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25/05/2021 | FRANCE | N°21PA00688

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 25 mai 2021, 21PA00688


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... E... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du

28 janvier 2020 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois suivant le jugement à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et de mettre à la charge de l'État une somme de

1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.
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Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... E... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du

28 janvier 2020 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination, d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour dans le délai d'un mois suivant le jugement à intervenir sous astreinte de 50 euros par jour de retard, et de mettre à la charge de l'État une somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2005725/4-2 du 17 septembre 2020, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête enregistrée le 10 février 2021, M. D... E..., représenté par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2005725/4-2 du 17 septembre 2020 du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler les décisions portant refus de titre de séjour, obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination contenues dans l'arrêté du 28 janvier 2020 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de lui délivrer un titre de séjour dans le délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ; à défaut, d'enjoindre au préfet de réexaminer sa situation et de lui délivrer dans l'attente une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler dans le délai de 15 jours à compter de la notification de l'arrêt à intervenir sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 000 euros sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision refusant le renouvellement de son titre de séjour, qui méconnait les stipulations du titre III du protocole annexe à l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié, est entachée d'erreur manifeste d'appréciation du caractère réel et sérieux de ses études eu égard aux problèmes médicaux et personnels qu'il a rencontrés en 2017/2018 et 2018/2019.

- la décision portant obligation de quitter le territoire français méconnait les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

Par un mémoire en défense enregistré le 12 mai 2021, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que les moyens soulevés par M. E... ne sont pas fondés.

Par une décision n°2020/035802 du 11 décembre 2020 du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris, M. E... a été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- l'accord conclu le 27 décembre 1968 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement de la République algérienne démocratique et populaire et son protocole annexé ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. E..., ressortissant algérien né le 2 avril 1990, entré en France le 19 octobre 2017, a sollicité le 11 octobre 2019 auprès du préfet de police le renouvellement de son certificat de résidence algérien obtenu en qualité d'étudiant sur le fondement des stipulations du titre III du protocole annexe à l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 modifié. Par un arrêté du

28 janvier 2020, le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination. M. E... relève appel du jugement du 17 septembre 2020 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande d'annulation des décisions contenues dans l'arrêté du préfet de police

du 28 janvier 2020.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes du titre III du protocole à l'accord franco-algérien du 27 décembre 1968 : " Les ressortissants algériens qui suivent un enseignement, un stage ou font des études en France et justifient de moyens d'existence suffisants (bourses ou autres ressources) reçoivent, sur présentation, soit d'une attestation de pré-inscription ou d'inscription dans un établissement d'enseignement français, soit d'une attestation de stage, un certificat de résidence valable un an, renouvelable et portant la mention "étudiant" ou "stagiaire" (...) ". Il appartient à l'autorité administrative, saisie d'une demande de renouvellement d'une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant ", d'apprécier, sous le contrôle du juge de l'excès de pouvoir, la réalité et le sérieux des études poursuivies en tenant compte, notamment, de la progression et de la cohérence du cursus suivi.

3. Il ressort des pièces du dossier, qu'après avoir obtenu dans son pays d'origine un baccalauréat série " lettres et philosophie " en 2015 et y avoir validé une première année de licence en sciences humaines et sociales, le requérant a souhaité, pour des raisons personnelles, poursuivre ses études en France et s'est inscrit en deuxième année de licence de sociologie à l'université Lorraine-Metz durant l'année universitaire 2017/2018 mais qu'il n'y a pas validé son année de L2. Après s'être inscrit pour redoubler, en 2018/2019, à l'université Paris 1 Panthéon-Sorbonne, il a de nouveau échoué. A la date de la décision attaquée, il avait ainsi effectué deux années en L2 de licence de sciences sociales. Pour autant, il ressort des pièces du dossier et des attestations produites, et notamment de celle du directeur pédagogique de licence 3 et codirecteur de licence 2 qui atteste connaitre précisément la situation des dix-huit étudiants désormais inscrits en L3, qu'en dépit de ces deux échecs successifs dans un contexte de grève étudiante puis de crise sanitaire, M. E... a pu en définitive valider son année de L2, avant d'intégrer la troisième année de licence pendant l'année universitaire 2019/2020. Le directeur pédagogique souligne également que l'intéressé, qui a constamment fait preuve d'assiduité, a accompli de sensibles progrès après avoir résolu les problèmes personnels qui avaient entravé sa réussite en début de scolarité. Ces éléments, confirmés par l'admission en L3 de l'intéressé au titre de l'année 2019/2020, établissent ainsi la réalité et le sérieux des études en dépit de ses débuts difficiles. Dans ces conditions, le préfet de police a commis une erreur d'appréciation en lui refusant le renouvellement de son titre de séjour " étudiant ".

4. Il résulte de ce qui précède que M. E... est fondé à soutenir que c'est à tort que par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. La décision par laquelle le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour " étudiant " doit être annulée, et, par voie de conséquence, doivent l'être également les décisions lui faisant obligation de quitter le territoire dans un délai de trente jours et fixant le pays de destination.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. L'annulation ci-dessus prononcée implique nécessairement que le préfet de police délivre à M. E... une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant ". Il y a lieu, par suite, sur le fondement des articles L. 911-1 et suivants du code de justice administrative, de lui enjoindre de procéder à cette délivrance dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Il n'y a pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte ni de prescrire la délivrance d'une autorisation provisoire de séjour autorisant son bénéficiaire à travailler.

Sur les conclusions tendant à l'application des articles L. 761-1 du code de justice administrative et 37 de la loi du 10 juillet 1991 :

6. M. E... ayant été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale, son avocate peut prétendre au bénéfice des dispositions de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Par suite, il y a lieu de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me C..., avocate de M. E..., le versement de la somme de 1 500 euros, sous réserve que Me C... renonce au versement de la part contributive de l'Etat à l'aide juridique.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2005725/4-2 du tribunal administratif de Paris du 17 septembre 2020 est annulé.

Article 2 : L'arrêté du préfet de police du 28 janvier 2020 est annulé.

Article 3 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à M. E... une carte de séjour temporaire portant la mention " étudiant " dans le délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 4 : Sous réserve de la renonciation par Me C... au versement de la part contributive de l'Etat à l'aide juridique, l'Etat versera à Me C..., avocat de M. E..., la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... E..., au ministre de l'intérieur, au préfet de police et à Me B... C....

Délibéré après l'audience publique du 18 mai 2021 à laquelle siégeaient :

- M. Bernier, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme A..., premier conseiller,

- Mme Mornet, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 25 mai 2021.

Le rapporteur,

M-D. A...Le président de la formation de jugement,

Ch. BERNIER

Le greffier,

E. MOULIN

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

1

N° 08PA04258

2

N° 21PA00688


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA00688
Date de la décision : 25/05/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. BERNIER
Rapporteur ?: Mme Marie-Dominique JAYER
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : MAIRE

Origine de la décision
Date de l'import : 29/05/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-05-25;21pa00688 ?
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