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28/01/2021 | FRANCE | N°19PA04059

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 8ème chambre, 28 janvier 2021, 19PA04059


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler les arrêtés du 5 septembre 2019 par lesquels le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination d'une mesure d'éloignement et lui a interdit de retourner sur le territoire français pendant un délai de douze mois ainsi que la décision de placement en rétention du même jour.

Par un jugement n° 1919246/5-3 du 13 novembre 2019, le magistrat désigné par le président du trib

unal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une re...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler les arrêtés du 5 septembre 2019 par lesquels le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination d'une mesure d'éloignement et lui a interdit de retourner sur le territoire français pendant un délai de douze mois ainsi que la décision de placement en rétention du même jour.

Par un jugement n° 1919246/5-3 du 13 novembre 2019, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire de régularisation, enregistrés les 13 et 17 décembre 2019, et un mémoire complémentaire enregistré le 18 décembre 2020, M. C..., représenté par Me E..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1919246/5-3 du 13 novembre 2019 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler les décisions du 5 septembre 2019 par lesquelles le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination d'une mesure d'éloignement et lui a interdit de retourner sur le territoire français pendant un délai de douze mois ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de procéder au réexamen de sa situation et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans l'attente de ce réexamen ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

S'agissant de la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- le préfet de police n'a pas répondu à ce moyen devant le tribunal et il n'a pas produit l'arrêté de délégation de signature mentionné dans le jugement attaqué ; par suite, il ne justifie pas que la décision contestée a été signée par une personne compétente ;

- la décision contestée est insuffisamment motivée ;

- le préfet de police a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle dès lors notamment qu'il s'est associé avec ses deux frères, qui sont en situation régulière sur le territoire français, pour créer une entreprise familiale dans laquelle il travaille comme pâtissier ;

S'agissant de la décision refusant de lui accorder un délai de départ volontaire :

- la décision a été signée par une autorité incompétente ;

- elle est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'erreur de droit dès lors que le préfet de police s'est estimé à tort en situation de compétence liée et ne s'est pas livré à un examen sérieux de sa situation personnelle ;

- elle est entachée d'un défaut de base légale, dès lors que l'article L. 511-1-II du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile est contraire aux articles 1er et 3 de la directive n° 2008/115/CE du Parlement européen et du conseil du 16 décembre 2008 ;

- le préfet de police a retenu à tort un risque de fuite ;

- le préfet de police a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle ;

- l'irrégularité de la procédure a été constatée par une ordonnance du juge judiciaire du 7 septembre 2019 dont il ressort qu'il n'avait pas l'intention de ne pas se conformer à la décision l'obligeant à quitter le territoire français ;

S'agissant de la décision d'interdiction de retour sur le territoire français :

- la décision est insuffisamment motivée au regard des quatre critères prévus par les dispositions de l'article L. 511-1-III du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision méconnaît les dispositions de l'article L. 511-1-III du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que le préfet de police ne s'est pas prononcé sur chacune des conditions légales justifiant l'édiction d'une telle mesure ;

- la décision méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le préfet de police a commis une erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de sa décision sur sa situation personnelle eu égard à sa situation professionnelle et à ses liens familiaux en France et alors que la simple menace pour l'ordre public n'est pas caractérisée en l'espèce.

Par un mémoire en défense, enregistré le 15 septembre 2020, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. C... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil européen du 16 décembre 2008 ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative ;

- le décret n° 2020-1406 du 18 novembre 2020 portant adaptation des règles applicables devant les juridictions de l'ordre administratif.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme G...,

- et les observations de Me E..., avocat de M. C....

Considérant ce qui suit :

1. M. B... C..., ressortissant tunisien né le 15 août 1987 à Tataouine, est entré en France en 2016 selon ses déclarations. Il a été interpellé le 4 septembre 2019 par les services de police dans le cadre d'un contrôle pour travail dissimulé. Par des arrêtés du 5 septembre 2019, le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français sans délai, a fixé le pays à destination d'une mesure d'éloignement, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée de douze mois, et a décidé de son placement en rétention administrative. M. C... relève appel du jugement du 13 novembre 2019 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de ces arrêtés.

Sur les moyens communs aux décisions portant obligation de quitter le territoire français et refusant un délai de départ volontaire :

2. Par un arrêté n° 2019-0062 en date du 29 juillet 2019, régulièrement publié au recueil des actes administratifs spécial de la préfecture de Paris du 30 juillet 2019, le préfet de police a donné délégation à Mme F... D..., attachée d'administration de l'Etat directement placée sous l'autorité du chef du 8ème bureau de la direction de la police générale de la préfecture de police, pour signer tous actes, arrêtés et décisions dans la limite de ses attributions, au nombre desquelles figurent l'édiction de mesures d'éloignement des étrangers ainsi des décisions prises pour leur exécution, en cas d'absence ou d'empêchement d'autorités dont il n'est pas établi qu'elles n'auraient pas été absentes ou empêchées. En outre, contrairement à ce que soutient le requérant, le préfet de police n'est pas tenu de produire l'arrêté de délégation de signature dès lors qu'il a le caractère d'un acte réglementaire et qu'ainsi qu'il a été dit, il a été régulièrement publié. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence de la signataire des décisions contestées doit être écarté comme manquant en fait.

Sur les moyens dirigés contre la décision portant obligation de quitter le territoire français :

3. En premier lieu, aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. _ L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : 1° Si l'étranger ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité ; (...) La décision énonçant l'obligation de quitter le territoire français est motivée. (...) ".

4. La décision contestée vise l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, la convention franco-tunisienne du 17 mars 1988 et le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, notamment le 1° du I de son article L. 511-1. Elle précise l'identité, la date, le lieu de naissance de M. C... ainsi que sa nationalité et indique qu'il ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, qu'il est dépourvu de titre de séjour en cours de validité et en déduit qu'il ne s'est pas conformé aux dispositions de l'article L. 211-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elle indique également que l'intéressé a déclaré être marié à une ressortissante tunisienne vivant en Tunisie et qu'il n'a pas d'enfants à charge et porte l'appréciation selon laquelle, compte tenu des circonstances propres au cas d'espèce, il n'est pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Ainsi, la décision contestée comporte les considérations de droit et de fait sur lesquelles elle se fonde. Par suite, le préfet de police, qui n'est pas tenu de reprendre l'ensemble des éléments de la situation de M. C..., a satisfait à l'exigence de motivation prévue à l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, comme d'ailleurs à l'article L. 211-5 du code des relations entre le public et l'administration.

5. En second lieu, si M. C... soutient qu'il réside en France depuis 2016, les prescriptions médicales des 14 mars et 27 octobre 2016 et des 11 janvier, 15 mai et 22 novembre 2017 sont insuffisantes pour établir sa présence sur le territoire français au titre de ces deux années. Par ailleurs, il ressort des pièces du dossier, notamment des statuts de la SARL Boulangerie Mokrat, de son contrat de travail à durée indéterminée en date du 9 mars 2018 qui au demeurant mentionne qu'il possède la nationalité italienne, de la déclaration préalable à l'embauche en date du 9 mars 2018 et des bulletins de paie pour la période s'étendant du 9 mars 2018 au 31 août 2019 que M. C... exerce la profession de pâtissier au sein de la SARL Boulangerie Mokrat créée avec ses deux frères et dont il détient 25% des parts sociales. Toutefois, la demande d'autorisation de travail versée au dossier n'est pas visée par les autorités compétentes et M. C... n'établit pas avoir entrepris des démarches pour obtenir un titre de séjour notamment en qualité de salarié. Il ne ressort pas des pièces du dossier, alors que M. C... n'exerce pas les fonctions de gérant de la SARL Boulangerie Mokrat, que sa présence en France serait indispensable au fonctionnement de cette dernière. En outre, M. C... n'est pas dépourvu d'attaches familiales en Tunisie où vit son épouse et où il a vécu au moins jusqu'à l'âge de 29 ans. Au vu de l'ensemble de ces éléments, M. C... n'est pas fondé à soutenir que la décision portant obligation de quitter le territoire français serait entachée d'une erreur manifeste d'appréciation au regard de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Sur les moyens dirigés contre la décision refusant d'accorder un délai de départ volontaire :

6. En premier lieu, aux termes du II de l'article L. 511-1du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'étranger auquel il est fait obligation de quitter le territoire français dispose d'un délai de départ volontaire de trente jours à compter de la notification de l'obligation de quitter le territoire français (...). Toutefois, l'autorité administrative peut, par une décision motivée, décider que l'étranger est obligé de quitter sans délai le territoire français : (...) / 3° S'il existe un risque que l'étranger se soustraie à cette obligation. Ce risque peut être regardé comme établi, sauf circonstance particulière, dans les cas suivants : / a) Si l'étranger, qui ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français, n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour ; (...) / f) Si l'étranger ne présente pas de garanties de représentation suffisantes, notamment parce qu'il (...) ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale (...) ; / h) Si l'étranger a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français (...) ".

7. La décision contestée, qui vise notamment le II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, indique que l'intéressé ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français et n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour, qu'il ne présente pas de garanties de représentation suffisantes dans la mesure où il ne justifie pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation principale, et a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français. Par suite, le moyen tiré de l'insuffisante motivation de la décision refusant l'octroi d'un délai de départ volontaire doit être écarté.

8. En deuxième lieu, il ne ressort pas des pièces du dossier que le préfet de police se serait cru en situation de compétence liée, ou qu'il ne se serait pas livré à un examen sérieux de la situation de l'intéressé.

9. En troisième lieu, M. C... soutient que les dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile seraient contraires aux dispositions de l'article 1er de la directive 2008/115/CE du 16 décembre 2008 du Parlement européen et du Conseil aux termes duquel : " La présente directive fixe les normes et procédures communes à appliquer dans les Etats membres au retour des ressortissants de pays tiers en séjour irrégulier, conformément aux droits fondamentaux en tant que principes généraux du droit communautaire ainsi qu'au droit international " et de son article 3 aux termes duquel : " Aux fins de la présente directive, on entend par : (...) 7) " risque de fuite " : le fait qu'il existe des raisons, dans un cas particulier et sur la base de critères objectifs définis par loi, de penser qu'un ressortissant d'un pays tiers faisant l'objet de procédures de retour peut prendre la fuite ". Toutefois, en estimant dans les cas énoncés au 3°) du paragraphe II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qu'il existe des risques que l'étranger se soustraie à l'obligation qui lui est faite de quitter le territoire, le législateur a retenu des critères objectifs qui ne sont pas incompatibles avec la directive 2008/115/CE du Parlement européen et du Conseil que la loi a eu pour objet de transposer. En outre, en réservant l'hypothèse de circonstances particulières, l'article L. 551-1 a entendu garantir un examen de chaque situation individuelle au cas par cas et ne peut dès lors être regardé comme méconnaissant le principe de proportionnalité rappelé par la directive. Par suite, le moyen tiré de ce que la décision contestée aurait été prise sur le fondement de dispositions législatives contraires aux objectifs de cette directive ne peut qu'être écarté.

10. En quatrième lieu, pour refuser de lui octroyer le bénéfice d'un délai de départ volontaire, le préfet de police s'est fondé, comme il a déjà été dit, sur la circonstance que M. C... ne peut justifier être entré régulièrement sur le territoire français et qu'il n'a pas sollicité la délivrance d'un titre de séjour et qu'il ne présentait pas de garanties suffisantes de représentation dès lors qu'il ne justifiait pas d'une résidence effective et permanente dans un local affecté à son habitation et qu'il a explicitement déclaré son intention de ne pas se conformer à son obligation de quitter le territoire français. Si le requérant soutient avoir procédé au retrait d'un dossier en préfecture en vue d'effectuer une demande de titre de séjour, ces allégations ne sont corroborées par aucune pièce du dossier. En outre, si M. C... soutient qu'il a déclaré qu'il n'avait pas l'intention de se conformer à une obligation de quitter le territoire français lors de son audition du 4 septembre 2019 par un agent de police judiciaire en raison de sa mauvaise maîtrise de la langue française, il ressort des termes du procès-verbal établi lors de cette audition que l'intéressé a déclaré parler et comprendre le français. Par suite, et même si M. C... justifie être hébergé par un de ses frères, il n'est pas fondé à soutenir qu'en décidant de ne pas lui accorder un délai de départ volontaire, le préfet de police aurait fait une inexacte application des dispositions précitées.

11. En cinquième lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 5 du présent arrêt, M. C... n'est pas fondé à soutenir que la décision litigieuse serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Sur les moyens dirigés contre la décision portant interdiction de retour sur le territoire français :

12. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " (...) III. L'autorité administrative, par une décision motivée, assortit l'obligation de quitter le territoire français, d'une durée maximale de trois ans à compter de l'exécution de l'obligation de quitter le territoire français, lorsqu'aucun délai de départ volontaire n'a été accordé à l'étranger. Des circonstances humanitaires peuvent toutefois justifier que l'autorité administrative ne prononce pas d'interdiction de retour. (...) La durée de l'interdiction de retour mentionnée au premier, sixième et septième alinéa du présent III ainsi que le prononcé et la durée de l'interdiction de retour mentionnée au quatrième alinéa sont décidés par l'autorité administrative en tenant compte de la durée de présence de l'étranger sur le territoire français, de la nature et de l'ancienneté de ses liens avec la France, de la circonstance qu'il a déjà fait l'objet ou non d'une mesure d'éloignement et de la menace pour l'ordre publique que représente sa présence sur le territoire français. (...) ".

13. En premier lieu, la décision du 5 septembre 2019 vise la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, notamment son article 8, et les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Elle précise que M. C... allègue être entré sur le territoire français en 2016, qu'il ne peut être regardé comme se prévalant de liens suffisamment anciens, forts et caractérisés avec la France dès lors qu'il a déclaré être marié avec une ressortissante tunisienne vivant en Tunisie et n'avoir aucun enfant à charge et porte l'appréciation selon laquelle, compte tenu des circonstances propres au cas d'espèce, il n'est pas porté une atteinte disproportionnée à son droit au respect de sa vie privée et familiale. Il ressort des termes de la décision contestée que le préfet de police n'a pas entendu lui opposer l'existence d'une menace à l'ordre public. Par suite, le préfet de police, qui n'est pas tenu de se prononcer sur chacun des critères mentionnés au III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, mais seulement sur ceux qu'il entendait retenir, a suffisamment motivé sa décision prononçant une interdiction de retour à l'encontre de M. C... pour une durée de douze mois.

14. En deuxième lieu, il ressort des pièces du dossier que la situation de l'intéressé a fait l'objet d'un examen au regard des quatre critères prévus par le III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Toutefois, comme il a déjà été dit, le préfet de police n'est pas tenu de se prononcer sur chacun des critères mentionnés au III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile mais seulement sur ceux qu'il entendait retenir. Par suite, le moyen tiré de ce que le préfet de police aurait méconnu les dispositions du III de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile en ne se prononçant pas sur chacune des conditions légales justifiant l'interdiction de retour d'une durée de douze mois doit être écarté.

15. En troisième lieu, si M. C... se prévaut des liens personnels et professionnels qu'il a développés en France et de son emploi de pâtissier exercé avec ses frères au sein de l'entreprise familiale, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'il réside en France seulement depuis 2018, qu'il est célibataire et sans charge de famille en France alors que son épouse vit en Tunisie où il a lui-même vécu jusqu'à l'âge de 29 ans. En outre, il ne fait valoir aucune circonstance humanitaire justifiant que le préfet de police ne prononce pas la mesure d'interdiction de retour sur le territoire français. Par suite, le requérant n'est pas fondé à soutenir que le préfet de police aurait, en prononçant à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français d'une durée d'un an, porté à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée aux buts en vue desquels la décision contestée a été prise. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

16. En quatrième et dernier lieu, pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 5 du présent arrêt, M. C... n'est pas fondé à soutenir que la décision litigieuse serait entachée d'une erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

17. Il résulte de tout ce qui précède que M. C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions du 5 septembre 2019. Par voie de conséquence, ses conclusions aux fins d'injonction ainsi que celles présentées au titre des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. B... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 7 janvier 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme A..., président de chambre,

- M. Luben, président assesseur,

- Mme G..., premier conseiller.

Rendu public part mise à disposition au greffe le 28 janvier 2021.

La présidente de la 8ème chambre,

H. A...La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

8

N° 19PA04059


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 8ème chambre
Numéro d'arrêt : 19PA04059
Date de la décision : 28/01/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme VINOT
Rapporteur ?: Mme Virginie LARSONNIER
Rapporteur public ?: Mme GUILLOTEAU
Avocat(s) : DUBREUIL

Origine de la décision
Date de l'import : 06/02/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-01-28;19pa04059 ?
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