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22/01/2019 | FRANCE | N°17PA00460

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 22 janvier 2019, 17PA00460


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La Fondation de l'armée du Salut a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté n° 2013-EN-47 du 4 octobre 2013 par lequel le président du conseil général de Seine-et-Marne a prononcé la fermeture définitive du service de prévention spécialisée APS-Armée du Salut intervenant sur les cantons de Claye-Souilly, Mitry-Mory et Dammartin en Goële à compter du 5 octobre 2013 à minuit, ensemble le rejet le 22 janvier 2014 de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1402762 du 7 d

écembre 2016, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande comme tardive.

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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La Fondation de l'armée du Salut a demandé au tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté n° 2013-EN-47 du 4 octobre 2013 par lequel le président du conseil général de Seine-et-Marne a prononcé la fermeture définitive du service de prévention spécialisée APS-Armée du Salut intervenant sur les cantons de Claye-Souilly, Mitry-Mory et Dammartin en Goële à compter du 5 octobre 2013 à minuit, ensemble le rejet le 22 janvier 2014 de son recours gracieux.

Par un jugement n° 1402762 du 7 décembre 2016, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande comme tardive.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 7 février 2017 et des mémoires enregistrés les 16 avril 2018 et 10 juillet 2018, la fondation de l'Armée du Salut représentée par Me C...B..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1402762 du tribunal administratif de Melun du 7 décembre 2016 ;

2°) d'annuler l'arrêté n° 2013-EN-47 du président du conseil général de Seine-et-Marne du 4 octobre 2013 ;

3°) de mettre à la charge du département de Seine-et-Marne la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- son appel est recevable ;

- les arrêtés du 4 septembre 2014 notifiés le 10, pouvaient faire l'objet d'un recours gracieux le 5 décembre 2014 ;

- il n'est pas établi que l'arrêté du 4 octobre 2013 ait été notifié à la fondation le jour même ;

- le rapport d'émission de l'envoi par télécopie du 4 décembre 2013 a force probante en vertu de l'article L.112-15 du code des relations entre le public et l'administration ;

- le tribunal n'a pas répondu à ce moyen ;

- en vertu de l'article 688 du code civil, la date d'envoi du recours et non celle de la réception fait courir les délais ;

- le recours par voie postale introduit le 5 décembre 2013 et reçu le 9 n'était pas tardif ;

- les délais courent à partir du moment où la décision est devenue exécutoire ;

- la requête n'est pas donc tardive ;

- elle maintient les moyens soulevés en première instance.

Par des mémoires enregistrés les 2 mars 2018 et 29 juin 2018, le département de Seine-et-Marne représenté par la SCPA Seban et associés conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de la fondation Armée du Salut la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- la requête qui ne comporte aucun moyen propre est irrecevable ;

- il n'a pas reçu la télécopie, adressée à un faux numéro ;

- un rapport d'émission de télécopie est dépourvu de force probante ;

- en vertu de l'article L. 112-13 du code des relations entre le public et l'administration, fait foi la date figurant sur l'accusé de réception ou l'accusé d'enregistrement ;

- l'obligation d'accuser réception des télécopies n'a été étendue aux collectivités locales que par le décret du 20 octobre 2016 ;

- le recours gracieux ne lui est parvenu que le 9 décembre 2013 ;

- le délai de recours gracieux n'est pas un délai franc ;

- les moyens soulevés en première instance ne sont pas fondés.

La clôture de l'instruction est intervenue le 2 novembre 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005 relative aux échanges électroniques entre les usagers et les autorités administratives et entre les autorités administratives ;

- l'ordonnance n° 2015-1341 du 23 octobre 2015 relative aux dispositions législatives du code des relations entre le public et l'administration ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'action sociale et des familles ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Bernier,

- les conclusions de Mme Delamarre, rapporteur public,

- et les observations de MeB..., représentant la fondation de l'Armée du Salut et de MeA..., représentant le département de Seine-et-Marne.

La cour a pris connaissance d'une note en délibéré, enregistrée le 11 janvier 2019, présentée par Me B...pour la fondation de l'Armée du Salut.

Considérant ce qui suit :

1. Par un arrêté n°2013-EN-035 du 26 septembre 2013, le président du conseil général de Seine-et-Marne a prononcé la fermeture définitive de l'établissement dénommé " Domaine de Morfondé " géré par la fondation Armée du Salut. Le tribunal administratif de Melun, par un jugement n° 1309166-1409713 du 7 décembre 2016 a rejeté la demande de la fondation tendant à l'annulation de cet arrêté. Par un arrêt 17PA00458 de ce jour, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel de la fondation contre ce jugement.

2. Par un arrêté 2013-EN-048, non daté, le président du conseil général de Seine-et-Marne, afin d'assurer la continuité de la prise en charge des jeunes, a transféré à l'association départementale de sauvegarde de l'enfance et de l'adolescence 77 (ADSEA77) la gestion du service de prévention spécialisée assurée jusqu'au 5 octobre 2013 par la fondation Armée du salut et l'autorisation afférente. Par un jugement n° 1402725 du 7 décembre 2016, le tribunal administratif de Melun a rejeté comme tardive la demande de la fondation Armée du Salut, enregistrée le 21 mars 2014 tendant à l'annulation de cet arrêté, ensemble la décision de rejet du recours gracieux du 22 janvier 2014. Par un arrêt 17PA00459 de ce jour, la cour administrative d'appel de Paris a rejeté l'appel de la fondation contre ce jugement.

3. Par un arrêté n°2013-EN-047, non daté, le président du conseil général de Seine-et-Marne a prononcé la fermeture définitive du service de prévention spécialisée APS-Armée du Salut intervenant sur les cantons de Claye-Souilly, Mitry-Mory et Dammartin en Goële à compter du 5 octobre 2013 à minuit. Par un jugement n° 1402762 du 7 décembre 2016, le tribunal administratif de Melun a rejeté comme tardive la demande de la fondation Armée du Salut, enregistrée le 21 mars 2014 tendant à l'annulation de cet arrêté, ensemble la décision de rejet du recours gracieux du 22 janvier 2014. La fondation Armée du Salut relève appel de ce jugement.

Sur la recevabilité de la requête d'appel :

4. Dans sa requête d'appel enregistrée le 7 février 2017, la fondation Armée du Salut conteste par une argumentation propre la tardiveté retenue par le tribunal pour rejeter sa demande de première instance. Cette requête de la fondation Armée du Salut ne se borne donc pas à reproduire intégralement et exclusivement les écritures de première instance, même si elle se réfère à elles pour réitérer les moyens de fond. Elle est donc suffisamment motivée. La fin de non-recevoir opposée par le département de Seine-et-Marne doit dès lors être écartée.

Sur la régularité du jugement :

5. Si la fondation Armée du Salut fait grief aux premiers juges d'avoir omis de statuer sur le moyen tiré de ce que l'article L. 112-15 du code des relations du public et de l'administration lui permettait d'adresser son recours gracieux par télécopie plutôt que par lettre recommandée, l'accusé de réception faisant alors foi, ce moyen a été présenté pour la première fois dans la note en délibéré enregistrée le 10 novembre 2016, alors que l'instruction était close. Ainsi donc, le jugement du 7 décembre 2016 n'est pas entaché d'irrégularité.

Sur la tardiveté de la demande :

6. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative : " Sauf en matière de travaux publics, la juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée./ (...) ".

7. L'arrêté 2013-EN-047 prononçant la fermeture définitive du service de prévention spécialisée APS-Armée du Salut intervenant sur les cantons de Claye-Souilly, Mitry-Mory et Dammartin en Goële à compter du 5 octobre 2013 à minuit, publié le 4 octobre 2013 au recueil des actes administratifs du département, ne comporte pas de date. Il ressort de la mention manuscrite portée sur la lettre d'accompagnement du 4 octobre 2013 signée par le président du conseil général que cette lettre et les deux arrêtés 2013-EN-047 et 2013-EN-48 qui étaient joints ont été notifiés le 4 octobre 2013 à la fondation Armée du Salut. La fondation est fondée à soutenir que cette mention manuscrite, dont l'auteur ne peut être identifié, est insusceptible de faire foi. Pour autant, ni la remise des arrêtés en mains propres ni les insuffisances de cette mention manuscrite sur la lettre d'accompagnement ne sauraient entacher d'irrégularité la notification. Le département de la Seine-et-Marne soutient que la lettre et les deux arrêtés ont été signifiés le 4 octobre 2013 et cette assertion a été confirmée par la fondation Armée du Salut dont le recours gracieux du 4 décembre 2013 mentionne : " Cet arrêté a été remis en mains propres au siège de l'association, en date du 4 octobre 2013 ". La réalité de cette notification à la date du 4 octobre 2013 par remise des arrêtés en mains propres n'a pas été contestée par la requérante en première instance. Elle n'a été mise en doute qu'en appel dans son mémoire en réplique du 16 avril 2018 sans qu'au demeurant la fondation soutienne que l'arrêté lui aurait été notifié à une autre date. Cette contestation, tardivement soulevée pour les besoins de la cause, n'est pas de nature à remettre en cause la date de notification jusque-là admise par les deux parties. Par ailleurs, la notification par voie postale avec avis de réception à la date du

10 septembre 2014 que produit la fondation ne concerne pas l'arrêté contesté du 4 octobre 2013. Les délais de recours contentieux ont donc commencé à courir le 4 octobre 2013.

8. La mention des délais et voies de recours, au demeurant rappelés dans la lettre d'accompagnement du 4 octobre 2013, figurait à l'article 4 de l'arrêté contesté où il était indiqué que : " Cet arrêté pourra faire l'objet d'un recours gracieux auprès du président du conseil général, hôtel du département, rue des Saint Pères, CS 50377, 77010, Melun Cedex, ou d'un recours contentieux auprès du tribunal administratif de Melun, 43 rue du Général de Gaulle 77008 Melun cedex, et ce dans un délai de deux mois à compter de sa notification ". Un recours administratif devait donc être introduit le 4 décembre 2013, ou un recours juridictionnel le

5 décembre 2013, au plus tard.

9. Il ressort des pièces du dossier, et notamment de l'avis de réception postal, que si le recours gracieux formé par la fondation Armée du Salut contre l'arrêté qui lui avait été notifié le 4 octobre 2013 a été posté le 5 décembre 2013, il n'a été reçu par l'administration que le

9 décembre 2013, soit postérieurement à l'expiration du délai de recours contentieux qui courait contre cette décision. La fondation requérante ne saurait en tout état de cause utilement se prévaloir des dispositions de l'article 668 du code de procédure civile qui ne sont pas applicables aux recours administratifs.

10. La fondation Armée du Salut soutient avoir par ailleurs transmis au président du conseil général son recours gracieux par télécopie le 5 décembre 2013. Cependant, le département conteste avoir reçu ce recours gracieux et fait valoir, sans être utilement contredit sur ce point, que le numéro de télécopie auquel le recours a été envoyé ne correspond pas à un numéro de contact du département. La fondation Armée du Salut à qui il appartient de justifier que l'envoi est parvenu à son destinataire tel qu'il avait été désigné à l'article 4 de l'arrêté contesté se borne à produire la copie d'un rapport d'émission de télécopie alors que le département soutient ne pas être en mesure de verser au débat cette télécopie dont il ne trouve pas trace dans ses services. Elle n'apporte pas dès lors, eu égard aux conditions techniques dans lesquelles un tel document est établi, la preuve de l'existence d'un recours gracieux transmis par télécopie au président du conseil général susceptible d'avoir interrompu le recours contentieux. En tout état de cause, à la date à laquelle elle affirme avoir envoyé cette télécopie, le délai du recours administratif, qui n'est pas un délai franc ainsi qu'il a été dit au point 8 du présent arrêt, était expiré.

11. Enfin, la fondation Armée du Salut ne saurait utilement se prévaloir des dispositions des articles L. 112-13 et L. 112-15 du code des relations entre le public et l'administration, créés par l'ordonnance n° 2015-1341 du 23 octobre 2015 et qui ne s'appliquaient pas à la date à laquelle le recours gracieux a été introduit. Si la fondation fait valoir qu'en vertu de l'article 5 de l'ordonnance n° 2005-1516 du 8 décembre 2005, les délais de recours ne sont pas opposables à l'auteur d'une demande adressée par un usager à une autorité administrative par voie électronique lorsque l'accusé de réception ne lui a pas été transmis, ces règles, à les supposer applicables aux envois par télécopie, n'ont été rendues applicables aux relations entre les collectivités territoriales et leurs usagers que par le décret n°2016-1411 du 20 octobre 2016. En tout état de cause, elles ne sauraient s'appliquer au cas d'espèce dès lors que le rapport d'émission de télécopie, ainsi qu'il a été dit au point précédent, ne suffit pas à justifier que le président du conseil général avait été effectivement saisi d'un recours gracieux.

12. Il résulte de tout ce qui précède que, le recours gracieux reçu le 9 décembre 2013 n'ayant pas préservé le délai de recours contentieux, la fondation Armée du Salut n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande enregistrée le 21 mars 2014 comme tardive et donc irrecevable.

13. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la somme que réclame à ce titre la fondation Armée du Salut soit mise à la charge du département de Seine-et-Marne qui n'est pas la partie perdante dans la présente instance. Il y a lieu de mettre à la charge de la fondation Armée du Salut la somme de 1 500 euros à verser au département de Seine-et-Marne au titre des frais exposés par lui et non compris dans les dépens.

DECIDE :

Article 1er : La requête de la fondation Armée du Salut est rejetée.

Article 2 : La fondation Armée du Salut versera au département de la Seine-et-Marne la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la fondation Armée du Salut et au département de la Seine-et-Marne.

Copie en sera adressée pour information au préfet de la Seine-et-Marne.

Délibéré après l'audience du 8 janvier 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Bouleau, premier vice-président,

- M. Bernier, président assesseur,

- Mme Pena, premier conseiller,

Lu en audience publique, le 22 janvier 2019.

Le rapporteur,

Ch. BERNIERLe président,

M. BOULEAU

Le greffier,

N. DAHMANI

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

5

N° 10PA03855

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N° 17PA00460


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA00460
Date de la décision : 22/01/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. le Pdt. BOULEAU
Rapporteur ?: M. Christian BERNIER
Rapporteur public ?: Mme DELAMARRE
Avocat(s) : GRANDJEAN

Origine de la décision
Date de l'import : 05/02/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-01-22;17pa00460 ?
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