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24/06/2021 | FRANCE | N°20PA01891

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 24 juin 2021, 20PA01891


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... C... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 5 novembre 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduite d'office.

Par un jugement n° 1926472 du 16 juin 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requêt

e, enregistrée le 24 juillet 2020 et un mémoire enregistré le 5 août 2020, M. A... C..., représe...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. D... A... C... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 5 novembre 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduite d'office.

Par un jugement n° 1926472 du 16 juin 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 24 juillet 2020 et un mémoire enregistré le 5 août 2020, M. A... C..., représenté par Me B... demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1926472 du 16 juin 2020 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 5 novembre 2019 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer un titre de séjour dans un délai d'un mois de la notification de l'arrêt à intervenir et sous astreinte de 50 euros par jours de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'État le versement de la somme de 1 500 euros en application de l'article L.761-1 du code de justice administrative.

M. A... C... soutient que :

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé ;

- le préfet de police a méconnu les articles L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et les articles 3 et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et a commis une erreur manifeste d'appréciation sur sa durée de présence en France ainsi que de la réalité de son insertion à raison de dix-huit années d'expérience professionnelle.

Par un mémoire en défense enregistré le 10 février 2021, le préfet de police conclut au rejet de la requête. Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- l'accord franco-marocain du 9 octobre 1987 ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. E... a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A... C..., ressortissant marocain, a sollicité son admission exceptionnelle au séjour, sur le fondement de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 3 de l'accord franco-marocain. Par un arrêté du 5 novembre 2019, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourrait être reconduit d'office. M. A... C... fait appel du jugement du 16 juin 2020 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

2. En premier lieu, la décision de refus de séjour vise notamment les articles L. 313-14 et L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et l'article 3 de l'accord-franco marocain, ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et mentionne différents éléments de la situation personnelle et familiale de M. A... C... et les motifs pour lesquels un titre de séjour ne lui est pas accordé. Cette décision comprend ainsi les considérations de fait et de droit qui en constituent le fondement et est par suite suffisamment motivée. Par ailleurs, l'obligation de quitter le territoire français n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte, dès lors que le refus de séjour est suffisamment motivé. Ainsi, le moyen tiré du défaut de motivation de l'obligation de quitter le territoire français doit également être écarté.

3. En deuxième lieu, l'article 3 de l'accord entre le gouvernement de la République française et le gouvernement du Royaume du Maroc en matière de séjour et d'emploi du 9 octobre 1987 stipule : " Les ressortissants marocains désireux d'exercer une activité professionnelle salariée en France, pour une durée d'un an au minimum, et qui ne relèvent pas des dispositions de l'article 1er du présent Accord, reçoivent, après le contrôle médical d'usage et sur présentation d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes, un titre de séjour valable un an renouvelable et portant la mention " salarié " éventuellement assortie de restrictions géographiques ou professionnelles. / Après trois ans de séjour continu en France, les ressortissants marocains visés à l'alinéa précédent pourront obtenir un titre de séjour de dix ans. Il est statué sur leur demande en tenant compte des conditions d'exercice de leurs activités professionnelles et de leurs moyens d'existence (...) ". L'accord franco-marocain renvoie, sur tous les points qu'il ne traite pas, à la législation nationale, en particulier aux dispositions pertinentes du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et du code du travail pour autant qu'elles ne sont pas incompatibles avec les stipulations de l'accord et nécessaires à sa mise en oeuvre. Il en va notamment ainsi, pour le titre de séjour " salarié " mentionné à l'article 3 cité ci-dessus qui est délivré sur présentation d'un contrat de travail " visé par les autorités compétentes ", des dispositions des articles R. 5221-17 et suivants du code du travail, qui précisent les modalités selon lesquelles et les éléments d'appréciation en vertu desquels le préfet se prononce, au vu notamment du contrat de travail, pour accorder ou refuser une autorisation de travail. De même, lui sont applicables l'article R. 311-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile qui prévoit que la carte de séjour temporaire est retirée à l'étranger qui cesse de remplir les conditions pour l'obtenir et l'article R. 313-36 du même code qui dispose : " Lorsque l'étranger sollicite le renouvellement de la carte de séjour temporaire délivrée au titre des dispositions du 1° de l'article L. 313-10, il doit présenter, outre les pièces mentionnées aux articles R. 311-2-2 et R. 313-4-1, les pièces suivantes : 1° En cas de poursuite de son contrat à durée indéterminée, l'autorisation de travail accordée à son employeur correspondant à l'emploi occupé ; 2° Dans les autres cas, un formulaire de demande d'autorisation de travail, pour la conclusion d'un contrat à durée indéterminée avec un employeur établi en France correspondant à l'emploi sollicité. Ce formulaire est conforme au modèle fixé par arrêté du ministre chargé du travail ".

4. Il ressort des pièces du dossier que M. A... C... ne dispose pas d'un contrat de travail visé par les autorités compétentes et est démuni d'un visa de long séjour. Le préfet de police a donc pu régulièrement estimer que l'intéressé n'entrait pas dans le champ des stipulations précitées de l'article 3 de l'accord franco-marocain.

5. En troisième lieu, aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui " et aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2. (...) ". Ces dispositions n'instituent pas une catégorie de titres de séjour distincte mais est relatif aux conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France soit au titre de la vie privée et familiale, soit au titre d'une activité salariée. Il fixe ainsi, notamment, les conditions dans lesquelles les étrangers peuvent être admis à séjourner en France au titre d'une activité salariée. Dès lors que l'article 3 de l'accord franco-marocain prévoit la délivrance de titres de séjour au titre d'une activité salariée, traitant ainsi de ce point au sens de l'article 9 de cet accord, il fait obstacle à l'application des dispositions de l'article L. 313-14 lors de l'examen d'une demande d'admission au séjour présentée par un ressortissant marocain au titre d'une telle activité. Cet examen ne peut être conduit qu'au regard des stipulations de l'accord, sans préjudice de la mise en oeuvre par le préfet du pouvoir discrétionnaire dont il dispose pour apprécier, en fonction de l'ensemble des éléments de la situation personnelle de l'intéressé, l'opportunité de délivrer à titre de régularisation un titre de séjour à un étranger ne remplissant pas les conditions auxquelles cette délivrance est normalement subordonnée, pouvoir dont les stipulations de l'accord franco-marocain ne lui interdisent pas de faire usage à l'égard d'un ressortissant marocain.

6. Il ressort des pièces du dossier que si M. A... C... est entré en France en 2013, il exerce une activité professionnelle depuis moins de deux années à la date de l'arrêté attaqué. Par ailleurs, il est célibataire et sans charge de famille. Ainsi, le préfet de police n'a pas porté au droit de l'intéressé au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée en refusant de lui délivrer un titre de séjour et en l'obligeant à quitter le territoire français. Par suite, les moyens tirés, en tout état de cause, de la méconnaissance de l'article L. 313-11 et de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doivent être écartés. Pour les mêmes motifs, le préfet de police n'a pas commis d'erreur manifeste dans l'appréciation des conséquences de ces décisions sur la situation personnelle de M. A... C....

7. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... C... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Sa requête, y compris ses conclusions à fin d'injonction, doit dès lors être rejetée.

Sur les conclusions présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

8. En vertu des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la Cour ne peut pas faire bénéficier la partie tenue aux dépens ou la partie perdante du paiement par l'autre partie des frais qu'elle a exposés à l'occasion du litige soumis au juge. Les conclusions présentées à ce titre par M. A... C..., partie perdante en l'espèce, doivent dès lors être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. D... A... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 10 juin 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Formery, président de chambre,

- Mme Marion, premier conseiller,

- M. E..., premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 24 juin 2021.

Le rapporteur,

B. E... Le président,

S.-L. FORMERY

La greffière,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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N° 20PA01891


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA01891
Date de la décision : 24/06/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01 Étrangers. Séjour des étrangers.


Composition du Tribunal
Président : M. FORMERY
Rapporteur ?: M. Bruno SIBILLI
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : ABEL

Origine de la décision
Date de l'import : 06/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-06-24;20pa01891 ?
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