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30/12/2016 | FRANCE | N°15PA00793

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 30 décembre 2016, 15PA00793


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge de l'amende, d'un montant de 310 233 euros, infligée à la société Dresscodecie au titre de l'exercice clos en 2008, sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts, au paiement de laquelle elle est solidairement recherchée.

Par un jugement n° 1310945 du 19 décembre 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le

18 février 2015, MmeC..., représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugem...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge de l'amende, d'un montant de 310 233 euros, infligée à la société Dresscodecie au titre de l'exercice clos en 2008, sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts, au paiement de laquelle elle est solidairement recherchée.

Par un jugement n° 1310945 du 19 décembre 2014, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 18 février 2015, MmeC..., représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1310945 du 19 décembre 2014 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) de prononcer la décharge de l'amende, d'un montant de 310 233 euros, infligée à la société Dresscodecie au titre de l'exercice clos en 2008, sur le fondement de l'article 1759 du code général des impôts, au paiement de laquelle elle est solidairement recherchée ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la procédure d'imposition est irrégulière dès lors qu'elle aurait dû être personnellement avisée des rehaussements notifiés à la société Dresscodecie par l'envoi d'une copie de la proposition de rectification du 19 décembre 2011 ; aucun acte de la procédure d'imposition, en particulier la copie de la demande de désignation des bénéficiaires des distributions, adressée à la société, ne lui a été notifié ;

- le service n'a pas répondu à sa demande tendant à connaître la date du dépôt de la déclaration de résultats de la société Dresscodecie et son signataire alors qu'elle avait informé le greffe du tribunal de commerce du retrait de son mandat de gérante ; elle n'était pas la gérante de droit, ni même la gérante de fait à la date du versement des distributions occultes ou à la date du dépôt de la déclaration de résultats de la société ;

- elle est en mesure de justifier que certaines sommes qualifiées de bénéfices occultes constituent des virements de compte à compte, des remboursements, des apports en comptes courants d'associés, des encaissements pour le compte de la société TA4 et que le service n'a pas retraité les encaissements autres que les ventes.

Par un mémoire en défense, enregistré le 6 août 2015, le ministre des finances et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués par la requérante ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- la décision n° 2010-90 QPC du 21 janvier 2011 du Conseil constitutionnel ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Larsonnier,

- et les conclusions de M. Lemaire, rapporteur public.

1. Considérant que la société Dresscodecie a fait l'objet d'une vérification de sa comptabilité portant sur les exercices clos en 2008 et 2009 ; qu'à l'issue des opérations de contrôle, par une proposition de rectification du 19 décembre 2011, le service a demandé à la société, sur le fondement des dispositions de l'article 117 du code général des impôts, de lui fournir, dans un délai de trente jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires des sommes regardées comme distribuées en application des articles 109 et 111, c du code général des impôts ; que, faute pour la société Dresscodecie d'avoir satisfait à cette demande, celle-ci s'est vue assigner la pénalité de 100% du montant des sommes distribuées prévue par l'article 1759 du même code, qui a été mise en recouvrement à son nom, le 24 avril 2012, pour un montant de 310 233 euros au titre de l'année 2008 ; que, par un avis du 29 octobre 2012, Mme C..., gérante de la société Dresscodecie du 12 septembre 2008 au 28 juillet 2009, a été informée de la mise en recouvrement de cette pénalité entre ses mains, en sa qualité de débiteur solidaire de la société Dresscodecie, sur le fondement du 3 du V de l'article 1754 du code général des impôts ; que Mme C...fait appel du jugement du 19 décembre 2014, par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge de l'amende d'un montant de 310 233 euros, infligée à la société Dresscodecie, au paiement de laquelle elle est solidairement recherchée ;

2. Considérant qu'aux termes de l'article 117 du code général des impôts : " Au cas où la masse des revenus distribués excède le montant total des distributions tel qu'il résulte des déclarations de la personne morale visées à l'article 116, celle-ci est invitée à fournir à l'administration, dans un délai de trente jours, toutes indications complémentaires sur les bénéficiaires de l'excédent de distribution. En cas de refus ou à défaut de réponse dans ce délai, les sommes correspondantes donnent lieu à l'application de la pénalité prévue à l'article 1759 " ; que l'article 1759 de ce code dispose : " Les sociétés et les autres personnes morales passibles de l'impôt sur les sociétés qui versent ou distribuent, directement ou par l'intermédiaire de tiers, des revenus à des personnes dont, contrairement aux dispositions des articles 117 et 240, elles ne révèlent pas l'identité, sont soumises à une amende égale à 100% des sommes versées ou distribuées. " ; qu'aux termes du 3 du V de l'article 1754 du même code : " (...) Les dirigeants sociaux mentionnés à l'article 62 et aux 1°, 2° et 3° du b de l'article 80 ter ainsi que les dirigeants de fait gestionnaires de la société à la date du versement ou, à défaut de connaissance de cette date, à la date de déclaration des résultats de l'exercice au cours duquel les versements ont eu lieu, sont solidairement responsables du paiement de l'amende prévue à l'article 1759 " ;

3. Considérant, en premier lieu, que Mme C...soutient que l'administration fiscale aurait dû l'informer des rehaussements notifiés à la société Dresscodecie, en lui adressant une copie de la proposition de rectification dont celle-ci avait été destinataire, ainsi que la demande de désignation des bénéficiaires des sommes considérées par le service comme des revenus distribués ; que, toutefois, ainsi d'ailleurs qu'en a jugé le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 2010-90 QPC du 21 janvier 2011, qu'à la différence de la pénalité instituée par l'article 1759 du code général des impôts, qui frappe la personne morale s'étant refusée à répondre à la demande de renseignements que lui a adressée l'administration, la solidarité prévue par le 3 du V de l'article 1754 du même code ne revêt pas le caractère d'une punition mais constitue seulement une garantie pour le recouvrement de la créance du Trésor public ; qu'au surplus, les dirigeants tenus au paiement de la pénalité peuvent contester, au moyen des voies de recours ouvertes par le livre des procédures fiscales, tant leur qualité de débiteur solidaire que le bien-fondé et l'exigibilité de la pénalité et s'opposer aux poursuites, de même qu'ils disposent, lorsqu'ils se sont acquittés du paiement de la pénalité, d'une action récursoire à l'encontre du débiteur principal et, le cas échéant, contre les débiteurs solidaires ; que, dans ces conditions, l'administration n'est pas tenue d'inviter ces personnes à présenter leurs observations avant d'infliger cette pénalité ni, le cas échéant, de les informer de ce qu'une telle pénalité est susceptible d'être mise à leur charge en leur qualité de débiteur solidaire ; que, par suite, le moyen soulevé par Mme C...et tiré de ce que l'administration aurait porté atteinte aux droits de la défense en ne l'informant pas de la procédure mise en oeuvre à l'encontre de la société et en ne la mettant pas à même de présenter ses observations, ne peut qu'être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales : " Les contestations relatives au recouvrement des impôts, taxes, redevances et sommes quelconques dont la perception incombe aux comptables publics compétents mentionnés à l'article L. 252 doivent être adressées à l'administration dont dépend le comptable qui exerce les poursuites. Les contestations ne peuvent porter que : 1° Soit sur la régularité en la forme de l'acte ; 2° Soit sur l'existence de l'obligation de payer, sur le montant de la dette compte tenu des paiements effectués, sur l'exigibilité de la somme réclamée, ou sur tout autre motif ne remettant pas en cause l'assiette et le calcul de l'impôt. (...) " ;

5. Considérant qu'en soutenant qu'elle ne saurait être tenue au paiement de l'amende litigieuse dès lors qu'elle n'était plus la gérante de la société Dresscodecie à la date du versement des sommes en cause et à celle de la déclaration des résultats de l'exercice au cours duquel les versements ont eu lieu, Mme C...entend remettre en cause non l'assiette ou le calcul de la pénalité fiscale mise à la charge de cette société, mais l'obligation qui lui a été faite d'en acquitter le montant au lieu et place de cette dernière, en vertu de la solidarité établie par les dispositions précitées du 3 du V de l'article 1754 du code général des impôts ; que ce moyen, qui se rattache au contentieux du recouvrement de l'impôt en application des dispositions précitées de l'article L. 281 du livre des procédures fiscales, est inopérant dans le cadre du présent litige qui concerne l'assiette de l'impôt ; qu'en tout état de cause, si Mme C...fait valoir qu'elle a dénoncé, dès le 27 mars 2009, son contrat de gérance de la société, il résulte de l'instruction que ce n'est que le 28 juillet 2009 qu'elle a effectivement présenté sa démission par un courrier adressé au greffe du Tribunal de commerce, dont a pris acte l'assemblée générale de la société le 29 septembre suivant ; que Mme C...a ainsi été gérante de la société Dresscodecie du 12 septembre 2008 au 28 juillet 2009 ; que, contrairement à ce qui est allégué, les pièces versées aux débats ne permettent pas de déterminer la date des distributions en cause ; qu'il résulte de l'instruction que la déclaration des résultats de la société de l'exercice clos le 31 décembre 2008 a été déposée au plus tard le 5 mai 2009 ; que, contrairement à ce que soutient la requérante, l'administration n'avait pas l'obligation de lui communiquer la date du dépôt de la déclaration des résultats de la société ; qu'ainsi, Mme C...était la gérante de droit de la société Dresscodecie lors de la souscription par la société de sa déclaration de résultats de l'exercice au cours duquel les distributions en litige ont eu lieu ; que, par suite, le moyen doit être écarté ;

6. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 74 du livre des procédures fiscales : " Les bases d'imposition sont évaluées d'office lorsque le contrôle fiscal ne peut avoir lieu du fait du contribuable ou de tiers. (...) " ;

7. Considérant qu'il résulte de l'instruction que par son comportement, le gérant de la société Dresscodecie, qui a succédé à MmeC..., a empêché le service de procéder à la vérification de comptabilité de la société et a conduit l'administration à mettre en oeuvre la procédure d'opposition à contrôle fiscal et à évaluer d'office ses bases d'imposition ; que la société Dresscodecie n'ayant ainsi présenté aucun document comptable ou pièce justificative, le service a déterminé le montant de son résultat imposable de l'exercice clos en 2008 sur la base des relevés bancaires qu'il a obtenus dans le cadre du droit de communication qu'il a exercé auprès des établissements financiers détenteurs des comptes de la société, dont il a déduit le montant des charges déductibles déclaré par celle-ci ;

8. Considérant que Mme C...conteste la reconstitution des recettes de la société Dresscodecie opérée par le service vérificateur à partir des encaissements de la société en soutenant que le service vérificateur n'a pas neutralisé les virements de compte à compte de la société, qu'il n'a pas retraité les encaissements autres que les ventes et qu'il n'a pas déduit les encaissements opérés par la société pour le compte de la société TA4 dont le terminal de carte bancaire était défectueux ;

9. Considérant, d'une part, que Mme C...présente à la Cour un tableau récapitulant des virements de compte à compte de la société Dresscodecie, le relevé du compte 580000 de la société qui était soldé à la clôture de l'exercice 2008, des relevés de comptes bancaires de la société ainsi que des bordereaux de remises de chèques pour la plupart illisibles ; qu'à défaut de précisions quant au montant et à la date des virements allégués, Mme C...n'établit pas que le service vérificateur aurait à tort inclus dans les recettes de la société Dresscodecie des sommes correspondant à des virements de compte à compte ;

10. Considérant, d'autre part, que pour démontrer que certains encaissements effectués par la société Dresscodecie correspondraient à des apports en compte courant ou à divers remboursements et non à des recettes, Mme C...a produit de nombreuses pièces, dont, au demeurant, certaines, comme les tableaux récapitulatifs établis par ses soins ou par l'un des associés, ainsi que les bordereaux de remise de chèques ou de versements d'espèces qui ne sont pas signés, sont dénuées de valeur probante, qui ne permettent pas, en l'absence de précisions sur les montants et les dates des encaissements, de remettre en cause la reconstitution des recettes de la société Dresscodecie opérée par le service vérificateur ;

11. Considérant, enfin, que si la requérante produit devant la Cour le relevé du compte 4671 " autres comptes débiteurs ou créditeurs ", mentionnant les montants de 79 430,50 euros au débit et 154 475,50 au crédit ainsi qu'un solde de 75 045,00 euros au titre de l'exercice 2008, un tableau intitulé " Restitution CA TA4 " ainsi que des relevés de compte bancaire de la société Dresscodecie et des facturettes de paiements par carte bancaire, qui attesteraient selon elle du remboursement des sommes encaissées pour le compte de la société TA4, ces pièces ne permettent toutefois pas d'établir que les sommes créditées sur les comptes bancaires de la société Dresscodecie au cours du mois de décembre 2008 auraient été encaissées, comme la requérante l'affirme, pour le compte de la société TA4, ni qu'elles auraient été effectivement reversées à cette dernière en l'absence, notamment, de la copie des chèques émis par la société Dresscodecie et des relevés de compte bancaire de la société TA4, et alors que le compte 4671 " autres comptes débiteurs ou créditeurs " de la société Dresscodecie n'était pas soldé à la clôture de l'exercice 2008 ; que, par suite, la preuve de l'exagération des recettes reconstituées et des distributions qui en découlent, n'est pas rapportée ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme C...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme C...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C...et au ministre de l'économie et des finances.

Copie en sera adressée à l'administrateur général des finances publiques, en charge de la direction de contrôle fiscal Ile-de-France Est.

Délibéré après l'audience du 8 décembre 2016, à laquelle siégeaient :

- Mme Coiffet, président,

- M. Platillero, premier conseiller,

- Mme Larsonnier, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 30 décembre 2016.

Le rapporteur,

V. LARSONNIERLe président,

V.COIFFET

Le greffier,

S. JUSTINE La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15PA00793


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA00793
Date de la décision : 30/12/2016
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

Contributions et taxes - Généralités - Amendes - pénalités - majorations.

Contributions et taxes - Impôts sur les revenus et bénéfices - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières - Revenus des capitaux mobiliers et assimilables - Revenus distribués - Notion de revenus distribués - Imposition personnelle du bénéficiaire.


Composition du Tribunal
Président : Mme COIFFET
Rapporteur ?: Mme Virginie LARSONNIER
Rapporteur public ?: M. LEMAIRE
Avocat(s) : GRASSET

Origine de la décision
Date de l'import : 17/01/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2016-12-30;15pa00793 ?
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