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01/06/2017 | FRANCE | N°16PA02767

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 01 juin 2017, 16PA02767


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B...a demandé au Tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler l'arrêté du 27 juillet 2016 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné et a décidé son placement en rétention administrative, et, d'autre part, d'enjoindre au préfet de police, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, de réexaminer sa situation administrative dans un délai

de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir et de lui d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B...a demandé au Tribunal administratif de Paris, d'une part, d'annuler l'arrêté du 27 juillet 2016 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné et a décidé son placement en rétention administrative, et, d'autre part, d'enjoindre au préfet de police, sous astreinte de 50 euros par jour de retard, de réexaminer sa situation administrative dans un délai de quinze jours à compter de la notification du jugement à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour.

Par un jugement n° 1611904/8 du 1er août 2016, la magistrate désignée par la présidente du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête sommaire et un mémoire ampliatif, enregistrés le 19 août 2016 et le 11 octobre 2016, M. B..., représenté par Me Job, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1611904/8 du 1er août 2016 de la magistrate désignée par la présidente du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 27 juillet 2016 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police, sous astreinte de 150 euros par jour de retard, de réexaminer sa situation administrative dans un délai de quinze jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le Tribunal administratif de Paris n'a pas répondu au moyen tiré de l'insuffisance de motivation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et placement en rétention administrative, ainsi qu'au moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant par la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

- l'arrêté litigieux est insuffisamment motivé ;

- le préfet de police n'a pas procédé à un examen particulier de sa situation personnelle avant de prendre à son encontre une obligation de quitter le territoire français ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 février 2017, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par le requérant n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Dalle,

- et les observations de Me Job, avocat de M. B....

1. Considérant que M.B..., ressortissant angolais né le 1er juin 1964 et entré en France le 12 octobre 1992 selon ses déclarations, a été interpellé par les services de police le 27 juillet 2016 à l'occasion d'un contrôle d'identité ; que, par un arrêté du même jour, le préfet de police lui a fait obligation de quitter le territoire français, a refusé de lui accorder un délai de départ volontaire, a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné et a décidé son placement en rétention administrative ; que M. B...relève appel du jugement par lequel la magistrate désignée par la présidente du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que la magistrate désignée a expressément écarté le moyen tiré de l'insuffisance de motivation des décisions portant obligation de quitter le territoire français et placement en rétention administrative, ainsi que celui tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale des droits de l'enfant par la décision portant obligation de quitter le territoire français ; que, par suite, M. B...n'est pas fondé à soutenir que le jugement attaqué serait entaché d'une omission à statuer sur ces moyens ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté litigieux comporte l'énoncé des considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde ; qu'en effet, il vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment ses articles 3 et 8, la convention d'application de l'accord de Schengen, notamment ses articles 19 § 1 et 2, 20 § 1 et 21 § 1 et 2, ainsi que le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment ses articles L. 211-1, L. 511-1, L. 512-1, L. 551-1, L. 551-2 et L. 551-3 ; qu'il mentionne que M. B... ne peut justifier être entré régulièrement en France et n'est pas titulaire d'un titre de séjour en cours de validité, qu'il existe un risque qu'il se soustraie à l'obligation de quitter le territoire français dans la mesure où il s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement et ne présente pas de garanties de représentation suffisantes et qu'il ne réunit pas les conditions d'une assignation à résidence dès lors qu'il ne peut justifier de la possession de documents d'identité ou de voyage en cours de validité et qu'il s'est soustrait à l'exécution d'une précédente mesure d'éloignement ; qu'il relève également qu'il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale et que M. B...n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne des droits de l'homme en cas de retour dans son pays d'origine ou dans son pays de résidence habituelle où il est effectivement réadmissible ; que, par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de l'arrêté litigieux doit être écarté ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort ni des termes de l'arrêté litigieux qui est motivé, ni d'aucune autre pièce du dossier, que le préfet de police n'aurait pas procédé à un examen approfondi de la situation personnelle de M. B...avant de prendre à son encontre une obligation de quitter le territoire français ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ;

6. Considérant que M. B...fait valoir qu'il vit en France depuis le 12 octobre 1992, qu'il entretient une relation de concubinage avec une ressortissante de la République démocratique du Congo, Mme A...C..., titulaire d'un titre de séjour, avec laquelle il a eu trois enfants, et qu'il est le père de deux autres enfants issus d'une précédente relation avec une ressortissante française ; que, toutefois, il ressort des pièces du dossier que les justificatifs de présence qu'il produit sont insuffisants et ne permettent d'établir qu'une présence ponctuelle en France ; qu'il n'est pas établi ni allégué que Mme A...C...aurait obtenu le renouvellement de son titre de séjour, qui expirait le 2 février 2016 ; que les conditions du séjour en France de l'intéressée ne sont pas précisées ; que les quelques courriers que le requérant verse au dossier, établis à son nom et à celui de Mme A...C...et l'attestation d'hébergement établie par celle-ci, ne suffisent pas à établir l'effectivité de la communauté de vie dont il se prévaut, d'autant plus qu'il n'a pas reconnu leur troisième enfant et n'a reconnu leur deuxième enfant que quatre ans après sa naissance ; que les attestations établies par Mme A...C..., par le frère de celle-ci et par un médecin généraliste ne suffisent pas non plus à démontrer qu'il contribue à l'entretien et à l'éducation de ses enfants, alors qu'il est constant qu'il est sans emploi ; que, par ailleurs, il ne fait état d'aucune circonstance particulière qui ferait obstacle à ce que sa vie familiale se poursuive dans son pays d'origine, où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de 28 ans ; que, dans ces conditions, compte tenu de l'ensemble des circonstances de l'espèce et notamment de ce que M. B...s'est soustrait à une précédente mesure d'éloignement en date du 21 décembre 2007, la décision portant obligation de quitter le territoire français ne peut être regardée comme ayant porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée par rapport aux buts en vue desquels elle a été prise ; que, par suite, elle n'a pas méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

7. Considérant, en quatrième et dernier lieu, qu'aux termes du paragraphe 1 de l'article 3 de la convention internationale des droits de l'enfant du 26 janvier 1990 : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale " ; qu'il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant ;

8. Considérant que, comme il a été dit au point 6 ci-dessus, le requérant n'établit pas qu'il contribuait effectivement à la date de l'arrêté litigieux à l'entretien et à l'éducation de ses enfants et ne fait état d'aucune circonstance qui ferait obstacle à ce que sa vie familiale se poursuive dans son pays d'origine ; que, dans ces conditions, le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnaîtrait les stipulations précitées doit être écarté ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, la magistrate désignée par la présidente du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 27 juillet 2016 du préfet de police ; que, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 11 mai 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- M. Dalle, président assesseur,

- Mme Notarianni, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 1er juin 2017.

Le rapporteur,

D. DALLE Le président,

C. JARDIN

Le greffier,

C. MONGIS

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16PA02767


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA02767
Date de la décision : 01/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: M. David DALLE
Rapporteur public ?: M. BLANC
Avocat(s) : JOB

Origine de la décision
Date de l'import : 13/06/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-06-01;16pa02767 ?
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