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10/10/2018 | FRANCE | N°17PA03903

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 10 octobre 2018, 17PA03903


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Coccinelle France a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer, à titre principal, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2011 et en 2012 ou, à titre subsidiaire, la réduction des bases à hauteur de 253 384 euros au titre de l'exercice clos en 2006 et

604 368 euros au titre de l'exercice clos en 2007.

Par un jugement n° 1602146/2-3 du 23 novembre 2017, le Tribunal administratif de Pari

s a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Coccinelle France a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer, à titre principal, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2011 et en 2012 ou, à titre subsidiaire, la réduction des bases à hauteur de 253 384 euros au titre de l'exercice clos en 2006 et

604 368 euros au titre de l'exercice clos en 2007.

Par un jugement n° 1602146/2-3 du 23 novembre 2017, le Tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 21 décembre 2017, la société Coccinelle France, représentée par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 23 novembre 2017 ;

2°) de prononcer, à titre principal, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2011 et en 2012 ou, à titre subsidiaire, la réduction des bases à hauteur de 253 384 euros au titre de l'exercice clos en 2006 et 604 368 euros au titre de l'exercice clos en 2007 ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 5 000 euros au titre de

l'article L.761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la charge de la preuve ne peut être renversée, en présence d'une comptabilité ;

- le prêt souscrit ayant eu pour objet de rembourser une partie du compte courant créditeur de la gérante, les intérêts correspondants sont déductibles ;

- le déficit reportable en 2007 est celui de 876 691 euros figurant sur la déclaration rectificative relative à l'exercice 2006 et non la somme de 623 307 euros figurant dans la déclaration initiale ; il n'y a par suite pas d'écart entre le déficit reportable 2006 et le déficit effectivement reporté ;

- ce redressement fait double emploi avec le rejet intégral des déficits reportables 2006 et 2007 ;

- les premiers juges n'ont pas répondu à ce grief ;

- s'agissant de l'année 2007, des documents attestent de l'existence réelle de charges à hauteur de 39 503 804, 99 euros qui retirent toute base au rehaussement portant sur l'exercice clos en 2011 ;

- les premiers juges n'ont pas répondu à ce grief ;

- la reprise sur les amortissements excessifs n'a pu être effectuée qu'en 2007 ;

- la reprise en franchise d'impôt n'aurait dû concerner que la quote-part d'amortissements déduite des charges jusqu'au 31 décembre 2004, soit un montant

de 1 674 793 euros, au lieu 2 871 285 euros ; ainsi, la diminution des déficits reportables doit être limitée à 1 194 492 euros.

Par un mémoire en défense, enregistré le 8 février 2018, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- les moyens soulevés par la société Coccinelle France ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 6 juin 2018, la clôture de l'instruction a été fixée au

20 juin 2018.

Vu :

- les autres pièces du dossier ;

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Magnard,

- les conclusions de M. Cheylan, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., substituant MeA..., représentant la société Coccinelle France.

1. Considérant que la société Coccinelle France relève appel du jugement du 23 novembre 2017 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2011 et en 2012 ou, à titre subsidiaire, à la réduction des bases à hauteur de 253 384 euros au titre de l'exercice clos en 2006 et 604 368 euros au titre de l'exercice clos en 2007 ;

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Considérant que les premiers juges n'ont pas statué sur le moyen, qui n'était pas inopérant, tiré de ce que le rehaussement tiré de l'existence d'un écart entre le montant du déficit reportable de l'exercice 2006 et le déficit effectivement reporté sur l'année suivante faisait double emploi avec le rejet intégral des déficits reportables 2006 et 2007 ; qu'il s'ensuit qu'il y a lieu d'annuler le jugement attaqué ; qu'il y a également lieu d'évoquer et de statuer immédiatement sur la demande présentée par la société requérante devant le Tribunal administratif de Paris ;

Sur le bien-fondé de l'imposition :

En ce qui concerne la charge de la preuve :

3. Considérant que si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci ; qu'il appartient, dès lors, au contribuable, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net que de la correction de leur inscription en comptabilité ; que le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée ; que, dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive ; que contrairement à ce qui est soutenu, il appartient à la société requérante d'apporter les éléments permettant à la Cour d'apprécier le montant et les modalités de détermination des déficits des années antérieures dont elle demande l'imputation sur les résultats des exercices en cause, ainsi que de l'objet des emprunts au titre desquels la déduction des intérêts est sollicitée ;

En ce qui concerne la déductibilité des intérêts de l'emprunt :

4. Considérant que le service vérificateur a constaté que des intérêts liés à un prêt de 13 millions d'euros contracté, le 13 décembre 2007, par la société Coccinelle France auprès de la société ING Lease France, figuraient parmi les charges comptabilisées au titre des exercices 2009, 2010, 2011 et 2012 ; qu'il n'est pas sérieusement contesté par la société requérante que cet emprunt a servi, pour partie, à régler un rappel d'impôt de solidarité sur la fortune dû à titre personnel par la présidente de la société et des honoraires de conseil fiscal ayant porté, entre autres, sur cet impôt ; que pour contester le rejet par le service comme charges déductibles de la fraction des intérêts de cet emprunt correspondant à ces dépenses, la société requérante soutient que les sommes concernées ont été portées au débit du compte courant d'associé de la présidente, qui était créditeur en raison d'une reprise d'abandon de compte courant réalisée par cette dernière ; qu'en se bornant à produire une note de contrôle du commissaire aux comptes datée du 5 février 2008 indiquant cette somme en débit dans le compte courant d'associé de la présidente, un rapport de gestion de l'exercice 2007 qui fait mention de cette somme, un document faisant état, sans plus de précisions, d'un abandon de créance provisoire avec clause de retour à meilleure fortune consenti par la présidente en ce qui concerne les sommes portées sur son compte courant d'associé, et en appel le " fichier des écritures comptables 2011 " sans l'assortir de commentaires permettant à la Cour d'identifier les écritures dont elle se prévaut, la société n'établit pas que ce compte courant était effectivement créditeur au cours des années en cause, que les conditions permettant de recourir à la clause de retour à meilleure fortune étaient réunies, et que la somme en cause a été réellement portée au débit de ce compte ; qu'en tout état de cause, la société ne fournit aucune précision sur les modalités de comptabilisation des intérêts qui permettrait à la Cour de constater que d'une manière ou d'une autre, l'inscription desdits intérêts au débit d'un compte de charge aurait été neutralisée par une inscription en sens inverse ; qu'ainsi, elle ne conteste pas valablement la réintégration par le service de la fraction des intérêts d'emprunt qui n'a pas été exposée dans son intérêt ; que dans ces conditions le moyen tiré de ce que la société aurait été en droit d'avoir recours à un emprunt pour procéder au remboursement d'un compte courant d'associé ne peut qu'être écarté ;

En ce qui concerne l'imputation des déficits reportables :

5. Considérant, en premier lieu, que le service vérificateur a constaté que la société avait imputé sur son résultat au titre de l'exercice 2007 un montant de déficit reportable constaté au titre de l'exercice 2006 supérieur au montant figurant sur la déclaration déposée au titre de ce dernier exercice ; qu'en se prévalant d'une déclaration rectificative relative à l'année 2006 adressée au service au cours de la procédure de vérification de comptabilité des années 2011 et 2012 au mois de juin 2014, dont rien n'établit qu'elle serait plus conforme à la réalité que la déclaration initiale, la société ne remet pas valablement en cause le rehaussement du service, qui a pris en compte la déclaration initialement souscrite ;

6. Considérant, en deuxième lieu, que l'administration a réintégré les déficits reportables constatés par la société au 1er janvier 2011 au motif qu'ils n'étaient pas justifiés ; que la circonstance qu'elle ait également fait valoir que la société avait imputé sur son résultat au titre de l'exercice 2007 un montant de déficit reportable constaté au titre de l'exercice 2006 supérieur au montant figurant sur la déclaration déposée au titre de ce dernier exercice ne révèle à cet égard aucune double imposition ; que la double imposition invoquée n'est pas établie ;

7. Considérant, en troisième lieu, qu'en se bornant à se prévaloir de l'existence de charges à hauteur de 39 503 804, 99 euros au titre de l'exercice clos en 2007, composées d'ailleurs pour l'essentiel d'impositions non déductibles, de la réactivation d'un compte courant abandonné, dont, ainsi qu'il a été dit au point 4., rien ne permet d'établir la réalité et la consistance, de l'annulation d'une créance pour garantie de passif dont rien ne vient démontrer le caractère certain dans son principe et dans son montant, et des honoraires pour partie relatifs à des contentieux ne concernant pas la société, et à faire valoir que les recettes de cet exercice ne peuvent en tout état de cause dépasser le montant résultant des baux de location produits au service, et en l'absence de comptabilité complète étayée de pièces justificatives, la société Coccinelle France n'établit pas l'existence et le montant du déficit reportable invoqué au titre de cet exercice ;

8. Considérant, en quatrième lieu, qu'à supposer que la société Coccinelle France ait entendu faire valoir, à l'appui du moyen dirigé contre la remise en cause par le service du montant du déficit de l'exercice 2005 reportable sur les années suivantes, que la reprise des amortissements constatée en 2007 au titre des dotations effectuées à tort sur des biens non amortissables pouvait être déduite de son résultat comptable s'agissant de la quote-part d'amortissements déduite des charges jusqu'au 31 décembre 2004, une telle argumentation ne saurait être retenue, en l'absence de toute précision permettant d'identifier le montant des réintégrations comptables effectuées au titre des dotations aux amortissements ayant fait l'objet d'un rehaussement antérieur, et d'établir la correspondance entre ces réintégrations comptables et les reprises de dotations déduites de manière extracomptable sur les formulaires 2058 A et 2058 B produites au dossier ;

9. Considérant qu'il résulte de tout ce qui précède que la société Coccinelle France n'est pas fondée à demander, à titre principal, la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mises à sa charge au titre des exercices clos en 2011 et en 2012 ou, à titre subsidiaire, la réduction des bases à hauteur de 253 384 euros au titre de l'exercice clos en 2006 et 604 368 euros au titre de l'exercice clos en 2007 ; que les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de l'État, qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, le versement de la somme que la société requérante demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens ;

DECIDE :

Article 1er : Le jugement n° 1602146/2-3 du 23 novembre 2017 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée par la société Coccinelle France devant le Tribunal administratif de Paris ainsi que le surplus de ses conclusions devant la Cour sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la société Coccinelle France et au ministre de l'action et des comptes publics.

Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé de la direction de contrôle fiscal

d'Ile-de-France.

Délibéré après l'audience du 26 septembre 2018, à laquelle siégeaient :

- Mme Appèche, président,

- M. Magnard, premier conseiller,

- Mme Jimenez, premier conseiller,

Lu en audience publique le 10 octobre 2018.

Le rapporteur,

F. MAGNARDLe président assesseur,

En application de l'article R. 222-26 du code

de justice administrative

S. APPECHE

Le greffier,

S. DALL'AVA

La République mande et ordonne au ministre de l'action et des comptes publics en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

7

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N° 17PA03903


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA03903
Date de la décision : 10/10/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme APPECHE
Rapporteur ?: M. Franck MAGNARD
Rapporteur public ?: M. CHEYLAN
Avocat(s) : MOSSER

Origine de la décision
Date de l'import : 16/10/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-10-10;17pa03903 ?
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