La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

12/12/2017 | FRANCE | N°16PA03556

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 12 décembre 2017, 16PA03556


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision en date du 5 novembre 2014 par laquelle la présidente du conseil général de Paris a refusé de lui délivrer l'agrément sollicité en qualité d'assistante maternelle, ensemble la décision du 20 mars 2015 rejetant son recours gracieux, et de condamner le département de Paris à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation des préjudices subis en raison de l'illégalité de la décision lui refusant la délivrance d'un agr

ment en qualité d'assistante maternelle.

Par un jugement n° 1508218/6-3 du 29 se...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision en date du 5 novembre 2014 par laquelle la présidente du conseil général de Paris a refusé de lui délivrer l'agrément sollicité en qualité d'assistante maternelle, ensemble la décision du 20 mars 2015 rejetant son recours gracieux, et de condamner le département de Paris à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation des préjudices subis en raison de l'illégalité de la décision lui refusant la délivrance d'un agrément en qualité d'assistante maternelle.

Par un jugement n° 1508218/6-3 du 29 septembre 2016 le tribunal administratif a rejeté sa demande ;

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 2 décembre 2016, MmeA..., représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 29 septembre 2016 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler la décision en date du 5 novembre 2014 par laquelle la présidente du conseil général de Paris a refusé de lui délivrer un agrément en qualité d'assistante maternelle, ensemble la décision du 20 mars 2015 rejetant son recours gracieux ;

3°) de condamner le département de Paris à réparer l'entier préjudice qu'elle a subi de ce fait, évalué provisoirement à une somme de 10 000 euros.

Elle soutient que :

- le jugement a méconnu le principe du contradictoire dès lors que, pour écarter le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision attaquée, le tribunal s'est fondé sur des éléments produits en défense dont la requérante n'avait pas eu connaissance ;

- le jugement est mal fondé puisqu'il se fonde exclusivement sur les conclusions du rapport de l'administration sans prendre en compte les éléments produits par la requérante qui auraient pourtant permis d'écarter la conclusion de dysfonctionnements répétés dans ses pratiques professionnelles ;

- le tribunal a à tort également retenu qu'elle ne contestait pas sérieusement les faits reprochés alors qu'elle n'a reconnu qu'une seule erreur, consistant à n'avoir pas tenu compte d'une allergie alimentaire signalée par les parents et qui, étant un fait isolé, ne saurait justifier un refus d'agrément ;

- la requérante produit de nombreuses attestations témoignant de la satisfaction des parents des enfants qu'elle gardait, tandis que les plaintes concernent principalement une famille, particulièrement exigeante ;

- elle est fondée à demander réparation de son préjudice, qui est continu dès lors qu'elle n'a toujours pas retrouvé d'emploi et que la décision attaquée a eu également des conséquences sur sa santé.

Par un mémoire enregistré le 8 août 2017 le département de Paris demande à la Cour :

1°) de rejeter la requête

2°) de mettre à la charge de Mme A...une somme de 2 500 euros à lui verser sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par ordonnance du 24 juillet 2017, la clôture de l'instruction a été fixée au 31 août 2017.

Un mémoire en réplique a été enregistré le 21 novembre 2017 pour MmeA....

Mme A...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle partielle par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 3 mars 2017.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Labetoulle,

- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,

- et les observations de MmeA....

1. Considérant que Mme A..., assistante maternelle agréée depuis 1999, accueille à ce titre à son domicile des enfants qui lui sont confiés par la Fondation Œuvre de Saint-Simon qui l'emploie au sein de la crèche associative familiale Beaugrenelle depuis le 30 août 2010 ; que, le 7 août 2014, elle a sollicité le renouvellement de son agrément ; que par courrier du 11 août 2014, elle a été informée que, cette démarche ayant été effectuée postérieurement au 2 août 2014, date d'expiration du délai de trois mois précédant la fin de son agrément en qualité d'assistante maternelle, elle serait traitée comme une première demande d'agrément ; que par décision du 5 novembre 2014, la présidente du conseil général de Paris a refusé de lui délivrer l'agrément sollicité aux motifs que l'intéressée ne remplissait pas les conditions requises par l'article L. 421-3 du code de l'action sociale et des familles garantissant la sécurité, la santé et l'épanouissement des mineurs accueillis ; que Mme A...a alors saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande d'annulation de cette décision, ensemble la décision du 20 mars 2015 rejetant son recours gracieux et a par ailleurs sollicité l'indemnisation des préjudices résultant selon elle de l'illégalité de ces décisions ; que le tribunal a toutefois rejeté cette demande par jugement du 29 septembre 2016 dont elle interjette appel ;

Sur la régularité du jugement :

2. Considérant que Mme A...soutient que le jugement aurait été rendu en méconnaissance du principe du contradictoire, dès lors que, pour écarter le moyen tiré de l'incompétence du signataire des décisions attaquées, ce jugement se réfère à des arrêtés de délégation de signature des 24 avril et 20 octobre 2014 sans que ces arrêtés aient fait l'objet d'une communication contradictoire ; que, toutefois, dès lors que, comme le relève expressément le jugement, ces arrêtés des 24 avril et 20 octobre 2014 avaient été régulièrement publiés au bulletin municipal officiel de la Ville de Paris des 29 avril 2014 et 5 décembre 2014 respectivement, et eu égard au caractère réglementaire de ces actes, le tribunal n'a pas méconnu le principe du caractère contradictoire de la procédure en se fondant sur l'existence de ces arrêtés produits à sa demande devant lui, sans les communiquer préalablement à la requérante ;

Sur le bien-fondé du jugement :

3. Considérant qu'aux termes de l'article L. 421-3 du code de l'action sociale et des familles dans sa version en vigueur à la date des décisions contestées : " L'agrément nécessaire pour exercer la profession d'assistant maternel ou d'assistant familial est délivré par le président du conseil général du département où le demandeur réside. Un référentiel approuvé par décret en Conseil d'Etat fixe les critères d'agrément. (...) L'agrément est accordé à ces deux professions si les conditions d'accueil garantissent la sécurité, la santé et l'épanouissement des mineurs et majeurs de moins de vingt et un ans accueillis, en tenant compte des aptitudes éducatives de la personne. (...) " ; qu'aux termes de l'article R. 421-3 du même code : " Pour obtenir l'agrément d'assistant maternel ou d'assistant familial, le candidat doit :/ 1° Présenter les garanties nécessaires pour accueillir des mineurs dans des conditions propres à assurer leur développement physique, intellectuel et affectif ;/ 2° Passer un examen médical qui a pour objet de vérifier que son état de santé lui permet d'accueillir habituellement des mineurs et dont le contenu est fixé par arrêté des ministres chargés de la santé et de la famille ;/ 3° Disposer d'un logement dont l'état, les dimensions, les conditions d'accès et l'environnement permettent d'assurer le bien-être et la sécurité des mineurs compte tenu du nombre et, s'agissant d'un candidat à l'agrément d'assistant maternel, de l'âge de ceux pour lesquels l'agrément est demandé " ; qu'aux termes de l'article R. 421-5 : " Les entretiens avec un candidat à des fonctions d'assistant maternel ou avec un assistant maternel agréé et les visites à son lieu d'exercice doivent permettre d'apprécier, au regard des critères précisés dans le référentiel figurant à l'annexe 4-8 du présent code, si les conditions légales d'agrément sont remplies " ; que parmi les critères énumérés par la section 1 de l'annexe 4-8, il convient de prendre en compte " la capacité à appliquer les règles relatives à l'hygiène, notamment alimentaire, et à respecter les interdictions alimentaires signalées par les parents ", " l'aptitude à la communication et au dialogue nécessaire pour l'établissement de bonnes relations avec l'enfant, ses parents et les services départementaux de protection maternelle et infantile ", " les capacités d'information des parents et d'échange avec eux au sujet de l'enfant, en particulier sur le déroulement de sa journée d'accueil " ainsi que " la capacité à mesurer les responsabilités qui sont les siennes vis-à-vis de l'enfant, de ses parents ainsi que des services départementaux de protection maternelle et infantile, en tenant compte de l'apport des réunions d'information préalables et de la formation obligatoire ultérieure (...) " ; que la section 2 de ce référentiel relative aux conditions matérielles d'accueil et de sécurité prévoit qu'il convient de prendre en compte parmi les critères d'agrément de l'assistant maternel " la conformité du lieu d'accueil aux règles d'hygiène et de confort élémentaires : ce lieu doit être propre, clair, aéré, sain et correctement chauffé. (...) En termes de sécurité, une vigilance particulière doit être apportée : (...) protection effective des espaces d'accueil et des installations dont l'accès serait dangereux pour l'enfant, notamment les escaliers, les fenêtres (...) " ; qu'aux termes de l'article D. 421-8 du code précité : " Peuvent être sollicitées, pour donner leur avis dans le cadre de la procédure d'instruction des demandes d'agrément d'assistant maternel, les personnes mentionnées au troisième alinéa de l'article L. 421-3, à condition d'être titulaires du certificat d'aptitude professionnelle petite enfance ou de l'un des diplômes mentionnés à l'article D. 421-49 dispensant de la formation d'assistant maternel. " ;

4. Considérant qu'il résulte du rapport établi le 7 octobre 2014 dans le cadre de l'instruction de la demande de renouvellement d'agrément de Mme A..., qu'il est reproché à celle-ci des manquements aux règles relatives à la sécurité des enfants accueillis et à l'hygiène ; qu'il a ainsi été constaté lors des visites effectuées à son domicile les 29 août et 15 septembre 2014, qui avaient pourtant fait l'objet d'une annonce préalable, la présence d'objets pointus à hauteur d'enfants, de jouets sales ou détériorés pouvant présenter un danger pour eux; que les fenêtres de l'appartement, situé au 22ème étage, étaient ouvertes pendant les heures d'accueil des enfants sans que la circonstance, au demeurant non établie, qu'elles ne l'auraient été que pendant les horaires de sieste permette d'éliminer tout risque, alors surtout qu'il est relevé que la configuration du mobilier permettait aux enfants d'accéder aisément à ces fenêtres ; qu'il a de même été constaté la présence d'objets divers dans les lits des enfants ce qui, alors même que ces objets devaient selon la requérante être retirés avant sa reprise d'activité, révèle un problème d'hygiène, confirmé par la présence de nombreux petits insectes volants ; que la requérante ne saurait par ailleurs soutenir que le tribunal se serait " exclusivement appuyé sur les conclusions du rapport produit par l'administration " c'est-à-dire le rapport du 7 octobre 2014, ni qu'une prise en compte globale de l'ensemble des pièces du dossier aurait du conduire les premiers juges à faire droit à sa requête, alors qu'il est rappelé dans le jugement attaqué qu'en février et mars 2014, la directrice adjointe de la crèche associative familiale Beaugrenelle avait déjà procédé à son encontre à un rappel de la réglementation concernant l'hygiène et la sécurité des enfants accueillis et que le 29 juillet 2014 un avertissement lui avait été notifié sur ce point, ainsi qu'en raison de difficultés de communication rencontrées avec les parents et les enfants ; qu'il ressort par ailleurs du rapport du 10 octobre 2014 de la directrice adjointe de la crèche et de celui du directeur de la crèche du 2 octobre 2014, qui a émis un avis défavorable à l'octroi de l'agrément sollicité, que Mme A...a vu ses évaluations annuelles se dégrader rapidement et a connu de nombreux problèmes avec les familles ; que ces difficultés ont occasionné plusieurs ruptures d'accueil du fait du mécontentement des parents, dont une après qu'un enfant confié à sa garde ait souffert d'une dermatite liée à des changes insuffisants, sans qu'elle justifie que, comme elle le soutient, ceci s'expliquerait par l'insuffisance de couches mises à sa disposition par les parents de cet enfant ; qu'il ressort de même de ces rapports qu'après l'avertissement infligé en juillet 2014, une nouvelle procédure disciplinaire a été engagée à son encontre ; qu'elle convient par ailleurs avoir oublié de prendre en compte une allergie alimentaire d'un enfant qui lui avait été pourtant signalée ainsi qu'à la crèche ; que ces manquements, d'autant moins compréhensibles de la part d'une professionnelle ayant de nombreuses années d'expérience et ayant bénéficié selon le rapport de la directrice adjointe de la crèche du 10 octobre 2014, d'au moins six formations entre 2010 et 2014, révèlent des dysfonctionnements répétés dans les pratiques professionnelles de MmeA..., dont la réalité et la gravité ne peuvent être remises en cause par le fait que d'autres familles aient établi des attestations élogieuses à son égard ; que, par suite, la présidente du conseil général de Paris a pu, sans commettre d'erreur d'appréciation, estimer qu'à la date de la décision attaquée, les conditions d'accueil offertes aux enfants ne garantissaient pas la sécurité, la santé et l'épanouissement des mineurs et refuser l'agrément d'assistante maternelle sollicité par MmeA... ;

Sur les conclusions à fins d'indemnisation :

5. Considérant que MmeA... n'ayant pas démontré l'illégalité des décisions qu'elle conteste, ses conclusions à fins d'indemnisation du préjudice qu'elles lui auraient causé ne peuvent dès lors qu'être rejetées, sans qu'il soit besoin de statuer sur leur recevabilité ;

6. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que Mme A...n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant d'une part à l'annulation de la décision en date du 5 novembre 2014 par laquelle la présidente du conseil général de Paris lui a refusé son agrément en qualité d'assistante maternelle, ensemble la décision du 20 mars 2015 rejetant son recours gracieux et d'autre part à la condamnation du département de Paris à lui verser la somme de 10 000 euros en réparation des préjudices que ces décisions lui auraient causés ; que sa requête doit dès lors être rejetée ;

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Considérant qu'il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme A...la somme que le Département de Paris demande au titre des frais exposés et non compris dans les dépens ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme A...est rejetée.

Article 2 : Les conclusions présentées par le département de Paris sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent jugement sera notifié à Mme C...A...et au département de Paris.

Délibéré après l'audience du 28 novembre 2017, à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président-assesseur,

- Mme Labetoulle, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 12 décembre 2017.

Le rapporteur,

M-I. LABETOULLELe président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

P. TISSERANDLa République mande et ordonne au préfet de Paris, préfet de la région Ile-de-France en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

3

N° 16PA03556


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 16PA03556
Date de la décision : 12/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

04-02 Aide sociale. Différentes formes d'aide sociale.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: Mme Marie-Isabelle LABETOULLE
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : VIEGAS

Origine de la décision
Date de l'import : 26/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-12-12;16pa03556 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award