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08/06/2021 | FRANCE | N°21PA01100

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 3ème chambre, 08 juin 2021, 21PA01100


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montreuil de constater et déclarer le caractère suspensif de son recours aux fins d'empêcher l'exécution de la mesure d'éloignement dont elle fait l'objet jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile, d'annuler l'arrêté du 14 décembre 2020 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pa

ys de renvoi, lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme D... B... a demandé au magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montreuil de constater et déclarer le caractère suspensif de son recours aux fins d'empêcher l'exécution de la mesure d'éloignement dont elle fait l'objet jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile, d'annuler l'arrêté du 14 décembre 2020 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi, lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an et l'a signalée aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen, d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine, dès la notification du jugement à intervenir, d'une part, de procéder à l'effacement de son signalement dans le système d'information de Schengen, d'autre part, de lui délivrer une attestation de demandeur d'asile et de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros en application de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 2014791 du 5 février 2021, le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa demande.

Procédure devant la cour :

Par une requête, enregistrée le 3 mars 2021, Mme B..., représentée par Me C..., demande à la cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2014791 du 5 février 2021 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montreuil ;

2°) d'annuler les décisions portant obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, lui faisant interdiction de retour que le territoire français pour une durée d'un an et portant inscription dans le système d'information Schengen du préfet des Hauts-de-Seine du 14 décembre 2020 ;

3°) d'enjoindre au préfet d'abroger les décisions attaquées ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- dès lors que la décision du directeur général de l'office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) avait fait l'objet d'un recours devant la cour nationale du droit d'asile (CNDA), le premier juge devait suspendre les décisions portant obligation de quitter le territoire et interdiction de retour en France d'une durée d'un an dans l'attente du jugement imminent de cette dernière, conformément aux stipulations de l'article 6 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la CNDA a annulé la décision du directeur général de l'OFPRA le 19 février 2021 et lui a accordé la protection internationale ; la décision lui faisant obligation de quitter le territoire français méconnait en conséquence les stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- cette décision est également contraire aux stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 12 mars 2021, le préfet des Hauts-de-Seine conclut au rejet de la requête.

Il s'en remet à ses précédentes écritures ainsi qu'aux termes du jugement de première instance.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention de Genève du 28 juillet 1951 et le protocole signé à New York le 31 janvier 1967 relatif au statut des réfugiés ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme A... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... B..., ressortissante indienne née le 21 novembre 1977, qui serait entrée en France le 30 avril 2019, y a demandé l'asile, le 13 mai suivant. Par une décision du

17 juin 2020, l'office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) a rejeté sa demande. Mme B... a formé un recours contre cette décision devant la Cour nationale du droit d'asile (CNDA), enregistré le 31 juillet 2020. Par un arrêté du 14 décembre 2020, le préfet des Hauts-de-Seine lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours, a fixé le pays de renvoi, lui a fait interdiction de retour sur le territoire français pour une durée d'un an et l'a signalée aux fins de non-admission dans le système d'information Schengen. Mme B... fait appel du jugement du 5 février 2021 par lequel le magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montreuil a rejeté sa requête tendant, d'une part, à la suspension de l'exécution de cet arrêté jusqu'à la notification de la décision de la Cour nationale du droit d'asile et, d'autre part, à l'annulation de cet arrêté.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

2. D'une part, aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application de l'article

L. 743-2, à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité. (...) ". D'autre part, aux termes de l'article L. 511-5 du même code : " En cas de reconnaissance de la qualité de réfugié ou d'octroi de la protection subsidiaire, l'autorité administrative abroge l'obligation de quitter le territoire français qui, le cas échéant, a été prise. Elle délivre sans délai au réfugié la carte de résident prévue au 8° de l'article L. 314-11 et au bénéficiaire de la protection subsidiaire la carte de séjour temporaire prévue à l'article L. 313-13. Une mesure d'éloignement ne peut être prise à l'encontre de l'étranger bénéficiant d'un droit au séjour. ". Il résulte de ces dispositions que l'octroi de la protection subsidiaire fait, en tout état de cause, obstacle à l'éloignement d'un étranger.

3. Il ressort des pièces du dossier que, postérieurement au jugement litigieux, par une décision du 19 février 2021, après avoir annulé la décision du directeur général de l'OFPRA du 17 juin 2020, la Cour nationale du droit d'asile a accordé la protection subsidiaire à Mme B.... Cette décision d'accorder le bénéfice de la protection subsidiaire revêt un caractère recognitif et a eu pour effet de rétroagir à la date de l'arrêté litigieux. Par suite, Mme B... peut s'en prévaloir pour contester la légalité de l'arrêté pris à son encontre par le préfet des Hauts-de-Seine, antérieurement à son intervention.

4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme B... est fondée à demander l'annulation des décisions contenues dans l'arrêté du 14 décembre 2020 ainsi que celle du jugement du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montreuil rejetant ses demandes.

Sur les frais liés à l'instance :

5. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D É C I D E :

Article 1er : Le jugement n° 2014791 du 5 février 2021 du magistrat désigné par le président du tribunal administratif de Montreuil est annulé.

Article 2 : L'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 14 décembre 2020 est annulé.

Article 3 : L'Etat versera à Mme B... la somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme D... B... et au ministre de l'intérieur. Copie en sera adressée pour information au préfet des Hauts-de-Seine.

Délibéré après l'audience publique du 18 mai 2021 à laquelle siégeaient :

- M. Bernier, président-assesseur, assurant la présidence de la formation de jugement en application de l'article R. 222-26 du code de justice administrative,

- Mme A..., premier conseiller,

- Mme Mornet, premier conseiller,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 8 juin 2021.

Le rapporteur,

M-D. A...Le président de la formation de jugement,

Ch. BERNIERLe greffier,

E. MOULIN

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

1

N° 08PA04258

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N° 21PA01100


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 3ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA01100
Date de la décision : 08/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : M. BERNIER
Rapporteur ?: Mme Marie-Dominique JAYER
Rapporteur public ?: Mme PENA
Avocat(s) : LENDREVIE

Origine de la décision
Date de l'import : 15/06/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-06-08;21pa01100 ?
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