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11/07/2019 | FRANCE | N°18PA03820

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 11 juillet 2019, 18PA03820


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 8 janvier 2018 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1806117 du 6 juillet 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 7 décembre 2018, M.A..., représenté par MeB..., dem

ande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1806117 du 6 juillet 2018 du Tribunal administratif d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C...A...a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 8 janvier 2018 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 1806117 du 6 juillet 2018, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 7 décembre 2018, M.A..., représenté par MeB..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1806117 du 6 juillet 2018 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du 8 janvier 2018 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire ou, à défaut, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour et de réexaminer sa situation, dans le délai d'un mois à compter de la date de notification de l'arrêt à intervenir, sous astreinte de 150 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 200 euros au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

Sur la décision pourtant refus de titre de séjour :

- elle est insuffisamment motivée ;

- l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), produit par le préfet de police à l'appui de la décision contestée, est insuffisamment motivé ;

- la décision contestée est entachée d'une erreur de droit le préfet de police ayant méconnu l'étendu de sa compétence en se croyant, à tort, lié par l'avis du collège des médecins de l'OFII ;

- la décision contestée méconnaît les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle ;

- la décision contestée méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle est illégale par voie d'exception, à raison de l'illégalité affectant la décision portant refus de titre de séjour ;

- elle méconnaît les dispositions du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle méconnaît les stipulations des articles 2, 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire enregistré le 31 mai 2019, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par une décision du 19 octobre 2018, le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris a admis M. A...au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales,

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile,

- le code des relations entre le public et l'administration,

- le code de justice administrative,

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 et son décret d'application n° 91-1266 du 19 décembre 1991.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Le rapport de M. Doré a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M.A..., ressortissant marocain, est entré en France en 2005, selon ses déclarations. Il a sollicité, le 15 décembre 2017, auprès des services de la préfecture de police, la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement des dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 8 janvier 2018, le préfet de police lui a refusé la délivrance du titre demandé, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai d'un mois et a fixé le pays de renvoi. M. A...fait appel du jugement du 6 juillet 2018 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la décision portant refus de titre de séjour :

2. En premier lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : 1° Restreignent l'exercice des libertés publiques ou, de manière générale, constituent une mesure de police ". Aux termes des dispositions de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par le présent chapitre doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". Il ressort des pièces du dossier que l'arrêté attaqué vise les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dont M. A... s'était prévalu à l'appui de sa demande de titre de séjour, ainsi que les stipulations des articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 et les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Le préfet de police s'est également référé à l'avis émis le 19 novembre 2017 par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dont il s'est approprié les motifs, et a indiqué les raisons pour lesquelles il a considéré que M. A...ne remplissait pas les conditions pour obtenir la carte de séjour qu'il sollicitait en énonçant qu'il pouvait effectivement bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé dans son pays d'origine. Il a enfin exposé des éléments suffisants sur la situation familiale de l'intéressé en relevant que ce dernier était célibataire et sans charge de famille en France et qu'il n'attestait pas être démuni d'attaches familiales à l'étranger. Dans ces conditions, le préfet de police a suffisamment exposé les considérations de droit et de fait fondant sa décision de refus de titre de séjour. Dès lors, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de cette décision ne peut qu'être écarté.

3. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier, et en particulier de la motivation de la décision contestée, que le préfet de police a procédé à un examen suffisant de la situation de M. A... et ne s'est pas estimé lié par l'avis rendu le 19 novembre 2017 par le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration.

4. En troisième lieu, en mentionnant que l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut peut entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, qu'il peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé marocain et que son état de santé lui permet de voyager sans risque vers son pays d'origine, l'avis du 19 novembre 2017 émis par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, est suffisamment motivé. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de cet avis doit être écarté.

5. En quatrième lieu, aux termes des dispositions de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat (...) ". Il ressort des pièces du dossier que M. A...souffre d'une pathologie ostéo-articulaire, qui nécessite des soins répétés et prolongés en milieu spécialisé. Pour lui refuser la délivrance du titre de séjour sollicité, le préfet de police s'est fondé sur l'avis du 19 novembre 2017 émis par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, qui indique, ainsi qu'il a été dit, que l'intéressé peut effectivement bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé marocain. A l'appui de ses écritures, M. A...produit de nombreux certificats médicaux, comptes rendus opératoires et bilans radiologiques, dont il ressort que le requérant a besoin d'un traitement médicamenteux régulier et d'interventions chirurgicales fréquentes. Toutefois, ces éléments médicaux ne se prononcent pas sur la possibilité effective de soins au Maroc. Sur ce point, le requérant se borne à produire des documents généraux sur le système de santé au Maroc, qui ne suffisent pas à remettre en cause l'appréciation du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police aurait méconnu les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

6. En cinquième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien- être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale ou à la protection des droits et libertés d'autrui ". M. A... fait valoir qu'il est entré en France en 2005 et qu'y résident deux de ses soeurs, ainsi que sa fille qui a acquis la nationalité française le 25 juin 2018 et sa petite fille. Toutefois, M. A... ne justifie pas résider habituellement en France depuis 2005 et ne justifie pas de l'importance des liens qu'il entretiendrait avec sa famille résidant en France, alors qu'il ressort des mentions de la fiche de salle qu'il a renseignée le 5 juillet 2017 et de celle renseignée par sa fille, que M. A...est célibataire et qu'il n'est pas dépourvu d'attaches dans son pays d'origine où résident une partie de sa fratrie et de ses enfants et où il a vécu, au moins, jusqu'à l'âge de 38 ans. Dans ces circonstances, la décision contestée n'a pas porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels elle a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations précitées doit être écarté. Pour les mêmes motifs, le préfet de police n'a pas entaché sa décision d'une erreur manifeste d'appréciation de ses conséquences sur la situation personnelle de M.A....

Sur la décision portant obligation de quitter le territoire français :

7. En premier lieu, la décision de refus de titre de séjour n'étant pas illégale, l'exception d'illégalité de cette décision invoquée à l'appui des conclusions dirigées contre l'obligation de quitter le territoire français doit être écartée.

8. En deuxième lieu, aux termes du 10° de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : / (...) 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ". Pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 5, les moyens tirés de la méconnaissance des dispositions précitées du 10° de l'article L. 511-4 et des articles 2 et 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, qui ne peuvent, au demeurant, être utilement invoqués qu'à l'encontre de la décision fixant le pays de destination, doivent être écartés.

9. En dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux retenus au point 6, M. A... n'est pas fondé à soutenir que la décision l'obligeant à quitter le territoire français méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A...n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A...est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C...A...et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 27 juin 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- Mme Lescaut, premier conseiller,

- M. Doré, premier conseiller.

Lu en audience publique, le 11 juillet 2019.

Le rapporteur,

F. DORÉLe président,

S.-L. FORMERY

La greffière,

N. ADOUANE

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N°18PA03820 6


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA03820
Date de la décision : 11/07/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: M. FRANCOIS DORE
Rapporteur public ?: M. LEMAIRE
Avocat(s) : PIERROT

Origine de la décision
Date de l'import : 19/07/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-07-11;18pa03820 ?
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