La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

24/10/2017 | FRANCE | N°16PA02527

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 24 octobre 2017, 16PA02527


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'annuler la décision en date du 28 avril 2015 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé son licenciement.

Par un jugement n° 1500430 du 10 juin 2016, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a annulé la décision attaquée.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 2 août et 24 novembre 2016, la commune de Voh, représentée par MeA..., demande à la Cour :

1°)

d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie du 10 juin 2016 ;

2°) de confirme...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...C...a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'annuler la décision en date du 28 avril 2015 par laquelle l'inspecteur du travail a autorisé son licenciement.

Par un jugement n° 1500430 du 10 juin 2016, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a annulé la décision attaquée.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 2 août et 24 novembre 2016, la commune de Voh, représentée par MeA..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie du 10 juin 2016 ;

2°) de confirmer la décision de l'inspecteur du travail en date du 28 avril 2015 qui a autorisé le licenciement de M.C... ;

3°) de mettre à la charge de M. C...la somme 100 000 F CFP au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le vice de procédure invoqué par M. C...quant à la transmission de la demande de licenciement n'est pas démontré et ne pouvait, en tout état de cause, influer sur le contenu de la décision contestée ;

- l'inspecteur du travail signataire de l'autorisation de licenciement litigieuse était bien compétent ;

- la décision attaquée est suffisamment motivée ;

- M.C..., agent non titulaire et par conséquent soumis au principe hiérarchique, a refusé d'exécuter un ordre du directeur des services techniques, qui relevait pourtant des missions qui lui sont dévolues par son contrat de travail ; que ces faits, constitutifs de désobéissance et d'insubordination, justifient le licenciement de M.C..., sans que cette mesure ne soit disproportionnée par rapport aux faits qui lui sont reprochés ;

- il ne pouvait s'exonérer de l'exécution de cet ordre dans la mesure où celui-ci n'était pas manifestement illégal et n'était pas de nature à compromettre gravement un intérêt public ;

- il ne pouvait invoquer un quelconque droit de retrait puisqu'il ne disposait d'aucun motif légitime pour refuser d'obéir à l'ordre que le directeur des services techniques lui avait donné ;

- les réclamations quant à l'organisation du service qu'a formées M. C...ne portant, ni sur la sécurité, ni sur une quelconque menace à un intérêt public, ne justifiaient pas son comportement ; elles ne peuvent d'ailleurs pas être prises en compte dans le contrôle de proportionnalité du licenciement ;

- il n'existe aucun lien entre le mandat de l'intéressé et son licenciement.

Par un mémoire en défense, enregistré le 3 novembre 2016, M. C...conclut au rejet de la requête et à la condamnation de la commune de Voh à lui verser la somme de 250 000 XPF sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le tribunal n'a pas examiné les moyens de légalité externe qu'il a invoqués ;

- l'auteur de la décision attaquée est incompétent ;

- il n'a pas eu accès à l'ensemble du dossier communiqué par l'employeur ;

- il n'est pas démontré que la commune de Voh a saisi l'inspecteur du travail par lettre recommandée avec accusé de réception ;

- l'inspecteur du travail a commis une erreur de fait alors qu'il n'a pas refusé de travailler le 1er avril 2015 mais a alors simplement indiqué avoir déjà reçu une autre affectation ;

- il n'a pas commis de faute grave dans la mesure où, si son comportement peut être qualifié d'insubordination, il ne s'agit que d'un refus ponctuel dû à des consignes contradictoires résultant d'un défaut dans l'organisation du service.

Vu :

- la loi organique n° 99-209 et la loi n° 99-210 du 19 mars 1999, relatives à la Nouvelle-Calédonie ;

- le code du travail de la Nouvelle-Calédonie ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Pena,

- et les conclusions de Mme Delamarre, rapporteur public.

1. Considérant que M. C...a été recruté par contrat à durée indéterminée du

2 mars 2009, en qualité d'agent polyvalent, par la commune de Voh ; que, depuis les élections professionnelles du 29 novembre 2013, il exerçait en outre le mandat de délégué du personnel titulaire ; qu'il a été convoqué, le 8 avril 2015, à un entretien préalable à son licenciement, et mis à pied le même jour à compter du 13 avril suivant ; que, le 17 avril 2015, la commune de Voh a demandé à l'inspection du travail l'autorisation de licencier M. C...pour refus d'obéissance ; que, par une décision du 28 avril 2015, l'inspecteur du travail a décidé, après convocation du maire de la commune et de M. C...le 28 avril 2015, d'autoriser son licenciement en raison d'une faute d'une gravité suffisante ; que la commune de Voh relève appel du jugement du 10 juin 2016 par lequel le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a annulé, à la demande de M.C..., la décision de l'inspecteur du travail autorisant son licenciement ;

Sur la légalité de la décision du 28 avril 2015 :

2. Considérant qu'en vertu des dispositions du titre V du code du travail de la Nouvelle-Calédonie, le licenciement des représentants du personnel ne peut intervenir que sur autorisation de l'inspecteur du travail dont dépend l'établissement ; que les salariés légalement investis de fonctions représentatives bénéficient, dans l'intérêt de l'ensemble des salariés qu'ils représentent, d'une protection exceptionnelle ; que, lorsque le licenciement d'un de ces salariés est envisagé, ce licenciement ne doit pas être en rapport avec les fonctions représentatives normalement exercées ou l'appartenance syndicale de l'intéressé ; que, dans le cas où la demande de licenciement est motivée par un comportement fautif, il appartient à l'inspecteur du travail, et le cas échéant au Président du Gouvernement de la Nouvelle-Calédonie, de rechercher, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, si les faits reprochés au salarié sont d'une gravité suffisante pour justifier son licenciement, compte tenu de l'ensemble des règles applicables au contrat de travail de l'intéressé et des exigences propres à l'exécution normale du mandat dont il est investi ;

3. Considérant que l'autorisation de licenciement contestée a été accordée aux motifs que M. C...a refusé d'exécuter un ordre donné par le directeur des services techniques de la commune, ordre qui consistait en la préparation d'une pelle hydraulique qui devait être déplacée du dock municipal à un chantier et affectant le salarié en tant que conducteur de cette pelle sur ce même chantier ; que M. C...a réitéré ce refus le 1er avril 2015 alors que l'instruction donnée la veille lui avait été rappelée ;

4. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. C...avait reçu l'ordre donné par le directeur des services techniques de conduire la pelle CAT 963 le 1er avril 2015 ; qu'il a effectivement refusé d'exécuter cette consigne en affirmant être déjà affecté à une autre pelle ; qu'il a réitéré ce refus devant le directeur des services techniques le jour-même et en aurait alors profité pour critiquer l'organisation du travail ; que M. C...fait valoir de son côté qu'il n'a commis aucune faute dès lors que la consigne qu'il a reçue entrait en contradiction avec une note de services qui l'affectait à la pelle Volvo 120 ; que si cette note intitulée " Affectation des engins et des véhicules " affectait effectivement prioritairement l'intéressé à la pelle Volvo ainsi qu'à un pickup, la pelle CAT 963 que le directeur des services techniques lui a demandé de conduire n'était quant à elle affectée à aucun employé en particulier et pouvait donc l'être à n'importe lequel des agents du chantier ; qu'il était donc nécessaire que M. C...reçoive des instructions pour savoir quel engin ou véhicule il était censé conduire ce jour-là ; qu'il a dès lors commis une faute en ne suivant pas la consigne donnée par son supérieur ; que l'existence d'un lien entre le licenciement de M. C...et son mandat de délégué du personnel ne saurait être établi par l'unique témoignage d'un de ses collègues faisant état d'une volonté de sanction de la part de la hiérarchie après qu'il ait dénoncé des problèmes d'organisation du travail ; que, toutefois, alors que M. C...était embauché par la commune depuis plusieurs années à la date de la décision attaquée, celle-ci ne fait valoir aucun antécédent disciplinaire le concernant ; qu'il s'agit là d'un comportement isolé dans la carrière de M. C..., quand bien même il a réitéré son refus d'exécuter l'ordre devant le directeur des services techniques le jour des faits litigieux ; que, dans ces conditions, son attitude ne constitue pas une faute d'un gravité suffisante de nature à justifier son licenciement ; que, par suite, la commune de Voh n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué du

10 juin 2016, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a annulé pour ce motif, et sans qu'il ait été besoin pour ce faire d'examiner les autres moyens soulevés devant lui et notamment ceux de légalité externe, la décision de l'inspecteur du travail autorisant le licenciement de

M.C... ;

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

5. Considérant que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M.C..., qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance, la somme que la commune de Voh demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Voh la somme de 2 000 euros au titre de ces mêmes frais ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la commune de Voh est rejetée.

Article 2 : La commune de Voh versera à M. C...la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M.C..., à la commune de Voh et au gouvernement de la Nouvelle-Calédonie.

Délibéré après l'audience du 11 octobre 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Bouleau, premier vice-président,

- M. Bernier, président assesseur,

- Mme Pena, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 24 octobre 2017.

Le rapporteur,

E. PENALe président,

M. BOULEAU

Le greffier,

N. DAHMANI

La République mande et ordonne au Haut-commissaire de la République en Nouvelle-Calédonie en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 10PA03855

2

N° 16PA02527


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA02527
Date de la décision : 24/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: Mme Eléonore PENA
Rapporteur public ?: Mme DELAMARRE
Avocat(s) : SELARL D'AVOCATS CALEXIS

Origine de la décision
Date de l'import : 05/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-10-24;16pa02527 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award