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20/09/2018 | FRANCE | N°15PA03309

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 20 septembre 2018, 15PA03309


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par un jugement n° 1200497/6-2 du 16 juin 2015, le Tribunal administratif de Paris a condamné l'Assistance publique - hôpitaux de Paris à verser la somme de 119 212,23 euros à Mme C..., ainsi qu'une rente d'un montant annuel de 2 800 euros au titre des frais d'assistance par tierce personne à compter de la date du jugement, versée par trimestre échu et revalorisée au 1er janvier de chaque année par application des coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale, à verser au d

épartement de la Somme la somme de 167 242,50 euros ainsi que la somme de 1 0...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Par un jugement n° 1200497/6-2 du 16 juin 2015, le Tribunal administratif de Paris a condamné l'Assistance publique - hôpitaux de Paris à verser la somme de 119 212,23 euros à Mme C..., ainsi qu'une rente d'un montant annuel de 2 800 euros au titre des frais d'assistance par tierce personne à compter de la date du jugement, versée par trimestre échu et revalorisée au 1er janvier de chaque année par application des coefficients prévus à l'article L. 434-17 du code de la sécurité sociale, à verser au département de la Somme la somme de 167 242,50 euros ainsi que la somme de 1 037 euros au titre de l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale, à verser à la Caisse des dépôts et consignations la somme de 273 044,69 euros, majorée des intérêts à compter du 16 juin 2015, a mis à la charge définitive de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 2 000 euros et a rejeté le surplus des conclusions de MmeC..., du département de la Somme et de la Caisse des dépôts et consignations.

Procédure devant la Cour :

Par un arrêt avant-dire-droit du 19 octobre 2017, la Cour a, avant de statuer sur la requête de Mme C...et l'appel incident de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris, estimé qu'il convenait de procéder à une expertise médicale complémentaire en vue d'éclairer la Cour sur le lien direct et certain existant entre les préjudices subis par Mme C...et la fracture de sa cheville gauche occasionnée par sa chute survenue le 2 avril 2010 à l'hôpital Cochin, au regard notamment de son état antérieur et/ou d'une dégradation.

L'expert désigné par l'ordonnance du président de la Cour du 7 novembre 2017 a déposé son rapport le 31 mai 2018.

Par un mémoire enregistré le 16 juillet 2018 et le 23 août 2018, Mme D...C..., représentée par MeE..., maintient ses précédentes écritures. Et, en outre, demande à la Cour de mettre à la charge de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris les frais de l'expertise du docteurB..., d'un montant de 2 400,48 euros et la somme de 2 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par deux nouveaux mémoires, enregistrés le 14 juin 2018 et le 31 juillet 2018, soit après le dépôt du rapport d'expertise du DrB..., l'Assistance publique - hôpitaux de Paris, représentée par Me Tsoudéros, conclut à ce que :

- l'indemnité destinée à réparer l'assistance par une tierce personne jusqu'à la date du jugement attaqué soit ramenée à la somme de 2 040 euros ;

- le jugement entrepris soit infirmé en ce qu'il a octroyé une rente annuelle de 2 800 euros à compter du 16 juin 2015 ;

- la somme allouée au titre du déficit fonctionnel temporaire soit ramenée à 936 euros ;

- la somme allouée au titre de l'incapacité permanente totale soit ramenée à 8 000 euros ;

- la somme allouée au titre des souffrances endurées soit ramenée à 1 850 euros ;

- la somme allouée au titre du préjudice esthétique soit ramenée à 500 euros ;

- le jugement soit infirmé en tant qu'il retient un préjudice sexuel ;

- le jugement attaqué soit infirmé en tant qu'il alloue au département de la Somme et à la Caisse des dépôts et consignations des sommes correspondant respectivement à des dépenses de santé et au maintien du salaire et au versement d'une rente d'invalidité ;

- le jugement attaqué soit confirmé en ce qu'il a rejeté la demande d'indemnisation au titre du préjudice d'agrément.

Par une ordonnance du 21 juin 2018, le président de la Cour a liquidé et taxé les frais et honoraires de l'expert à la somme de 2 400,48 euros.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique,

- le code de la sécurité sociale,

- la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984,

- l'ordonnance n° 59-76 du 7 janvier 1959,

- le décret n° 98-255 du 31 mars 1998,

- l'arrêté du 20 décembre 2017 relatif aux montants de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Luben,

- les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public,

- et les observations de Me Tsouderos, avocat de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris.

Considérant ce qui suit :

Sur la responsabilité de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris :

1. Il résulte de l'instruction, et notamment des rapports d'expertise médicale, que Mme C..., qui, souffrant d'un syndrome fémoro-patellaire, avait été hospitalisée le 1er avril 2010 dans le service d'orthopédie de l'hôpital Cochin pour une mobilisation du genou gauche sous anesthésie générale, y a fait une chute en se levant de son lit, le 2 avril 2010, qui a provoqué une fracture de la malléole externe non déplacée de la cheville gauche. Mme C...n'ayant pas bénéficié d'une aide du personnel de l'hôpital alors qu'elle se levait pour la première fois après l'intervention chirurgicale subie la veille, cette circonstance doit être regardée comme une négligence fautive dans 1'organisation et le fonctionnement du service, directement à 1'origine de la fracture de la cheville de MmeC..., de nature à engager la responsabilité de 1'Assistance publique - hôpitaux de Paris, qui au demeurant ne la conteste pas.

2. Il résulte toutefois également de l'instruction, et notamment du dernier rapport d'expertise médicale, que MmeC..., qui souffrait d'une gonalgie au genou gauche, s'était vu implanter en 2007 une prothèse totale du genou gauche, qui n'a toutefois jamais donné de bons résultats (des épanchements ont persisté régulièrement, des synovites ont été diagnostiquées, et un descellement prothétique a été mis en évidence sur des images radiologiques). Elle a ensuite subi, sans résultats véritablement favorables, trois interventions chirurgicales pour gagner plus de mobilité et soulager ses douleurs (une synovectomie sous arthroscopie en avril 2009, une synovectomie à ciel ouvert en février 2010 puis une recentration de la rotule avec section de l'aileron externe et mobilisation le 1er avril 2010). De plus, un scanner a mis en évidence chez la patiente un canal lombaire étroit en L3 et L4 gauche à l'origine de douleurs lombaires, qui ne trouvent donc pas leur cause, comme le soutient MmeC..., dans les difficultés de sa marche du fait des conséquences de la chute du 2 avril 2010 (elle a ainsi été opérée du rachis par laminectomie / arthrodèse en avril 2016, avec une reprise pour démontage en août 2016 du fait d'une paralysie postopératoire du nerf sciatique poplité externe). Par suite, les conséquences directes de la fracture de la malléole externe non déplacée de la cheville gauche provoquée par la chute survenue le 2 avril 2010, qui engagent la responsabilité de 1'Assistance publique - hôpitaux de Paris, doivent être distinguées de l'évolution défavorable de la prothèse totale du genou gauche de la patiente comme des conséquences de son canal lombaire étroit, qui sont sans lien avec l'accident survenu le 2 avril 2010 à l'hôpital Cochin. Il suit de là que 1'Assistance publique - hôpitaux de Paris est fondée à demander, par son appel incident, à ce que les différents préjudices invoqués par Mme C...ne soient indemnisés que pour autant qu'ils découlent directement et exclusivement de la chute du 2 avril 2010.

Sur les préjudices de Mme C...:

En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux temporaires :

S'agissant de l'assistance par une tierce personne :

3. Il résulte de l'instruction, et notamment du dernier rapport d'expertise médical, qu'en raison de la fracture de la malléole externe de sa cheville gauche, provoquée par la chute survenue le 2 avril 2010, Mme C...a dû recourir, pendant les cinq premières semaines d'immobilisation, à une aide humaine à raison de deux heures par jour, puis, pendant les sept semaines suivantes d'immobilisation, à une aide humaine à raison d'une heure par jour, puis pendant les trois mois suivants, à une aide humaine à raison de trois heures par semaine. Si Mme C...a été hospitalisée du 2 avril 2010 au 9 avril 2010 puis du 25 mai 2010 au 30 décembre 2010, cette hospitalisation ayant eu lieu en journée, elle a ainsi eu besoin de l'assistance d'une tierce personne rémunérée pendant ces deux périodes d'hospitalisation. Il sera ainsi fait une juste indemnisation de ce préjudice en ramenant à 3 300 euros la somme de 15 000 euros que les premiers juges avaient condamné 1'Assistance publique - hôpitaux de Paris à verser à MmeC....

S'agissant de la perte de gains professionnels :

4. Il ne résulte pas de l'instruction, et notamment du dernier rapport d'expertise médical, que MmeC..., dont le déficit fonctionnel permanent en lien avec la chute du 2 avril 2010 a été évalué à 7 %, ait ainsi subi, du seul fait de la fracture de la malléole externe de sa cheville gauche provoquée par la chute survenue le 2 avril 2010, une perte de revenus professionnels ou une perte de chance de progression dans sa carrière. Par suite, les conclusions présentées à ce titre doivent être rejetées, comme l'ont fait les premiers juges quoique sur un autre fondement.

En ce qui concerne les préjudices patrimoniaux permanents :

S'agissant des dépenses de santé futures :

5. Il ne résulte pas de l'instruction, et notamment du dernier rapport d'expertise médical, que les frais sollicités par Mme C...pour des consultations de podologue, l'achat d'une genouillère et la location d'un " neurosti tenseco " soient en lien direct avec la fracture de la malléole externe de sa cheville gauche provoquée par la chute survenue le 2 avril 2010. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté cette demande indemnitaire.

S'agissant de l'assistance par une tierce personne :

6. Il ne résulte pas de l'instruction, et notamment du dernier rapport d'expertise médical, que l'état de MmeC..., occasionné par la seule fracture de la malléole externe de sa cheville gauche provoquée par la chute survenue le 2 avril 2010, nécessite l'assistance d'une tierce personne passée la période mentionnée au point 3 ci-dessus. Par suite, la demande indemnitaire de Mme C... doit être rejetée.

S'agissant des frais liés au handicap :

7. Il ne résulte pas de l'instruction, et notamment du dernier rapport d'expertise médical, que l'état de MmeC..., occasionné par la seule fracture de la malléole externe de sa cheville gauche provoquée par la chute survenue le 2 avril 2010, nécessite qu'elle dispose d'un véhicule aménagé avec boîte automatique. Par suite, les conclusions présentées à ce titre, tendant à l'indemnisation du surcoût de l'acquisition d'un véhicule avec boîte automatique, doivent être rejetées, comme l'ont fait les premiers juges quoique sur un autre fondement.

S'agissant des pertes de gains professionnels futurs :

8. Il ne résulte pas de l'instruction, et notamment du dernier rapport d'expertise médical, que l'état de MmeC..., occasionné par la seule fracture de la malléole externe de sa cheville gauche provoquée par la chute survenue le 2 avril 2010, ait été la cause d'une perte de chance de promotion. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté cette demande indemnitaire.

En ce qui concerne les préjudices personnels temporaires :

9. En premier lieu, il résulte de l'instruction, et notamment du dernier rapport d'expertise médical, que le déficit fonctionnel temporaire total imputable à la seule fracture de la malléole externe de la cheville gauche de Mme C...provoquée par la chute survenue le 2 avril 2010 est inexistant. Pendant les cinq premières semaines d'immobilisation, le déficit fonctionnel temporaire partiel peut être évalué à 50 %, puis à 25 % pour les sept semaines suivantes, et enfin à 10 % pendant les trois mois suivants. Par suite, il sera fait une juste indemnisation de ce préjudice en ramenant à la somme de 1 150 euros l'indemnité de 13 000 euros que les premiers juges avaient condamné l'Assistance publique - hôpitaux de Paris à verser à MmeC....

10. En second lieu, il résulte de l'instruction, et notamment du dernier rapport d'expertise médical, que les douleurs éprouvées par Mme C...du fait de la seule fracture de la malléole externe de sa cheville gauche, provoquée par la chute survenue le 2 avril 2010, ont été évaluées à 2 sur une échelle de 7 par le dernier expert médical du fait de la présence d'une algodystrophie et du traitement de la cheville gauche. Par suite, il sera fait une juste indemnisation de ce préjudice en ramenant à la somme de 1 900 euros l'indemnité de 15 000 euros que les premiers juges avaient condamné 1'Assistance publique - hôpitaux de Paris à verser à MmeC....

En ce qui concerne les préjudices personnels permanents :

11. En premier lieu, il résulte de l'instruction, et notamment du dernier rapport d'expertise médical, que le déficit fonctionnel permanent dont souffre MmeC..., après consolidation, du fait de la seule fracture de la malléole externe de sa cheville gauche provoquée par la chute survenue le 2 avril 2010, a été évalué à 7 % par le dernier expert médical, compte tenu de la gêne fonctionnelle, des douleurs secondaires et surtout de la présence des lésions ostéochondrales au niveau du calcanéum. Par suite, il sera fait une juste indemnisation de ce préjudice en ramenant à la somme de 8 000 euros l'indemnité de 66 000 euros que les premiers juges avaient condamné 1'Assistance publique - hôpitaux de Paris à verser à Mme C...à ce titre.

12. En deuxième lieu, il résulte de l'instruction, et notamment du dernier rapport d'expertise médical, que Mme C...du fait de la seule fracture de la malléole externe de sa cheville gauche provoquée par la chute survenue le 2 avril 2010, a subi un préjudice esthétique temporaire qui a été évalué à 2 sur une échelle de 7 par le dernier expert médical, mais n'a subi aucun préjudice esthétique permanent. Par suite, il sera fait une juste indemnisation de ce premier préjudice en ramenant à la somme de 1 000 euros l'indemnité de 5 000 euros que les premiers juges avaient condamné 1'Assistance publique - hôpitaux de Paris à verser à Mme C...à ce titre.

13. En troisième lieu, il ne résulte pas de l'instruction, et notamment du dernier rapport d'expertise médical, que MmeC..., du fait de la seule fracture de la malléole externe de sa cheville gauche, provoquée par la chute survenue le 2 avril 2010, ait subi un préjudice sexuel. Par suite, le jugement attaqué doit être réformé en ce qu'il a alloué à ce titre à Mme C...une indemnité de 1 500 euros.

14. En quatrième lieu, il ne résulte pas de l'instruction, et notamment du dernier rapport d'expertise médical, que MmeC..., du fait de la seule fracture de la malléole externe de sa cheville gauche provoquée par la chute survenue le 2 avril 2010, ait subi un préjudice d'agrément. Par suite, c'est à bon droit que les premiers juges ont rejeté cette demande indemnitaire.

15. Il résulte de tout ce qui précède que la somme totale de 119 212,23 euros, ainsi que la rente d'un montant annuel de 2 800 euros à compter de la date de lecture du jugement attaqué, que les premiers juges ont condamné 1'Assistance publique - hôpitaux de Paris à verser à MmeC..., doit être ramenée à la somme de 16 662,23 euros.

Sur les droits du département de la Somme :

16. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus au point 7 que la seule fracture de la malléole externe de la cheville gauche de MmeC..., provoquée par la chute survenue le 2 avril 2010, ne nécessite pas qu'elle dispose d'un véhicule aménagé avec boîte automatique. Par suite, le jugement attaqué doit être réformé en ce qu'il mis à la charge de 1'Assistance publique - hôpitaux de Paris le remboursement de la somme de 1 500 euros exposée à ce titre par le département de la Somme.

17. En deuxième lieu, aux termes du dernier alinéa du 2° de l'article 57 de la loi du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale : " La collectivité est subrogée dans les droits éventuels du fonctionnaire victime d'un accident provoqué par un tiers jusqu'à concurrence du montant des charges qu'elle a supportées ou supporte du fait de cet accident. Elle est admise à poursuivre directement contre le responsable du dommage ou son assureur le remboursement des charges patronales afférentes aux rémunérations maintenues ou versées audit fonctionnaire pendant la période d'indisponibilité de celui-ci (...) ". Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus au point 9 que la seule fracture de la malléole externe de la cheville gauche de MmeC..., provoquée par la chute survenue le 2 avril 2010, a été la cause d'un déficit fonctionnel partiel de 50 % du 2 avril au 7 mai 2010 et d'un déficit temporaire fonctionnel partiel de 25 % du 7 mai au 25 juin 2010, périodes pendant lesquelles Mme C...a donc été dans l'impossibilité de travailler. Le département de la Somme justifie avoir versé à l'intéressée durant cette période allant du 2 avril 2010 au 25 juin 2010 une somme totale de 12 005,43 euros au titre du traitement brut, des indemnités statutaires et des charges patronales. Toutefois, il résulte de l'instruction que MmeC..., en raison des autres pathologies dont elle souffrait, se trouvait déjà, à la date de sa chute survenue le 2 avril 2010, en situation de congé de longue maladie, et se trouvait encore dans cette situation six mois après sa chute pour des motifs médicaux autres que ceux tenant à la fracture de la malléole externe de la cheville gauche. Par suite, le lien de causalité entre les conséquences de la chute survenue le 2 avril 2010 et les sommes que le département de la Somme a versé à l'intéressée, durant la période de déficit fonctionnel partiel, au titre du traitement brut, des indemnités statutaires et des charges patronales n'étant pas établi, la demande indemnitaire du département de la Somme doit être rejetée.

18. En troisième lieu, le département de la Somme demande en outre le remboursement de la somme de 1 056 euros exposée au titre des " sommes pour justifier des demandes de mise en longue maladie ", soit des frais d'ambulance et d'expertises. Il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que seuls les frais d'ambulance exposés les 20 avril 2010 et 19 mai 2010 (pour 123,22 euros chacun, soit un total de 246,44 euros), peuvent être regardés comme ayant un lien direct avec les conséquences de la fracture de la cheville gauche de Mme C...survenue le 2 avril 2010 et doivent être remboursés par1'Assistance publique - hôpitaux de Paris.

19. Par suite, la créance du département de la Somme, en tant qu'employeur subrogé dans les droits de MmeC..., s'établit à la somme de 246,44 euros ; le jugement attaqué, qui avait estimé que la créance du département de la Somme s'établissait à la somme de 164 686,14 euros, doit être réformé sur ce point.

Sur les droits de la Caisse des dépôts et consignations :

20. Aux termes de l'article 1er de l'ordonnance du 7 janvier 1959 relative aux actions en réparation civile de l'Etat et de certaines autres personnes publiques : " I. Lorsque le décès, l'infirmité ou la maladie d'un agent de l'Etat est imputable à un tiers, l'Etat dispose de plein droit contre ce tiers (...) d'une action en remboursement de toutes les prestations versées ou maintenues à la victime ou à ses ayants droit à la suite du décès, de l'infirmité ou de la maladie. / II. Cette action concerne notamment : (...) Les arrérages des pensions et rentes viagères d'invalidité (...) ; / Les arrérages des pensions de retraite et de réversion prématurées jusqu'à la date à laquelle la victime aurait pu normalement faire valoir ses droits à pension, ainsi que les allocations et majorations accessoires " ; l'article 7 de la même ordonnance dispose que : " Les dispositions de la présente ordonnance sont applicables aux recours exercés par : ... / 3° La caisse des dépôts et consignations agissant (...) comme gérante de la caisse nationale des retraites des agents des collectivités locales ".

21. Si la Caisse des dépôts et consignations se prévaut de l'action subrogatoire organisée par ces dispositions qui lui sont applicables lorsqu'elle agit, comme en l'espèce, en qualité de gérante de la Caisse nationale de retraite des agents des collectivités locales, laquelle verse à Mme C..., depuis le 15 mars 2015, une retraite pour invalidité et demande la condamnation de 1'Assistance publique - hôpitaux de Paris à lui rembourser le capital représentatif de sa créance, dont elle justifie à hauteur de la somme non contestée de 273 044,69 euros arrêtée au 1er mai 2015, il ne résulte pas de l'instruction, et notamment du dernier rapport d'expertise médical, que la seule fracture de la malléole externe de la cheville gauche de MmeC..., provoquée par la chute survenue le 2 avril 2010, qui ne lui a occasionné qu'un déficit fonctionnel permanent évalué par le dernier expert médical à 7 %, et qui ne faisait ainsi pas obstacle, par elle-même, à la poursuite de l'activité professionnelle de l'intéressée, soit à l'origine de sa mise à la retraite pour invalidité à compter du 15 mars 2015. Par suite, le jugement attaqué, qui avait estimé qu'il y avait lieu de condamner 1'Assistance publique - hôpitaux de Paris au versement de la somme de 273 044,69 euros à la Caisse des dépôts et consignations, doit être réformé sur ce point.

Sur les frais d'expertise :

22. Dans les circonstances de l'espèce, il y a lieu de mettre à la charge définitive de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris les frais et honoraires de l'expertise du Dr A..., taxés et liquidés à la somme de 2 000 euros par ordonnances du 5 novembre 2012 et 23 octobre 2014 du vice-président du Tribunal administratif de Paris, ainsi que les frais et honoraires de l'expertise du Dr B..., taxés et liquidés à la somme de 2 400,48 euros par ordonnance du 21 juin 2018 du président de la Cour.

Sur l'indemnité forfaitaire de gestion prévue par les dispositions de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale :

23. Aux termes de l'article 3 du décret susvisé du 31 mars 1998 : " En contrepartie des frais qu'ils engagent pour obtenir le remboursement, en application des articles 29 à 32 de la loi du 5 juillet 1985 susvisée, des prestations énumérées au II de l'article 1er de l'ordonnance du 7 janvier 1959 susvisée qu'ils ont versées soit à l'un de leurs agents victime d'un accident survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions et imputable en tout ou partie à un tiers, soit aux ayants droit de cet agent, les collectivités et établissements mentionnés à l'article 2 des lois du 26 janvier 1984 et du 9 janvier 1986 susvisées perçoivent une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable dont le montant est déterminé, sur la base de ces prestations, dans les conditions définies au sixième alinéa de l'article L. 454-1 du code de la sécurité sociale. / En cas de versement du capital-décès et lorsque l'accident dont l'agent a été victime n'est pas survenu dans l'exercice ou à l'occasion de l'exercice de ses fonctions, les dispositions de l'alinéa précédent sont également applicables si la caisse primaire d'assurance maladie à laquelle l'agent était affilié au titre des prestations en nature maladie n'a pas fait application ou n'est pas susceptible de faire application, au titre de ces prestations, des dispositions des cinquième et sixième alinéas de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale. (...) ". Aux termes de l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale : " (...) En contrepartie des frais qu'elle engage pour obtenir le remboursement mentionné au troisième alinéa ci-dessus, la caisse d'assurance maladie à laquelle est affilié l'assuré social victime de l'accident recouvre une indemnité forfaitaire à la charge du tiers responsable et au profit de l'organisme national d'assurance maladie. Le montant de cette indemnité est égal au tiers des sommes dont le remboursement a été obtenu, dans les limites d'un montant maximum de 910 euros et d'un montant minimum de 91 euros. A compter du 1er janvier 2007, les montants mentionnés au présent alinéa sont révisés chaque année, par arrêté des ministres chargés de la sécurité sociale et du budget (...) ". Aux termes de l'article 1er de l'arrêté susvisé du 20 décembre 2017 relatif aux montants de l'indemnité forfaitaire de gestion prévue aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale : " Les montants maximum et minimum de l'indemnité forfaitaire de gestion visés aux articles L. 376-1 et L. 454-1 du code de la sécurité sociale sont fixés respectivement à 1 066 euros et à 106 euros à compter du 1er janvier 2018 ".

24. En application des dispositions précitées, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de condamner l'Assistance publique - hôpitaux de Paris à verser au département de la Somme la somme de 106 euros.

Sur les frais liés à l'instance :

25. En vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais liés à l'instance ; dès lors, les conclusions présentées à ce titre par Mme C...et par la Caisse des dépôts et consignations doivent être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La somme de 119 212,23 euros, ainsi que la rente d'un montant annuel de 2 800 euros à compter de la date de lecture du jugement attaqué, que le jugement attaqué avait condamné 1'Assistance publique - hôpitaux de Paris à verser à MmeC..., est ramenée à la somme de 16 662,23 euros.

Article 2 : La somme de 164 686,14 euros que le jugement attaqué avait condamné 1'Assistance publique - hôpitaux de Paris à verser au département de la Somme, est ramenée à la somme de 246,44 euros.

Article 3 : L'Assistance publique - hôpitaux de Paris versera au département de la Somme la somme de 106 euros au titre de l'indemnité forfaitaire prévue par l'article L. 376-1 du code de la sécurité sociale.

Article 4 : Le jugement attaqué est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 5 : Le surplus des conclusions de MmeC..., du département de la Somme et de la Caisse des dépôts et consignations est rejeté.

Article 6 : Les frais d'expertise, liquidés et taxés à la somme de 2 000 euros et à la somme de 2 400,48 euros, sont mis à la charge définitive de l'Assistance publique - hôpitaux de Paris.

Article 7 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D...C..., à l'Assistance publique - hôpitaux de Paris, à la Caisse des dépôts et consignations, au département de la Somme et à la Mutualité de la fonction publique.

Copie en sera adressée au docteurB..., expert.

Délibéré après l'audience du 6 septembre 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président,

- M. Luben, président assesseur,

- MmeF..., première conseillère.

Lu en audience publique, le 20 septembre 2018.

Le rapporteur,

I. LUBENLe président,

J. LAPOUZADELa greffière,

Y. HERBERLa République mande et ordonne à la ministre des solidarités et de la santé en ce qui la concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 15PA03309


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 15PA03309
Date de la décision : 20/09/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

60-02-01 Responsabilité de la puissance publique. Responsabilité en raison des différentes activités des services publics. Service public de santé.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: M. Ivan LUBEN
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : DELECROIX

Origine de la décision
Date de l'import : 02/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-09-20;15pa03309 ?
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