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30/06/2017 | FRANCE | N°16PA03150

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 30 juin 2017, 16PA03150


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 22 mars 2016 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant son pays de destination.

Par un jugement n° 1606236/3-1 du 20 septembre 2016, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés le 26

octobre 2016 et le 30 mars 2017, Mme B..., représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 22 mars 2016 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant son pays de destination.

Par un jugement n° 1606236/3-1 du 20 septembre 2016, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire en réplique enregistrés le 26 octobre 2016 et le 30 mars 2017, Mme B..., représentée par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1606236/3-1 du 20 septembre 2016 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 22 mars 2016 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour, sous la même astreinte.

Elle soutient que :

- l'arrêté du 22 mars 2016 est entaché d'un vice de procédure en ce que l'avis du médecin chef de la préfecture de police est irrégulier ;

- cet arrêté méconnait l'article L. 313-11 (11°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et est entaché d'une erreur d'appréciation ;

- il méconnait l'article L. 313-11 (7°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 21 mars 2017, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- l'arrêté du 9 novembre 2011 relatif aux conditions d'établissement et de transmission des avis rendus par les agences régionales de santé en application de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en vue de la délivrance d'un titre de séjour pour raison de santé ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Pellissier a entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que Mme B..., ressortissante iranienne née en avril 1984, est entrée en France en octobre 2009 et y a bénéficié de titres de séjour en qualité d'étudiante ; que du 24 septembre 2014 au 23 septembre 2015, elle a bénéficié d'une carte de séjour temporaire " vie privée et familiale " en raison de son état de santé ; que, par un arrêté du 22 mars 2016, le préfet de police a refusé de renouveler ce titre de séjour, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel l'intéressée pourrait être reconduite d'office ; que Mme B... relève régulièrement appel du jugement du 20 septembre 2016 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

2. Considérant en premier lieu qu'aux termes de l'article R. 313-22 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Pour l'application du 11° de l'article L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour temporaire au vu d'un avis émis par le médecin de l'agence régionale de santé compétente au regard du lieu de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général. Par dérogation, à Paris, ce médecin est désigné par le préfet de police. L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin agréé ou un médecin praticien hospitalier et, d'autre part, des informations disponibles sur l'existence d'un traitement dans le pays d'origine de l'intéressé (...). Le préfet peut, après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, prendre en considération une circonstance humanitaire exceptionnelle pour délivrer la carte de séjour temporaire même s'il existe un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé " ; qu'aux termes de l'article 4 de l'arrêté du 9 novembre 2011 : " (...) Au vu de ce rapport médical et des informations dont il dispose, le médecin de l'agence régionale de santé émet un avis précisant : - si l'état de santé de l'étranger nécessite ou non une prise en charge médicale ; - si le défaut de cette prise en charge peut ou non entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité sur son état de santé ;- s'il existe dans le pays dont il est originaire, un traitement approprié pour sa prise en charge médicale ; - la durée prévisible du traitement. Dans le cas où un traitement approprié existe dans le pays d'origine, il peut, au vu des éléments du dossier du demandeur, indiquer si l'état de santé de l'étranger lui permet de voyager sans risque vers ce pays. Cet avis est transmis au préfet sous couvert du directeur général de l'agence régionale de santé. Celui-ci, s'il estime, sur la base des informations dont il dispose, qu'il y a lieu de prendre en compte des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, transmet au préfet un avis complémentaire motivé. Par ailleurs, dès lors que l'intéressé porterait à la connaissance du préfet des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, le préfet saisit pour avis le directeur général de l'agence régionale de santé, qui lui communique son avis motivé dans un délai d'un mois (...) " ;

3. Considérant, d'une part, que le médecin chef de la préfecture de police a indiqué, dans son avis du 19 février 2016, que l'état de santé de Mme B...nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais que le traitement et le suivi étaient disponibles en Iran ; que dès lors que le médecin estimait qu'il existait un traitement approprié en Iran, il n'avait pas à se prononcer sur la durée prévisible du traitement, le séjour en France de Mme B... étant, comme il l'a également indiqué, " non médicalement justifié " ;

4. Considérant, d'autre part, que les dispositions précitées de l'arrêté du 9 novembre 201l ne font pas obligation au médecin de se prononcer sur la capacité du demandeur à voyager sans risque vers le pays de renvoi ; que s'il appartient néanmoins au préfet de prendre en compte cette capacité avant d'obliger l'intéressé à quitter le territoire français, il ne ressort d'aucune pièce du dossier que la schizophrénie de Mme B... suscitait des interrogations sur sa capacité à supporter un voyage entre la France et l'Iran ;

5. Considérant, enfin, qu'il ne ressort pas de l'étude du dossier que Mme B... aurait porté à la connaissance du médecin inspecteur des circonstances humanitaires exceptionnelles susceptibles de fonder une décision d'admission au séjour, si bien qu'il aurait dû compléter son avis en ce sens, ni d'ailleurs que Mme B...aurait fait valoir de telles circonstances devant le préfet de police, si bien que celui-ci aurait dû demander un avis complémentaire au directeur général de l'agence régionale de santé ;

6. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que l'arrêté du 22 mars 2016 serait entaché d'un vice de procédure doit être écarté ;

7. Considérant, en deuxième lieu, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police se serait cru lié par l'avis du médecin inspecteur et n'aurait pas examiné la situation personnelle de l'intéressée ;

8. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale" est délivrée de plein droit (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France dont l'état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité, sous réserve de l'absence d'un traitement approprié dans le pays dont il est originaire, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle appréciée par l'autorité administrative après avis du directeur général de l'agence régionale de santé, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative, après avis du médecin de l'agence régionale de santé de la région de résidence de l'intéressé, désigné par le directeur général de l'agence, ou, à Paris, du médecin, chef du service médical de la préfecture de police (...) " ;

9. Considérant que Mme B... fait valoir qu'elle est atteinte de schizophrénie nécessitant un suivi médical prolongé en France non susceptible d'être dispensé en Iran ; que, toutefois, il ne ressort pas des pièces du dossier, et notamment des quatre certificats médicaux versés par la requérante et non étayés par des arguments circonstanciés, qu'elle ne pourrait bénéficier d'un traitement approprié en cas de retour dans le pays dont elle a la nationalité ; que les informations tirées du site du ministère des affaires étrangères, d'un article de journal français en ligne et d'un article rédigé par un institut de recherche indépendant américain se bornent à relater une pénurie de médicaments en Iran sans démontrer que Mme B... ne pourrait pas y bénéficier d'un traitement approprié de sa maladie ; qu'en outre, le préfet de police établit la disponibilité des soins nécessaires à la situation médicale de Mme B... en produisant en appel la liste des médicaments disponibles en Iran sur laquelle figure la substance active de la Dépakine et du Leponex, ainsi que des articles de presse relatant l'existence de plusieurs structures de prise en charge des troubles psychiatriques en Iran ; que, par suite, Mme B... n'est pas fondée à soutenir que le préfet de police ne pouvait légalement lui refuser le titre de séjour qu'elle sollicitait sans méconnaître les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

10. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit: (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée (...) " ;

11. Considérant que Mme B... est célibataire et sans charge de famille ; que si elle se prévaut en appel de la présence de sa soeur en France, elle ne démontre pas que celle-ci y réside habituellement et régulièrement ni n'allègue ne plus détenir d'attaches familiales en Iran où habitent ses parents et où elle a vécu jusqu'à l'âge de 25 ans ; que la circonstance que Mme B... serait inscrite à l'Université Paris 8 dans le but d'obtenir un diplôme universitaire de médiateur de santé n'est pas attestée par les pièces du dossier ; que si Mme B...s'est vu reconnaitre la qualité de travailleur handicapé, au demeurant postérieurement à l'arrêté attaqué, cette circonstance ne peut suffire à démontrer son insertion sociale et professionnelle en France ; que, dans ces conditions, il ne ressort pas des pièces du dossier que l'arrêté du 22 mars 2016 aurait porté au droit de Mme B... au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au but en vue duquel il a été pris ; qu'ainsi, cette décision n'a méconnu ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

12. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; qu'ainsi sa requête d'appel ne peut qu'être rejetée, y compris, par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 22 juin 2017, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, présidente de chambre,

- M. Diémert, président-assesseur,

- Mme Amat, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 30 juin 2017.

Le président-assesseur,

S. DIÉMERTLe président de chambre,

rapporteur,

S. PELLISSIER

Le greffier,

A. LOUNISLa République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 16PA03150


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 16PA03150
Date de la décision : 30/06/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: Mme Sylvie PELLISSIER
Rapporteur public ?: M. ROMNICIANU
Avocat(s) : MIKOWSKI

Origine de la décision
Date de l'import : 18/07/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-06-30;16pa03150 ?
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