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24/02/2021 | FRANCE | N°20PA01356

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 24 février 2021, 20PA01356


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D... a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'annuler la décision du 24 mai 2019 par laquelle le directeur du centre hospitalier territorial (CHT) Gaston Bourret l'a suspendue à titre conservatoire.

Par un jugement n° 1900330 du 26 mars 2020, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 26 mai 2020 et le 12 novembre 2020, Mme D..., représentée par la SELARL

de Greslan-Lentignac, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1900330 du 26 mars 2...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D... a demandé au Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie d'annuler la décision du 24 mai 2019 par laquelle le directeur du centre hospitalier territorial (CHT) Gaston Bourret l'a suspendue à titre conservatoire.

Par un jugement n° 1900330 du 26 mars 2020, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et des mémoires, enregistrés le 26 mai 2020 et le 12 novembre 2020, Mme D..., représentée par la SELARL de Greslan-Lentignac, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1900330 du 26 mars 2020 du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie ;

2°) d'annuler la décision du 24 mai 2019 prononçant sa suspension ;

3°) de mettre à la charge du CHT le versement de la somme de 1 000 000 francs XPF en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- il n'est justifié à son encontre d'aucun fait grave de nature à compromettre la sécurité des patients ni le fonctionnement du service ;

- elle s'est conformée à l'engagement pris en juillet 2018 d'abandonner ses fonctions de chef de service ;

- le comportement du CHT à son égard s'apparente à du harcèlement moral ;

- la décision attaquée est entachée de détournement de pouvoir ;

- le conseil de discipline ne s'est pas prononcé dans le délai de quatre mois suivant sa saisine ;

- l'avis émis par le 17 mai 2019 par le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail ne lui a pas été transmis et ne peut dès lors fonder la décision.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 octobre 2020, le centre hospitalier territorial (CHT) Gaston Bourret, représenté par Me C..., conclut au rejet de la requête et à ce que le versement la somme de 5 000 euros soit mis à la charge de Mme D... sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme D... ne sont pas fondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie ;

- la délibération n° 139/CP du 26 mars 2004 ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme B...,

- et les conclusions de Mme Stoltz-Valette, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D..., praticien hospitalier exerçant ses fonctions dans le service d'ophtalmologie du centre hospitalier territorial (CHT) Gaston Bourret de Nouvelle-Calédonie, a fait l'objet le 26 novembre 2018 d'une décision de suspension provisoire, qui a été annulée par un jugement du Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie du 16 mai 2019. Après son retour dans le service le 17 mai 2019 elle a fait l'objet, le 24 mai 2019, d'une nouvelle décision de suspension de ses fonctions à titre conservatoire. Elle fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

2. Aux termes de l'article 57 de la délibération n° 139/CP du 26 mars 2004 portant statut des praticiens des établissements hospitaliers de la Nouvelle-Calédonie : " En cas de comportement incompatible avec l'exercice de sa mission, le praticien peut être immédiatement suspendu à titre conservatoire par le directeur de l'établissement pour une durée maximum de six mois. / Dans ce cas, le directeur de l'établissement informe dans les 24 heures le président du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie qui saisit la commission ad hoc. / Toutefois, lorsque le praticien fait l'objet de poursuites pénales, la suspension peut être prolongée pendant toute la durée de la procédure. / Le praticien suspendu conserve les émoluments mentionnés au 1. de l'article 15. / Toutefois, lorsqu'une décision de justice lui interdit d'exercer, ses émoluments subissent une retenue, qui ne peut excéder la moitié de leur montant. / Lorsque le praticien, à l'issue de la procédure disciplinaire n'a été frappé d'aucune sanction ou n'a fait l'objet que d'un avertissement ou d'un blâme, il a droit au remboursement des retenues opérées sur son traitement. (...) ".

3. La suspension d'un praticien hospitalier sur le fondement des dispositions précitées est une mesure à caractère conservatoire, prise dans le but de préserver l'intérêt du service. Elle peut être prononcée dès lors que les faits imputés à l'intéressé présentent un caractère suffisant de vraisemblance et de gravité.

4. En l'espèce il ressort des pièces du dossier, et notamment du rapport établi le 29 juin 2018 par la mission de diagnostic relatif à la qualité des relations de travail diligentée par le CHT au sein du service d'ophtalmologie, laquelle a recueilli des témoignages concordants de la majorité des personnels affectés dans ce service, ainsi que du témoignage du successeur de Mme D... en qualité de chef de service, que le comportement professionnel inapproprié imputé à Mme D... en sa qualité de chef de service jusqu'en juillet 2018 revêtait un caractère suffisant de vraisemblance et de gravité, et, qu'eu égard à la déstabilisation du service suscitée par la reprise de fonctions de l'intéressée alors qu'une procédure disciplinaire était en cours à son encontre, la suspension de Mme D... était encore nécessaire, à la date de la décision attaquée du 24 mai 2019, au bon fonctionnement du service d'ophtalmologie. Par suite Mme D... n'est pas fondée à soutenir que cette décision serait entachée d'une erreur d'appréciation.

5. Par ailleurs, la circonstance que Mme D... n'ait pas eu communication de l'avis émis le 17 mai 2019 par le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail est sans incidence sur la légalité de la décision, qui n'est pas fondée sur cet avis que le CHT n'était au demeurant pas tenu de recueillir avant de procéder à la suspension de Mme D....

6. Sont également sans incidence sur la légalité de la décision de suspension attaquée la circonstance que Mme D... n'aurait pas reçu communication de l'avis émis le 22 mai 2019 par le conseil de discipline, saisi dans le cadre d'une procédure disciplinaire distincte, et que celui-ci ne se serait pas prononcé dans le délai de quatre mois suivant sa saisine.

7. Il résulte de ce qui précède que la suspension de Mme D... ayant été prise dans le but de préserver l'intérêt du service, cette décision n'est pas entachée de détournement de pouvoir et n'est pas non plus de nature à faire présumer une situation de harcèlement moral à son encontre.

8. Il résulte de tout ce qui précède que le Mme D... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Nouvelle-Calédonie a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du 24 mai 2019 prononçant sa suspension.

9. Les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge du CHT, qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que Mme D... demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. Par ailleurs, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de Mme D... le versement de la somme que le CHT demande sur le fondement des mêmes dispositions.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme D... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions du centre hospitalier territorial Gaston Bourret de Nouvelle-Calédonie présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié au centre hospitalier territorial (CHT) Gaston Bourret de Nouvelle-Calédonie et à Mme A... D....

Délibéré après l'audience du 9 février 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- Mme B..., président assesseur,

- M. Aggiouri, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 24 février 2021.

Le rapporteur,

P. B...Le président,

C. JARDIN

Le greffier,

C. MONGISLa République mande et ordonne au ministre des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 20PA01356 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA01356
Date de la décision : 24/02/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-09-01 Fonctionnaires et agents publics. Discipline. Suspension.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: Mme Perrine HAMON
Rapporteur public ?: Mme STOLTZ-VALETTE
Avocat(s) : SELARL DE GRESLAN-LENTIGNAC

Origine de la décision
Date de l'import : 16/03/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-02-24;20pa01356 ?
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