La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/06/2020 | FRANCE | N°19PA02486

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 15 juin 2020, 19PA02486


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... B... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 4 décembre 2018 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant son pays de renvoi.

Par un jugement n° 1810889 du 29 mai 2019, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 2

8 juillet 2019 et le 11 septembre 2019, M. B..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°)...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. F... B... a demandé au Tribunal administratif de Melun d'annuler l'arrêté du 4 décembre 2018 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours en fixant son pays de renvoi.

Par un jugement n° 1810889 du 29 mai 2019, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire complémentaire, enregistrés le 28 juillet 2019 et le 11 septembre 2019, M. B..., représenté par Me A..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1810889 du 29 mai 2019 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 4 décembre 2018 par lequel le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français et a fixé le pays de renvoi ;

2°) d'annuler cet arrêté ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour portant la mention " salarié " dans le délai de quinze jours à compter de l'arrêt à intervenir ou, à défaut, de procéder au réexamen de sa demande et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans cette attente ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'arrêté est insuffisamment motivé ;

- il est entaché d'un défaut d'examen sérieux de sa situation ;

- il méconnaît les stipulations du paragraphe 321 de l'accord franco-sénégalais relatif à la gestion concertée des flux migratoires du 23 septembre 2006 modifié ;

- il méconnaît les stipulations du paragraphe 42 de l'accord franco-sénégalais modifié ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-sénégalais relatif à la gestion concertée des flux migratoires entre la France et le Sénégal du 23 septembre 2006 modifié ;

- l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme C...,

- les observations de Me A..., pour M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. F... B..., ressortissant sénégalais né le 2 juin 1977, est entré régulièrement en France le 27 août 2013 selon ses déclarations. Il a sollicité son admission exceptionnelle au séjour le 15 septembre 2017. Par un arrêté du 4 décembre 2018, le préfet du Val-de-Marne a refusé de lui délivrer le titre de séjour sollicité, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. M. B... relève appel du jugement n° 1810889 du 29 mai 2019 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la légalité de la décision contestée :

2. En premier lieu, M. B... reprend en appel, sans apporter d'éléments nouveaux, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de l'arrêté contesté. Il y a donc lieu de l'écarter par adoption des motifs retenus par les premiers juges.

3. En deuxième lieu, si M. B... fait valoir que l'arrêté du 4 décembre 2018 est entaché d'une erreur de droit dès lors que le préfet du Val-de-Marne n'a pas examiné sa demande de titre de séjour " salarié " effectuée sur le fondement du paragraphe 321 de l'accord franco-sénégalais, il ne prouve pas avoir sollicité un titre sur le fondement de ces stipulations. La production des demandes d'autorisation de travail ne peut, à elle seule, suffire à établir l'existence d'une telle demande alors même que l'attestation de dépôt de sa demande de titre de séjour se place sur le terrain de l'admission exceptionnelle et que dans la demande complémentaire que M. B... a formulée sur le terrain de la vie privée et familiale, il n'a pas précisé qu'il avait également demandé de titre de séjour portant la mention " salarié ". Par suite, le moyen tiré du défaut d'examen de la demande de titre de séjour en qualité de salarié ne peut qu'être écarté.

4. En troisième lieu, les dispositions du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile relatives aux titres de séjour qui peuvent être délivrés aux étrangers et aux conditions de délivrance de ces titres s'appliquent, ainsi que le rappelle l'article L. 111-2 du même code, " sous réserve des conventions internationales ". En ce qui concerne les ressortissants sénégalais, le paragraphe 3.2.1 de l'article 3 de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006, modifié par l'avenant signé le 25 février 2008, stipule que : " La carte de séjour temporaire portant la mention

" salarié ", d'une durée de douze mois renouvelable, ou celle portant la mention " travailleur temporaire " sont délivrées, sans que soit prise en compte la situation de l'emploi, au ressortissant sénégalais titulaire d'un contrat de travail visé par l'Autorité française compétente, pour exercer une activité salariée dans l'un des métiers énumérés à l'annexe IV. / Lorsque le travailleur dispose d'un contrat à durée déterminée, la durée de la carte de séjour est équivalente à celle du contrat. / Lorsque le travailleur dispose d'un contrat à durée indéterminée, la carte de séjour portant la mention " salarié " devient, selon les modalités prévues par la législation française, une carte de résident d'une durée de dix ans renouvelable. / Les ressortissants sénégalais peuvent travailler dans tous les secteurs d'activité s'ils bénéficient d'un contrat de travail (...) ".

5. M. B... ne peut utilement se prévaloir de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006 modifié, dès lors qu'il ressort des pièces du dossier qu'il a effectué une demande d'admission exceptionnelle au séjour sur le fondement des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. En tout état de cause, il ressort des pièces du dossier que M. B... n'est pas titulaire d'un contrat de travail visé par la direction régionale des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi (DIRECCTE). Par suite, le moyen doit être écarté.

6. En quatrième lieu, aux termes du paragraphe 42 de l'article 4 de l'accord

franco-sénégalais du 23 septembre 2006 modifié : " (...) Un ressortissant sénégalais en situation irrégulière en France peut bénéficier, en application de la législation française, d'une admission exceptionnelle au séjour se traduisant par la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant : soit la mention " salarié " s'il exerce l'un des métiers mentionnés dans la liste figurant en annexe IV de l'Accord et dispose d'une proposition de contrat de travail. / Soit la mention " vie privée et familiale " s'il justifie de motifs humanitaires ou exceptionnels ". Aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée au 1° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 311-3. ".

7. Les stipulations du paragraphe 42 précité renvoyant à la législation française en matière d'admission exceptionnelle au séjour des ressortissants sénégalais en situation irrégulière, rendent applicables à ces ressortissants les dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Dès lors, le préfet, saisi d'une demande d'admission exceptionnelle au séjour par un ressortissant sénégalais en situation irrégulière, est conduit, par l'effet de l'accord du 23 septembre 2006 modifié, à faire application des dispositions de l'article L. 313-14 de ce code. Toutefois, pour l'examen des demandes déposées par des ressortissants sénégalais en qualité de salarié, l'autorité administrative doit également prendre en compte la liste des métiers figurant en annexe IV de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre 2006.

8. Il résulte de ce qui a été dit au point 7 qu'un ressortissant sénégalais en situation irrégulière en France qui justifie d'une promesse d'embauche ou d'un contrat lui permettant d'exercer une activité figurant à l'annexe IV de l'accord, ne peut bénéficier d'une admission exceptionnelle au séjour se traduisant par la délivrance d'une carte de séjour temporaire portant la mention " salarié " que s'il justifie de motifs exceptionnels, en application des dispositions de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il appartient à l'autorité administrative, sous le contrôle du juge, d'examiner si cette promesse d'embauche ou ce contrat de travail, de même que tout élément de sa situation personnelle dont l'étranger ferait état à l'appui de sa demande, tel que par exemple, l'ancienneté de son séjour en France, peuvent constituer des motifs exceptionnels d'admission au séjour.

9. En l'espèce, M. B... a sollicité son admission exceptionnelle au séjour en qualité de salarié en se prévalant d'une ancienneté dans le travail par la production de plusieurs fiches de paie et d'une demande d'autorisation de travail de la société Auto Lego datée du 17 janvier 2017, pour un poste de carrossier automobile, métier qui ne figure pas sur la liste portée à l'annexe IV de l'accord franco-sénégalais du 23 septembre modifié, auquel renvoi l'article 4 paragraphe 42 de ce même accord. En outre, l'intéressé ne fait état d'aucune vie familiale en France. S'il a conclu un pacte civil de solidarité depuis le 12 mars 2018 avec une ressortissante française, ce pacte présentait un caractère récent à la date de l'arrêté contesté. Il résulte de ce qui précède que le requérant, à supposer même établie sa résidence continue en France depuis 2013, ne justifie pas de l'existence de considérations humanitaires ou de motifs exceptionnels au sens des dispositions de l'article

L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par suite, le préfet du Val-de-Marne n'a pas commis d'erreur manifeste d'appréciation en refusant l'admission exceptionnelle au séjour du requérant sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

10. En cinquième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui ".

11. Si M. B... invoque les stipulations qui précèdent, il n'invoque la présence en France d'aucun membre de sa famille, et n'établit pas être dépourvu d'attaches dans son pays d'origine, où il a vécu jusqu'à l'âge de 36 ans. S'il a conclu un pacte civil de solidarité avec une ressortissante française depuis le 12 mars 2018, ce pacte présentait un caractère récent à la date de l'arrêté contesté. Dans ces conditions, et alors même que la résidence continue de l'intéressé en France depuis 2013 serait établie, l'arrêté litigieux n'a pas, en l'espèce, porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale, une atteinte disproportionnée à aux buts en vue desquels il a été pris. Dès lors, le moyen tiré de la violation des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

12. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DECIDE :

Article 1er : La requête de M. B... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet du Val-de-Marne.

Délibéré après l'audience du 29 mai 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme D..., présidente,

- M. Mantz, premier conseiller,

- Mme C..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 15 juin 2020.

La présidente,

M. D...

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19PA02486


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA02486
Date de la décision : 15/06/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335 Étrangers.


Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: Mme Celine PORTES
Rapporteur public ?: M. BARONNET
Avocat(s) : SOW

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-06-15;19pa02486 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award