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31/05/2018 | FRANCE | N°17PA03896

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 31 mai 2018, 17PA03896


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 19 octobre 2016 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant son pays de destination.

Par un jugement n° 1703424/6-1 du 30 juin 2017, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 21 décembre 2017, M. C..., r

eprésenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1703424/6-1 du 30 juin...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... C...a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 19 octobre 2016 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant son pays de destination.

Par un jugement n° 1703424/6-1 du 30 juin 2017, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 21 décembre 2017, M. C..., représenté par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1703424/6-1 du 30 juin 2017 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 19 octobre 2016 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de cent euros par jour de retard, ou, à titre subsidiaire, de réexaminer sa situation administrative dans le même délai et sous la même astreinte ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 et de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

- l'arrêté en litige méconnaît les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dès lors qu'il justifiait de dix années d'activité salariée en France ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- il méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 (7°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire français :

- elle est dépourvue de base légale en raison de l'illégalité du refus de titre de séjour qui la fonde ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11 (7°) du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense enregistré le 24 avril 2018, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

M. C... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal de grande instance de Paris du 9 novembre 2017.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Legeai a été entendu au cours de l'audience publique.

1. Considérant que M.C..., ressortissant malien né le 15 janvier 1970 et entré en France en 2004 selon ses déclarations, a sollicité un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que, par un arrêté du 19 octobre 2016, le préfet de police a opposé un refus à sa demande, a assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays à destination duquel M. C...pourrait être reconduit ; que M. C...relève régulièrement appel du jugement du 30 juin 2017 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté ;

Sur la légalité de la décision de refus de titre de séjour :

2. Considérant, en premier lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code d'entrée et de séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7 " ; qu'en présence d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour présentée sur le fondement de l'article L. 313-14, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et, à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " ; que, dans cette dernière hypothèse, un demandeur qui justifie d'une promesse d'embauche ou d'un contrat de travail ne saurait être regardé, par principe, comme attestant, par là-même, des " motifs exceptionnels " exigés par la loi ; qu'en effet, il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si cette promesse d'embauche ou ce contrat de travail, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour ;

3. Considérant que si M. C...fait valoir qu'il réside habituellement en France depuis plus de dix ans, cette seule circonstance ne constitue pas en elle-même un motif exceptionnel d'admission au séjour ; que le requérant est célibataire et, s'il est le père d'un fils né en France en 2009 et de nationalité malienne à la date de la décision litigieuse, il n'établit pas participer effectivement à son éducation et à son entretien, cet enfant résidant chez sa mère malienne, dont l'intéressé est séparé depuis 2010 ; qu'en outre, il est constant que le requérant a principalement vécu au Mali, jusqu'à l'âge de 34 ans selon ses dires, et n'y est pas dépourvu d'attaches familiales, notamment son frère ; que si l'intéressé se prévaut de l'exercice d'une activité professionnelle depuis 2006 en qualité de plongeur et d'agent d'entretien, les emplois occupés par le requérant, son ancienneté dans ses différents emplois et ses qualifications professionnelles ne peuvent dans les circonstances de l'espèce être regardés comme constitutifs d'un motif exceptionnel au sens des dispositions de l'article L. 313-14 précité ; que, par suite, M. C... n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police aurait commis une erreur manifeste d'appréciation en refusant de lui délivrer un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

4. Considérant, en deuxième lieu, qu'aux termes de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait d'institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur des enfants doit être une considération primordiale " ; que M. C..., ainsi qu'il a été dit, ne démontre pas contribuer effectivement à l'entretien et à l'éducation de son fils, de nationalité malienne à la date de la décision litigieuse, né en France en 2009 ; qu'il n'établit pas qu'il serait dans l'impossibilité de le revoir au Mali pour le cas où il y retournerait ; que, par suite, le moyen de M. C... tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant ne peut qu'être écarté ;

5. Considérant, en troisième lieu, qu'aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) " ; qu'aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales: " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui " ; que, pour l'application de ces dispositions et stipulations, l'étranger qui invoque la protection due à son droit au respect de sa vie privée et familiale en France doit apporter toute justification permettant d'apprécier la réalité et la stabilité de ses liens personnels et familiaux effectifs en France au regard de ceux qu'il a conservés dans son pays d'origine ;

6. Considérant que, comme il a été dit aux points 3 et 4 ci-dessus, M. C...ne démontre pas avoir en France, au regard des liens gardés avec son pays d'origine, des attaches privées et familiales telles que le refus de titre de séjour puisse être regardé comme portant à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des buts en vue desquels l'arrêté en litige a été pris ; que, par suite, le préfet de police n'a pas méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ; que l'arrêté litigieux n'est, pour les mêmes motifs, pas entaché d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle et familiale de l'intéressé ;

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire français :

7. Considérant, en premier lieu, qu'il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire français serait illégale du fait de l'illégalité de la décision lui refusant un titre de séjour sur la base de laquelle elle est intervenue ;

8. Considérant, en deuxième lieu, que, comme il a été dit au point 6, M. C...ne pouvait bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour et du droit d'asile ; qu'ainsi, le préfet de police a pu, sans que ces dispositions y fassent obstacle, l'obliger à quitter le territoire français ;

9. Considérant, en dernier lieu, que, eu égard à la situation personnelle de M. C...analysée aux points 3, 4 et 6, la décision portant obligation de quitter le territoire français n'a pas méconnu l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'une erreur manifeste d'appréciation quant à ses conséquences sur la situation de l'intéressé ;

Sur la légalité de la décision fixant le Mali comme pays de renvoi :

10. Considérant que M. C...ne soulève aucun moyen à l'encontre de la décision par laquelle le préfet de police a fixé le pays de destination duquel il pourra être reconduit ; qu'il n'est, dès lors, pas fondé à en demander l'annulation ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande ; que sa requête d'appel ne peut qu'être rejetée, y compris ses conclusions à fin d'injonction et de condamnation de l'Etat, qui n'est pas partie perdante, à verser à son conseil, sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, une somme représentative des frais de procédure qu'il aurait exposés s'il n'avait bénéficié de l'aide juridictionnelle totale ;

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... C...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 4 mai 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Pellissier, présidente de chambre,

- M. Legeai, premier conseiller,

- Mme Nguyên Duy, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 31 mai 2018.

Le rapporteur,

A. LEGEAILa présidente,

S. PELLISSIER Le greffier,

M. A...La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

6

N° 17PA03896


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 17PA03896
Date de la décision : 31/05/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. Séjour des étrangers. Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme PELLISSIER
Rapporteur ?: M. Alain LEGEAI
Rapporteur public ?: M. ROMNICIANU
Avocat(s) : TERREL

Origine de la décision
Date de l'import : 12/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-05-31;17pa03896 ?
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