La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

09/06/2020 | FRANCE | N°19PA02454

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 09 juin 2020, 19PA02454


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Bidel Dépannage a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 28 février 2018 par laquelle le maire de Paris a rejeté sa réclamation contre le titre de recettes mettant à sa charge la somme de 1 398,49 euros au titre des dommages causés à un véhicule lors d'une opération de mise en fourrière, d'annuler l'article 3 de l'arrêté du 11 septembre 2017 par lequel le préfet de police a ordonné le recouvrement de la somme de 1 398,49 euros mise à sa charge au titre des

dommages causés à un véhicule lors d'une opération de mise en fourrière, de la dé...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

La société Bidel Dépannage a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler la décision du 28 février 2018 par laquelle le maire de Paris a rejeté sa réclamation contre le titre de recettes mettant à sa charge la somme de 1 398,49 euros au titre des dommages causés à un véhicule lors d'une opération de mise en fourrière, d'annuler l'article 3 de l'arrêté du 11 septembre 2017 par lequel le préfet de police a ordonné le recouvrement de la somme de 1 398,49 euros mise à sa charge au titre des dommages causés à un véhicule lors d'une opération de mise en fourrière, de la décharger de l'obligation de payer la somme de 1 398,49 euros ainsi mise à sa charge et de mettre à la charge de la ville de Paris la somme de 500 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1806207/4-1 du 23 mai 2019, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 26 juillet 2019 et 16 septembre 2019 la société Bidel dépannage, représentée par Me B..., demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 23 mai 2019 ;

2°) d'annuler la décision du 28 février 2018 par laquelle le maire de Paris a rejeté sa réclamation contre le titre de recettes mettant à sa charge la somme de 1 398,49 euros ;

3°) d'annuler l'article 3 de l'arrêté du 11 septembre 2017 par lequel le préfet de police a ordonné le recouvrement de la somme de 1 398,49 euros mise à sa charge au titre des dommages causés à un véhicule lors d'une opération de mise en fourrière.

4°) de la décharger de l'obligation de payer la somme de 1 398,49 euros ainsi mise à sa charge ;

5°) de mettre à la charge de la ville de Paris la somme de 800 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé notamment en ce qu'il n'a pas répondu au moyen tiré de ce que les dommages constatés sur le pare-choc avant constituent de simples rayures et n'ont pas donné lieu à réclamation de la part du propriétaire ;

- l'article 11 du cahier des clauses administratives particulières applicable au marché ne pouvait permettre de lui imputer le remplacement du carter alors qu'aucun dégât n'avait été constaté au niveau du carter moteur lors de l'arrivée en fourrière ;

- cette clause de l'article 11 du cahier des clauses administratives particulières ne pouvait lui être opposée car elle est entachée de nullité, ayant pour effet d'engager la responsabilité du cocontractant sur une simple vraisemblance, et donc sans faute, alors que le régime de la responsabilité contractuelle administrative est un régime de responsabilité pour faute et que la réalité de la faute doit être prouvée.

Par une ordonnance du 6 février 2020, la clôture de l'instruction a été fixée au 10 mars 2020 à 12h00.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le cahier des clauses administratives particulières applicable au marché ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme A...,

- et conclusions de M. Baffray, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. La société Bidel Dépannage est attributaire d'un marché conclu avec la préfecture de police, agissant pour le compte de la ville de Paris, lui confiant des opérations d'enlèvement et de conduite en fourrière de véhicules stationnant sur la voie publique. Elle a dans ce cadre procédé, le 29 mai 2017, à l'enlèvement d'un véhicule immatriculé BG-179-XB. Lors de la restitution de ce véhicule le jour-même, le propriétaire a rempli une feuille de réclamation. Le préfet de police a, par arrêté du 11 septembre 2017, alloué la somme de 1 398,49 euros au propriétaire de ce véhicule, au titre du règlement total et définitif des dommages causés à ce véhicule, et a ordonné le recouvrement de cette somme auprès de la société Bidel Dépannage. Un titre de recettes de même montant a en conséquence été ensuite émis le 27 octobre 2017 à l'encontre de cette société. Par courrier du 21 décembre 2017, celle-ci a formé une réclamation, qui a fait l'objet d'une décision de rejet du maire de Paris en date du 28 février 2018. La société Bidel Dépannage a alors sollicité du tribunal administratif de Paris l'annulation de l'article 3 de l'arrêté du 11 septembre 2017, ensemble la décision de rejet de sa réclamation, ainsi que la décharge de l'obligation de payer la somme de 1 398,49 euros, mais le tribunal a rejeté cette demande par jugement du 23 mai 2019 dont elle interjette appel.

Sur la régularité du jugement :

2. Il ressort de la lecture du jugement qu'après avoir cité les stipulations utiles en l'espèce de l'article 11 du cahier des clauses administratives particulières applicable au marché, les premiers juges ont précisément décrit les circonstances de fait sur lesquelles ils se sont fondés et ont ainsi suffisamment motivé leur jugement. Par ailleurs si le tribunal est tenu de répondre à l'ensemble des moyens soulevés devant lui, il n'a pas en revanche à répondre à chacun des arguments présentés à l'appui de ces moyens. Or, si la société requérante a, dans sa requête introductive d'instance, fait valoir que les dommages constatés sur le pare-choc avant constituaient de simples rayures et n'avaient pas donné lieu à réclamation de la part du propriétaire, il ne s'agissait en tout état de cause que d'un argument à l'appui du moyen tiré de ce qu'à l'arrivée sur le parc le préposé n'avait pas mentionné de dégâts supplémentaires par rapport au constat initial dans le cadre prévu à cet effet. Par suite le moyen tiré de l'insuffisance de motivation du jugement attaqué manque en fait.

Sur le bien-fondé du jugement :

3. Aux termes de l'article 11 du cahier des clauses administratives particulières applicable au marché: " " En cas de dégâts causés à un véhicule transporté en pré-fourrière ou en fourrière, la préfecture de police remboursera à son propriétaire le montant des dommages constatés et occasionnés à son véhicule lors de son enlèvement, de son transport, de son déchargement et de sa garde. / L'imputabilité des dégâts aux opérations supra découle de la comparaison entre la fiche d'enlèvement et la feuille de réclamation. / Toutefois, le titulaire sera responsable à l'égard de la préfecture de police de tous dégâts occasionnés aux véhicules lors : - de l'enlèvement ; - du transport ; - du déchargement. Les dégâts imputés au titulaire résulteront des différences relevées entre l'état descriptif sommaire établi par l'agent verbalisateur sur la voie publique et l'état du véhicule constaté par le contrôleur ou le préposé, permettant de compléter l'état descriptif lors de la dépose du véhicule en pré-fourrière ou fourrière. Le support principal utilisé sera la fiche descriptive répondant à la présentation réglementaire (...) / Toutefois pour chacun des lots n°1, 2 et 3 la préfecture de police se réserve la possibilité d'utiliser en complément les relevés photographiques de l'état des véhicules ou toute autre mesure d'expertise effectués à l'occasion de la réclamation du propriétaire. Dans l'hypothèse où aucun état descriptif du véhicule n'a été réalisé lors de la dépose de celui-ci en pré-fourrière ou en fourrière, ou que celui-ci est incomplet, la préfecture de police se réserve le droit d'imputer les dommages subis par ledit véhicule lorsqu'ils correspondent de manière plausible à la méthode d'enlèvement pratiquée par le titulaire. (....)".

4. Il est vrai qu'en application de cet article les dégâts imputables à la société Bidel Dépannage résultent de la comparaison entre l'état du véhicule lors de son enlèvement sur la voie publique et son état lors de sa dépose en pré-fourrière ou fourrière, tels qu'ils résultent de l'état descriptif, et qu'en l'espèce celui-ci ne mentionnait lors de l'arrivée en fourrière aucun dommage au carter moteur. Toutefois ceci s'explique par le fait qu'il s'agit d'un dommage à un élément intérieur, indécelable par l'examen effectué lors de l'entrée en préfourrière. Par ailleurs cet examen faisait apparaitre notamment des dommages sur le pare-chocs avant qui n'existaient pas lors de l'enlèvement. Dès lors, au vu de ce constat, qui a été corroboré par la fiche de réclamation établie par le propriétaire mentionnant des dommages au protège-moteur côté gauche et émettant des réserves sur le moteur, le lien a pu être établi entre un choc manifestement subi par le véhicule lors de l'enlèvement, révélé par les rayures sur tout le bas de caisse, et le dommage subi par le carter-moteur, dont la réalité n'est pas contestée. Dans ces conditions même si aucun dégât n'a été relevé au niveau du carter moteur à l'arrivée du véhicule à la préfourrière, ce dommage signalé immédiatement par le propriétaire du véhicule mais invisible de l'extérieur, est en lien avec celui constaté en bas de caisse, lors de l'arrivée du véhicule en préfourrière et est compatible avec le mode d'enlèvement utilisé.

5. La société requérante invoque ensuite le caractère illicite de la clause de l'article 11 cité ci-dessus du cahier des clauses administratives particulières applicable au marché qui prévoit que dans l'hypothèse où aucun état descriptif du véhicule n'a été réalisé lors de la dépose de celui-ci en pré-fourrière ou en fourrière, ou que celui-ci est incomplet, la préfecture de police se réserve le droit d'imputer les dommages subis par le véhicule lorsqu'ils correspondent de manière plausible à la méthode d'enlèvement pratiquée par le titulaire. Toutefois, contrairement à ce que soutient la société requérante, cette clause, qui se borne à établir le mode de preuve de l'existence d'une faute du cocontractant de l'administration, n'a ni pour objet ni pour effet de créer un régime de responsabilité sans faute et n'instaure pas plus de présomption de faute que lorsque l'imputabilité du dommage résulte de la comparaison entre la fiche d'enlèvement du véhicule, et son état descriptif lors de son arrive en préfourrière. Par suite, à supposer même que l'administration se soit véritablement fondée sur cette clause plutôt que sur le simple rapprochement des constats effectués lors de l'enlèvement et à l'arrivée en préfourrière, tels qu'éclairés, s'agissant de dommages internes, par des constats et photographies ultérieurs, le moyen doit, en tout état de cause, être écarté.

6. Il résulte de tout ce qui précède que la société Bidel Dépannage n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Sa requête ne peut dès lors qu'être rejetée, y compris ses conclusions présentées sur le fondement de l'article L761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de la Société Bidel Dépannage est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à la société Bidel Dépannage et à la Ville de Paris.

Délibéré après l'audience du 26 mai 2020 à laquelle siégeaient :

- Mme Fuchs Taugourdeau, président de chambre,

- M. Niollet, président-assesseur,

- Mme A..., premier conseiller.

Lu en audience publique, le 9 juin 2020.

Le rapporteur,

M-I. A...Le président,

O. FUCHS TAUGOURDEAU

Le greffier,

P. TISSERAND

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19PA02454


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA02454
Date de la décision : 09/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

60-03 Responsabilité de la puissance publique. Problèmes d'imputabilité.


Composition du Tribunal
Président : Mme FUCHS TAUGOURDEAU
Rapporteur ?: Mme Marie-Isabelle LABETOULLE
Rapporteur public ?: M. BAFFRAY
Avocat(s) : MANDELKERN

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-06-09;19pa02454 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award