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06/07/2021 | FRANCE | N°20PA00490

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 06 juillet 2021, 20PA00490


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D... a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française d'annuler la décision du 14 mars 2019 par laquelle le maire de la commune de Papeete a maintenu sa proposition de classement au sein de la fonction publique des communes de la Polynésie française dans le cadre d'emplois " exécution ".

Par un jugement n° 1900160 du 12 décembre 2019, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mém

oire, enregistrés le 10 février 2020 et le 9 octobre 2020, Mme D..., représentée par Me C..., d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... D... a demandé au Tribunal administratif de la Polynésie française d'annuler la décision du 14 mars 2019 par laquelle le maire de la commune de Papeete a maintenu sa proposition de classement au sein de la fonction publique des communes de la Polynésie française dans le cadre d'emplois " exécution ".

Par un jugement n° 1900160 du 12 décembre 2019, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire, enregistrés le 10 février 2020 et le 9 octobre 2020, Mme D..., représentée par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 1900160 du 12 décembre 2019 du Tribunal administratif de la Polynésie française ;

2°) d'annuler la décision du 14 mars 2019 du maire de la commune de Papeete ;

3°) d'enjoindre au maire de la commune de Papeete de lui proposer d'intégrer la fonction publique des communes de la Polynésie française dans le cadre d'emplois " application ".

4°) de mettre à la charge de la commune de Papeete une somme de 250 000 F CFP en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la décision contestée méconnaît le principe d'égal accès aux emplois publics ;

- elle méconnaît le principe d'égalité des membres d'un même corps, et subséquemment le principe d'égalité de traitement ;

- elle est entachée d'une erreur manifeste d'appréciation compte tenu des fonctions qu'elle occupe effectivement, qui relèvent de l'aide maternelle et donc du cadre d'emploi " application ".

Par des mémoires en défense, enregistrés le 19 septembre 2020 et le 3 novembre 2020, la commune de Papeete, représentée par Me E..., conclut au rejet de la requête et à ce qu'une somme de 200 000 F CFP soit mise à la charge de Mme D... en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient qu'aucun des moyens soulevés n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la loi organique n° 2004-192 du 27 février 2004 ;

- l'ordonnance n° 2005-10 du 4 janvier 2005 ;

- l'arrêté du haut-commissaire de la République en Polynésie française n° 1118 DIPAC du 5 juillet 2012 fixant le statut particulier du cadre d'emplois " application " ;

- l'arrêté du haut-commissaire de la République en Polynésie française n° 1119 DIPAC du 5 juillet 2012 fixant le statut particulier du cadre d'emplois " exécution " ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. B...,

- les conclusions de Mme Stoltz-Valette, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme D... a été recrutée par la commune de Papeete pour occuper les fonctions de femme de service, pour une durée d'un an à compter du 1er octobre 2004, par un contrat signé le 20 septembre 2014, renouvelé pour un an par un avenant signé le 27 septembre 2005. Elle a ensuite signé le 28 août 2006 un contrat à durée indéterminée pour exercer les fonctions de femme de service en milieu scolaire, à compter du 1er octobre 2006. Par un courrier du 6 septembre 2018, le maire de la commune de Papeete a proposé à Mme D... son intégration en qualité de fonctionnaire, sur le fondement de l'article 74 de l'ordonnance du 4 janvier 2005 portant statut général des fonctionnaires des communes et des groupements de communes de la Polynésie française ainsi que de leurs établissements publics administratifs, dans le cadre d'emplois " exécution ", spécialité " technicien ", au grade d'agent qualifié. Mme D... a saisi la commission de conciliation afin que celle-ci se prononce sur les conditions d'intégration lui ayant été proposées. Le 20 février 2019, la commission a émis un avis favorable quant aux conditions d'intégration de Mme D... dans la fonction publique proposées par le maire de la commune de Papeete. Par une décision du 14 mars 2019, le maire de la commune de Papeete a maintenu sa proposition de classement dans le cadre d'emplois " exécution ", spécialité " technique ", au grade d'agent qualifié. Mme D... relève appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cette décision.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article 74 de l'ordonnance du 4 janvier 2005 portant statut général des fonctionnaires des communes et des groupements de communes de la Polynésie française ainsi que de leurs établissements publics administratifs, applicable aux agents titulaires d'un contrat à durée indéterminée : " Les agents mentionnés à l'article 73 ont vocation à être intégrés sur leur demande, après inscription sur une liste d'aptitude établie par l'autorité de nomination après avis d'une commission spéciale, dans les cadres d'emplois de fonctionnaires régis par le présent statut général [...] ". L'article 76 de cette ordonnance dispose que : " Les cadres d'emplois auxquels les agents mentionnés à l'article 74 peuvent accéder sont déterminés en tenant compte, d'une part, des fonctions réellement exercées par ces agents, du niveau et de la nature des emplois qu'ils occupent et, d'autre part, des titres ou diplômes exigés pour l'accès aux emplois concernés ou de l'expérience professionnelle acquise par l'intéressé. / Les agents sont classés, sans reprise d'ancienneté, dans le cadre d'emplois et dans un grade. [...] ". Enfin l'article 6 de cette ordonnance dispose que : " Les cadres d'emplois de fonctionnaires sont répartis en quatre catégories désignées, dans l'ordre hiérarchique décroissant : / a) Conception et encadrement ; / b) Maîtrise ; / c) Application ; / d) Exécution [...] ".

3. Aux termes de l'article 3 de l'arrêté du haut-commissaire de la République en Polynésie française n° 1118 DIPAC du 5 juillet 2012 fixant le statut particulier du cadre d'emplois " application " : " [...] III - Les fonctionnaires du cadre d'emplois "application" appartenant à la spécialité "technique" ont vocation à occuper différents types de postes, dans différents domaines [...]. Ils peuvent également / - être chargés de l'assistance au personnel enseignant pour la réception, l'animation et l'hygiène de très jeunes enfants, ainsi que de la préparation et la mise en état de propreté des locaux et du matériel servant directement à ces enfants. Ils peuvent enfin être chargés de la surveillance de très jeunes enfants dans les cantines [...] ". Aux termes de l'article 3 de l'arrêté du haut-commissaire de la République en Polynésie française n° 1119 DIPAC du 5 juillet 2012 fixant le statut particulier du cadre d'emplois " exécution " : [...] III. - Les fonctionnaires du cadre d'emplois "exécution" appartenant à la spécialité "technique" ont vocation à occuper différents types de postes, dans différents domaines. Ils exécutent les tâches et peuvent être amenés à devenir un référent d'équipe. / Ils exercent notamment leurs fonctions dans les domaines du bâtiment, des travaux publics, de la voirie et des réseaux divers, des espaces naturels et des espaces verts, de la mécanique et de l'électromécanique, de la restauration collective, de l'environnement et de l'hygiène, des transports, ainsi que de la logistique, des systèmes d'informations et de la sécurité des réseaux. / Ils peuvent en outre : / - être chargés des tâches nécessaires au fonctionnement des services matériels des établissements d'enseignement du premier degré [...] ".

4. Il ressort de la fiche de poste de Mme D..., signée par l'intéressée le 18 janvier 2019, qu'elle a pour missions principales d' " assurer l'entretien de la propreté des locaux et matériels scolaires " et qu'elle " peut être amenée à titre secondaire, à accompagner les sorties scolaires, accueillir les enfants, préparer les goûters, participer à la préparation des fêtes et manifestations de l'école, aider à l'hygiène et à la propreté des enfants, et assister l'enseignant dans les activités manuelles ". A cet égard, il ressort des pièces du dossier que Mme D... a suivi une formation concernant " la gestion des comportements difficiles de l'enfant ", en décembre 2018, durant trois jours. Ainsi, les fonctions dévolues à Mme D..., qui impliquent notamment, outre le nettoyage des locaux et du matériel pédagogique, une mission d'assistance auprès de l'enseignant, en particulier dans le cadre des sorties scolaires et des activités manuelles, ainsi que l'accueil des enfants et la participation à leur hygiène, se rattachent au cadre d'emplois " application ", alors que le cadre d'emplois " exécution " au sein duquel le maire de la commune de Papeete a proposé à Mme D... son intégration dans la fonction publique des communes de la Polynésie française, ne mentionne aucune mission impliquant la prise en charge des enfants mais seulement des " tâches nécessaires au fonctionnement des services matériels des établissements d'enseignement du premier degré ". Par suite, Mme D... est fondée à soutenir que le maire de la commune de Papeete a commis une erreur d'appréciation en proposant son classement dans le cadre d'emploi " exécution ".

5. Il résulte de ce qui précède et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que Mme D... est fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de la Polynésie française a rejeté sa demande tendant à l'annulation de la décision du maire de la commune de Papeete du 14 mars 2019.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

6. Eu égard au motif d'annulation retenu ci-dessus, le présent arrêt implique nécessairement, sous réserve d'un changement dans la situation de l'intéressée, que le maire de la commune de Papeete propose à Mme D... son intégration dans la fonction publique des communes de la Polynésie française dans le cadre d'emplois " application ". Il y a lieu d'enjoindre au maire de la commune de Papeete d'y procéder, dans le délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Sur les frais liés à l'instance :

7. D'une part, il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de la commune de Papeete le versement de la somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

8. D'autre part, les dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que soit mis à la charge de Mme D... qui n'est pas, dans la présente instance, la partie perdante, le versement de la somme que la commune de Papeete demande au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens.

D E C I D E :

Article 1er: Le jugement n° 1900160 du 12 décembre 2019 du Tribunal administratif de la Polynésie française et la décision du maire de la commune de Papeete du 14 mars 2019 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au maire de la commune de Papeete de proposer à Mme D... son intégration dans la fonction publique des communes de la Polynésie française dans le cadre d'emplois " application " dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : La commune de Papeete versera une somme de 1 500 euros à Mme D... en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Les conclusions de la commune de Papeete présentées sur le fondement des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... D... et à la commune de Papeete.

Délibéré après l'audience du 22 juin 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Hamon, présidente,

- M. Segretain, premier conseiller,

- M. B..., premier conseiller.

Rendu public par mise au disposition au greffe, le 6 juillet 2021.

Le rapporteur,

K. B...

La présidente,

P. HAMONLe greffier,

C. MONGIS

La République mande et ordonne au ministre des outre-mer en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

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Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA00490
Date de la décision : 06/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

36-04-01 Fonctionnaires et agents publics. Changement de cadres, reclassements, intégrations. Questions d'ordre général.


Composition du Tribunal
Président : Mme HAMON
Rapporteur ?: M. Khalil AGGIOURI
Rapporteur public ?: Mme STOLTZ-VALETTE
Avocat(s) : BOUYSSIE

Origine de la décision
Date de l'import : 20/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-07-06;20pa00490 ?
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