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05/10/2021 | FRANCE | N°20PA02580

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 05 octobre 2021, 20PA02580


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant :

1°) à l'annulation de la décision du 13 novembre 2018 par laquelle l'adjoint au directeur général adjoint des ressources humaines de la chambre de commerce et d'industrie de région Paris Ile de France a prononcé son licenciement pour inaptitude physique ;

2°) à ce qu'il soit enjoint au directeur général de la chambre de commerce et d'industrie de lui remettre une attestation Pôle Emploi, les bulletins de paie d

es mois de décembre 2018 à mars 2019 et un certificat de travail, dans un délai de qui...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. B... A... a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant :

1°) à l'annulation de la décision du 13 novembre 2018 par laquelle l'adjoint au directeur général adjoint des ressources humaines de la chambre de commerce et d'industrie de région Paris Ile de France a prononcé son licenciement pour inaptitude physique ;

2°) à ce qu'il soit enjoint au directeur général de la chambre de commerce et d'industrie de lui remettre une attestation Pôle Emploi, les bulletins de paie des mois de décembre 2018 à mars 2019 et un certificat de travail, dans un délai de quinze jours à compter de la date de notification de ce jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

3°) à la condamnation de la chambre de commerce et d'industrie de région Paris Ile de France à lui verser une somme de 192 179 euros en réparation des préjudices qu'il estime avoir subis, outre des conclusions au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n°1900698/2-2 du 9 juillet 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 6 septembre 2020, et un mémoire en réplique, enregistré le 3 juin 2021, M. A..., représenté par Me Lefort, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du 9 juillet 2020 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler la decision mentionnée ci-dessus du 13 novembre 2018 ;

3°) de condamner la chambre de commerce et d'industrie de région Paris Ile de France à lui verser les sommes de 50 000 euros en réparation du harcèlement moral subi, 80 000 euros en réparation du préjudice de carrière, de rémunération, de retraite et de formation, 50 000 euros en réparation du licenciement abusif subi, 11 072,64 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 1 107,26 euros au titre de l'indemnité compensatrice des congés payés afférents ;

4°) d'enjoindre au directeur général de la chambre de commerce et d'industrie de région Paris Ile de France de lui remettre une attestation Pôle Emploi, les bulletins de paie des mois de décembre 2018 à mars 2019 et un certificat de travail, dans un délai de quinze jours à compter de la date de notification de ce jugement, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

5°) de mettre à la charge de la chambre de commerce et d'industrie de région Paris Ile de France, au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative, la somme de 3 000 euros pour les frais irrépétibles de première instance et la somme de 1 800 euros pour les frais irrépétibles d'appel.

Il soutient que :

- la décision de licenciement litigieuse est entachée de défaut de motivation ;

- ladite décision est entachée de vice de procédure du fait du délai trop bref entre la date de réception du courrier de convocation à l'entretien préalable au licenciement et la date de cet entretien ;

- ladite décision est entachée de vice de procédure pour méconnaissance de l'article 33 du statut du personnel administratif des chambres de commerce et d'industrie ;

- ladite décision est entachée d'erreur manifeste d'appréciation car son inaptitude physique n'est que la résultante du harcèlement moral qu'il a subi ;

- ladite décision méconnaît l'article 34 bis du statut qui prévoit une obligation de recherche de reclassement ;

- ladite décision est entachée de détournement de pouvoir ;

- il est fondé à demander la condamnation de la chambre de commerce et d'industrie de région Paris Ile de France à lui verser les sommes de 50 000 euros en réparation du harcèlement moral subi, 80 000 euros en réparation du préjudice de carrière, de rémunération, de retraite et de formation, 50 000 euros en réparation du licenciement abusif subi, 11 072,64 euros à titre d'indemnité compensatrice de préavis, 1 107,26 euros au titre de l'indemnité compensatrice des congés payés afférents.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 11 mars 2021 et 16 juin 2021, la chambre de commerce et d'industrie de région Paris Ile de France, représentée par la SCP Rocheteau-Uzan-Sarano, conclut au rejet de la requête et demande, en outre, qu'une somme de 4 500 euros soit mise à la charge de M. A... au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- les conclusions indemnitaires sont irrecevables faute de liaison du contentieux ;

- les moyens soulevés par M. A... sont infondés.

Par une ordonnance du 24 août 2021, la clôture de l'instruction a été fixée au 9 septembre 2021 à 12 heures.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 52-1311 du 10 décembre 1952, ensemble le statut du personnel administratif des chambres de commerce et d'industrie ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pagès ;

- les conclusions de Mme Mach, rapporteure publique ;

- et les observations de Me Lefort pour M. A....

Considérant ce qui suit :

1. M. A... a été recruté par la chambre de commerce et d'industrie de Paris le

11 juin 2001 en qualité d'agent d'entretien contractuel au sein de l'établissement de prestations logistiques de la chambre de commerce et d'industrie de Paris, puis titularisé le 7 mars 2003.

M. A... a été affecté sur le site des Gobelins à compter du 9 avril 2004 puis, à compter du

4 janvier 2006, au sein de l'ESCP Europe, établissement d'enseignement rattaché à la chambre, en qualité d'employé principal en charge de la gestion des moyens logistiques. Placé en arrêt de travail à compter de mai 2018, M. A... a fait l'objet d'un licenciement pour inaptitude physique par décision du 13 novembre 2018. Il a saisi le Tribunal administratif de Paris d'une demande tendant à l'annulation de cette décision et à l'indemnisation des préjudices qu'il estime avoir subis en raison des conditions de son licenciement ainsi que du harcèlement moral et de l'absence d'évolution dans sa carrière dont il estime avoir été victime, outre des conclusions à fin d'injonction. Par un jugement du 9 juillet 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. M. A... relève appel de ce jugement.

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision du 13 novembre 2018 :

2. En premier lieu, aux termes de l'article L. 211-2 du code des relations entre le public et l'administration : " Les personnes physiques ou morales ont le droit d'être informées sans délai des motifs des décisions administratives individuelles défavorables qui les concernent. / A cet effet, doivent être motivées les décisions qui : (...) 4°Retirent ou abrogent une décision créatrice de droits (...) ". Aux termes de l'article L. 211-5 du même code : " La motivation exigée par la présente loi doit être écrite et comporter l'énoncé des considérations de droit et de fait qui constituent le fondement de la décision ". Aux termes de l'article L. 211-6 de ce code : " Les dispositions de la présente loi ne dérogent pas aux textes législatifs interdisant la divulgation ou la publication de faits couverts par le secret ".

3. La décision litigieuse, qui vise les articles 33 et 34 bis du statut du personnel administratif des chambres de commerce et d'industrie, mentionne également l'avis d'inaptitude physique rendu par le médecin du travail le 16 octobre 2018, dont elle reproduit une partie des termes et dont il n'est pas contesté que M.A... a été destinataire. Elle indique enfin qu'en l'absence de solution de reclassement en adéquation avec les compétences de ce dernier et les préconisations du médecin du travail, il a été décidé de prononcer le licenciement pour inaptitude physique de l'intéressé. Ainsi, cette décision comporte l'ensemble des considérations de droit et de fait qui en constituent le fondement et le moyen tiré de l'insuffisance de sa motivation ne peut qu'être écarté comme manquant en fait.

4. En deuxième lieu, les moyens tirés des vices de procédure du fait d'un délai insuffisant pour préparer sa défense et du fait de la méconnaissance des dispositions de l'article 33 du statut du personnel administratif des chambres de commerce et d'industrie doivent être écartés par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges respectivement au point 9 et aux points 10 et 11 du jugement attaqué.

5. En troisième lieu, M. A... soutient que son licenciement est entaché d'erreur d'appréciation car il n'est que la résultante du harcèlement moral qu'il a subi. Toutefois, d'une part, le moyen tiré du harcèlement moral doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges aux points 2 à 5 du jugement attaqué. D'autre part, et en tout état de cause, M. A... ne conteste pas l'inaptitude physique constatée par le médecin du travail. Le moyen tiré de l'erreur d'appréciation doit donc être écarté.

6. En quatrième lieu, d'une part, aux termes de l'article 34 bis du statut du personnel administratif des chambres de commerce et d'industrie : " Avant tout licenciement pour inaptitude physique, il sera recherché une adaptation possible du poste ou un reclassement éventuel ". D'autre part, il résulte d'un principe général du droit, dont s'inspirent tant les dispositions du code du travail relatives à la situation des salariés qui, pour des raisons médicales, ne peuvent plus occuper leur emploi que les règles statutaires applicables dans ce cas aux fonctionnaires, que, lorsqu'il a été médicalement constaté qu'un agent public se trouve, de manière définitive, atteint d'une inaptitude physique à occuper son emploi, il incombe à l'employeur public, avant de pouvoir prononcer son licenciement, de chercher à reclasser l'intéressé dans un autre emploi. La mise en œuvre de ce principe implique que, sauf si l'agent manifeste expressément sa volonté non équivoque de ne pas reprendre une activité professionnelle, l'employeur propose à ce dernier un emploi compatible avec son état de santé et aussi équivalent que possible avec l'emploi précédemment occupé ou, à défaut d'un tel emploi, tout autre emploi si l'intéressé l'accepte. Ce n'est que lorsque ce reclassement est impossible, soit qu'il n'existe aucun emploi vacant pouvant être proposé à l'intéressé, soit que l'intéressé est déclaré inapte à l'exercice de toutes fonctions ou soit que l'intéressé refuse la proposition d'emploi qui lui est faite, qu'il appartient à l'employeur de prononcer, dans les conditions applicables à l'intéressé, son licenciement.

7. En l'espèce, il ressort des termes mêmes de l'avis rendu le 16 octobre 2018 par le médecin du travail que celui-ci a estimé, d'une part, que M. A... était inapte au poste de technicien PAO et de responsable en reprographie, d'autre part, que " l'état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi ". Le médecin du travail a donc conclu à l'inaptitude de M. A... non seulement à l'exercice des fonctions qu'il occupait antérieurement, mais également à l'exercice de toute autre fonction. Dès lors, son reclassement pouvait être regardé comme impossible par la chambre de commerce et le moyen tiré de ce que cette dernière n'aurait pas satisfait à son obligation de recherche de reclassement doit donc être écarté.

8. En dernier lieu, ni la circonstance qu'avant le prononcé de la décision en litige, M. A... se soit plaint du harcèlement moral dont il estime avoir été victime, ni celle qu'il faisait alors l'objet d'une procédure disciplinaire, qui n'a été interrompue que du seul fait de son licenciement pour inaptitude physique, ne sauraient suffire à faire regarder ce licenciement comme ayant été dicté par un motif autre que celui de l'inaptitude physique de l'intéressé, dûment constatée par le médecin du travail et non contestée par le requérant. Le moyen tiré du détournement de pouvoir doit donc également être écarté et les conclusions à fin d'annulation rejetées.

Sur les conclusions indemnitaires :

9. Il résulte de ce qui a été dit aux points 2 à 8 que la décision de licenciement de

M. A... n'est pas illégale et qu'il n'a pas subi une situation de harcèlement moral. La chambre de commerce et d'industrie n'ayant commis aucune faute, les conclusions indemnitaires de

M. A... doivent également être rejetées sans qu'il soit besoin de statuer sur la fin de non-recevoir soulevée par cette dernière.

10. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction doivent également être rejetées ainsi que celles tendant à l'application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Enfin, dans les circonstances de l'espèce, il n'y a pas lieu de faire droit aux conclusions présentées au titre du même article par la chambre de commerce et d'industrie de région Paris- Ile de France.

DÉCIDE:

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions de la chambre de commerce et d'industrie de région Paris- Ile de France au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3: Le présent arrêt sera notifié à M. B... A... et à la chambre de commerce et d'industrie de région Paris- Ile de France.

Délibéré après l'audience du 21 septembre 2021 à laquelle siégeaient :

- M. Célérier, président de chambre,

- M. Niollet, président assesseur,

- M. Pagès, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 5 octobre 2021.

Le rapporteur,

D. PAGES

Le président,

T. CELERIER

La greffière,

Z. SAADAOUI

La République mande et ordonne au préfet de la région Ile-de-France, préfet de Paris, en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 20PA02580 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA02580
Date de la décision : 05/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: M. Dominique PAGES
Rapporteur public ?: Mme MACH
Avocat(s) : LEFORT

Origine de la décision
Date de l'import : 12/10/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-10-05;20pa02580 ?
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