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28/06/2018 | FRANCE | N°17PA03707

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 28 juin 2018, 17PA03707


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...E...D...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 10 janvier 2017 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1700996/1 du 3 novembre 2017, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enr

egistrée le 6 décembre 2017, M. D..., représenté par Me Jeudi, demande à la Cour :

1°) d'annuler le...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B...E...D...a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 10 janvier 2017 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné à l'expiration de ce délai.

Par un jugement n° 1700996/1 du 3 novembre 2017, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 6 décembre 2017, M. D..., représenté par Me Jeudi, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1700996/1 du 3 novembre 2017 du Tribunal administratif de Melun;

2°) d'annuler l'arrêté du 10 janvier 2017 contesté devant ce tribunal ;

3°) d'enjoindre au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour mention " vie privée et familiale " et, très subsidiairement, d'enjoindre audit préfet de statuer à nouveau sur sa demande ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à son conseil de la somme de

1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique.

Il soutient que :

S'agissant de la décision de refus de titre de séjour :

- la procédure est entachée d'irrégularité dès lors qu'il lui a été impossible, pour démontrer le caractère exceptionnel de sa situation, de joindre, lors du dépôt de sa demande de titre de séjour, d'autres documents que ceux sollicités par le guichet de la préfecture et mentionnés sur une liste préétablie ; il a ainsi été privé d'une garantie et l'administration n'a pas examiné son dossier de manière suffisamment éclairée ;

- le préfet a méconnu les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et a commis une erreur manifeste d'appréciation au regard de cet article ;

- le préfet a méconnu les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision méconnaît les stipulations de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

- c'est à tort que le préfet indique que son épouse peut avoir recours à la procédure de regroupement familial.

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- la décision est dépourvue de base légale compte tenu de l'illégalité de la décision portant refus d'un titre de séjour ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- elle méconnaît les stipulations de la convention internationale relative aux droits de l'enfant.

La requête d'appel de M. D... a été transmise au préfet du Val-de-Marne qui n'a pas produit, malgré la mise en demeure qui lui a été adressée le 6 février 2018.

Par ordonnance du 7 mai 2018, la clôture d'instruction a été fixée au 23 mai 2018.

M. D... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du 21 mars 2018.

Vu :

- les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Jimenez,

- les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public,

- et les observations de Me Jeudi, représentant M.D....

1. Considérant que M.D..., ressortissant vietnamien né le 1er octobre 1980 à Haiphong, a sollicité du préfet du Val-de-Marne la délivrance d'un titre de séjour ; que, par arrêté du 10 janvier 2017, le préfet a rejeté sa demande, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné à l'expiration de ce délai ; que M. D...relève appel du jugement n° 1700996/1 du

3 novembre 2017 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande d'annulation de cet arrêté ;

Sur la légalité de l'arrêté du 10 janvier 2017 :

2. Considérant qu'aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 sur le fondement du troisième alinéa de cet article peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-7. (...) " ; ;

3. Considérant qu'il ressort des pièces du dossier que M. D...est marié depuis 2012 avec MmeA..., ressortissante vietnamienne titulaire d'un titre de séjour pluriannuel mention " étudiant " ; que de cette union est née une fille le 24 août 2012 ; que Mme A...est venue s'installer en France en 2015 accompagnée de sa fille ; qu'en effet, par décision du

21 juillet 2015, Mme A...a été autorisée par le ministre de l'éducation vietnamien, dans le cadre d'accords de coopération entre la France et le Vietnam, à poursuivre ses études doctorales dans le domaine de la linguistique à l'université de la Sorbonne pour une durée de quatre années à compter d'août 2015, et bénéficie pour ce faire d'une bourse ; qu'aux termes de cette décision, Mme A...devra, à la fin de son séjour, rentrer au Vietnam pour reprendre son travail d'enseignante à l'université d'Hanoï et travailler pour cet établissement pour une durée égale au moins à trois fois la durée de la formation et qu'en cas de non respect des engagements, elle devra rembourser la totalité de la bourse et des frais de formation et subirait des sanctions disciplinaires dans son établissement d'origine et son établissement d'accueil ; qu'eu égard aux circonstances très particulières de l'espèce, et notamment à l'impossibilité pour M. D...de poursuivre sa vie familiale avec son épouse et leur fille hors de France jusqu'en août 2019, en prenant l'arrêté litigieux du 10 janvier 2017, le préfet du Val-de-Marne doit être regardé comme ayant entaché sa décision d'erreur manifeste d'appréciation au regard des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

4. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. D...est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande ;

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Considérant que le présent arrêt implique, eu égard au motif d'annulation ci-dessus énoncé, qu'il soit enjoint au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt ;

Sur les conclusions présentées sur le fondement des dispositions de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

6. Considérant que M. D...a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle du Tribunal de grande instance de Paris du

21 mars 2018 ; que, par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 ; qu'il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me Jeudi, avocat de M. D...renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Jeudi de la somme de 1 500 euros ;

D E C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 1700996/1 du 3 novembre 2017 du Tribunal administratif de Melun et l'arrêté du 10 janvier 2017 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de délivrer un titre de séjour à M. D..., l'a obligé à quitter le territoire dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné à l'expiration de ce délai sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet du Val-de-Marne de délivrer à M. D... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera à Me Jeudi, avocat de M. D..., une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, sous réserve qu'elle renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat.

Article 4: Le présent arrêt sera notifié à M. B...E...D..., au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur, à Me C...Jeudi et au préfet du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 20 juin 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- Mme Appèche, président assesseur,

- Mme Jimenez, premier conseiller.

Lu en audience publique le 28 juin 2018.

Le rapporteur,

J. JIMENEZLe président,

I. BROTONS

Le greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au ministre d'Etat, ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17PA03707


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA03707
Date de la décision : 28/06/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Julia JIMENEZ
Rapporteur public ?: M. CHEYLAN
Avocat(s) : JEUDI

Origine de la décision
Date de l'import : 10/07/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-06-28;17pa03707 ?
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