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10/07/2020 | FRANCE | N°19PA02604

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 10 juillet 2020, 19PA02604


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme F... ont demandé au Tribunal administratif de Melun, d'une part, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2013 et 2014, et, d'autre part, de leur accorder le bénéfice des dispositions de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales relatives au sursis de paiement.

Par un jugement n° 1705491 du 13 juin 2019, le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande.

Procédure devant l

a Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 5 août 2019 et le 21 novembre 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme F... ont demandé au Tribunal administratif de Melun, d'une part, de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2013 et 2014, et, d'autre part, de leur accorder le bénéfice des dispositions de l'article L. 277 du livre des procédures fiscales relatives au sursis de paiement.

Par un jugement n° 1705491 du 13 juin 2019, le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 5 août 2019 et le 21 novembre 2019, M. et Mme F..., représentés par Me B... et Me D..., doivent être regardés comme demandant à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1705491 du 13 juin 2019 du Tribunal administratif de Melun ;

2°) de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu contestées, en droits et pénalités ;

3°) à titre subsidiaire, de limiter les intérêts de retard au taux de l'intérêt légal ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le jugement attaqué est insuffisamment motivé dans son appréciation des justificatifs de la mise en location de leur appartement ;

- la proposition de rectification du 25 août 2016 est insuffisamment motivée, tant au regard des articles 6 et 10 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, des articles 11, 41, 47 et 48 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, de l'article 296 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, des dispositions combinées des articles 13, 14, 15, 16 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, des articles L. 57 et R. 57-1 du livre des procédures fiscales, des articles L. 211-5 et L. 221-8 du code des relations entre le public et l'administration, de l'article 1er de la loi n° 79-587 du 1er juillet 1979 et des III-4 et III-5 de la circulaire du Premier ministre du 28 septembre 1987, que des doctrines administratives référencées 13 L-1513 n° 73 du 1er avril 1995 et 13 L-1514 nos 37 à 39 du 1er juillet 2002, des instructions référencées BOI-CF-IOR-10-50-20120912 nos 430 et suivants, BOI-CF-PGR-30-10-20120912 nos 200 et suivants et BOI-CF-IOR-10-40-20120912 nos 40 et 80, du préambule de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, de la charte du contribuable, de la charte de déontologie des membres de la juridiction administrative et du recueil des obligations déontologiques des magistrats ;

- la réponse aux observations du contribuable est insuffisamment motivée, tant au regard de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales que de la doctrine administrative référencée 13 L-1514 nos 37 à 39, reprise au BOI-CF-IOR-10-50-20120912 nos 430 et suivants ;

- le service a méconnu son obligation de communication des documents obtenus de tiers sur lesquels il s'est fondé pour asseoir les rectifications en litige, en méconnaissance tant des articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et des articles 41, 47 et 48 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, que de l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration et de la doctrine administrative référencée 13 L-1513 n° 73 du 1er avril 1995 et du BOI-CF-PGR-30-10-20120912 nos 200 et suivants ;

- le service a méconnu son devoir de loyauté tel qu'imposé par les principes de légalité, de nécessité, de proportionnalité, de consentement à l'impôt et de respect du droit de propriété, par l'article L. 100-2 du code des relations entre le public et l'administration et l'article 25 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, ainsi que par la charte du contribuable, le préambule de la charte des droits et obligations du contribuable vérifié, la charte de déontologie des membres de la juridiction administrative et le recueil des obligations déontologiques des magistrats ;

- le service n'a pas respecté les droits de la défense, en méconnaissance tant de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales que des articles 47 et 48 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, de la charte du contribuable, des doctrines administratives référencées 13 L-1511 et 13 L-1512 du 1er juillet 2002 et des réponses ministérielles apportées à MM. H... et C..., députés, le 16 février 2010 ;

- l'avis d'imposition par lequel le service a mis en recouvrement les droits et pénalités contestés, par voie de rôle supplémentaire, est irrégulier ;

- l'article 199 septvicies du code général des impôts instaurant un dispositif inintelligible et portant en conséquence atteinte aux principes constitutionnels et conventionnels de sécurité juridique, de confiance légitime et d'intelligibilité de la règle de droit, son application doit être écartée :

- le service a méconnu les dispositions de cet article 199 septvicies ainsi que la doctrine administrative référencée 5 B-17-09 du 12 mai 2009, reprise au BOI-IR-RICI-230-20-20 nos 40 et 50, en remettant en cause la réduction d'impôt à laquelle ils avaient droit à raison de la location de leur appartement d'Aix-en-Provence, qui a été immédiatement reproposé à la location à la suite du préavis donné par les locataires qui l'ont occupé du 15 juin 2012 au 15 août 2013 ;

- c'est à tort que le service a assorti les droits litigieux d'intérêts de retard non motivés et d'un niveau tellement excessif qu'ils constituent un enrichissement sans cause pour l'Etat et doivent être assimilés à une sanction, comme l'administration l'a elle-même reconnu dans les réponses ministérielles faites aux députés Gautier, Voisin et Weber, les 10 mars, 7 juin et 12 juin 1999 ;

- la majoration de 10 % prévue par l'article 1758 A du code général des impôts, assimilable à une sanction au sens du paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, est insuffisamment motivée au regard des dispositions de l'article 1er de la loi n° 79-587 du 11 juillet 1979 ;

- au regard de l'instruction référencée 13 N-1-08 du 14 février 2008, le service ne pouvait leur infliger cette majoration sans les avoir au préalable invités à régulariser leur situation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 octobre 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il soutient que :

- le moyen tiré de ce que l'article 199 septvicies du code général des impôts porterait atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution est irrecevable, faute d'avoir été présenté dans un mémoire distinct, conformément aux exigences posées par l'article R. 771-3 du code de justice administrative ;

- les autres moyens de M. et Mme F... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la Constitution ;

- la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen du 26 août 1789 ;

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- le traité sur le fonctionnement de l'Union européenne ;

- l'ordonnance n° 58-1067 du 7 novembre 1958 portant loi organique sur le Conseil constitutionnel ;

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative et l'ordonnance n° 2020-305 du 25 mars 2020 modifiée.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience, en application de l'article 8 de l'ordonnance du 25 mars 2020 modifiée portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme F..., qui résident à Saint-Fargeau-Ponthierry (Seine-et-Marne), ont acquis en novembre 2010 un appartement en état futur d'achèvement, d'une valeur de 749 000 euros, situé à Aix-en-Provence (Bouches-du-Rhône). Achevé le 25 novembre 2011, cet appartement a été loué du 15 juin 2012 au 15 août 2013 et considéré par leurs propriétaires comme étant éligible à la réduction d'impôt prévue par l'article 199 septvicies du code général des impôts. A la suite du contrôle sur pièces du dossier fiscal de M. et Mme F..., l'administration a remis en cause le bénéfice de cette réduction au titre des années 2013 et 2014, au motif que l'appartement en cause n'avait été remis en location que le 13 juillet 2015, après que M. et Mme F... eurent vainement tenté de le vendre. M. et Mme F... doivent être regardés comme relevant appel du jugement du 13 juin 2019 par lequel le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été subséquemment assujettis au titre des années 2013 et 2014, ainsi que des pénalités correspondantes.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. L'article L. 9 du code de justice administrative dispose que : " Les jugements sont motivés ". Il ressort des termes du jugement attaqué que les premiers juges, qui ne sont pas tenus de répondre à tous les arguments invoqués au soutien des moyens de la requête, ont suffisamment motivé leur réponse au moyen tiré de ce que les requérants avaient accompli des diligences suffisantes pour la relocation de leur bien. Si M. et Mme F... soutiennent que les premiers juges ont dénaturé les faits qui leur étaient soumis en jugeant non probantes les pièces soumises à leur appréciation pour justifier ces diligences, un tel moyen, qui porte sur le fond du litige, est en tout état de cause sans incidence sur la régularité du jugement attaqué.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) ". L'article R. 57-1 du même livre dispose que : " La proposition de rectification prévue par l'article L. 57 fait connaître au contribuable la nature et les motifs de la rectification envisagée. L'administration invite, en même temps, le contribuable à faire parvenir son acceptation ou ses observations dans un délai de trente jours à compter de la réception de la proposition, prorogé, le cas échéant (...) ". Il résulte de ces dispositions que, pour être régulière, une proposition de rectification doit comporter la désignation de l'impôt concerné, de l'année d'imposition et de la base d'imposition, et énoncer les motifs sur lesquels l'administration entend se fonder pour justifier les redressements envisagés, de façon à permettre au contribuable de formuler utilement ses observations.

4. La proposition de rectification du 25 août 2016 adressée à M. et Mme F... a précisé les règles de droit applicables, l'impôt concerné, l'année d'imposition, ainsi que les motifs de fait sur lesquels le service s'est fondé pour estimer que leur appartement situé à Aix-en-Provence, qu'ils ont souhaité vendre et qui n'a pas été loué entre le 15 août 2013 et le 13 juillet 2015, n'était pas éligible, en 2013 et 2014, à la réduction d'impôt prévue par l'article 199 septvicies du code général des impôts, laquelle suppose une location continue d'au moins neuf ans. Contrairement à ce que soutiennent les requérants cette motivation leur permettait de comprendre les rectifications en cause et de présenter utilement leurs observations dans le respect du contradictoire, ce qu'ils ont d'ailleurs fait en répondant au service le 19 octobre 2016. Dans ces conditions, doit être écarté comme manquant en fait le moyen tiré de ce que la proposition de rectification en litige serait insuffisamment motivée au regard des exigences posées par les dispositions précitées du livre des procédures fiscales, qui sont les seules applicables au présent litige de plein contentieux fiscal et auxquelles, en tout état de cause, n'ajoutent ni les articles invoqués de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne, du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne et de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, d'une part, ni les chartes dont se prévalent M. et Mme F..., d'autre part.

5. En deuxième lieu, le dernier alinéa de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales dispose que : " Lorsque l'administration rejette les observations du contribuable, sa réponse doit également être motivée ".

6. Il résulte de l'instruction que la réponse aux observations du contribuable du 24 novembre 2016 a répondu à chacune des observations formulées par M. et Mme F..., sans se borner à se référer à la proposition de rectification, en relevant que leur appartement n'avait pas été proposé à la location mais à la vente, mentionnant à cet égard les mandats de vente confiés par les intéressés à des agences immobilières, une offre d'achat et un compromis de vente finalement infructueux, ainsi que sur le dégrèvement de taxe sur les logements vacants accordé par le service des impôts des particuliers d'Aix-en-Provence après qu'il eut été informé par M. et Mme F... de leur intention de vendre leur bien immobilier. Dans ces conditions, le moyen tiré de l'insuffisance de motivation de la réponse aux observations du contribuable en litige doit être écarté comme manquant en fait.

7. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 81 du livre des procédures fiscales : " Le droit de communication permet aux agents de l'administration, pour l'établissement de l'assiette et le contrôle des impôts, d'avoir connaissance des documents et des renseignements mentionnés aux articles du présent chapitre dans les conditions qui y sont précisées (...) ". L'article L. 76 B du même livre dispose que : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 (...). Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ".

8. Il est constant que pour établir les rectifications en litige, le service s'est notamment fondé sur le dégrèvement de taxe sur les logements vacants que le service des impôts des particuliers d'Aix-en-Provence a accordé à M. et Mme F... à raison de la mise en vente de ce bien, ainsi que sur les documents qui ont motivé ce dégrèvement. Toutefois, ces éléments ne lui ont pas été transmis à la suite de l'exercice d'un droit de communication au sens de l'article L. 81 du livre des procédures fiscales, lequel ne vise pas les informations que se transmettent entre eux les services de l'administration fiscale. M. et Mme F... ne sont donc pas fondés à soutenir que le service les aurait privés du droit d'obtenir communication des documents ainsi obtenus, qu'ils avaient au demeurant eux-mêmes transmis au service des impôts d'Aix-en-Provence, en méconnaissance de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales. A cet égard, les intéressés ne sauraient utilement se prévaloir des articles 6 et 13 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, des articles 41, 47 et 48 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne et de l'article L. 122-1 du code des relations entre le public et l'administration qui ne sont pas applicables au présent litige.

9. En quatrième lieu, ainsi qu'il vient d'être dit, M. et Mme F... ont pu débattre avec le service en amont de la procédure contentieuse et n'ont été privés d'aucune garantie procédurale prévue par le livre des procédures fiscales. Ils ne sauraient en conséquence se prévaloir de ce qu'ils auraient été privés des droits de la défense ou de ce que le service se serait montré déloyal envers eux. A cet égard, les principes de légalité, de nécessité, de proportionnalité, de consentement à l'impôt et de respect du droit de propriété sont en tout état de cause sans incidence sur la solution du litige, de même que les stipulations de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentaux et de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne dont se prévalent M. et Mme F.... Il en va de même des dispositions légales et réglementaires ainsi que des diverses chartes qu'ils invoquent.

10. Enfin, s'agissant de la régularité de la procédure d'imposition, M. et Mme F... ne sauraient utilement se prévaloir de la méconnaissance par le service des instructions administratives et réponses ministérielles dont ils se prévalent.

Sur la régularité de la mise en recouvrement :

11. Dans le cadre d'un contentieux d'assiette, les irrégularités dont sont, le cas échéant, entachés les avis relatifs aux impositions recouvrées par voie de rôle sont sans incidence sur la régularité et le bien-fondé de l'impôt. M. et Mme F... ne peuvent donc utilement se prévaloir de l'irrégularité de l'avis d'imposition par lequel le service a mis en recouvrement les droits et pénalités contestés, par voie de rôle supplémentaire.

Sur le bien-fondé des impositions contestées :

En ce qui concerne l'application de la loi fiscale :

12. Aux termes de l'article 199 septvicies du code général des impôts : " I.-1. Les contribuables domiciliés en France au sens de l'article 4 B qui acquièrent, entre le 1er janvier 2009 et le 31 décembre 2012, un logement neuf ou en l'état futur d'achèvement bénéficient d'une réduction d'impôt sur le revenu à condition qu'ils s'engagent à le louer nu à usage d'habitation principale pendant une durée minimale de neuf ans (...) VII. - La réduction d'impôt obtenue fait l'objet d'une reprise au titre de l'année au cours de laquelle intervient : 1° La rupture de l'engagement de location (...) ".

13. Il résulte de ces dispositions qu'en cas de vacance du logement, du fait du départ du locataire au cours de la période d'engagement de location de neuf ans qu'elles prévoient, le maintien de l'avantage fiscal est subordonné à la condition que le contribuable justifie avoir accompli sans délai toutes les diligences nécessaires pour que son bien puisse être reloué.

14. En premier lieu, si M. et Mme F... soutiennent que les dispositions de l'article 199 septvicies du code général des impôts portent atteinte aux droits et libertés garantis par la Constitution, notamment au principe d'intelligibilité de la loi qui découle des articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, il n'appartient pas au juge administratif, en dehors des cas où il est saisi par un mémoire distinct et motivé conformément aux dispositions de l'article R. 771-3 du code de justice administrative, de se prononcer sur un tel moyen. En l'absence d'un tel mémoire, le moyen ne peut qu'être écarté.

15. En deuxième lieu, il n'est pas contesté que l'appartement dont M. et Mme F... sont propriétaires à Aix-en-Provence n'a été loué qu'entre le 15 juin 2012 et le 15 août 2013, avant d'être à nouveau loué seulement à compter du 13 juillet 2015. Il résulte de l'instruction que pendant cette vacance de 23 mois, M. et Mme F... ont tenté de vendre ce bien immobilier, comme ils l'ont eux-mêmes indiqué au service des impôts des particuliers d'Aix-en-Provence pour demander à être exonérés de la taxe sur les logements vacants à laquelle ils ont subséquemment été assujettis. A ce titre, M. et Mme F... ont d'ailleurs produit les mandats de vente signés avec deux agences immobilières, les 17 et 28 septembre 2013, une offre d'achat du 14 janvier 2014 et un compromis de vente qui s'est avéré infructueux, signé le 14 avril 2015. En se bornant à produire des attestations de la gérante de la SARL Cabinet Immobilier Drujon d'Astros d'Aix-en-Provence en date des 23 décembre 2016 et 3 juin 2019, selon lesquelles leur bien immobilier aurait été proposé à la location, ils ne justifient pas par ces seuls documents, très peu circonstanciés sur la nature des diligences accomplies sur toute la période de vacance du bien, qu'ils auraient fait toutes diligences pour trouver un nouveau locataire dès l'été 2012, l'absence de cuisine équipée et de placards aménagés dans le logement dont s'agit étant à cet égard sans incidence. Dans ces conditions, c'est à bon droit que le service a remis en cause le bénéfice de la réduction d'impôt prévues par les dispositions de l'article 199 septvicies du code général des impôts au titre des années 2013 et 2014 en litige.

16. Enfin, dès lors que la réduction d'impôt en litige est uniquement régie par le droit interne, M. et Mme F... ne peuvent utilement invoquer les principes de sécurité juridique et de confiance légitime issus du droit de l'Union européenne, qui ne trouvent à s'appliquer dans l'ordre juridique national que dans le cas où la situation juridique dont a à connaître le juge administratif français est régie par le droit de l'Union, ce qui n'est pas le cas en l'espèce.

En ce qui concerne l'application de la doctrine administrative :

17. Aux termes de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales : " Il ne sera procédé à aucun rehaussement d'impositions antérieures si la cause du rehaussement poursuivi par l'administration est un différend sur l'interprétation par le redevable de bonne foi du texte fiscal et s'il est démontré que l'interprétation sur laquelle est fondée la première décision a été, à l'époque, formellement admise par l'administration. / Lorsque le redevable a appliqué un texte fiscal selon l'interprétation que l'administration avait fait connaître par ses instructions ou circulaires publiées et qu'elle n'avait pas rapportée à la date des opérations en cause, elle ne peut poursuivre aucun rehaussement en soutenant une interprétation différente. Sont également opposables à l'administration, dans les mêmes conditions, les instructions ou circulaires publiées relatives au recouvrement de l'impôt et aux pénalités fiscales ".

18. Dès lors, ainsi qu'il vient d'être dit, que M. et Mme F... ont mis leur bien immobilier en vente pendant la période où il n'a plus été loué, ils ne peuvent utilement se prévaloir de l'instruction administrative référencée 5 B-7-09 du 12 mai 2009, reprise aux BOI-IR-RICI-230-20-20 nos 40 et 50 et BOI-IR-RICI-230-20-20 nos 40 et 50 des 20 février 2013 et 21 mai 2015, laquelle, si elle admet que le propriétaire d'un bien immobilier puisse établir avoir accompli des diligences concrètes de remise en location avant d'être déchu du régime de faveur prévu par l'article 199 septvicies du code général des impôts, ne vise pas les propriétaires ayant proposé leur logement à la vente pendant une période de vacance. Le moyen de M. et Mme F... soulevé sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales doit donc être écarté.

Sur les pénalités :

En ce qui concerne les intérêts de retard :

Quant à l'application de la loi fiscale :

19. Aux termes de l'article 1727 du code général des impôts : " Le défaut ou l'insuffisance dans le paiement ou le versement tardif de l'un des impôts, droits, taxe, redevances ou sommes établis ou recouvrés par la direction générale des impôts donnent lieu au versement d'un intérêt de retard qui est dû indépendamment de toute sanction ".

20. Les intérêts de retard prévus par le premier alinéa de l'article 1727 du code général des impôts, qui ne majorent pas les bases d'imposition, s'appliquent indépendamment de toute appréciation portée par l'administration fiscale sur le comportement du contribuable. Dès lors, ils n'ont pas le caractère d'une sanction, mais d'une réparation du préjudice subi par le Trésor, à raison du non-respect par le contribuable de ses obligations déclaratives, même pour la part qui excèderait l'application du taux de l'intérêt légal. A cet égard M. et Mme F... ne peuvent utilement se prévaloir de l'absence de motivation des intérêts de retard mis à leur charge, ni de leur caractère excessif. En outre, l'intérêt de retard, qui ne procède ni d'une accusation en matière pénale, ni d'une contestation sur des droits et obligations de caractère civil, n'entre pas dans le champ d'application des stipulations du paragraphe 1 de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentale. Par suite, M. et Mme F... ne sont pas fondés à en demander la décharge. Enfin, il ne relève pas de l'office du juge de limiter le taux de l'intérêt de retard à celui de l'intérêt légal. Les conclusions en ce sens de M. et Mme F... ne peuvent donc, en tout état de cause, qu'être rejetées.

Quant à l'application de la doctrine administrative :

21. M. et Mme F... ne peuvent utilement se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, des réponses ministérielles apportées au député Gautier, JOAN 10 mars 1999, n° 670, au député Voisin, JOAN, 7 juin 1999, n° 25749 et au député Weber, 12 juin 1999, JOAN 12 juin 1999, n° 31189, qui ne font pas de la loi fiscale une interprétation différente de celle qui vient d'être exposée sur le terrain de la loi.

En ce qui concerne la majoration de 10 % prévue par l'article 1758 A du code général des impôts :

22. En vertu de l'article 1758 A du code général des impôts : " I. - Le retard ou le défaut de souscription des déclarations qui doivent être déposées en vue de l'établissement de l'impôt sur le revenu ainsi que les inexactitudes ou les omissions relevées dans ces déclarations, qui ont pour effet de minorer l'impôt dû par le contribuable ou de majorer une créance à son profit, donnent lieu au versement d'une majoration égale à 10 % des droits mis à la charge du contribuable ou de la créance indue. / II. - Cette majoration n'est pas applicable : / a) En cas de régularisation spontanée ou lorsque le contribuable a corrigé sa déclaration dans un délai de trente jours à la suite d'une demande de l'administration ; / b) Ou lorsqu'il est fait application des majorations prévues par les b et c du 1 de l'article 1728, par l'article 1729 ou par le a de l'article 1732 (...) ". Aux termes de l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales applicables au litige : " Les décisions mettant à la charge des contribuables des sanctions fiscales sont motivées au sens des articles L. 211-2 à L. 211-7 du code des relations entre le public et l'administration, quand un document ou une décision adressés au plus tard lors de la notification du titre exécutoire ou de son extrait en a porté la motivation à la connaissance du contribuable (...) ".

23. En premier lieu, la proposition de rectification du 25 août 2016 a indiqué que les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles M. et Mme F... ont été assujettis au titre des années 2013 et 2014 avaient été assorties de la majoration de 10 % prévue à l'article 1758 A du code général des impôts. Dès lors qu'elle a repris les termes de cet article et précisé le taux de la majoration appliquée, son assiette, ainsi que son fondement juridique, cette pièce de la procédure doit être regardée comme ayant répondu aux exigences posées par l'article L. 80 D du livre des procédures fiscales. Le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la majoration en cause, qui s'apprécie au regard de ce seul article, doit donc être écarté.

24. En second lieu, il ne résulte ni des dispositions de l'article 1758 A du code général des impôts, ni d'aucun autre texte, que l'administration serait tenue de mettre en demeure un contribuable de corriger sa déclaration avant de lui infliger la majoration de 10 % en litige. A ce titre, M. et Mme F... ne peuvent utilement invoquer l'instruction administrative référencée 13 N-1-08 en date du 14 février 2008, rapportée à la date du 12 septembre 2012, soit antérieurement aux années en litige, par l'instruction n° 13 A-2-12 du 7 septembre 2012 relative à la création de la base documentaire " Bulletin officiel des finances publiques - Impôts ". En tout état de cause, si l'instruction en cause avait prévu que la majoration en litige ne s'appliquait pas en cas de déclaration spontanée souscrite avant l'engagement par l'administration d'une procédure contraignante, cette même instruction prévoyait que l'engagement d'une telle procédure était constitué, entre autres, par la réception par le contribuable d'une demande d'éclaircissements ou de justifications prévue à l'article L. 16 du livre des procédures fiscales. Dès lors qu'une telle pièce a été adressée à M. et Mme F... le 13 juin 2016, le service était en toute hypothèse fondé à leur infliger la majoration contestée au stade de la proposition de rectification du 25 août 2016.

25. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme F... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande. Par voie de conséquence, il y a lieu de rejeter leurs conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. et Mme F... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. E... F..., à Mme G... F... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction régionale des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris (pôle contrôle fiscal et affaires juridiques).

Délibéré après l'audience du 30 juin 2020, à laquelle siégeaient :

- Mme Hamon, président,

- Mme Mielnik-Meddah, premier conseiller,

- Mme A..., premier conseiller,

Lu en audience publique, le 10 juillet 2020.

Le rapporteur,

C. A...Le président,

P. HAMON

Le greffier,

C. MONGIS

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 19PA02604


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA02604
Date de la décision : 10/07/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-02 Contributions et taxes. Impôts sur les revenus et bénéfices. Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. Revenus fonciers.


Composition du Tribunal
Président : Mme HAMON
Rapporteur ?: Mme Christelle ORIOL
Rapporteur public ?: Mme STOLTZ-VALETTE
Avocat(s) : SELARL DUBAULT-BIRI et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 28/07/2020
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-07-10;19pa02604 ?
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