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24/12/2020 | FRANCE | N°19PA00830

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 24 décembre 2020, 19PA00830


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

1°) M. et Mme F... C... ont demandé au tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007 et 2008 et des pénalités y afférentes.

2°) M. F... C... a demandé au tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2009, ainsi que des pénalités et amendes

correspondantes.

Par un jugement n° 1308329 et n° 1308332 du 26 mars 2015, le tribunal...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

1°) M. et Mme F... C... ont demandé au tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007 et 2008 et des pénalités y afférentes.

2°) M. F... C... a demandé au tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée mis à sa charge au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2009, ainsi que des pénalités et amendes correspondantes.

Par un jugement n° 1308329 et n° 1308332 du 26 mars 2015, le tribunal administratif de Melun a déchargé M. C... des amendes qui lui ont été infligées au titre des années 2007 à 2009, mis à la charge de l'État la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus des conclusions des demandes.

Par un arrêt n° 15PA02046 du 19 octobre 2016, la Cour a rejeté l'appel de M. C... et de Mme B..., ex-épouse C..., à l'encontre du jugement du 26 mars 2015 du tribunal administratif de Melun.

Par une décision n° 406159 du 15 février 2019, le Conseil d'État statuant au contentieux a, saisi d'un pourvoi de M. C... et de Mme B..., annulé l'arrêt du 19 octobre 2016 et renvoyé l'affaire à la Cour, où elle a été enregistrée sous le numéro 19PA00830.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistré le 22 mai 2015 et le 24 février 2019, M. C... et Mme B..., représentés par Me A..., demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1308329 et n° 1308332 du 26 mars 2015 du tribunal administratif de Melun en tant qu'il leur est défavorable ;

2°) de prononcer la décharge des impositions et pénalités restant en litige ;

3°) de mettre à la charge de l'État la somme de 3 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

M. C... et Mme B... soutiennent que :

- la proposition de rectification a été adressée au domicile des époux après leur séparation, alors que l'administration n'ignorait pas le nouveau domicile du titulaire des revenus commerciaux, en méconnaissance de l'article L. 54 du livre des procédures fiscales ;

- l'information des conséquences financières des rectifications en matière de bénéfices industriels et commerciaux ne sont pas parvenues à M. C..., en méconnaissance de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales ;

- la proposition de rectification est insuffisamment motivée au regard de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, dès lors qu'elle fait état de l'impôt sur les sociétés ;

- les modalités et le résultat de l'usage du droit de communication n'ont pas été précisés ;

- les prestations fournies par les sociétés G... Andrew, Pneus Europe Diffusion, H24 et G... Matuki Didier Edwige ont été remises en cause sans motif pertinent ;

- les pénalités pour manquement délibéré ne sont pas justifiées.

Par des mémoires en défense enregistrés le 12 octobre 2015 et le 14 mars 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Le ministre soutient que :

- la jonction effectuée par le jugement attaqué est irrégulière ;

- les moyens invoqués par M. C... et Mme B... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- l'ordonnance n° 2020-1402 du 18 novembre 2020 ;

- les décrets n° 2020-1404 et n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. D... ;

- et les conclusions de Mme Lescaut, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. C..., qui exerce l'activité de transporteur routier à titre individuel sous l'enseigne " Transport C... ", a fait l'objet d'une vérification de comptabilité, à l'issue de laquelle une proposition de rectification lui a été adressée le 22 juillet 2010, les conséquences de ce contrôle à l'impôt sur le revenu du foyer fiscal alors constitué avec Mme B... étant tirées par une seconde proposition de rectification du même jour. Au terme de la procédure, un rappel de taxe sur la valeur ajoutée a été mis à la charge de M. C... au titre de la période du 1er janvier 2007 au 31 décembre 2009, assorti d'intérêts de retard, de la majoration pour manquement délibéré et d'amendes pour factures fictives, et des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu ont été mises à la charge de M. et Mme C... au titre des années 2007 et 2008, assorties d'intérêts de retard et de la majoration pour manquement délibéré. Par un jugement du 26 mars 2015, le tribunal administratif de Melun a déchargé M. C... des amendes qui lui ont été infligées, mis à la charge de l'État la somme de 1 200 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et rejeté le surplus des conclusions des demandes. Par une requête enregistrée le 22 mai 2015, M. C... et Mme B... ont demandé à la Cour d'annuler ce jugement en tant qu'il leur est défavorable et de prononcer la décharge des impositions restant en litige. Par un arrêt du 19 octobre 2016, la Cour a rejeté la requête des contribuables. Par une décision du 15 février 2019, le Conseil d'État a, saisi d'un pourvoi de M. C... et de Mme B..., annulé l'arrêt du 19 octobre 2016 et renvoyé l'affaire à la Cour.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Dans l'intérêt d'une bonne administration de la justice, le juge administratif dispose, sans jamais y être tenu, de la faculté de joindre deux ou plusieurs affaires, y compris lorsqu'elles concernent des contribuables ou des impositions distincts. La jonction est, par elle-même, insusceptible d'avoir un effet sur la régularité de la décision rendue et ne peut, par suite, être contestée en tant que telle devant le juge d'appel. Il en résulte qu'en se bornant à critiquer la jonction opérée par le tribunal administratif de Melun de la requête de M. C... et de Mme B... en matière d'impôt sur le revenu et de la requête de M. C... en matière de taxe sur la valeur ajoutée, le ministre, qui ne fait état d'aucune irrégularité entachant le jugement attaqué qui aurait résulté de la jonction à laquelle les premiers juges ont procédé, n'est pas fondé à en demander l'annulation pour irrégularité.

Sur les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu :

3. Aux termes de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales dans sa rédaction applicable à la procédure de contrôle en litige : " A l'issue d'un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle au regard de l'impôt sur le revenu ou d'une vérification de comptabilité, lorsque des rectifications sont envisagées, l'administration doit indiquer, avant que le contribuable présente ses observations ou accepte les rehaussements proposés, dans la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 ou dans la notification mentionnée à l'article L. 76, le montant des droits, taxes et pénalités résultant de ces rectifications. " Il résulte de ces dispositions que l'indication du montant des conséquences financières des rectifications proposées constitue une garantie pour le contribuable vérifié. Par suite, dans le cas où elle procède à la vérification de la comptabilité d'une entreprise dont les bénéfices sont taxés au titre de l'impôt sur le revenu global du foyer auquel appartient le contribuable qui les réalise, l'administration doit indiquer à ce contribuable, par une notification faite à son adresse personnelle, les conséquences financières des rectifications envisagées.

4. Il résulte de l'instruction que M. C..., à la suite de sa séparation avec Mme B... intervenue en 2009, résidait au 12 rue de la Gaîté à Champigny-sur-Marne, ainsi qu'en avait été informée l'administration fiscale antérieurement aux propositions de rectification mentionnées au point 1, son épouse continuant à résider au 17 rue Joséphine de Beauharnais dans la même commune, adresse de l'ancien foyer fiscal et qui est demeurée celle du siège de l'entreprise individuelle de M. C... à la suite de la séparation des époux. La proposition de rectification du 22 juillet 2010 rehaussant les revenus professionnels de M. C..., imposables dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux à l'impôt sur le revenu au nom du foyer fiscal, a été envoyée à M. C... " G... C... " au 17 rue Joséphine de Beauharnais et retournée sans avoir été réclamée, après dépôt d'un avis du 27 juillet. Une copie a toutefois été envoyée au même nom et à la même adresse et a été effectivement reçue par M. C... le 4 septembre 2010, ainsi qu'en atteste l'accusé de réception produit en première instance, l'administration ayant par la suite accordé un délai supplémentaire de réponse à M. C... pour répondre, ce qu'il a fait le 18 octobre 2010, la procédure contradictoire s'étant ensuite poursuivie avec, notamment, une réponse aux observations du contribuable du 10 décembre 2010 et saisine de la commission départementale des impôts directs et des taxes sur la chiffre d'affaires.

5. Toutefois, s'agissant des conséquences financières des rectifications en matière de bénéfices industriels et commerciaux, la proposition de rectification mentionnée au point précédent ne précisait pas le montant des droits, intérêts de retard et pénalités qui en résultaient en matière d'impôt sur le revenu, mais indiquait que cette information serait notifiée de manière distincte. Le détail des conséquences du rehaussement du revenu imposable à l'impôt sur le revenu figurait dans une seconde proposition de rectification du 22 juillet 2010 adressée par lettre recommandée avec accusé de réception à M. ou Mme C..., au 17 rue Joséphine de Beauharnais, adresse du siège de l'entreprise et qui était demeurée l'adresse du seul domicile personnel de Mme B.... Malgré une présentation le 27 juillet 2010, le pli n'a pas été retiré et a été retourné à l'administration non réclamé. Si le ministre fait valoir qu'une copie de cette proposition de rectification aurait été envoyée le 2 septembre 2010 à la même adresse en courrier simple et recommandé, il ne justifie pas de sa réception. La seule circonstance que cette proposition de rectification a été envoyée à l'adresse professionnelle de M. C... à laquelle il a reçu la première proposition de rectification relative à ses revenus catégoriels ne prouve pas qu'il a reçu la seconde proposition de rectification. A cet égard, le ministre n'est pas fondé à se prévaloir des dispositions de l'article L. 54 A du livre des procédures fiscales, qui est sans effet sur la preuve de l'information des conséquences financières qui doit être faite à l'époux titulaire des revenus au titre de son entreprise individuelle. En outre, et alors que la circonstance que M. C... a effectivement bénéficié d'un débat contradictoire ne prouve pas davantage, par elle-même, qu'il a été informé des conséquences financières des rectifications envisagées, aucune pièce du dossier n'établit la réalité d'une telle information. En particulier, le courrier de réponse du 18 octobre 2010 de M. C... se borne à mentionner la " proposition de rectification de la comptabilité de l'entreprise " et fait directement suite à la réception de la proposition de rectification catégorielle, mais ne contient aucun élément qui permettrait d'établir que le contribuable a été effectivement informé des conséquences financières résultant des rectifications en matière de bénéfices industriels et commerciaux.

6. Dans ces conditions, M. C... est fondé à soutenir qu'il n'a pas été effectivement informé des conséquences financières à l'impôt sur le revenu des rectifications notifiées dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux, dans des délais lui permettant de formuler des observations en toute connaissance de cause, en méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales. Dès lors qu'il résulte de l'instruction que la seule rectification au niveau du foyer fiscal portait sur les bénéfices industriels et commerciaux de

celui-ci, M. C... et Mme B... sont par suite fondés à soutenir, sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que les cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007 et 2008 et les majorations y afférentes ont été établies à la suite d'une procédure irrégulière.

Sur les rappels de taxe sur la valeur ajoutée :

En ce qui concerne la régularité de la procédure d'imposition :

7. En premier lieu, aux termes de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales : " L'administration adresse au contribuable une proposition de rectification qui doit être motivée de manière à lui permettre de formuler ses observations ou de faire connaître son acceptation (...) ".

8. Si M. C... et Mme B... soutiennent que la proposition de rectification portant sur les rehaussements des bénéfices industriels et commerciaux et les rappels de taxe sur la valeur ajoutée propres à l'entreprise individuelle " G... C... " est insuffisamment motivée au regard de l'article L. 57 du livre des procédures fiscales, dès lors qu'elle fait état de l'impôt sur les sociétés, cette circonstance est sans incidence sur les rappels de taxe sur la valeur ajoutée en litige.

9. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales : " L'administration est tenue d'informer le contribuable de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers sur lesquels elle s'est fondée pour établir l'imposition faisant l'objet de la proposition prévue au premier alinéa de l'article L. 57 (...) Elle communique, avant la mise en recouvrement, une copie des documents susmentionnés au contribuable qui en fait la demande ".

10. La proposition de rectification relative à l'activité de M. C... précise que le service a effectué un droit de communication auprès des fournisseurs H24 et TMDE, qui n'ont pas reconnu l'existence de factures comptabilisées par l'entreprise individuelle de M. C... à leur nom. L'administration a ainsi suffisamment informé M. C... de la teneur et de l'origine des renseignements et documents obtenus de tiers, en dépit de l'absence de mention des dates des demandes et des réponses, lui permettant de demander la communication des documents contenant les informations qui lui étaient opposées avant la mise en recouvrement de la taxe sur la valeur ajoutée en litige. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 76 B du livre des procédures fiscales doit ainsi être écarté.

11. En troisième lieu, il résulte de l'instruction que la proposition de rectification du 22 juillet 2010 mentionnée au point 4, relative aux revenus professionnels de M. C..., a été effectivement reçue par M. C... le 4 septembre 2010, ainsi qu'en atteste l'accusé de réception produit en première instance, l'administration ayant par la suite accordé un délai supplémentaire de réponse à M. C... pour répondre, ce qu'il a fait, et la procédure contradictoire s'étant ensuite poursuivie. Cette proposition de rectification mentionnait les conséquences financières des rectifications en matière de taxe sur la valeur ajoutée, en droits, intérêts de retard et majorations pour manquement délibéré. Dans ces conditions, la proposition de rectification effectivement reçue par M. C... lui ayant permis d'être informé des conséquences financières des rectifications avant qu'il ne présente ses observations, le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions de l'article L. 48 du livre des procédures fiscales doit être écarté.

12. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 54 du livre des procédures fiscales : " Les procédures de fixation des bases d'imposition ou de rectification des déclarations relatives aux revenus provenant d'une activité dont les produits relèvent de la catégorie (...) des bénéfices industriels et commerciaux (...) sont suivies entre l'administration des impôts et celui des époux titulaire des revenus (...) ".

13. Si les requérants se prévalent d'une méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 54 du livre des procédures fiscales, ce moyen doit en tout état de cause être écarté au vu des éléments de fait précédemment mentionnés, dès lors que la procédure afférente aux revenus professionnels soumis à la taxe sur la valeur ajoutée a bien été menée avec M. C..., qui a effectivement reçu la proposition de rectification et a par la suite bénéficié de l'ensemble des garanties attachées à la procédure contradictoire.

En ce qui concerne le bien-fondé :

14. D'une part, il résulte de l'instruction que le vérificateur a écarté la comptabilité de l'activité professionnelle de transport de M. C... comme irrégulière et dépourvue de valeur probante aux motifs, notamment, de l'absence de continuité de la facturation, de l'absence de comptabilisation de l'intégralité des factures du principal client, la société Seine Express, de l'absence de comptes de fournisseurs, les règlements étant faits par le compte de l'exploitant, et de l'existence de factures fictives, et non pas seulement de l'absence de vérification auprès de la société G... Andrew, sous-traitant, en matière de travail clandestin. Dans ces conditions, à supposer même ce dernier motif erroné, c'est à bon droit que la comptabilité a été écartée comme irrégulière et dépourvue de valeur probante.

15. D'autre part, aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. 2. Le droit à déduction prend naissance lorsque la taxe déductible devient exigible chez le redevable. ". Aux termes de l'article 269 du même code : " 1. Le fait générateur de la taxe se produit : a) Au moment où la livraison, l'acquisition intracommunautaire du bien ou la prestation de services est effectué (...) 2. La taxe est exigible : a) Pour les livraisons et les achats visés au a du 1 (...), lors de la réalisation du fait générateur (...) c) Pour les prestations de services (...), lors de l'encaissement des acomptes, du prix, de la rémunération ou, sur option du redevable, d'après les débits (...) ".

16. Il résulte de l'instruction que le vérificateur a procédé à plusieurs rectifications en matière de taxe sur la valeur ajoutée. Après exercice du droit de communication auprès du principal client, il a procédé à un rappel correspondant à l'insuffisance de déclaration de taxe sur la valeur ajoutée collectée auprès de ce client. Par ailleurs, il a procédé à un rappel de la taxe sur la valeur ajoutée déduite au titre de prestations qui auraient été fournies par la société G... Andrew, au motif que les factures présentées et comptabilisées étaient soit postérieures à la liquidation de cette société, soit, pour les factures antérieures, dépourvues de justificatifs de paiement, le paiement étant enregistré par le compte de l'exploitant, par la société Pneus Europe Diffusion, au motif que les factures présentées et comptabilisées étaient soit postérieures à la liquidation de cette société, soit, pour les factures antérieures, dépourvues de justificatifs de paiement, les factures présentées présentant en outre un numéro au registre du commerce et des sociétés qui était erroné, par la société H24, au motif qu'à la suite de l'exercice du droit de communication, cette société n'a pas reconnu l'existence des factures, qui présentaient en outre un numéro SIRET erroné, le paiement, enregistré au crédit du compte d'exploitant, n'ayant au demeurant pas pu être justifié, et par la société G... Matuki Didier Edwige (TMDE), au motif qu'à la suite de l'exercice du droit de communication, cette société n'a pas reconnu l'existence des factures, qui présentaient en outre un code postal erroné, le paiement, enregistré au crédit du compte d'exploitant, n'ayant au demeurant pas pu être justifié. Contrairement à ce qui est soutenu, en matière de taxe sur la valeur ajoutée, le service n'a ainsi pas rejeté 70 % du montant de la taxe sur la valeur ajoutée déductible mais l'intégralité de la taxe mentionnée sur les factures produites s'agissant de ces fournisseurs, l'argumentation sur ce point, relative au souci de réalisme économique opposé par le service en matière de bénéfices industriels et commerciaux, étant dès lors inopérante.

17. Compte tenu de l'ensemble des éléments ainsi avancés, l'administration apporte des éléments suffisants permettant de penser que les factures en cause ne correspondaient pas à des opérations réelles. Il appartient ainsi à M. C... d'apporter toutes les justifications utiles sur la réalité des opérations. Or, le contribuable se borne à contester les éléments retenus par l'administration. Ainsi, d'une part, s'agissant de la société G... Andrew et la société Pneus Europe Diffusion, il fait valoir la possibilité d'avoir été abusé par les prestataires en ignorant leur liquidation et soutient qu'il aurait procédé à des règlements en espèce à partir du compte d'exploitant et ne peut être tenu responsable des anomalies formelles affectant les factures de la seconde société, sans fournir aucun élément de nature à établir la réalité de prestations d'entretien de véhicules et d'achats de pièces mentionnées sur les factures. A cet égard, la circonstance que la proposition de rectification mentionne que l'administration a sollicité la communication de la copie de chèques, sans qu'il résulte de l'instruction que ces copies auraient été obtenues et auraient fondé les rectifications, est sans portée pour contester les éléments de fait avancés par le service. D'autre part, s'agissant de la société H24 et de la société TMDE, M. C... se borne à contester les réponses de ces sociétés à la suite de l'exercice du droit de communication, mais ne fournit aucun élément de nature à combattre les éléments relevés par l'administration et à établir la réalité des prestations d'entretien et de location de véhicules facturées. Dans ces conditions, M. C... n'est pas fondé à contester le rappel de taxe sur la valeur ajoutée déductible en litige.

En ce qui concerne les pénalités :

18. Aux termes de l'article 1729 du code général des impôts : " Les inexactitudes ou les omissions relevées dans une déclaration ou un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt ainsi que la restitution d'une créance de nature fiscale dont le versement a été indûment obtenu de l'État entraînent l'application d'une majoration de : a. 40 % en cas de manquement délibéré (...) ".

19. En matière de taxe sur la valeur ajoutée, l'administration a appliqué la majoration pour manquement délibéré à la rectification relative à l'omission de chiffre d'affaires, compte tenu de l'importance de cette omission, aux alentours de 20 % du chiffre d'affaires annuel, de la connaissance du manquement dès lors que M. C... a établi les factures et fait effectuer les virements correspondants sur un compte bancaire dont il n'a pas révélé l'existence au cours du contrôle, ainsi qu'à la rectification relative à la remise en cause de la taxe sur la valeur ajoutée déductible, compte tenu de l'importance et du caractère répétitif des manquements et des modalités comptables mises en oeuvre, entraînant des paiements par le compte de l'exploitant ne permettant pas d'affecter les paiements aux factures. Compte tenu de l'ensemble de ces éléments, qui ne saurait résulter d'une erreur matérielle, l'administration établit l'existence de manquements délibérés et, par suite, le bien-fondé de l'application de la majoration prévue au a) de l'article 1729 du code général des impôts.

20. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... et Mme B... sont seulement fondés à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande tendant à la décharge des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007 et 2008 et des pénalités y afférentes. Ce jugement doit ainsi être réformé dans cette mesure et la décharge correspondante prononcée. Le surplus des conclusions en décharge de la requête doit en revanche être rejeté.

Sur les frais liés au litige :

21. Aux termes de l'article L. 761-1 du code de justice administrative : " Dans toutes les instances, le juge condamne la partie tenue aux dépens ou, à défaut, la partie perdante, à payer à l'autre partie la somme qu'il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Le juge tient compte de l'équité ou de la situation économique de la partie condamnée. Il peut, même d'office, pour des raisons tirées des mêmes considérations, dire qu'il n'y a pas lieu à cette condamnation ".

22. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'État, sur le fondement des dispositions précitées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 1 000 euros, au titre des frais que M. C... et Mme B... ont exposés dans la présente instance.

DÉCIDE :

Article 1er : M. C... et Mme B... sont déchargés des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2007 et 2008 et des majorations y afférentes.

Article 2 : Le jugement n° 1308329 et n° 1308332 du 26 mars 2015 du tribunal administratif de Melun est réformé en ce qu'il a de contraire au présent arrêt.

Article 3 : L'État versera à M. C... et Mme B... la somme globale de 1 000 euros, en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. F... C..., à Mme E... B... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée du directeur régional des finances publiques d'Île-de-France et de Paris (Service du contentieux d'appel déconcentré).

Délibéré après l'audience du 10 décembre 2020, à laquelle siégeaient :

- M. D..., président de la formation de jugement,

- Mme Marion, premier conseiller,

- M. Sibilli, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 décembre 2020.

Le président-rapporteur,

F. D...L'assesseur le plus ancien,

I. MARION

La greffière,

F. DUBUY-THIAMLa République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision

4

N° 19PA00830


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA00830
Date de la décision : 24/12/2020
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-01-03-02-02-02 Contributions et taxes. Généralités. Règles générales d'établissement de l'impôt. Rectification (ou redressement). Proposition de rectification (ou notification de redressement).


Composition du Tribunal
Président : M. PLATILLERO
Rapporteur ?: M. Fabien PLATILLERO
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : ELBAZ

Origine de la décision
Date de l'import : 16/01/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2020-12-24;19pa00830 ?
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