La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

06/07/2021 | FRANCE | N°20PA01791

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 06 juillet 2021, 20PA01791


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... D... E... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 29 janvier 2020 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine, d'une part, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de renvoi pour son éloignement et, d'autre part, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une période de douze mois.

Par une ordonnance n° 2001985/6-1 du 23 juin 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.



Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 10 juill...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. G... D... E... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 29 janvier 2020 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine, d'une part, l'a obligé à quitter le territoire français sans délai et a fixé le pays de renvoi pour son éloignement et, d'autre part, a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une période de douze mois.

Par une ordonnance n° 2001985/6-1 du 23 juin 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête et un mémoire enregistrés les 10 juillet et 29 décembre 2020, M. D... E..., représenté par Me C..., demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 2001985/6-1 du 23 juin 2020 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 29 janvier 2020 du préfet des Hauts-de-Seine ;

3°) d'enjoindre au préfet des Hauts-de-Seine de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de sept jours, à compter la notification de l'arrêt à intervenir et de réexaminer sa situation ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- l'obligation de quitter le territoire français est dépourvue de base légale ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation et méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision lui refusant un délai de départ volontaire est illégale en conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire ;

- elle méconnaît les dispositions du II de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la décision fixant le pays de destination est illégale en conséquence de l'illégalité de la décision portant obligation de quitter le territoire ;

- la décision portant interdiction de retour sur le territoire français a été prise par un auteur incompétent ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 41 de la Charte des droits fondamentaux de l'Union européenne ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 février 2021, le préfet des Hauts-de-Seine conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués par le requérant ne sont pas fondés.

M. D... E... été admis au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal judiciaire de Paris du 15 octobre 2020.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. F...,

- et les observations de Me A..., représentant M. D... E....

Considérant ce qui suit :

1. M. G... D... E..., ressortissant colombien né le 19 décembre 1971, est entré en France en 2017 selon ses déclarations. Il a fait l'objet d'un arrêté du 29 janvier 2020 par lequel le préfet des Hauts-de-Seine l'a obligé à quitter sans délai le territoire français, a fixé le pays de renvoi et a prononcé à son encontre une interdiction de retour sur le territoire français pendant une période de douze mois. M. D... E... fait appel de l'ordonnance du 23 juin 2020 par laquelle le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation :

2. Aux termes de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers te du droit d'asile : " I. _ L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 3° Si la délivrance ou le renouvellement d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger ou si le titre de séjour qui lui avait été délivré lui a été retiré (...). "

3. Il ressort de l'arrêté du 29 janvier 2020 que le préfet des Hauts-de-Seine a fondé l'obligation de quitter le territoire français notifiée à M. D... E... sur les dispositions précitées du 3° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, et sur la circonstance que sa demande de titre de séjour a fait l'objet d'un refus assorti d'une obligation de quitter le territoire du 27 février 2018 notifié le 2 mars 2018. Toutefois, alors que M. D... E... soutient qu'il n'a jamais sollicité un titre de séjour, le préfet des Hauts-de-Seine ne produit aucun élément justifiant de l'existence d'un refus de titre de séjour, en particulier daté du 27 février 2018, qui ne ressort pas des pièces du dossier. Le préfet des Hauts-de-Seine ne pouvait dès lors fonder la décision portant obligation de quitter le territoire sur le 3° de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Il n'invoque en outre aucun autre motif prévu par les dispositions du I de l'article L. 511-1. Dans ces conditions, M. D... E... est fondé à soutenir que l'obligation de quitter le territoire est dépourvue de base légale, ainsi que, par voie de conséquence, les décisions qui l'assortissent. Par suite, l'arrêté attaqué du 29 janvier 2020 doit être annulé dans toutes ses dispositions.

4. Il résulte de ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, que M. D... E... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par l'ordonnance attaquée, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

5. Eu égard au motif d'annulation retenu, le présent arrêt implique nécessairement, sous réserve d'un changement dans la situation de l'intéressé, que soit réexaminée la situation de M. D... E..., dans un délai de trois mois. Il y a lieu de munir l'intéressé, dans cette attente, d'une autorisation provisoire de séjour.

Sur les frais liés à l'instance :

6. M. D... E... a obtenu le bénéfice de l'aide juridictionnelle. Par suite, son avocat peut se prévaloir des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, et sous réserve que Me C..., avocat de M. D... E..., renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me C... de la somme de 1 500 euros.

DÉCIDE :

Article 1er : L'ordonnance n° 2001985/6-1 du Tribunal administratif de Paris du 23 juin 2020 et l'arrêté du préfet des Hauts-de-Seine du 29 janvier 2020 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet des Hauts-de-Seine de réexaminer la situation de M. D... E... dans un délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt et de le munir dans cette attente d'une autorisation provisoire de séjour.

Article 3 : L'Etat versera à Me C..., avocat de M. D... E..., à condition qu'il renonce à percevoir la somme correspondant à la part contributive de l'Etat, la somme de 1 500 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à M. G... D... E..., à Me B... C..., au ministre de l'intérieur et au préfet des Hauts-de-Seine.

Délibéré après l'audience du 22 juin 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Hamon, présidente,

- M. F..., premier conseiller,

- M. Aggiouri, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 6 juillet 2021.

Le rapporteur,

A. F...La présidente,

P. HAMON

Le greffier,

C. MONGISLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 20PA01791 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA01791
Date de la décision : 06/07/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03 Étrangers. Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière.


Composition du Tribunal
Président : Mme HAMON
Rapporteur ?: M. Alexandre SEGRETAIN
Rapporteur public ?: Mme STOLTZ-VALETTE
Avocat(s) : Claire LACHAUX

Origine de la décision
Date de l'import : 20/07/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-07-06;20pa01791 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award