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29/12/2017 | FRANCE | N°17PA02273

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 29 décembre 2017, 17PA02273


Vu la requête, enregistrée le 6 juillet 2017, présentée pour la société Direct Energie dont le siège est 2bis, rue Louis Armand CS 75725 Paris Cedex 15 par Me B...et Perrotet pour le Cabinet Veil Jourde et Me A...pour le Cabinet A...Tasso de Panafieu AARPI ;

La société Direct Energie demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1707298/2-1 du 15 mai 2017 par laquelle la présidente de la 2ème section du Tribunal administratif de Paris a rejeté pour irrecevabilité manifeste sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 148 900 00

0 euros en réparation des préjudices ayant résulté pour elle de l'illégalité d...

Vu la requête, enregistrée le 6 juillet 2017, présentée pour la société Direct Energie dont le siège est 2bis, rue Louis Armand CS 75725 Paris Cedex 15 par Me B...et Perrotet pour le Cabinet Veil Jourde et Me A...pour le Cabinet A...Tasso de Panafieu AARPI ;

La société Direct Energie demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 1707298/2-1 du 15 mai 2017 par laquelle la présidente de la 2ème section du Tribunal administratif de Paris a rejeté pour irrecevabilité manifeste sa demande tendant à ce que l'Etat soit condamné à lui verser la somme de 148 900 000 euros en réparation des préjudices ayant résulté pour elle de l'illégalité des arrêtés ministériels des 12 août 2010, 28 juin 2011, 20 juillet 2012, 28 juillet 2014 et 26 juillet 2013 qui ont fixé le niveau des tarifs réglementés de vente d'électricité pour les années 2011 à 2013 :

2°) d'évoquer et de condamner l'Etat à lui payer la somme de 148 900 000 euros, sauf à parfaire, en réparation des préjudices par elle subis ;

3°) de condamner l'Etat à lui verser une somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ;

Elle soutient :

- que l'ordonnance est entachée d'irrégularité en ce qu'elle n'énonce pas les raisons pour lesquelles la demande serait irrecevable ;

- que c'est à tort que le tribunal a cru pouvoir reprendre une solution qui, telle qu'elle a été dégagée par l'arrêt d'assemblée du Conseil d'Etat du 13 juillet 2016, ne saurait concerner que les seules décisions explicites ;

- que la demande ne pouvait en tout état de cause être rejetée par ordonnance sur le fondement de l'article R. 222-1 du code de justice administrative, l'irrecevabilité relevée ne pouvant être tenue pour manifeste ; que dans ces conditions le recours à l'ordonnance qui a empêché la requérant de présenter ses observations a méconnu le principe du contradictoire ;

- que l'ordonnance est entachée d'erreur de droit en ce qu'elle juge que la demande était irrecevable ;

- que l'application de la ligne jurisprudentielle dont l'auteur de cette ordonnance a voulu s'inspirer aux décisions implicites de rejet violerait les principes de sécurité et prévisibilité juridiques que le Conseil d'Etat a voulu consacrer ;

- que l'Etat a commis dans la fixation des tarifs réglementés de vente d'électricité des illégalités fautives qui engagent sa responsabilité ;

- que ces fautes ont été cause pour Direct Energie d'un préjudice qui doit être estimé à 148 900 000'euros, sauf à parfaire ;

- que la responsabilité de l'Etat serait engagée même sans faute à raison de la rupture d'égalité devant les charges publiques résultant du préjudice anormal et spécial ayant résulté desdits tarifs pour Direct Energie ;

Vu, enregistrées le 16 novembre 2017, les observations en défense présentées par le ministre de l'économie et des finances et tendant au rejet de la requête et à la condamnation de la société requérante à verser à l'Etat la somme de 5 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative par les moyens que l'ordonnance attaquée est régulière, les conditions d'une application de l'article R. 222-1 du code de justice administrative étant remplies et bien fondée car c'est sans commettre d'erreur de droit que le premier juge a estimé, dans la ligne de la " jurisprudence Czabaj " que les recours dirigés contre des décisions implicites de rejet au-delà d'un délai raisonnable d'un an à compter de leur naissance étaient entachés de tardiveté, et, à titre subsidiaire qu'il n'y a ni faute ni préjudice, ni lien de causalité, que la responsabilité sans faute de l'Etat n'est pas susceptible d'être engagée ;

Vu, enregistré le 1er décembre 2017, le mémoire en réplique présenté par Mes B...et Perrotet pour la société requérante tendant aux mêmes fins que sa requête par les mêmes moyens en portant à la somme de 290 200 000 euros le montant de sa demande indemnitaire ;

Vu les autres pièces du dossier ;

Vu le code de justice administrative ;

Les parties ayant été régulièrement averties du jour de l'audience ;

Après avoir entendu au cours de l'audience publique du 5 décembre 2017 :

- le rapport de M. Bouleau, président-rapporteur,

- les conclusions de Mme Delamarre, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant la société Direct Energie ;

1. Considérant qu'aux termes de l'article R. 421-2 du code de justice administrative : " Sauf disposition législative ou réglementaire contraire, dans les cas où le silence gardé par l'autorité administrative sur une demande vaut décision de rejet, l'intéressé dispose, pour former un recours, d'un délai de deux mois à compter de la date à laquelle est née une décision implicite de rejet. Toutefois, lorsqu'une décision explicite de rejet intervient avant l'expiration de cette période, elle fait à nouveau courir le délai de recours... " ; qu'aux termes de l'article L. 112-6 du code des relations entre le public et l'administration : " Les délais de recours ne sont pas opposables à l'auteur d'une demande lorsque l'accusé de réception ne lui a pas été transmis ou ne comporte pas les indications exigées par la réglementation./Le défaut de délivrance d'un accusé de réception n'emporte pas l'inopposabilité des délais de recours à l'encontre de l'auteur de la demande lorsqu'une décision expresse lui a été régulièrement notifiée avant l'expiration du délai au terme duquel est susceptible de naître une décision implicite. " ;

2. Considérant qu'il résulte des dispositions précitées, par lesquelles ont été exhaustivement définies par les pouvoirs constitutionnellement compétents pour ce faire les conditions dans lesquelles un délai de recours contentieux peut être opposé lorsqu'est en cause une décision tacite, que, lorsqu'un accusé de réception portant les indications requises n'a pas été transmis à l'auteur d'une demande, le délai dans lequel doit être contestée la décision implicite née du silence gardé sur cette demande n'est jamais opposable au dit auteur ; qu'il suit de là que l'ordonnance attaquée est entachée d'une erreur de droit en ce qu'elle a prétendu rejeter à raison de leur tardiveté des conclusions indemnitaires faisant suite à une demande préalable, dont le seul objet était de lier le contentieux, sur laquelle aucune décision expresse n'avait été prise et qui n'avait fait l'objet d'aucun accusé de réception en se fondant sur l'existence d'une règle qui imposerait un délai " raisonnable " pour présenter dans une telle hypothèse une requête contentieuse ;

3. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que l'ordonnance attaquée ne peut qu'être annulée ; qu'il y a lieu, alors qu'il n'a pas pu être débattu du bien-fondé des conclusions de la demande et afin que les parties puissent bénéficier du double degré de juridiction qui est de principe en la matière, de renvoyer l'affaire au Tribunal administratif de Paris ;

4. Considérant que la société Direct Energie n'ayant pas dans la présente instance la qualité de partie perdante il ne peut être fait droit aux conclusions tendant à ce qu'elle soit condamnée à verser une somme au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ; qu'il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées par la société Direct Energie au titre des dites dispositions ;

DÉCIDE :

Article 1er :L'ordonnance n° 1707298/2-1 du 15 mai 2017 de la présidente de la 2ème section du Tribunal administratif de Paris est annulée.

Article 2 : La société Direct Energie est renvoyée devant le Tribunal administratif de Paris pour qu'il soit statué sur sa demande.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la société Direct Energie est rejeté.

Article 4 : Les conclusions présentées par le ministre de l'économie et des finances au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à la société Direct Energie et au ministre de l'économie et des finances.

Délibéré après l'audience du 5 décembre 2017, à laquelle siégeaient :

- M. Bouleau, premier vice-président,

- M. Bernier, président assesseur,

- Mme Pena, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 29 décembre 2017.

L'assesseur le plus ancien,

Ch. BERNIERLe président-rapporteur,

M. BOULEAU

Le greffier,

E. MOULIN

La République mande et ordonne au ministre de l'économie et des finances en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 10PA03855

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N° 17PA02273


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA02273
Date de la décision : 29/12/2017
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: M. le Pdt. Michel BOULEAU
Rapporteur public ?: Mme DELAMARRE
Avocat(s) : CABINET VEIL JOURDE

Origine de la décision
Date de l'import : 09/01/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2017-12-29;17pa02273 ?
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