La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

21/12/2017 | FRANCE | N°17PA01882

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 21 décembre 2017, 17PA01882


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A...et la société Kuaidi ont demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler la décision, en date du 12 septembre 2016, du ministre de l'intérieur, de rejet de la demande d'autorisation de travail déposée en faveur de M.A..., ainsi que l'arrêté en date du 30 août 2016 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de délivrer à M. A...un titre de séjour portant la mention " salarié " et lui a fait obligation de quitter le territoire français, en fixant son pays de destination.

Pa

r un jugement n°s 1608229, 1608382 du 26 avril 2017, le Tribunal administratif de Mel...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A...et la société Kuaidi ont demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler la décision, en date du 12 septembre 2016, du ministre de l'intérieur, de rejet de la demande d'autorisation de travail déposée en faveur de M.A..., ainsi que l'arrêté en date du 30 août 2016 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de délivrer à M. A...un titre de séjour portant la mention " salarié " et lui a fait obligation de quitter le territoire français, en fixant son pays de destination.

Par un jugement n°s 1608229, 1608382 du 26 avril 2017, le Tribunal administratif de Melun a rejeté ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 1er juin 2017, M. A... et la société Kuaidi, représentés par Me B..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du n°s 1608229, 1608382 du 26 avril 2017 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision du ministre de l'intérieur du 12 septembre 2016 et l'arrêté du 30 août 2016 du préfet du Val-de-Marne ;

3°) d'enjoindre au ministre de l'intérieur de délivrer à la société Kuaidi une autorisation de travail au profit de M. A...dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de délivrer à M. A...un titre de séjour temporaire dans un délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement de la somme de 1 500 euros à chacun des requérants au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la décision de refus d'autorisation de travail est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- la décision de refus de séjour est entachée d'erreurs de fait et d'erreur manifeste d'appréciation ;

- le préfet du Val-de-Marne s'est senti en situation de compétence liée ;

- le préfet du Val-de-Marne a commis une erreur d'appréciation en ne tenant pas compte du fait que la décision de refus d'autorisation de travail avait fait l'objet d'un recours hiérarchique et d'un recours contentieux ;

- les décisions portant obligation de quitter le territoire et fixant le pays de destination sont illégales par exception d'illégalité de la décision de refus de séjour ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé ;

- la décision fixant le pays de destination est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé.

La requête a été communiquée au préfet du Val-de-Marne ainsi qu'au ministre de l'intérieur, qui n'ont pas présenté de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code du travail,

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

M. Luben a présenté son rapport au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. D... A..., de nationalité chinoise, et la société Kuaidi relèvent appel du jugement du 26 avril 2017 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté leurs demandes tendant à l'annulation de la décision du 12 septembre 2016 par laquelle le ministre de l'intérieur a refusé l'autorisation de travail demandée pour M. A...et l'arrêté du 30 août 2016 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé à M. A...la délivrance d'un titre de séjour " salarié " et lui a fait obligation de quitter le territoire français, en fixant son pays de destination.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

S'agissant de la décision du ministre de l'intérieur portant refus de délivrer une autorisation de travail d'un étranger à la société Kuaidi :

2. Aux termes de l'article L. 5221-2 du code du travail : " Pour entrer en France en vue d'y exercer une profession salariée, l'étranger présente : 1° Les documents et visas exigés par les conventions internationales et les règlements en vigueur ; 2° Un contrat de travail visé par l'autorité administrative ou une autorisation de travail ". Aux termes de l'article R. 5221-20 du même code : " Pour accorder ou refuser l'une des autorisations de travail mentionnées à l'article R. 5221-11, le préfet prend en compte les éléments d'appréciation suivants : (...) 2° L'adéquation entre la qualification, l'expérience, les diplômes ou titres de l'étranger et les caractéristiques de l'emploi auquel il postule (...) ".

3. Il ressort des pièces du dossier, et notamment du descriptif de l'offre d'emploi diffusé par Pôle Emploi, que la maîtrise de la langue ouïghour était bien indiquée, dans le descriptif de l'offre d'emploi proposé, comme étant demandée. Par suite, les premiers juges ont retenu à bon droit que la décision attaquée était entachée d'une erreur de fait.

4. Cependant, l'administration, en première instance, a fait valoir devant le juge de l'excès de pouvoir que la décision dont l'annulation est demandée était légalement justifiée par un motif de fait, autre que celui initialement indiqué, mais également fondé sur la situation existante à la date de cette décision. Il appartenait donc aux premiers juges, après avoir mis à même l'auteur du recours de présenter ses observations sur la substitution ainsi sollicitée, de rechercher si un tel motif était de nature à fonder légalement la décision puis d'apprécier si l'administration aurait pris la même décision si elle s'était initialement fondée sur ce motif, et enfin, le cas échéant, de procéder à la substitution demandée dès lors que celle-ci ne privait pas le requérant d'une garantie procédurale liée au motif substitué.

5. Le ministre de l'intérieur s'est ainsi fondé, pour rejeter la demande du requérant, sur un autre motif tiré de l'absence d'adéquation entre les caractéristiques de l'emploi auquel il postulait et ses compétences. S'il ressort des pièces du dossier que M. A...a suivi au moins cinq années d'étude au sein de l'institut supérieur privé d'enseignement des métiers (ISPEM), il ne verse au dossier aucun élément permettant d'apprécier la nature ou la valeur du diplôme obtenu, ni aucune pièce établissant qu'il est bien titulaire d'un diplôme au moins équivalent à " Bac + 2 ".

6. Les premiers juges ont rejeté la demande de M. A...au motif de l'absence d'adéquation entre les caractéristiques de l'emploi auquel il postulait et ses compétences. En effet, S'il ressort des pièces du dossier que M. A...a suivi au moins cinq années d'étude au sein de l'institut supérieur privé d'enseignement des métiers (ISPEM), l'intéressé ne verse au dossier aucun élément permettant d'apprécier la nature ou la valeur du diplôme obtenu. Par suite, les premiers juges, après avoir retenu l'erreur figurant dans la décision attaquée en ce que le poste concerné exigeait un niveau " Bac + 2 " et non simplement " Bac ", ont pu, à bon droit, estimer que cette décision n'était pas entachée d'une erreur d'appréciation.

S'agissant de la décision de refus de titre de séjour :

7. Aux termes de l'article L. 313-10 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire autorisant l'exercice d'une activité professionnelle est délivrée : 1° A l'étranger titulaire d'un contrat de travail visé conformément aux dispositions de l'article L. 341-2 du code du travail. / Pour l'exercice d'une activité professionnelle salariée dans un métier et une zone géographique caractérisés par des difficultés de recrutement et figurant sur une liste établie au plan national par l'autorité administrative, après consultation des organisations syndicales d'employeurs et de salariés représentatives, l'étranger se voit délivrer cette carte sans que lui soit opposable la situation de l'emploi sur le fondement du même article L. 341-2. / La carte porte la mention "salarié" lorsque l'activité est exercée pour une durée supérieure ou égale à douze mois. Elle porte la mention "travailleur temporaire" lorsque l'activité est exercée pour une durée déterminée inférieure à douze mois. Si la rupture du contrat de travail du fait de l'employeur intervient dans les trois mois précédant le renouvellement de la carte portant la mention "salarié", une nouvelle carte lui est délivrée pour une durée d'un an ".

8. En premier lieu, le préfet du Val-de-Marne a motivé le refus de titre de séjour litigieux en qualité de salarié sur le fondement de l'article L. 313-10 précité du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. La seule circonstance qu'il ait cité, dans la motivation de la décision litigeuse, le contenu de l'avis de la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi d'Ile-de-France ne saurait établir qu'il se soit estimé lié par cet avis. Par suite, M. A...n'est pas fondé à soutenir que le préfet du Val-de-Marne aurait méconnu l'étendue de sa compétence et aurait ainsi entaché la décision contestée d'une erreur de droit.

9. En deuxième lieu, il ne résulte d'aucune disposition du code du travail ni du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qu'un recours hiérarchique et un recours contentieux dirigés contre un refus de délivrance d'une autorisation de travail à un étranger fassent obstacle à ce que le préfet édicte une décision portant refus de titre de séjour et l'assortisse d'une obligation de quitter le territoire français. Par suite, le moyen tiré de l'erreur qu'aurait commise le préfet du Val-de-Marne en prenant l'arrêté contesté du 30 août 2016 doit être écarté.

10. En troisième lieu, en l'absence de justificatif produit par M. A...permettant d'apprécier la nature et la valeur de ses diplômes, comme il a été dit ci-dessus, ce dernier n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que le préfet du Val-de-Marne a motivé sa décision de rejet par l'inadéquation entre la qualification, l'expérience, les diplômes ou titres du pétitionnaire et les caractéristiques de l'emploi auquel il postulait.

11. Enfin, il ne ressort pas des pièces du dossier que cette décision serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation personnelle de l'intéressé.

S'agissant des décisions portant obligation de quitter le territoire et fixant le pays de destination :

12. En premier lieu, les moyens dirigés contre la décision de refus de titre de séjour ayant été écartés, le moyen tiré de l'exception d'illégalité de cette décision invoquée par M. A... à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision portant obligation de quitter le territoire français et fixant le pays de destination ne peut qu'être écarté par voie de conséquence.

13. En second lieu, le moyen tiré de l'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de la décision portant obligation de quitter le territoire français sur la situation personnelle de M. A... doit être écarté, l'intéressé n'apportant aucun élément permettant d'établir un risque quelconque en cas d'exécution de cette décision.

14. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... et la Société Kuaidi ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté leurs demandes. Par voie de conséquence, leurs conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... et de la société Kuaidi est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A..., à la société Kuaidi et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 7 décembre 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Luben, président assesseur,

- MmeC..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 21 décembre 2017.

Le rapporteur,

I. LUBENLe président,

J. LAPOUZADE

La greffière,

A. CLEMENTLa République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17PA01882


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA01882
Date de la décision : 21/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour. Motifs.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Ivan LUBEN
Rapporteur public ?: M. SORIN
Avocat(s) : WERBA

Origine de la décision
Date de l'import : 26/12/2017
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-12-21;17pa01882 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award