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12/06/2018 | FRANCE | N°18PA00424

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 12 juin 2018, 18PA00424


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...A...a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du

20 octobre 2016 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant son pays de destination.

Par un jugement n° 1609697 du 27 décembre 2017, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 février 2

018, M. D...A..., représenté par

Me B...C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du trib...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D...A...a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du

20 octobre 2016 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour et lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, en fixant son pays de destination.

Par un jugement n° 1609697 du 27 décembre 2017, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 6 février 2018, M. D...A..., représenté par

Me B...C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Melun du 27 décembre 2017 ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir, la décision de refus de délivrance d'un titre de séjour du 20 octobre 2016 ;

3°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision portant obligation de quitter le territoire français ;

4°) d'annuler, pour excès de pouvoir, la décision fixant le pays de destination ;

5°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " ou " salarié " dans un délai de deux mois suivant le jugement à venir ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'absence de consultation du directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi, en méconnaissance de l'article L. 5221-5 du code du travail entache la régularité de la procédure ;

- le préfet s'est cru à tort lié par les appréciations portées par l'OFPRA et la cour nationale du droit d'asile sur sa demande tendant à ce que lui soit accordé le statut de réfugié ;

- la circulaire du 28 novembre 2012 prévoit la régularisation des demandeurs qui justifient de cinq années de présence en France et d'un travail ;

- compte tenu des dix années de présence en France, dont il justifie, et d'une activité professionnelle depuis 2014, le refus de séjour est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation ;

- le refus de séjour étant illégal, l'obligation de quitter le territoire est dépourvue de base légale ;

- compte tenu de la vie commune entamée en France avec une compatriote et de la naissance d'un enfant en 2016, l'obligation de quitter le territoire porte atteinte à son droit à une vie privée et familiale ;

- l'obligation de quitter le territoire étant illégale, la décision fixant le pays de destination l'est par voie de conséquence ;

- un renvoi en République démocratique du Congo méconnaitrait l'article L.513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les articles 3 et 5 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Le préfet du Val-de-Marne, à qui la requête a été communiquée, n'a pas produit de mémoire en défense.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Vu la décision du président de la formation de jugement de dispenser le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience ;

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bernier,

- les observations de M.A....

1. Considérant que M.A..., originaire de la République démocratique du Congo, a demandé au préfet du Val-de-Marne son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; qu'il relève appel du jugement du 27 décembre 2017 par lequel le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 20 octobre 2016 par lequel le préfet du Val-de-Marne lui a refusé un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire et a fixé le pays de destination ;

En ce qui concerne le refus de titre de séjour :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article

L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) " ;

3. Considérant que la demande présentée par un étranger sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'a pas à être instruite dans les règles fixées par le code du travail pour la délivrance de l'autorisation de travail mentionnée à son article L. 5221-5 ; qu'il s'ensuit que le préfet du Val-de-Marne n'était pas tenu de saisir le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi afin que ce dernier accorde ou refuse, préalablement à ce qu'il soit statué sur la délivrance de la carte de séjour temporaire, l'autorisation de travail visée à l'article L.5221-5 du code du travail ;

4. Considérant qu'il ressort de la motivation de la décision contestée que le préfet du Val-de-Marne a examiné la demande de titre de séjour de M. A...au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ; que pour la rejeter, il ne s'est pas fondé sur les refus d'asile opposés en 2009 et en 2010, qui ont été simplement rappelés dans le cadre d'un historique de la situation de l'intéressé ; que le moyen tiré de ce que le préfet se serait cru lié par les décisions de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides et de la Cour nationale du droit d'asile manque en fait ;

5. Considérant qu'en présence d'une demande de régularisation présentée sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, il appartient à l'autorité administrative de vérifier, dans un premier temps, si l'admission exceptionnelle au séjour par la délivrance d'une carte portant la mention " vie privée et

familiale " répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard de motifs exceptionnels, et à défaut, dans un second temps, s'il est fait état de motifs exceptionnels de nature à permettre la délivrance, dans ce cadre, d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " ou " travailleur temporaire " ; que, dans cette hypothèse, il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner, notamment, si la qualification, l'expérience et les diplômes de l'étranger ainsi que les caractéristiques de l'emploi auquel il postule, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer, en l'espèce, des motifs exceptionnels d'admission au séjour ;

6. Considérant que M.A..., qui affirme être entré en France le 7 janvier 2007 résidait sur le territoire français un peu plus de neuf ans le 20 octobre 2016, date de la décision

contestée ; que cette seule durée ne présente pas le caractère d'un motif exceptionnel d'admission au séjour ; que s'il justifie travailler régulièrement depuis 2014 sous couvert de récépissés de demande de titre de séjour en qualité d'agent de maintenance, cette activité professionnelle ne présente, en tout état de cause, pas de caractéristique justifiant son admission exceptionnelle au séjour ; que, dans ces conditions, en estimant que la demande d'admission exceptionnelle au séjour de M. A...ne répondait pas à des considérations humanitaires et ne se justifiait pas davantage au regard de motifs exceptionnels, et en refusant, par suite, de délivrer à M. A...un titre de séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, le préfet du Val-de-Marne n'a pas entaché son appréciation d'erreur manifeste ;

7. Considérant que M. A...ne saurait se prévaloir de la circulaire du ministre de l'intérieur du 28 novembre 2012 qui est dépourvue de valeur réglementaire et dont les énonciations ne constituent que des orientations générales adressées aux préfets pour la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation ;

8. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions aux fins de l'annulation du refus de titre de séjour doivent être rejetées ;

En ce qui concerne l'obligation de quitter le territoire :

9. Considérant que le refus de titre de séjour n'étant pas entaché d'illégalité, la décision portant obligation de quitter le territoire n'est pas dépourvue de base légale ;

10. Considérant que si M. A...produit l'acte de naissance de sa fille Chloé, née le

3 juin 2016, il ne justifie pas d'une vie commune avec la mère de cette enfant dont il se borne à indiquer qu'elle a demandé l'asile en France ; que par ailleurs, il n'est pas contesté que le père, la mère, l'épouse et les six enfants majeurs et mineurs de M. A...résident en République démocratique du Congo ; que dès lors, en dépit de la durée de la présence du requérant et de la naissance d'un enfant sur le territoire français, l'obligation qui lui est faite de quitter le territoire n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale garanti par les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise ;

11. Considérant qu'il résulte de ce qui précède que les conclusions aux fins de l'annulation de l'obligation de quitter le territoire doivent être rejetées ;

En ce qui concerne le pays de destination :

12. Considérant que ni le refus de titre de séjour, ni la décision portant obligation de quitter le territoire n'étant entachés d'illégalité, la décision distincte fixant le pays de destination n'est pas dépourvue de base légale ;

13. Considérant que si M. A...fait valoir qu'un retour en République démocratique du Congo l'exposerait à des risques pour la vie et sa sécurité et à la perte de sa liberté, les craintes dont il fait état ne sont justifiées par aucun élément personnel et circonstancié ; qu'il lui est loisible d'éviter les mauvais traitements auxquels seraient exposés les Congolais renvoyés de force dans leur pays d'origine en déférant volontairement à l'injonction du préfet de quitter le territoire ; que M.A..., dont la demande d'asile a été au demeurant rejetée par l'Office français de protection des réfugiés et apatrides le 19 octobre 2009 et par la Cour nationale du droit d'asile le 7 juillet 2010, n'est donc pas fondé à soutenir que la décision fixant le pays de destination méconnaitrait l'article L. 513-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les articles 3 et 5 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

14. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ;

15. Considérant que les conclusions aux fins d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative doivent être rejetées par voie de conséquence.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent jugement sera notifié à M. D...A...et au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée pour information au préfet du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 22 mai 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Bouleau, premier vice-président,

- M. Bernier, président assesseur,

- Mme Pena, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 12 juin 2018.

Le rapporteur,

Ch. BERNIERLe président,

M. BOULEAU

Le greffier,

E. MOULIN

La République mande et ordonne au ministre au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 10PA03855

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N° 18PA00424


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA00424
Date de la décision : 12/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: M. Christian BERNIER
Rapporteur public ?: Mme DELAMARRE
Avocat(s) : LUBELO-YOKA

Origine de la décision
Date de l'import : 19/06/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-06-12;18pa00424 ?
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