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19/09/2019 | FRANCE | N°18PA01219

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 19 septembre 2019, 18PA01219


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté en date du 16 mai 2017 par lequel le préfet du Val-de-Marne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1707257 du 8 mars 2018, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 11 avril 2018, M. B..

., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1707257 du 8 mars ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... B... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté en date du 16 mai 2017 par lequel le préfet du Val-de-Marne lui a refusé la délivrance d'un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 1707257 du 8 mars 2018, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 11 avril 2018, M. B..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1707257 du 8 mars 2018 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté en date du 16 mai 2017 du préfet du Val-de-Marne ;

3°) d'enjoindre, à titre principal, au préfet du Val-de-Marne de lui délivrer une carte de séjour temporaire, à titre subsidiaire, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

4°) de mettre à la charge de l'État la somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique, sous réserve de renonciation à la part contributive de l'État.

Il soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé sur son moyen tiré de l'irrégularité externe de l'arrêté attaqué pour défaut de saisine de la commission du titre de séjour ;

- dès lors qu'il justifie de sa résidence habituelle en France depuis plus de dix ans, la décision de refus de titre de séjour est entachée d'un vice de procédure, faute pour le préfet d'avoir saisi préalablement à son édiction la commission du titre de séjour ;

- elle a été prise en méconnaissance des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et de la circulaire du ministre de l'intérieur en date du 28 novembre 2012, dès lors qu'il justifie d'une résidence continue en France depuis plus de dix ans ; elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation ;

- elle méconnaît les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français est entachée d'illégalité par voie d'exception d'illégalité de l'illégalité de la décision lui refusant un titre de séjour.

Le préfet du Val-de-Marne a transmis des pièces le 22 mai 2018.

M. B... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal de grande instance de Paris du 19 juin 2018.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme C... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant malien, né le 20 novembre 1974, serait entré en France en 2001 selon ses déclarations. Il a sollicité son admission exceptionnelle au séjour sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté en date du 16 mai 2017, le préfet du Val-de-Marne a rejeté sa demande de titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. B... relève appel du jugement du 8 mars 2018 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Aux termes de l'article L. 9 du code de justice administrative : " Les jugements sont motivés ". Il ressort du jugement dont il est fait appel que le moyen tiré du défaut de saisine de la commission de titre de séjour a été visé, et écarté par une motivation suffisante au point 3. Le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué doit, par suite, être écarté.

Sur le bien fondé du jugement :

3. Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. / L'autorité administrative est tenue de soumettre pour avis à la commission mentionnée à l'article L. 312-1 la demande d'admission exceptionnelle au séjour formée par l'étranger qui justifie par tout moyen résider en France habituellement depuis plus de dix ans ".

4. M. B... soutient résider de manière habituelle en France depuis 2001. Toutefois, la production de fiches de salaires pour les mois de janvier à mars 2008, de deux factures du centre médical de santé des 3 novembre et 4 décembre 2008, et de relevés de livret A pour la seule période où M. B... a travaillé au titre de cette année, le versement au dossier de la déclaration des revenus des années 2009, 2012, et 2013 ne mentionnant aucun revenu, de formulaires d'envois d'argent au Mali au courant des mois d'avril, mai et juin 2009 et 2012, et au mois de novembre 2013, ainsi que le relevé d'opérations financières effectuées les 5 septembre et 8 novembre 2013 sont à elles seules insuffisantes pour justifier sa résidence habituelle et continue au cours des années 2008, 2009, 2012 et 2013. De même, sont insuffisants à établir cette résidence habituelle de l'intéressé en 2016, les trois relevés de livret A produits les 15 janvier, 15 mars et 17 octobre 2016. M. B... ne justifie ainsi pas qu'il résidait en France depuis plus de dix ans à la date de l'arrêté contesté. Dans ces conditions, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet aurait dû saisir la commission du titre de séjour avant de prendre la décision de refus de titre de séjour en litige.

5. Il résulte de ce qui a été dit au point précédent que M. B... n'établit pas résider habituellement en France depuis plus de dix ans. En faisant état de la durée de sa résidence en France, ainsi que de son intégration et de sa maitrise de la langue, et de la circonstance qu'il a travaillé à plusieurs reprises et cotisé à l'assurance-chômage sans pouvoir en bénéficier, il ne justifie pas de circonstances humanitaires ou de motifs exceptionnels de nature à fonder son admission au séjour au titre de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et n'établit pas que la décision de refus de titre de séjour contestée serait entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

6. M. B... ne peut par ailleurs utilement se prévaloir des orientations générales que le ministre de l'intérieur a pu adresser aux préfets pour les éclairer dans la mise en oeuvre de leur pouvoir de régularisation, dans sa circulaire du 28 novembre 2012, dont les dispositions sont dépourvues de tout caractère impératif et ne constituent pas des lignes directrices.

7. Aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 311-7 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République (...) ". Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

8. M. B..., célibataire et sans charge de famille, n'est pas dépourvu d'attaches familiales au Mali où résident ses parents, et ne démontre par aucune des pièces du dossier la réalité et l'intensité des liens affectifs qu'il soutient entretenir en France. S'il fait également valoir, sans plus de précisions, qu'il serait parfaitement intégré en France, cette seule allégation est insuffisante à le faire regarder comme particulièrement intégré dans la société française. Dans ces conditions et alors que l'ancienneté de la résidence de M. B... en France depuis plus de dix ans n'est pas établie, la décision litigieuse n'a méconnu ni les dispositions du 7° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ni les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Sur la légalité de l'obligation de quitter le territoire :

9. Pour les motifs exposés aux points précédents M. B... n'est pas fondé à exciper de l'illégalité de la décision de refus de titre de séjour à l'appui de ses conclusions dirigées contre la décision d'obligation de quitter le territoire français.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Ses conclusions aux fins d'injonction et celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 doivent, par voie de conséquence, être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 5 septembre 2019, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- Mme Poupineau, président assesseur,

- Mme C..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 19 septembre 2019.

Le rapporteur,

C. C... Le président,

S.-L. FORMERY

Le greffier,

C. DABERTLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 18PA01219


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA01219
Date de la décision : 19/09/2019
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: Mme Christine LESCAUT
Rapporteur public ?: M. LEMAIRE
Avocat(s) : JEUDI

Origine de la décision
Date de l'import : 26/09/2019
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2019-09-19;18pa01219 ?
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