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25/04/2017 | FRANCE | N°16PA03622

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 10ème chambre, 25 avril 2017, 16PA03622


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler la décision du 22 septembre 2015 par lequel le préfet de Seine-et-Marne a refusé de lui délivrer un visa de long séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française.

Par un jugement n° 1508413/9 du 5 octobre 2016, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 6 décembre 2016, M. B..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1508413/9 du 5 octobre 2016 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) d'an...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler la décision du 22 septembre 2015 par lequel le préfet de Seine-et-Marne a refusé de lui délivrer un visa de long séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française.

Par un jugement n° 1508413/9 du 5 octobre 2016, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 6 décembre 2016, M. B..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1508413/9 du 5 octobre 2016 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler la décision du préfet de Seine-et-Marne en date du 22 septembre 2015 ;

3°) d'enjoindre au préfet de Seine-et-Marne de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, de lui délivrer dans l'intervalle un récépissé avec autorisation de travail, subsidiairement de réexaminer sa situation dans le même délai et les mêmes conditions.

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le préfet de Seine-et-Marne n'a pas suffisamment motivé la décision attaquée du 22 septembre 2015 ;

- il a été privé du droit d'être entendu qu'il tient du paragraphe 2 de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le préfet a commis une erreur de fait en ce qui concerne l'absence de justification de vie commune et une erreur de procédure en ne transmettant pas la demande du requérant aux autorités consulaires compétentes ;

- le préfet a commis une erreur d'appréciation s'agissant de sa situation personnelle en ne tenant pas compte de l'ancienneté de sa vie commune ainsi qu'en n'acceptant pas les preuves fournies pour justifier de son entrée régulière sur le territoire français ;

- en refusant de délivrer un visa longue durée et un titre de séjour, le préfet a méconnu l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le préfet a méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

La requête a été communiquée le 10 janvier 2017 au préfet de Seine-et-Marne, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Mielnik-Meddah,

- les conclusions de M. Ouardes, rapporteur public,

- et les observations de Me Jean, avocat de M. B....

1. Considérant que M.B..., ressortissant tunisien né le 16 décembre 1955, entré en France le 30 octobre 2010 selon ses déclarations, a sollicité la délivrance d'un visa de long séjour et un titre de séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française sur le fondement des articles L. 211-2-1 et L. 311-7 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par une décision en date du 22 septembre 2015, le préfet de Seine-et Marne a opposé un refus à sa demande aux motifs qu'il ne justifiait pas d'une entrée régulière sur le territoire français ; que M. B...relève régulièrement appel du jugement du 5 octobre 2016 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

2. Considérant que la décision du 22 septembre 2015 opposant à M. B...le refus de délivrance d'un visa de long séjour comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et mentionne que l'intéressé ne peut pas justifier d'une entrée régulière sur le territoire français ; qu'ainsi cette motivation, qui n'est pas stéréotypée contrairement à ce que soutient le requérant, répond aux exigences de la loi susvisée du 11 juillet 1979 ;

3. Considérant qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne : " Toute personne a le droit de voir ses affaires traitées impartialement, équitablement et dans un délai raisonnable par les institutions et organes de l'Union (...) " ; qu'aux termes du paragraphe 2 de ce même article : " Ce droit comporte notamment : / - le droit de toute personne d'être entendue avant qu'une mesure individuelle qui l'affecterait défavorablement ne soit prise à son encontre (...) " ; que lorsqu'il sollicite la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour, l'étranger, en raison même de l'accomplissement de cette démarche qui tend à son maintien régulier sur le territoire français, ne saurait ignorer qu'en cas de refus, il pourra faire l'objet d'une mesure d'éloignement ; qu'à l'occasion du dépôt de sa demande, il est conduit à préciser à l'administration les motifs pour lesquels il demande que lui soit délivré un titre de séjour et à produire tous éléments susceptibles de venir au soutien de cette demande ; qu'il lui appartient lors du dépôt de cette demande d'apporter à l'administration toutes les précisions qu'il juge utiles ; qu'il lui est loisible, au cours de l'instruction de sa demande, de faire valoir auprès de l'administration toute observation complémentaire utile, au besoin en faisant état d'éléments nouveaux ; que le droit de l'intéressé d'être entendu est ainsi satisfait avant que n'intervienne le refus de titre de séjour ;

4. Considérant que M. B...fait valoir qu'il n'a pas été en mesure de présenter ses observations avant l'édiction de la décision attaquée ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'intéressé ait sollicité en vain un entretien avec les services préfectoraux, ni qu'il ait été empêché de présenter ses observations avant que ne soit prise la décision en litige ; que, dans ces conditions, M. B...n'est pas fondé à soutenir qu'il a été privé du droit d'être entendu qu'il tient du principe général du droit de l'Union énoncé au paragraphe 2 de l'article 41 de la charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

5. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 4° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, marié avec un ressortissant de nationalité française, à condition que la communauté de vie n'ait pas cessé depuis le mariage, que le conjoint ait conservé la nationalité française et, lorsque le mariage a été célébré à l'étranger, qu'il ait été transcrit préalablement sur les registres de l'état civil français (...) " ; qu'aux termes de l'article L. 311-7 du même code : " Sous réserve des engagements internationaux de la France et des exceptions prévues par les dispositions législatives du présent code, l'octroi de la carte de séjour temporaire et celui de la carte de séjour "compétences et talents" sont subordonnés à la production par l'étranger d'un visa pour un séjour d'une durée supérieure à trois mois " ; et qu'aux termes du 6ème alinéa de l'article L. 211-2-1 du même code : " Lorsque la demande de visa de long séjour émane d'un étranger entré régulièrement en France, marié en France avec un ressortissant de nationalité française et que le demandeur séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint, la demande de visa de long séjour est présentée à l'autorité administrative compétente pour la délivrance d'un titre de séjour " ;

6. Considérant qu'il résulte de la combinaison de ces dispositions que pour prétendre à la délivrance d'un visa de long séjour alors qu'il séjourne en France depuis plus de six mois avec son conjoint ressortissant de nationalité française, l'étranger doit justifier de son entrée régulière en France ;

7. Considérant qu'aux termes de l'article L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'article L. 531-1 est applicable à l'étranger qui, en provenance du territoire d'un Etat partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990, est entré ou a séjourné sur le territoire métropolitain sans se conformer aux dispositions des articles 19, paragraphe 1 ou 2, 20, paragraphe 1, ou 21, paragraphe 1 ou 2, de cette convention ou sans souscrire, au moment de l'entrée sur ce territoire, la déclaration obligatoire prévue par l'article 22 de la même convention, alors qu'il était astreint à cette formalité (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 211-32 du même code : " La déclaration obligatoire mentionnée à l'article L. 531-2 est, sous réserve des dispositions de l'article R. 212-6, souscrite à l'entrée sur le territoire métropolitain par l'étranger qui n'est pas ressortissant d'un Etat membre de la Communauté européenne et qui est en provenance directe d'un Etat partie à la convention signée à Schengen le 19 juin 1990 " ;

8. Considérant que si M. B... produit un passeport sur lequel est apposé un visa Schengen de type C délivré par les autorités portugaises, valable du 25 septembre 2010 au 24 septembre 2011, le cachet apposé sur ce visa est illisible ; que si, pour tenter d'établir la date de son entrée sur le territoire français, il produit un reçu de billet d'avion électronique à son nom, accompagné de la carte d'embarquement, pour un vol assuré par Aigle Azur au départ du Portugal à destination de la France le 30 septembre 2010, sur lequel est apposé un reçu de bagage de la compagnie TAP Portugal ainsi qu'une copie d'une autre carte d'embarquement se rapportant à un vol de la compagnie Lufthansa du 29 septembre sans mention de l'année, ces documents ne sont pas de nature à apporter la preuve d'une entrée effective et régulière en France à cette même date ; qu'il ressort en outre des pièces du dossier que M. B... ne s'est pas conformé aux dispositions précitées de l'article L. 531-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, dès lors, M. B... qui n'établit pas être entré régulièrement en France ne remplissait pas les conditions pour se voir délivrer un visa de long séjour selon les modalités fixées au 6ème alinéa de l'article L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que pour ce seul motif le préfet de Seine-et Marne, qui n'était pas tenu de transmettre la demande de M. B... aux autorités consulaires dès lors que l'intéressé était déjà en France, était fondé à y opposer un rejet ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que la décision portant refus de délivrance d'un visa de long séjour et d'un titre de séjour en qualité de conjoint d'une ressortissante française aurait méconnu les dispositions des articles L. 311-7 et L. 211-2-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté ;

9. Considérant que M. B...ne peut utilement invoquer la circulaire du 19 mars 2007, qui est dépourvue de tout caractère réglementaire ;

10. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L.313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile susvisé, dans sa rédaction alors applicable : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit: (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) " ;

11. Considérant que M.B..., âgé de 59 ans à la date de la décision attaquée, soutient qu'il vit depuis plusieurs années avec une ressortissante française, avec laquelle il est marié depuis le 27 septembre 2014 ; que, toutefois, la présence en France de l'intéressé présente un caractère récent à la date de la décision attaquée ; que s'il soutient que l'état de santé de son épouse en situation de longue maladie et qui perçoit une pension d'invalidité nécessite sa présence quotidienne à ses côtés, l'attestation du docteur Lutz en date du 31 octobre 2016, en tout état de cause postérieure à la décision attaquée, produite au soutien de ses allégations n'est pas de nature à établir que l'intéressé assure effectivement cette présence ; qu'il est constant que M. B...n'est pas dépourvu d'attaches en Tunisie, où il a vécu jusqu'à l'âge de 54 ans et où vivent ses six enfants ; que, par suite, la décision du 22 septembre 2015 du préfet de Seine-et-Marne n'a pas porté au droit de M. B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel elle a été prise ; qu'ainsi, cette décision n'a méconnu, ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B...et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée au préfet de Seine-et-Marne.

Délibéré après l'audience du 28 mars 2017 à laquelle siégeaient :

M. Krulic, président de chambre,

M. Auvray, président-assesseur,

Mme Mielnik-Meddah, premier conseiller,

Lu en audience publique le 25 avril 2017.

Le rapporteur,

A. MIELNIK-MEDDAH Le président,

J. KRULICLe greffier,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16PA03622


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 10ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA03622
Date de la décision : 25/04/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. KRULIC
Rapporteur ?: Mme Anne MIELNIK-MEDDAH
Rapporteur public ?: M. OUARDES
Avocat(s) : SHEBABO

Origine de la décision
Date de l'import : 09/05/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-04-25;16pa03622 ?
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