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24/10/2017 | FRANCE | N°16PA03440

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 24 octobre 2017, 16PA03440


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 12 mai 2016 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination, d'enjoindre à titre principal au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " sur le fondement des dispositions de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, d'enjoindre à titre subsidiaire au

préfet de police de procéder au réexamen de sa demande de titre de séjour, sous ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 12 mai 2016 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français et a fixé le pays de destination, d'enjoindre à titre principal au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " sur le fondement des dispositions de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, d'enjoindre à titre subsidiaire au préfet de police de procéder au réexamen de sa demande de titre de séjour, sous astreinte de 100 euros par jour de retard, et de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1609240/5-3 du 12 octobre 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 24 novembre 2016, régularisée le 25 novembre 2016, MmeA..., représentée par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 12 octobre 2016 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 12 mai 2016 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de destination ;

3°) d'enjoindre, à titre principal, au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa demande de titre de séjour, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 3 000 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le Tribunal administratif de Paris a omis de statuer sur le moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet de police quant aux conséquences de la décision sur sa situation personnelle et familiale ;

- l'arrêté du préfet de police est insuffisamment motivé ;

- il est entaché d'un vice de procédure dans la mesure où le préfet de police devait saisir la commission du titre de séjour en application des articles L. 313-14 alinéa 4 et L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile ;

- il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard des stipulations de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales dès lors, notamment, qu'elle vit en France depuis quatorze ans, que ses enfants sont nés et scolarisés en France, qu'elle est hébergée par une de ses tantes, et a donc désormais sa vie familiale en France ;

- il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile ;

- il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation au regard des conséquences qu'il entraine sur sa situation personnelle et familiale ;

Par un mémoire en défense, enregistré le 22 septembre 2017, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme A...ne sont pas fondés.

Un mémoire en réplique a été enregistré le 6 octobre 2017 pour MmeA....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968, modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pagès,

- et les observations de Me B...pour MmeA....

1. Considérant que Mme C...A..., ressortissante algérienne, née le 6 août 1981 à Constantine (Algérie), est entrée en France le 5 novembre 2002 selon ses déclarations sous couvert d'un visa long séjour en qualité d'étudiant ; que par un arrêté du 12 mai 2016, le préfet de police a refusé de lui accorder un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire et a fixé le pays de destination ; que, par un jugement du 12 octobre 2016, le Tribunal administratif de Paris a rejeté la demande de Mme A...tendant à l'annulation de cet arrêté ; que Mme A...relève appel de ce jugement ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant, que Mme A...soutient que le jugement est entaché d'une omission à statuer en ce qu'il n'a pas répondu au moyen tiré de l'erreur manifeste d'appréciation commise par le préfet de police quant aux conséquences de son arrêté sur sa situation personnelle et familiale ; qu'il ressort toutefois du point 6 du jugement attaqué que le tribunal administratif, après avoir détaillé les motifs pour lesquels était écarté le moyen tiré d'une méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, a expressément indiqué que, pour les mêmes motifs, l'arrêté attaqué n'est pas entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressée ; que dès lors le jugement attaqué n'est pas entaché d'une omission à statuer sur ce point ;

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Considérant, en premier lieu, que l'arrêté attaqué vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment ses articles 3 et 8, l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, ainsi que le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment son article L. 511-1 ; qu'il indique en particulier que l'intéressée ne justifie pas de manière probante résider habituellement en France depuis plus de 15 ans, qu'elle ne remplit pas les conditions prévues à l'article 6-5 de l'accord franco-algérien, qu'elle est célibataire, qu'elle est mère de deux enfants nés et résidant en France mais de nationalité algérienne et qu'elle n'atteste pas être démunie d'attaches familiales à l'étranger ; qu'ainsi la décision attaquée est suffisamment motivée ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes des stipulations de l'article 6 de l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Le certificat de résidence d'un an portant la mention " vie privée et familiale " est délivré de plein droit : (...) 5°Au ressortissant algérien qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial dont les liens personnels et familiaux en France sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus " ; qu'aux termes des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. " ;

5. Considérant que Mme A...soutient qu'elle est entrée régulièrement sur le territoire français le 5 novembre 2002, qu'elle justifie par des bulletins de salaires qu'elle produit, avoir exercé en France une activité professionnelle entre septembre et décembre 2008, entre janvier et décembre 2009, entre janvier et décembre 2010, entre janvier et novembre 2011, entre janvier et décembre 2012 et qu'elle bénéficie d'une promesse d'embauche datée du 18 novembre 2016 ; que toutefois elle a séjourné en France jusqu'en 2006 en qualité d'étudiante, qu'elle n'établit pas avoir résidé en France au cours de l'année 2007; que la circonstance qu'elle ait exercé une activité professionnelle et qu'elle bénéficie d'une promesse d'embauche, laquelle est postérieure au jugement attaqué, ne permet pas de caractériser une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée ; que si elle a eu deux enfants nés en France en 2012 et 2013 avec un ressortissant de nationalité libanaise, , et dont elle est aujourd'hui séparée, cette circonstance ne fait pas obstacle à ce que la cellule familiale se reconstitue en Algérie ; qu'en outre, si elle justifie de liens familiaux sur le territoire français où résident notamment trois de ses tantes, elle n'est pas dépourvue d'attaches familiales dans son pays d'origine où elle a vécu jusqu'à l'âge de vingt et un an et où résident ses parents, ses deux soeurs et son frère ; que, dans ces conditions, la décision contestée ne porte pas à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'elle ne méconnaît donc ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ni celles de l'article 6-5 de l'accord franco-algérien ; que, pour les mêmes motifs, le préfet n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur la situation personnelle de Mme A...;

6. Considérant, en troisième lieu, que si les dispositions de l'article L.313-14 ne sont pas applicables aux ressortissants algériens et si l'accord franco-algérien ne prévoit pas de semblables modalités d'admission exceptionnelle au séjour, l'autorité administrative compétente peut délivrer un certificat de résidence à un ressortissant algérien qui ne remplit pas l'ensemble des conditions auxquelles est subordonnée sa délivrance de plein droit ; qu'il dispose à cette fin d'un pouvoir discrétionnaire pour apprécier, compte tenu de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité d'une mesure de régularisation ;

7. Considérant, qu'il ne ressort pas de la motivation de l'arrêté attaqué que le préfet de police n'aurait pas procédé à un examen circonstancié du dossier de Mme A...en tenant compte de la possibilité d'une régularisation ; qu'il ressort des éléments précédemment exposés que si Mme A...fait état de la durée de sa présence en France, et de sa situation familiale l'arrêté attaqué ne peut être regardé, eu égard à ce qui vient d'être dit au point 5, comme reposant sur une appréciation manifestement erronée de la situation personnelle de l'intéressée en refusant de l'admettre à titre exceptionnel au séjour ;

8. Considérant, en quatrième lieu, qu'aux termes de l'article L. 312-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile " La commission est saisie par l'autorité administrative lorsque celle-ci envisage de refuser de délivrer ou de renouveler une carte de séjour temporaire à un étranger mentionné à l'article L. 313-11 ou de délivrer une carte de résident à un étranger mentionné aux articles L. 314-11 et L. 314-12, ainsi que dans le cas prévu à l'article L. 431-3 (...) " ; qu'en vertu des dispositions de l'article L. 312-2 le préfet n'est tenu de saisir la commission du titre de séjour que du cas des seuls étrangers qui remplissent les conditions prévues aux articles L. 313-11, L. 314-11, L. 314-12 et L. 431-3 du code précité, ou aux stipulations équivalentes de l'accord franco-algérien, auxquels il envisage de refuser le titre de séjour sollicité, et non de celui de tous les étrangers qui sollicitent un tel titre ;

9. Considérant qu'il résulte de ce qui a été dit précédemment que l'intéressée n'était pas au nombre des étrangers pouvant obtenir de plein droit un titre de séjour, en application des stipulations précitées de l'accord franco-algérien ; que par suite, le préfet de police n'était pas tenu de soumettre son cas à la commission du titre de séjour avant de lui refuser la délivrance d'un titre de séjour ;

10. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que ses conclusions à fin d'annulation ne peuvent qu'être rejetées ; que, par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A...C...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 11 octobre 2017, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

-M. Niollet, président-assesseur,

-M. Pagès, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 24 octobre 2017.

Le rapporteur,

D. PAGES

Le président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

P. TISSERAND

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

4

N° 16PA03440


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA03440
Date de la décision : 24/10/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: M. Dominique PAGES
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : MIKOWSKI

Origine de la décision
Date de l'import : 31/10/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-10-24;16pa03440 ?
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