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21/01/2020 | FRANCE | N°17PA22795

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 21 janvier 2020, 17PA22795


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La Caisse générale de sécurité sociale de la Guadeloupe ( CGSSG) a saisi le Tribunal administratif de la Guadeloupe d'une demande tendant à l'annulation de titres exécutoires émis les 3 octobre 2014, 3 novembre 2014, 12 janvier 2015, 27 janvier 2015, 26 février 2015, 24 mars 2015, 7 mai 2015, 21 mai 2015, 18 juin 2015, 31 juillet 2015, 25 août 2015, 16 septembre 2015, 3 novembre 2015, 3 décembre 2015, 6 janvier 2016, 1er mars 2016 et 22 mars 2016, outre des conclusions tendant à ce que le tribunal pronon

ce son droit à la libre disposition du local depuis le 1er mai 2014 en ap...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La Caisse générale de sécurité sociale de la Guadeloupe ( CGSSG) a saisi le Tribunal administratif de la Guadeloupe d'une demande tendant à l'annulation de titres exécutoires émis les 3 octobre 2014, 3 novembre 2014, 12 janvier 2015, 27 janvier 2015, 26 février 2015, 24 mars 2015, 7 mai 2015, 21 mai 2015, 18 juin 2015, 31 juillet 2015, 25 août 2015, 16 septembre 2015, 3 novembre 2015, 3 décembre 2015, 6 janvier 2016, 1er mars 2016 et 22 mars 2016, outre des conclusions tendant à ce que le tribunal prononce son droit à la libre disposition du local depuis le 1er mai 2014 en application du contrat du 14 septembre 1989, des conclusions indemnitaires et des conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1600494 du 15 juin 2017 le Tribunal administratif de la Guadeloupe a annulé les titres exécutoires litigieux, a mis à la charge de la commune de Bouillante une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus de sa demande.

Procédure devant la Cour:

Par une requête, enregistrée le 14 août 2017 au greffe de la Cour administrative d'appel de Bordeaux, et un mémoire en réplique, enregistré le 4 novembre 2019, la commune de Bouillante, représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 15 juin 2017 du Tribunal administratif de la Guadeloupe en tant qu'il a partiellement fait droit à la demande de la CGSSG ;

2°) de rejeter la demande de la CGSSG présentée devant le Tribunal administratif de la Guadeloupe ;

3°) de mettre à la charge de la CGSSG une somme de 3 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est irrégulier car il n'est pas signé ;

- c'est à tort que les premiers juges ont admis la recevabilité de la demande car elle était tardive ;

- c'est à tort que les premiers juges ont annulé les titres litigieux pour défaut d'indication des noms, prénoms et qualités de leur auteur.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 21 juin 2019, 7 octobre 2019 et 12 novembre 2019, la CGSSG, représentée par Me C..., conclut au rejet de la requête et, par la voie de l'appel incident, demande que la Cour, d'une part, prononce son droit à la libre disposition du local depuis le 1er mai 2014 en application du contrat du 14 septembre 1989, d'autre part, condamne la commune de Bouillante à lui verser la somme de 4 000 euros à titre de dommages et intérêts ; elle demande, en outre, qu'une somme de 2 800 euros soit mise à la charge de la commune de Bouillante au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les moyens soulevés par la commune de Bouillante ne sont pas fondés ;

- elle est fondée, par la voie de l'appel incident, à demander que la Cour, d'une part, prononce son droit à la libre disposition du local depuis le 1er mai 2014 en application du contrat du 14 septembre 1989, d'autre part, condamne la commune de Bouillante à lui verser la somme de 4 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Par une ordonnance du 1er mars 2019, le Président de la section du contentieux du Conseil d'Etat a attribué à la Cour la requête de la commune de Bouillante.

Par une ordonnance du 4 novembre 2019, la clôture d'instruction a été reportée au 26 novembre 2019 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

-le code général des collectivités territoriales ;

- la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. A...,

- les conclusions de M. Baffray, rapporteur public,

- les observations de Me D... pour la commune de Bouillante,

- et les observations de Me C... pour la caisse générale de sécurité sociale de la Guadeloupe.

Considérant ce qui suit :

1. Par contrat conclu le 14 septembre 1989, la commune de Bouillante a donné à bail à la caisse générale de sécurité sociale de la Guadeloupe (CGSSG) un local dont elle est propriétaire afin de permettre à la caisse d'y loger une partie de ses services. La commune de Bouillante a émis des titres exécutoires les 3 octobre 2014, 3 novembre 2014, 12 janvier 2015, 27 janvier 2015, 26 février 2015, 24 mars 2015, 7 mai 2015, 21 mai 2015, 18 juin 2015, 31 juillet 2015, 25 août 2015, 16 septembre 2015, 3 novembre 2015, 3 décembre 2015, 6 janvier 2016, 1er mars 2016 et 22 mars 2016 pour réclamer à la CGSSG le paiement de sommes afférentes à la mise à disposition de ce local. Cette dernière a alors saisi le Tribunal administratif de la Guadeloupe d'une demande tendant à l'annulation de ces titres exécutoires, outre des conclusions tendant à ce que le tribunal prononce son droit à la libre disposition du local depuis le 1er mai 2014 en application du contrat du 14 septembre 1989, des conclusions indemnitaires et des conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Par un jugement du 15 juin 2017 le Tribunal administratif de la Guadeloupe a annulé les titres exécutoires litigieux, a mis à la charge de la commune de Bouillante une somme de 1 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et a rejeté le surplus de sa demande. La commune de Bouillante relève appel de ce jugement en tant qu'il a partiellement fait droit à la demande de la CGSSG alors que cette dernière, par la voie de l'appel incident, demande que la Cour, d'une part, prononce son droit à la libre disposition du local depuis le 1er mai 2014 en application du contrat du 14 septembre 1989, d'autre part, condamne la commune de Bouillante à lui verser la somme de 4 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Contrairement à ce que soutient la commune de Bouillante, la minute du jugement attaqué comporte bien la signature du magistrat rapporteur, du président de la formation de jugement et du greffier d'audience. Le moyen tiré de l'irrégularité du jugement attaqué ne peut donc qu'être écarté comme manquant en fait.

Sur le bien fondé du jugement attaqué :

En ce qui concerne la recevabilité de la demande :

3. Aux termes de l'article R. 421-5 du code de justice administrative : " Les délais de recours contre une décision administrative ne sont opposables qu'à la condition d'avoir été mentionnés, ainsi que les voies de recours, dans la notification de la décision ". Aux termes du 2° de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, alors applicable : "L'action dont dispose le débiteur d'une créance assise et liquidée par une collectivité territoriale ou un établissement public local pour contester directement devant la juridiction compétente le bien-fondé de ladite créance se prescrit dans le délai de deux mois suivant la réception du titre exécutoire ou, à défaut, du premier acte procédant de ce titre ou de la notification d'un acte de poursuite ". Le non-respect de l'obligation d'informer le débiteur sur les voies et les délais de recours, prévue par l'article R. 421-5 du code de justice administrative, ou l'absence de preuve qu'une telle information a été fournie, est de nature à faire obstacle à ce que le délai de forclusion, prévu par l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, lui soit opposable.

4. Toutefois, le principe de sécurité juridique, qui implique que ne puissent être remises en cause sans condition de délai des situations consolidées par l'effet du temps, fait obstacle à ce que puisse être contestée indéfiniment une décision administrative individuelle qui a été notifiée à son destinataire ou dont il est établi, à défaut d'une telle notification, que celui-ci a eu connaissance. Dans une telle hypothèse, si le non-respect de l'obligation d'informer l'intéressé sur les voies et les délais de recours ou l'absence de preuve qu'une telle information a été fournie ne permet pas que lui soient opposés les délais de recours fixés par les textes applicables, le destinataire de la décision ne peut exercer de recours juridictionnel au-delà d'un délai raisonnable.

5. En l'espèce, d'une part, les titres exécutoires litigieux ne comportaient pas l'indication des voies et délais de recours. D'autre part, s'agissant du titre le plus ancien reçu par la caisse le 24 octobre 2014, il est constant qu'il avait été contesté devant le juge de l'exécution du Tribunal de grande instance de Basse Terre par une assignation adressée à la commune le 6 juillet 2015, lequel s'est déclaré incompétent le 11 janvier 2016. La saisine de cette juridiction incompétente dans ce délai raisonnable a interrompu le délai de recours qui a recommencé à courir dès la notification de la décision de cette juridiction. Le Tribunal administratif ayant été saisi le 6 juin 2016, la demande de la CGSSG n'était pas tardive.

Au fond :

6. Aux termes de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, dans sa rédaction alors applicable : " (...) 4° Le titre de recettes individuel ou un extrait du titre de recettes collectif est adressé aux redevables sous pli simple (...) / En application de l'article 4 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, le titre de recettes individuel ou l'extrait du titre de recettes collectif mentionne les nom, prénoms et qualité de la personne qui l'a émis ainsi que les voies et délais de recours. / Seul le bordereau de titres de recettes est signé pour être produit en cas de contestation (...) ". Il résulte de ces dispositions, d'une part, que le titre de recettes individuel ou l'extrait du titre de recettes collectif adressé au redevable doit mentionner les nom, prénoms et qualité de la personne qui l'a émis et, d'autre part, qu'il appartient à l'autorité administrative de justifier en cas de contestation que le bordereau de titre de recettes comporte la signature de l'émetteur.

7. En l'espèce, il résulte de l'instruction que tous les titres litigieux sont dépourvus de toute mention quant au nom, prénoms et qualité de la personne qui les a émis. Par suite, la commune de Bouillante n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que les premiers juges ont annulé, pour méconnaissance des dispositions citées ci-dessus de l'article L. 1617-5 du code général des collectivités territoriales, les titres de perception litigieux.

Sur les conclusions incidentes de la CGSSG :

8. Ces conclusions tendant à la condamnation indemnitaire de la commune et à ce que soit " prononcé son droit à la libre disposition du local depuis le 1er mai 2014 en application du contrat du 14 septembre 1989 " sont dépourvues de lien direct avec les conclusions de la requête de la commune de Bouillante et ont été présentées le 21 juin 2019 soit après l'expiration du délai d'appel. Elles doivent donc être rejetées comme irrecevables. Au surplus, les conclusions à fin de déclaration de droits sont par leur objet même irrecevables aussi pour ce motif.

9. Il résulte de tout ce qui précède que tant la requête de la commune de Bouillante que les conclusions d'appel incident de la CGSSG doivent être rejetées.

Sur les conclusions des parties tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

10. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de faire droit aux conclusions présentées au titre des dispositions mentionnées ci-dessus tant par la commune de Bouillante que par la CGSSG.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de la commune de Bouillante est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la Caisse générale de sécurité sociale de la Guadeloupe sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à la commune de Bouillante et à la Caisse générale de sécurité sociale de la Guadeloupe.

Copie en sera adressée au ministre des outre-mer et au préfet de la Guadeloupe.

Délibéré après l'audience du 7 janvier 2020 à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président-assesseur,

- M. A..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 21 janvier 2020.

Le rapporteur,

D. PAGES

Le président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

P. TISSERAND

La République mande et ordonne au préfet de la Guadeloupe en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 17PA22795


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 17PA22795
Date de la décision : 21/01/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

135-02 Collectivités territoriales. Commune.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: M. Dominique PAGES
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : CABINET LANDOT et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 28/01/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-01-21;17pa22795 ?
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