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20/12/2018 | FRANCE | N°18PA02666

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 20 décembre 2018, 18PA02666


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner Pôle emploi à lui verser une somme totale de 13 952,95 euros, augmentée des intérêts de retard et de leur capitalisation, correspondant, d'une part, à l'allocation temporaire d'attente dont elle a été indûment privée du 23 août 2012 au 2 septembre 2013 et du 22 mai au 2 juin 2014 et, d'autre part, à la réparation du préjudice moral né de cette privation et d'enjoindre à Pôle emploi de lui verser cette somme dans un délai d'un m

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A...C...a demandé au Tribunal administratif de Paris de condamner Pôle emploi à lui verser une somme totale de 13 952,95 euros, augmentée des intérêts de retard et de leur capitalisation, correspondant, d'une part, à l'allocation temporaire d'attente dont elle a été indûment privée du 23 août 2012 au 2 septembre 2013 et du 22 mai au 2 juin 2014 et, d'autre part, à la réparation du préjudice moral né de cette privation et d'enjoindre à Pôle emploi de lui verser cette somme dans un délai d'un mois à compter de la notification du jugement, sous astreinte de 100 euros par jour de retard.

Par un jugement n° 1610167/3-1 du 27 février 2018, le Tribunal administratif de Paris a condamné Pôle emploi à verser à Mme C...une somme de 150 euros, tous intérêts compris à la date de lecture du jugement, ainsi qu'une somme de 650 euros au conseil de Mme C...en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, et a rejeté le surplus des conclusions de sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés les 2 août 2018 et 28 septembre 2018, MmeC..., représentée par MeD..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1610167/3-1 du 27 février 2018 en tant que, par ce jugement, le Tribunal administratif de Paris n'a pas fait entièrement droit à sa demande ;

2°) de condamner Pôle emploi à lui verser une somme totale de 13 952,95 euros, augmentée des intérêts de retard à compter de la date de réception de sa demande indemnitaire préalable et de leur capitalisation, en réparation des préjudices matériel et moral qu'elle a subis, dans le délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

3°) de mettre à la charge de Pôle emploi le versement de la somme de 1 500 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- elle ne pouvait être privée du bénéfice de l'allocation temporaire d'attente au motif qu'elle avait été accueillie de nuit dans un centre d'hébergement et de réinsertion sociale puis par le SAMU social ; seules les personnes bénéficiant d'un hébergement en centre d'accueil pour demandeur d'asile sont exclues du bénéfice de l'allocation en cause comme l'a rappelé la circulaire interministérielle n° NOR IMIM0900085C du 3 novembre 2009 relative à l'allocation temporaire d'attente ;

- l'administration ne lui ayant pas délivré de récépissé de titre de séjour ou de titre de séjour en application de la circulaire susmentionnée, elle a été illégalement exclue du dispositif de l'allocation temporaire d'attente pour la période comprise entre le 23 août 2012 et le 1er septembre 2013 ; cette circulaire et le système mis en place par les autorités françaises consistant à écarter du bénéfice de l'allocation temporaire d'attente les étrangers placés en procédure Dublin méconnaissaient la directive européenne n° 2003/9/CE du 27 janvier 2003 relative aux normes minimales pour l'accueil des demandeurs d'asile dans les Etats membres telle qu'elle avait été interprétée par la Cour de justice de l'Union européenne dans un arrêt n° C179/11 du 27 septembre 2012 ;

- le tribunal a jugé à tort que sa demande du 4 janvier 2016 adressée à Pôle emploi était tardive dès lors qu'il s'agissait d'une demande indemnitaire préalable à la suite du refus fautif d'ouverture des droits pour la période du 23 août 2012 au 2 septembre 2013 et non une demande de versement de l'allocation temporaire d'attente pour la période considérée ; sa première inscription auprès de Pôle emploi a été effectuée le 17 juillet 2013, soit dans le délai de deux ans prescrit par les dispositions de l'article R. 5423-28 du code du travail ;

- sa nouvelle demande d'asile ayant été enregistrée le 22 mai 2014, l'allocation temporaire d'attente était due dès cette date ;

- en refusant de lui verser l'allocation temporaire d'attente pour les périodes du 23 août 2012 au 1er septembre 2013 et du 22 mai au 2 juin 2014, Pôle emploi a commis une faute de nature à engager sa responsabilité ;

- en raison de sa situation d'extrême précarité, elle a subi des préjudices matériel et moral qu'elle évalue à la somme totale de 13 952,95 euros.

Par un mémoire en défense et d'appel incident, enregistré le 26 novembre 2018, Pôle emploi, représenté par MeB..., conclut au rejet de la requête et à l'annulation du jugement n° 1610167/3-1 du 27 février 2018 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il l'a condamné à verser à Mme C...une somme de 150 euros, tous intérêts compris à la date de lecture du jugement.

Il soutient que :

- à la suite de sa demande du 3 juin 2014, Mme C...a bénéficié de l'allocation en cause ; aucune demande n'ayant été présentée pour la période comprise entre le 22 mai et le 2 juin 2014, c'est à tort que le tribunal a jugé qu'il devait rétroactivement faire droit à la demande de la requérante pour la période non prescrite ;

- les moyens soulevés par Mme C...ne sont pas fondés.

Mme C...a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 18 mai 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

-le code du travail,

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991,

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Larsonnier,

- et les conclusions de Mme Bernard, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. MmeC..., de nationalité géorgienne, a sollicité l'asile en France le 23 août 2012. Par un arrêté du 10 janvier 2013, le préfet du territoire de Belfort a ordonné son transfert aux autorités polonaises en application du règlement (CE) n° 343/2003 du Conseil du 18 février 2003 établissant des critères et mécanismes de détermination de l'Etat membre responsable de l'examen d'une demande d'asile présentée dans l'un des Etats membres par un ressortissant d'un pays tiers. Le 3 septembre 2013, Mme C...a été réacheminée en Pologne. Mme C...a sollicité une nouvelle fois l'asile en France le 22 mai 2014. Elle a bénéficié de l'allocation temporaire d'attente à compter du 3 juin 2014. Estimant que Pôle emploi aurait dû lui verser l'allocation temporaire d'attente pour les périodes comprises entre le 23 août 2012 et le 2 septembre 2013 et entre le 22 mai et le 2 juin 2014, Mme C...a sollicité le versement de la somme totale de 13 952,95 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis. Pôle emploi a implicitement rejeté sa demande. Mme C...relève appel du jugement n° 1610167/3-1 du 27 février 2018 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il n'a pas fait entièrement droit à sa demande. Pôle emploi doit être regardé comme demandant à la Cour d'annuler ce jugement en tant qu'il l'a condamné à verser à Mme C... une somme de 150 euros, tous intérêts compris au 27 février 2018.

2. Aux termes de l'article R. 811-1 du code de justice administrative : " Toute partie présente dans une instance devant le tribunal administratif ou qui y a été régulièrement appelée, alors même qu'elle n'aurait produit aucune défense, peut interjeter appel contre toute décision juridictionnelle rendue dans cette instance. Toutefois, le tribunal administratif statue en premier et dernier ressort : 1° Sur les litiges relatifs aux prestations, allocations ou droits attribués (...) en faveur des travailleurs privés d'emploi, mentionnés à l'article R. 772-5, (...) " et l'article L. 5423-8 du code du travail, inséré dans le titre II relatif à l'indemnisation des travailleurs involontairement privés d'emploi du livre IV de la cinquième partie du code du travail, dispose que : " Sous réserve des dispositions de l'article L. 5423-9, peuvent bénéficier d'une allocation temporaire d'attente : 1° Les ressortissants étrangers dont le titre de séjour ou le récépissé de demande de titre de séjour mentionne qu'ils ont sollicité l'asile en France et qui ont présenté une demande tendant à bénéficier du statut de réfugié, s'ils satisfont à des conditions d'âge et de ressources ; (...) ".

3. Le litige relatif à l'indemnisation d'une personne s'estimant privée de manière illégale du bénéfice de l'allocation temporaire d'attente constitue, au sens des dispositions de l'article R. 811-1 du code de justice administrative, un litige relatif aux allocations attribuées en faveur des travailleurs privés d'emploi.

4. Il s'ensuit que le Tribunal administratif de Paris a statué en premier et dernier ressort et que, contrairement à ce qui était indiqué dans la lettre de notification du jugement du 27 février 2018 du Tribunal administratif de Paris attaqué, la requête de Mme C...dirigée contre ce jugement ne ressortit pas à la compétence de la Cour administrative d'appel, mais à celle du Conseil d'Etat, statuant comme juge de cassation. Il y a lieu, dès lors, de transmettre le dossier au Conseil d'Etat.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête présentée par Mme C...est transmise au Conseil d'Etat.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié au président de la section du contentieux du Conseil d'Etat, à Mme A...C...et au directeur de Pôle emploi.

Délibéré après l'audience du 6 décembre 2018, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Luben, président assesseur,

- Mme Larsonnier, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 20 décembre 2018.

Le rapporteur,

V. LARSONNIERLe président,

J. LAPOUZADE

Le greffier,

C. POVSE

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N° 18PA02666


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA02666
Date de la décision : 20/12/2018
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Virginie LARSONNIER
Rapporteur public ?: Mme BERNARD
Avocat(s) : LAFARGE ASSOCIES SELARL

Origine de la décision
Date de l'import : 25/12/2018
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2018-12-20;18pa02666 ?
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