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05/02/2021 | FRANCE | N°18PA03844

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 4ème chambre, 05 février 2021, 18PA03844


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... E... a demandé au Tribunal administratif de Wallis-et-Futuna d'annuler la décision du 18 août 2017 par laquelle le directeur de l'agence de santé du territoire des îles de Wallis et Futuna a rejeté sa demande tendant au dédommagement des heures supplémentaires non rémunérées réalisées pendant son détachement.

Par un jugement n° 17600018 du 12 octobre 2018, le Tribunal administratif de Wallis-et-Futuna a annulé cette décision.

Procédure devant la cour :

Par une requê

te et des mémoires, enregistrés le 10 décembre 2018, le 24 janvier 2019, le 6 juin 2019 et le 9 oct...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... E... a demandé au Tribunal administratif de Wallis-et-Futuna d'annuler la décision du 18 août 2017 par laquelle le directeur de l'agence de santé du territoire des îles de Wallis et Futuna a rejeté sa demande tendant au dédommagement des heures supplémentaires non rémunérées réalisées pendant son détachement.

Par un jugement n° 17600018 du 12 octobre 2018, le Tribunal administratif de Wallis-et-Futuna a annulé cette décision.

Procédure devant la cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 10 décembre 2018, le 24 janvier 2019, le 6 juin 2019 et le 9 octobre 2019, l'agence de santé du territoire des îles de Wallis et Futuna, représentée par la SCP d'avocats Normand et associés, demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement du 12 octobre 2018 par lequel le Tribunal administratif de Wallis-et-Futuna a annulé la décision du 18 août 2017 par laquelle le directeur de l'agence de santé du territoire des îles de Wallis et Futuna a rejeté sa demande tendant au dédommagement des heures supplémentaires non rémunérées assurées pendant son détachement ;

2°) de rejeter la demande de M. E... ;

3°) de mettre à la charge de M. E... une somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- M. E... ne pouvait pas prétendre à l'indemnisation d'heures supplémentaires dès lors que n'est pas démontrée la nécessité de sa présence au sein de l'établissement ni la réalisation d'un travail effectif, ni le nombre d'heures supplémentaires réellement effectuées ;

- le tableau produit par M. E... n'a pas de valeur probante dès lors qu'il l'a lui-même établi ;

- il n'est pas établi que ces heures supplémentaires aient été effectuées à la demande du chef d'établissement ;

- à la fin de son détachement, M. E... a perçu le paiement des congés annuels et des jours de récupération.

Par des mémoires en défense, enregistrés le 10 mai 2019 et le 1er octobre 2019, M. A... E... conclut au rejet de la requête et à ce que soit mise à la charge de l'agence de santé du territoire des îles de Wallis et Futuna la somme de 2 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par la requête ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de la santé publique ;

- la loi n° 61 du 29 juillet 1961 ;

- le code de justice administrative dans sa version applicable dans les îles de Wallis et Futuna.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme D...,

- les conclusions de M. Baronnet, rapporteur public,

- et les observations de Me C..., représentant l'agence de santé du territoire des îles de Wallis et Futuna.

Considérant ce qui suit :

1. M. E..., praticien hospitalier biologiste, a été détaché auprès de l'agence de santé du territoire des îles de Wallis et Futuna du 10 juillet 2013 au 27 mai 2016. Ce détachement a été prolongé, par décision du 11 avril 2016, jusqu'au 27 juin 2017. Par lettre du 21 juin 2017, M. E... a demandé à l'agence de santé de l'indemniser des heures supplémentaires qu'il aurait effectuées pendant la durée de son détachement. Par décision du 18 août 2017, l'agence a rejeté sa demande. Par jugement du 12 octobre 2018, dont l'agence relève appel, le Tribunal administratif de Wallis-et-Futuna a annulé cette décision.

Sur le motif d'annulation retenu par le Tribunal administratif :

2. Aux termes de l'article L. 6431-12 du code de la santé publique : " Le personnel de l'agence, à l'exception du directeur et de l'agent comptable, est régi par une convention collective. (...) L'agence peut employer des fonctionnaires ainsi que des praticiens hospitaliers placés en détachement ou mis à sa disposition dans les conditions prévues par leurs statuts respectifs. ". Aux termes de l'article R. 6152-56 : " Le praticien détaché continue à bénéficier de ses droits à avancement dans son corps d'origine. Il cesse de percevoir toute rémunération au titre du corps dont il est détaché. ".

3. D'une part, il résulte de ces dispositions que si le détachement d'un praticien hospitalier auprès de l'agence de santé du territoire des îles de Wallis et Futuna est décidé en fonction de son statut tel que défini par le code de la santé publique, le praticien hospitalier est soumis pendant la durée de son détachement aux règles régissant la fonction qu'il exerce par l'effet de celui-ci. Par suite, la situation de M. E... était régie par la convention collective applicable au personnel de l'agence. Cependant, en l'absence de stipulations relatives aux astreintes, l'agence a défini, par une délibération n° 2011-131/ADS/CG du 21 avril 2011 et en dernier lieu, par une délibération n° 2016-185 du 24 mars 2016, les modalités de compensation des heures effectuées dans le cadre d'une astreinte. Il ressort des pièces du dossier que cette dernière délibération, applicable en conséquence à la situation de M. E..., prévoit un mode de compensation financière forfaitaire du temps de déplacement et du travail effectué lors des astreintes. Par suite, l'agence ne pouvait pas refuser l'indemnisation sollicitée par M. E... au motif que sa rémunération incluait l'indemnisation de la sujétion qui lui était imposée et que les astreintes, compensées par des jours de repos, ne pouvaient pas donner lieu à une compensation financière dès lors que le montant de la rémunération a pour objet de compenser le coût de la vie sur le territoire des îles de Wallis et Futuna et que l'attribution de jours de repos n'a pour objet que de compenser l'exigence de disponibilité liée à la situation d'astreinte et non les heures de travail effectif réalisées lors de ces astreintes.

4. D'autre part, il ressort des pièces du dossier que M. E... produit un tableau de toutes les opérations qu'il dit avoir effectuées durant les heures supplémentaires en litige ainsi que les noms des bénéficiaires, les dates et les codes correspondant à ces opérations. L'agence de santé, qui se borne à indiquer que ce document a été établi par l'intéressé lui-même, n'apporte pas de contradiction précise remettant en cause la réalité de ces opérations, la date de leur réalisation ou l'intervenant les ayant pratiquées. Si l'agence de santé fait valoir que toute intervention sur site dans le cadre d'une astreinte doit avoir été initiée par le chef d'établissement, elle ne démontre pas l'existence d'un cadre formel et n'établit ni même n'allègue qu'elle se serait opposée à la venue de M. E... pendant les week-ends alors même que ce dernier produit un courriel d'un ancien directeur de l'agence indiquant qu'il estimait que l'intéressé était " en droit et quasiment en devoir d'effectuer des présences le week-end ". Si l'étendue des heures supplémentaires réellement effectuées par M. E... n'est pas établie au regard notamment des attestations de son prédécesseur et de son successeur qui estiment exceptionnels les cas où l'intervention du médecin biologiste s'avère nécessaire, l'agence ne peut sérieusement soutenir que M. E... n'aurait effectué durant les quatre années de son détachement aucune heure de travail effectif qui ouvrirait droit à compensation financière. Enfin, si l'agence fait valoir que la présence de M. E... pendant les week-ends ne serait due qu'à son incapacité à remplir ses fonctions pendant la semaine, elle ne l'établit pas par la production de documents remettant en cause les compétences de l'intéressé en matière d'organisation et de relation avec son équipe du fait de l'ancienneté de ces documents ou par la production d'une pétition syndicale contestant la prolongation du détachement de M. E... alors même que ce détachement lui a été accordé.

5. Il résulte de ce qui précède que l'agence de santé du territoire des îles de Wallis et Futuna n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Wallis-et-Futuna a annulé sa décision du 18 août 2017.

Sur les conclusions tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mise à la charge de M. E..., qui n'est pas dans la présente instance la partie perdante, la somme demandée par l'agence de santé du territoire des îles de Wallis et Futuna, au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Il y a lieu, en revanche, de faire application de ces dispositions et de mettre à la charge de l'agence de santé une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. E... et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er : La requête de l'agence de santé du territoire des îles de Wallis et Futuna est rejetée.

Article 2 : L'agence de santé du territoire des îles de Wallis et Futuna versera la somme de 1 500 euros à M. E... en application des dispositions de l'article L 761-1 du code de justice administrative.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à l'agence de santé du territoire des îles Wallis et Futuna et à M. A... E....

Délibéré après l'audience du 22 janvier 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme B..., président,

- Mme D..., premier conseiller,

- Mme Mach, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 février 2021.

Le rapporteur,

C. D...Le président,

M. B...Le greffier,

S. GASPAR

La République mande et ordonne au préfet administrateur supérieur des Iles Wallis et Futuna, en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun, contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

4

N° 18PA03844


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 4ème chambre
Numéro d'arrêt : 18PA03844
Date de la décision : 05/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-08-03 Fonctionnaires et agents publics. Rémunération. Indemnités et avantages divers.


Composition du Tribunal
Président : Mme HEERS
Rapporteur ?: Mme Celine PORTES
Rapporteur public ?: M. BARONNET
Avocat(s) : SCP NORMAND et ASSOCIES

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-02-05;18pa03844 ?
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