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05/10/2021 | FRANCE | N°20PA01423

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 05 octobre 2021, 20PA01423


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler les arrêtés des 12 avril 2018 et 9 mai 2018 par lesquels le préfet de police, d'une part, a prononcé son expulsion et fixé le pays de destination, d'autre part, a procédé au retrait de sa carte de résident.

Par un jugement n°s 1819991/4-2, 1819992/4-2 du 30 janvier 2020, le Tribunal administratif de Paris, après avoir joint les requêtes de M. B..., a annulé la décision fixant le pays de destination et rejeté le surplus de ses

demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 10 juin 2020...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler les arrêtés des 12 avril 2018 et 9 mai 2018 par lesquels le préfet de police, d'une part, a prononcé son expulsion et fixé le pays de destination, d'autre part, a procédé au retrait de sa carte de résident.

Par un jugement n°s 1819991/4-2, 1819992/4-2 du 30 janvier 2020, le Tribunal administratif de Paris, après avoir joint les requêtes de M. B..., a annulé la décision fixant le pays de destination et rejeté le surplus de ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 10 juin 2020, M. B..., représenté par Me Pierrot, demande à la Cour :

1°) de l'admettre provisoirement au bénéfice de l'aide juridictionnelle ;

2°) d'annuler l'article 2 du jugement n°s 1819991/4-2, 1819992/4-2 du 30 janvier 2020 du Tribunal administratif de Paris ;

3°) d'annuler l'arrêté du 12 avril 2018 en tant que le préfet de police prononce son expulsion ;

4°) d'annuler l'arrêté du 9 mai 2018 du préfet de police ;

5°) d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et de lui délivrer une attestation provisoire de séjour, sous une astreinte de 150 euros par jour ;

6°) d'enjoindre au préfet de police de lui restituer sa carte de résident dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir, sous une astreinte de 150 euros par jour de retard ;

7°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 1 500 euros à verser à son conseil en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

- la décision qui prononce son expulsion est insuffisamment motivée ;

- elle est entachée d'erreur d'appréciation et méconnaît les dispositions de l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- elle est entachée d'erreur manifeste d'appréciation au regard de sa situation personnelle ;

- elle méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la décision qui procède au retrait de sa carte de résident est insuffisamment motivée ;

- elle est illégale par voie de conséquence de l'illégalité de la décision prononçant son expulsion.

Par un mémoire en défense, enregistré le 2 octobre 2020, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens de la requête n'est fondé.

Par une décision du 22 juin 2020, le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal judiciaire de Paris a rejeté la demande d'aide juridictionnelle présentée par M. B....

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Jardin,

- les conclusions de M. Segretain, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant congolais né le 11 avril 1991, est entré en France en 2008, s'est vu reconnaître en 2009 le statut de réfugié par une décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (OFPRA) et a obtenu en conséquence la délivrance d'une carte de résident valable du 25 novembre 2008 au 24 novembre 2018. Par un arrêté du 12 avril 2018, le préfet de police a prononcé son expulsion du territoire français et fixé le pays de destination, puis, par un arrêté du 9 mai 2018, il a tiré les conséquences de cette expulsion en procédant au retrait de sa carte de résident. M. B... fait appel du jugement du 30 janvier 2020 du Tribunal administratif de Paris en tant qu'il a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions prononçant son expulsion et procédant au retrait de sa carte de résident.

2. Le bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal judiciaire de Paris s'étant prononcé sur la demande d'aide juridictionnelle présentée par M. B..., qu'il a rejetée par une décision du 22 juin 2020, il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions du requérant tendant à son admission provisoire au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Sur la décision prononçant l'expulsion du territoire français :

3. En premier lieu, la décision contestée vise les dispositions applicables, et notamment les articles L. 521-1 et R. 522-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, ainsi que l'avis de la commission spéciale d'expulsion du 20 mars 2018. Il indique que M. B... a été condamné par le Tribunal correctionnel de Paris le 25 juin 2013 à une peine de cinq ans d'emprisonnement pour agression sexuelle sur mineur de plus de quinze ans et le 1er février 2016 à une peine de 300 euros d'amende pour usage illicite de stupéfiants. La décision précise en outre qu'en raison de ces éléments, la présence de M. B... sur le territoire français constitue une menace grave pour l'ordre public et que la décision contestée ne porte dès lors pas d'atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale. La décision prononçant l'expulsion du requérant énonce donc l'ensemble des considérations de droit et de fait qui la fondent, et n'est par suite pas insuffisamment motivée.

4. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 521-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, dans sa rédaction alors en vigueur : " Sous réserve des dispositions des articles L. 521-2, L. 521-3 et L. 521-4, l'expulsion peut être prononcée si la présence en France d'un étranger constitue une menace grave pour l'ordre public. ".

5. Les infractions pénales commises par un étranger ne sauraient, à elles seules, justifier légalement une mesure d'expulsion et ne dispensent pas l'autorité compétente d'examiner, d'après l'ensemble des circonstances de l'affaire, si la présence de l'intéressé sur le territoire français est de nature à constituer une menace grave pour l'ordre public. Lorsque l'administration se fonde sur l'existence d'une telle menace pour prononcer l'expulsion d'un étranger, il appartient au juge de l'excès de pouvoir, saisi d'un moyen en ce sens, de rechercher si les faits qu'elle invoque à cet égard sont de nature à justifier légalement sa décision.

6. Il ressort des pièces du dossier que M. B... a été condamné le 25 juin 2013 par le Tribunal correctionnel de Paris à une peine de cinq ans d'emprisonnement et à une peine complémentaire d'interdiction définitive du territoire français pour des faits d'agression sexuelle sur mineur de plus de quinze ans commis en 2011, s'étant vu reconnaître coupable de l'ensemble des faits qui lui étaient reprochés, consistant à avoir contraint une jeune femme à subir des rapports sexuels non consentis avec pénétration. Saisie par le préfet en application des articles L. 522-1 et L. 522-2 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, la commission spéciale d'expulsion a émis, le 20 mars 2018, un avis favorable à l'expulsion de M. B..., notamment en considération des faits ayant motivé cette condamnation. Au regard de ces éléments, et notamment de la gravité des faits ayant donné lieu à la condamnation prononcée en 2013, tels qu'ils ressortent du jugement du Tribunal correctionnel, le préfet de police n'a pas commis d'erreur d'appréciation ni méconnu les dispositions de l'article L. 521-1 précité en estimant que la présence en France de M. B... constituait une menace grave pour l'ordre public, en dépit des efforts de réinsertion déployés par M. B... après sa sortie de prison.

7. En troisième lieu, M. B... soutient que sa vie privée se trouve en France, où il vit depuis son arrivée en 2008, en faisant valoir qu'il s'est vu reconnaître le statut de réfugié en 2009, que sa famille, dont les membres ont également bénéficié d'une protection internationale, réside sur le territoire français, et qu'il a réalisé des efforts pour assurer son insertion professionnelle depuis sa sortie de prison en 2015. Toutefois, d'une part, M. B..., qui est célibataire et sans charge de famille en France, ne verse aucun élément de nature à justifier qu'il entretiendrait des liens avec son père, sa belle-mère et ses demi-frères et sœurs présents en France. D'autre part, l'intéressé ne témoigne pas d'une intégration particulière en France. Dans ces conditions, la décision d'expulsion ne porte pas une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de M. B... au regard des buts poursuivis, et en particulier de la protection de l'ordre public. Par suite, elle ne méconnaît pas les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et n'est pas entachée d'erreur manifeste dans l'appréciation de ses conséquences sur sa situation personnelle.

Sur la décision portant retrait de la carte de résident :

8. En premier lieu, il résulte de ce qui a été précédemment dit que doit être écarté le moyen invoqué par M. B... tiré de ce que la décision procédant au retrait de sa carte de résident devrait être annulée par voie de conséquence de l'annulation de la décision prononçant son expulsion.

9. En second et dernier lieu, la décision contestée vise les dispositions applicables, et précise que M. B... ayant fait l'objet d'une décision d'expulsion en date du 12 avril 2018, sa carte de résident lui était retirée en application des dispositions du 5° de l'article R. 311-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. La décision énonce donc l'ensemble des considérations de droit et de fait qui la fondent, et n'est pas, par suite, en tout état de cause, insuffisamment motivée.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. B... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation des décisions prononçant son expulsion du territoire français et procédant au retrait de sa carte de résident. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et celles au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er: Il n'y a pas lieu de statuer sur les conclusions de M. B... tendant à son admission à l'aide juridictionnelle provisoire.

Article 2 : Le surplus des conclusions de la requête de M. B... est rejeté.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 14 septembre 2021, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- Mme Hamon, présidente assesseure,

- Mme Jurin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 5 octobre 2021.

L'assesseure la plus ancienne,

P. HAMON Le président-rapporteur,

C. JARDIN

La greffière,

C. BUOT

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 20PA01423 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA01423
Date de la décision : 05/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-02-04 Étrangers. - Expulsion. - Droit au respect de la vie familiale.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: M. Claude JARDIN
Rapporteur public ?: M. SEGRETAIN
Avocat(s) : PIERROT

Origine de la décision
Date de l'import : 12/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-10-05;20pa01423 ?
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