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28/11/2017 | FRANCE | N°17PA01968

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 28 novembre 2017, 17PA01968


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 30 juin 2016 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français, dans un délai de trente jours, en fixant son pays de destination.

Par un jugement n° 1606610/2 du 11 mai 2017, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 10 juin 2017, et des pièces co

mplémentaires enregistrées le

8 novembre 2017, M. B..., représenté par Me Boulay, demande à l...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 30 juin 2016 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français, dans un délai de trente jours, en fixant son pays de destination.

Par un jugement n° 1606610/2 du 11 mai 2017, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 10 juin 2017, et des pièces complémentaires enregistrées le

8 novembre 2017, M. B..., représenté par Me Boulay, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du Tribunal administratif de Melun n° 1606610/2 du 11 mai 2017 ;

2°) d'annuler l'arrêté du préfet du Val-de-Marne du 30 juin 2016 ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale ", dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir ou, à titre subsidiaire, de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " dans le même délai ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est entaché d'omissions à statuer ;

- la décision portant refus de titre de séjour est insuffisamment motivée ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 3 de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;

- elle méconnaît les dispositions des articles L. 313-11 7ème et L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est illégale puisqu'elle a été prise sur le fondement d'une décision de refus d'admission au séjour elle-même illégale ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 7ème du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation.

La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne, qui n'a pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Even ;

- et les observations de Me Boulay, avocat de M.B....

1. Considérant que M.B..., ressortissant tunisien, a sollicité du préfet du Val-de-Marne la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " sur le fondement de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié et de l'article L. 313-11 7ème du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et la délivrance d'un titre de séjour portant la mention " salarié " sur le fondement de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié et de l'article

L. 313-14 du même code ; que, par arrêté du 30 juin 2016, le préfet du Val-de-Marne a rejeté sa demande et lui a fait obligation de quitter le territoire français, dans un délai de trente jours, en fixant le pays à destination duquel il sera reconduit à l'expiration de ce délai ; que M. B... fait appel du jugement du 11 mai 2017 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant qu'il résulte de l'instruction que, pour demander au tribunal administratif l'annulation de la décision du 30 juin 2016, M. B...a notamment soutenu que la décision attaquée méconnaissait les dispositions de l'article L. 313-11 7ème du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

3. Considérant qu'aux termes de l'article 7 quater de l'accord franco-tunisien du 17 mars 1988 modifié : " Sans préjudice des dispositions du b et du d de l'article 7ter, les ressortissants tunisiens bénéficient, dans les conditions prévues par la législation française, de la carte de séjour temporaire portant la mention "vie privée et familiale " ; qu'aux termes de l'article 11 du même accord : " Les dispositions du présent accord ne font pas obstacle à l'application de la législation des deux Etats sur le séjour des étrangers sur tous les points non traités par l'accord. / Chaque Etat délivre notamment aux ressortissants de l'autre Etat tous titres de séjour autres que ceux visés au présent accord, dans les conditions prévues par sa législation " ; qu'il en résulte que les dispositions de l'article L. 313-11 7ème du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile sont applicables aux ressortissants tunisiens ; que, dès lors, le moyen étant opérant, il appartenait au Tribunal administratif de Melun, qui a d'ailleurs visé ce moyen, d'y répondre ; qu'en l'absence de réponse à ce moyen, le jugement est entaché d'une irrégularité et doit être annulé ; qu'il y a lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur les conclusions à fin d'annulation présentée par M. B... devant le Tribunal administratif de Melun ;

Sur les conclusions à fin d'annulation :

Sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête ;

4. Considérant qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1°) Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance ; 2°) Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; qu'aux termes de l'article L. 313-11 7ème du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ;

5. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier et qu'il n'est pas contesté que M. B...réside en France depuis au moins 2011 ; que s'il est célibataire et sans enfants, ses parents et toute sa fratrie résident régulièrement en France, sous couvert de documents d'identités français ou de titres de séjour ; que, par suite, M. B...est fondé à soutenir que la décision attaquée a porté au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ; qu'ainsi, le préfet du Val-de-Marne doit être regardé comme ayant méconnu les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et les dispositions de l'article L. 313-11 7ème du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, sans qu'il soit besoin de statuer sur les autres moyens de la requête, que M. B...est fondé à soutenir que c'est à tort que le préfet du Val-de-Marne a rejeté sa demande de titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant le pays de destination ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

7. Considérant que, eu égard au motif d'annulation de l'arrêté attaqué ci-dessus retenu et alors qu'il ne résulte pas de l'instruction que des éléments de fait ou de droit nouveaux justifieraient que l'autorité administrative oppose une nouvelle décision de refus, le présent arrêt implique nécessairement que cette autorité délivre à M. B... un titre de séjour ; que, par suite, il y a lieu d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de délivrer ce titre dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. Considérant qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 000 (mille) euros au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement du Tribunal administratif de Melun n°1606610/2 du 11 mai 2017 et l'arrêté du 30 juin 2016 par lequel le préfet du Val-de-Marne a rejeté la demande de titre de séjour présentée par M. A... B...et lui a fait obligation de quitter le territoire français, dans un délai de trente jours, en fixant son pays de destination sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Val-de-Marne de délivrer à M. B... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à M. B... une somme de 1 000 (mille) euros au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au préfet du Val-de-Marne et au ministre de l'intérieur.

Délibéré après l'audience du 14 novembre 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Even, président de chambre,

- Mme Hamon, président assesseur,

- M. Dellevedove, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 28 novembre 2017.

Le président rapporteur,

B. EVEN

Le président assesseur,

P. HAMON

Le greffier,

I. BEDRLa République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

4

N° 17PA01968


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA01968
Date de la décision : 28/11/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. EVEN
Rapporteur ?: M. Bernard EVEN
Rapporteur public ?: Mme ORIOL
Avocat(s) : BOULAY

Origine de la décision
Date de l'import : 05/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-11-28;17pa01968 ?
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