORMERYLe greffier,

S. JUSTINELa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16PA01578


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA01578
Date de la décision : 06/10/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: Mme Valérie COIFFET
Rapporteur public ?: M. LEMAIRE
Avocat(s) : TERREL

Origine de la décision
Date de l'import : 27/12/2016
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-10-06;16pa01578 ?
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