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27/10/2021 | FRANCE | N°20PA02609

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 2ème chambre, 27 octobre 2021, 20PA02609


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

I - Par une requête enregistrée sous le n° 1819738, l'association Christian A... a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des cotisations d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie pour la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013.

II - Par une requête enregistrée sous le n° 1819740, l'association Christian A... a demandé au Tribunal administratif de Paris, à titre princip

al, de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des cotisation...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

I - Par une requête enregistrée sous le n° 1819738, l'association Christian A... a demandé au Tribunal administratif de Paris de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des cotisations d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujettie pour la période du 1er janvier 2012 au 31 décembre 2013.

II - Par une requête enregistrée sous le n° 1819740, l'association Christian A... a demandé au Tribunal administratif de Paris, à titre principal, de prononcer la décharge des rappels de taxe sur la valeur ajoutée et des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés auxquels elle a été assujetti pour la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2015 et, à titre subsidiaire, de fixer à 35 421 euros le total des sommes dues au titre des deux années en litige.

Par un jugement nos 1819738-1819740/1-2 du 23 juin 2020, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 8 septembre 2020, l'association Christian A..., représentée par Me Jean-Marc Descoubes, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement n°s 1819738/1-2 et 1819740/1-2 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) à titre principal, d'annuler les opérations de vérification dont l'association Christian A... a fait l'objet du 13 octobre 2016 au 9 mai 2017 ;

3°) à titre subsidiaire, d'annuler les décisions du 30 août 2018 par lesquelles l'administrateur général des finances publiques a rejeté ses réclamations préalables ;

4°) d'annuler les avis de mise en recouvrement émis à son encontre le 16 octobre 2017 par le comptable public pour le recouvrement, d'une part, de la somme de 43 628 euros, en droits et pénalités, au titre de la taxe sur la valeur ajoutée et de la somme de 31 373 euros, en droits et pénalités, au titre de l'impôt sur les sociétés mis à sa charge au titre des années 2012 et 2013 et, d'autre part, de la somme de 76 393 euros, en droits et pénalités, au titre de la taxe sur la valeur ajoutée et de la somme de 62 259, en droits et pénalités, au titre de l'impôt sur les sociétés mis à sa charge au titre des années 2014 et 2015 ;

5°) d'annuler la proposition de rectification du 30 mai 2017 ;

6°) de corriger la proposition de rectification du 23 mai 2017 ;

7°) de fixer à 35 421 euros le total des sommes dues au titre de la taxe sur la valeur ajoutée et de l'impôt sur les sociétés au titre des années 2014 et 2015 ;

8°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 5 000 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- la procédure d'imposition est entachée de nullité à défaut pour elle d'avoir été avisée des opérations de contrôle au titre des années 2012 et 2013 par un avis de vérification de comptabilité ;

- l'administration ne pouvait faire application du délai spécial de reprise prévu à l'article L. 188 C du livre des procédures fiscales dans la mesure où elle ne pouvait ignorer les omissions de déclaration et insuffisances d'impositions pour les années 2012 et 2013 ; elle ne pouvait, en effet, ignorer qu'elle proposait des stages payants à ses clients, qu'elle n'avait déposé aucune déclaration de TVA et d'impôt sur les sociétés au titre de ces deux années, sa constitution en 2006 ayant fait l'objet d'une publication au Journal officiel du 10 juin 2006 et son existence étant connue d'autres administrations ; en outre, les éléments recueillis par l'administration pour fonder les rappels de taxe sur les valeur ajoutée et les rectifications en matière d'impôt sur les sociétés ne l'ont pas été dans le cadre d'une instance devant un tribunal ; les années 2012 et 2013 sont donc prescrites ;

- les opérations de vérification de sa comptabilité au titre des années 2014 et 2015 se sont poursuivies au-delà du délai de trois mois prévu par les dispositions de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales, dès lors qu'elles se sont poursuivies jusqu'au 9 mai 2017 ;

- la méthode " Christian A... " qu'elle a mise en place pour soigner le bégaiement n'a aucun concurrent ; M. A... est en situation de monopole de fait ; les prix pratiqués sont, au regard du bénéfice que les stagiaires retirent, dérisoires ;

- les frais de publicité, qui sont soumis à la taxe sur la valeur ajoutée au titre des années 2014 et 2015 dès lors que les prestations de services par les opérateurs sont opérées sur le territoire français, sont susceptibles d'être admis en déduction ;

- le loyer du siège social, qui correspond au domicile de M. C... A..., doit être admis en déduction à hauteur de 50 % du loyer mensuel versé à la Régie immobilière de la Ville de Paris ; il en va de même des dépenses d'assurance du siège social ;

- les frais bancaires, qui sont soumis à la taxe sur la valeur ajoutée, doivent être admis en déduction au titre des années 2014 et 2015 ;

- les frais de réception et de représentation constituent des charges déductibles ; selon la doctrine administrative, la déduction des frais de voyage, de réception et de représentation des chefs d'entreprise ne doit pas être refusée systématiquement pour le seul motif que le montant de ces frais n'est pas justifié par la production de documents formant preuve certaine lorsque les sommes comptabilisées au titre de ces frais correspondent effectivement à des dépenses d'ordre professionnel et ne sont pas excessives eu égard à la nature et à l'importance de l'exploitation ainsi qu'à toutes autres circonstances propres à chaque cas particulier ; elle a remis à l'administration un tableau Excel consignant les dépenses engagées au titre des frais de réception et de représentation ;

- les frais de véhicule, dont elle est propriétaire, ainsi que les frais de stationnement, de carburant et d'entretien constituent des charges déductibles en application de la réponse ministérielle faite à M. B... le 2 avril 1978 ;

- les pénalités de 40 % pour mauvaise foi ne sont pas justifiées.

Par un mémoire en défense enregistré le 12 octobre 2020, le ministre de l'économie, des finances et de la relance conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués par l'association Christian A... ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 30 avril 2021, la clôture d'instruction a été fixée au 17 mai 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Bonneau-Mathelot,

- les conclusions de Mme Jimenez, rapporteure publique,

- et les observations de Me Descoubes, avocat de l'association Christian A....

Considérant ce qui suit :

1. L'association Christian A..., dont l'objet est la lutte contre le bégaiement, a demandé en vain au Tribunal administratif de Paris la décharge, en droits et pénalités, des rappels de taxe sur la valeur ajoutée (TVA) et des cotisations d'impôt sur les sociétés mis à sa charge, à l'issue d'un contrôle sur pièces qui a porté sur les années 2012 et 2013, ainsi qu'à titre principal, la décharge des rappels de TVA et des cotisations supplémentaires d'impôt sur les sociétés mis à sa charge, à l'issue d'une vérification de comptabilité qui a porté sur les années 2014 et 2015 et, à titre subsidiaire, de fixer à 35 421 euros le total des sommes dues au titre de ces deux années. Par la présente requête, elle relève appel du jugement n°s 1819738/1-2 et 1819740/1-2 par lequel ce tribunal a rejeté ses demandes et doit être regardée comme demandant, à titre principal, la décharge, en droits et pénalités, des impositions contestées devant ce tribunal et, à titre subsidiaire, la réduction des impositions mises à sa charge au titre des années 2014 et 2015.

Sur la régularité de la procédure d'imposition :

S'agissant des années 2012 et 2013 :

2. Aux termes de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales : " Un examen contradictoire de la situation fiscale personnelle d'une personne physique au regard de l'impôt sur le revenu, une vérification de comptabilité ou un examen de comptabilité ne peut être engagé sans que le contribuable en ait été informé par l'envoi ou la remise d'un avis de vérification ou par l'envoi d'un avis d'examen de comptabilité. / (...) ". Il résulte de ces dispositions que l'administration procède à la vérification de comptabilité d'une entreprise lorsqu'en vue d'assurer l'établissement d'impôts ou de taxes totalement ou partiellement éludés par les intéressés, elle contrôle sur place la sincérité des déclarations fiscales souscrites par cette entreprise en les comparant avec les écritures comptables ou les pièces justificatives dont elle prend alors connaissance. En revanche, ne constitue pas une vérification de comptabilité le contrôle sur pièces par le service, dans ses propres locaux, des déclarations ou de l'absence de déclarations à l'impôt sur les sociétés d'un contribuable, à l'aide d'éléments en possession de l'administration

3. Il résulte de la proposition de rectification du 30 mai 2017 que l'association Christian A... a fait l'objet d'un contrôle sur pièces au titre des années 2012 et 2013, à partir des documents que l'administration a obtenus dans le cadre de l'exercice de son droit de communication auprès du procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Paris le 30 novembre 2016, et non d'une vérification de comptabilité. Il suit de là que l'administration, qui n'a procédé à aucun contrôle sur place des documents comptables, n'était pas tenue d'adresser à l'association, préalablement à ce contrôle sur pièces, un avis de vérification en application des dispositions précitées de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales. L'association Christian A... ne peut donc utilement se prévaloir du non-respect des garanties du contribuable liées à la mise en œuvre d'une vérification de comptabilité prévues par cet article. Dans ces conditions, le moyen tiré de ce que la procédure d'imposition serait pour ce motif entachée d'irrégularité ne peut qu'être écarté.

S'agissant des années 2014 et 2015 :

4. Aux termes de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales : " I. - Sous peine de nullité de l'imposition, la vérification sur place des livres ou documents comptables ne peut s'étendre sur une durée supérieure à trois mois en ce qui concerne : / 1° Les entreprises industrielles et commerciales ou les contribuables se livrant à une activité non commerciale dont le chiffre d'affaires ou le montant annuel des recettes brutes n'excède pas les limites prévues au I de l'article 302 septies A du code général des impôts ; / (...) ".

5. Ces dispositions, qui ont notamment pour objet d'alléger les contraintes que fait peser le contrôle fiscal sur la gestion des petites et moyennes entreprises, définissent, au bénéfice des contribuables qu'elles mentionnent, une garantie qui s'oppose à ce que le vérificateur poursuive, au-delà de trois mois à compter du début du contrôle, la vérification des livres ou documents comptables au sein de l'entreprise vérifiée ou, lorsqu'ils ont été apportés par le contribuable ou ont été emportés par le vérificateur avec l'accord du contribuable, dans les locaux de l'administration.

6. Il résulte de la proposition de rectification du 23 mai 2017 que la vérification de comptabilité dont a fait l'objet l'association Christian A... au titre des années 2014 et 2015 a débuté le 13 octobre 2016 par une première intervention sur place du vérificateur, l'association ayant sollicité le report de cette intervention initialement prévue au 10 octobre 2016, en vue de l'examen au fond des " déclarations fiscales et opérations susceptibles d'être examinées pendant la période du 1er janvier 2014 au 31 décembre 2015 ". Après la dernière intervention ayant eu le même objet, et qui a eu lieu le 11 janvier 2017, le vérificateur a proposé à l'association, par courrier du 27 mars 2017, de la rencontrer dans les locaux de la direction spécialisée du contrôle fiscal - Ile-de-France, le 9 mai 2017, afin de lui exposer le contenu de la proposition de rectification qu'il envisageait de lui adresser. En se bornant à soutenir que " des documents produits [...] ont été examinés " le 9 mai 2017, sans préciser davantage son argumentation ni apporter d'élément de nature à la corroborer, l'association Christian A... ne conteste pas sérieusement que la rencontre du 9 mai 2017 dans les locaux de l'administration, lors de laquelle lui a été expliquée la teneur de la proposition de rectification, n'a pas donné lieu à l'examen de ses documents comptables. Il suit de là que le délai de trois mois prévu entre la première et la dernière intervention sur place, prescrit par les dispositions précitées de l'article L. 52 du livre des procédures fiscales, a été respecté. L'association Christian A... n'est donc pas fondée à soutenir que la procédure d'imposition serait pour ce motif entachée d'irrégularité.

Sur le bien-fondé des impositions :

En ce qui concerne l'assujettissement de l'association Christian A... à la taxe sur la valeur ajoutée et à l'impôt sur les sociétés :

7. Aux termes de l'article 206 du code général des impôts : " 1. Sous réserve des dispositions des articles 8 ter, 239 bis AA, 239 bis AB et 1655 ter, sont passibles de l'impôt sur les sociétés, quel que soit leur objet, les sociétés anonymes, les sociétés en commandite par actions, les sociétés à responsabilité limitée n'ayant pas opté pour le régime fiscal des sociétés de personnes dans les conditions prévues au IV de l'article 3 du décret n° 55-594 du 20 mai 1955 modifié, les sociétés coopératives et leurs unions ainsi que, sous réserve des dispositions des 6° et 6° bis du 1 de l'article 207, les établissements publics, les organismes de l'Etat jouissant de l'autonomie financière, les organismes des départements et des communes et toutes autres personnes morales se livrant à une exploitation ou à des opérations de caractère lucratif. / (...) ". Aux termes de l'article 207 du même code : " 1. Sont exonérés de l'impôt sur les sociétés : / (...). / 5° bis. Les organismes sans but lucratif mentionnés au 1° du 7 de l'article 261, pour les opérations à raison desquelles ils sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée ; / (...) ". Aux termes de l'article 261 dudit code : " Sont exonérés de la taxe sur la valeur ajoutée : / (...). / 7. (Organismes d'utilité générale) : / 1° a. les services de caractère social, éducatif, culturel ou sportif rendus à leurs membres par les organismes légalement constitués agissant sans but lucratif, et dont la gestion est désintéressée. / (...) ".

8. Il résulte de l'instruction, ainsi que l'a relevé le tribunal, que le service vérificateur a constaté que la gestion de l'association Christian A... n'était pas désintéressée, qu'elle exerçait son activité en concurrence avec des entreprises du secteur lucratif et dans des conditions similaires à celles des entreprises commerciales et a estimé que cette activité devait dès lors être soumise à l'impôt sur les sociétés et à la taxe sur la valeur ajoutée. L'association, qui ne conteste pas le caractère intéressé de sa gestion, soutient que ses prix ne sont pas plus élevés que ceux de la concurrence et qu'elle se trouve dans une situation de monopole de fait, étant la seule à avoir développé la méthode qu'elle pratique pour soigner le bégaiement. Toutefois, elle ne produit aucune pièce à l'appui de cette affirmation. En tout état de cause, ces circonstances, à les supposer établies, sont sans incidence sur le présent litige dès lors qu'elles ne sauraient remettre en cause le caractère lucratif de l'activité de l'association.

En ce qui concerne la prescription :

9. Aux termes de l'article L. 169 du livre des procédures fiscales : " Pour l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, le droit de reprise de l'administration des impôts s'exerce jusqu'à la fin de la troisième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due. / (...) ". Aux termes de l'article L. 188 C du même livre : " Même si les délais de reprise sont écoulés, les omissions ou insuffisances d'imposition révélées par une procédure judiciaire, par une procédure devant les juridictions administratives ou par une réclamation contentieuse peuvent être réparées par l'administration des impôts jusqu'à la fin de l'année suivant celle de la décision qui a clos la procédure et, au plus tard, jusqu'à la fin de la dixième année qui suit celle au titre de laquelle l'imposition est due ". Des insuffisances ou omissions d'imposition ne peuvent pas être regardées comme révélées par une procédure judiciaire au sens de ce dernier article lorsque l'administration dispose d'éléments suffisants lui permettant, par la mise en œuvre des procédures d'investigations dont elle dispose, d'établir ces insuffisances ou omissions d'imposition dans le délai normal de reprise prévu à l'article L. 169 du livre des procédures fiscales. Il en va également ainsi lorsque, à la date à laquelle l'administration dispose de ces informations, le délai prévu à l'article L. 169 du livre des procédures fiscales est expiré et qu'elle n'est plus en mesure, sur ce seul fondement, de réparer les insuffisances et omissions d'imposition. La circonstance que ces informations seraient ultérieurement mentionnées dans une procédure judiciaire n'ouvre pas à l'administration le droit de se prévaloir de l'article L. 188 C du livre des procédures fiscales dès lors qu'en pareille hypothèse, ces informations ne peuvent être regardées comme ayant été révélées par cette procédure.

10. Il résulte de la proposition de rectification du 30 mai 2017 que l'administration a exercé son droit de communication auprès du procureur de la République près le Tribunal de grande instance de Paris le 30 novembre 2016 et a été autorisée à consulter, le 18 janvier 2017, le dossier judiciaire référencé P 15 166 005 94 concernant l'information judiciaire ouverte auprès de ce tribunal et confiée à un juge d'instruction à la suite du dépôt de plainte en mars 2015 de la Fédération nationale des orthophonistes à l'encontre de M. A... pour exercice illégal de la profession d'orthophoniste. C'est à cette occasion que l'administration a découvert que l'association Christian A... exerçait une activité lucrative au titre des années 2012 et 2013 qui aurait dû donner lieu à déclaration.

11. D'une part, l'association Christian A... soutient que l'administration ne pouvait faire application du délai spécial de reprise prévu à l'article L. 188 C du livre des procédures fiscales dans la mesure où elle ne pouvait ignorer les omissions de déclaration et insuffisances d'impositions pour les années 2012 et 2013 alors qu'elle proposait des stages payants à ses clients, qu'elle n'avait déposé aucune déclaration de TVA et d'impôt sur les sociétés au titre de ces deux années, que sa constitution en 2006 avait fait l'objet d'une publication au Journal officiel du 10 juin 2006 et que son existence était connue d'autres administrations. Toutefois, la circonstance que l'association ait été déclarée en 2006 ne constituait pas, à lui seul, un indice suffisant de nature à faire soupçonner l'exercice d'une activité lucrative. Il ne résulte, par ailleurs, pas de l'instruction que l'administration disposait, avant l'exercice de son droit de communication, d'éléments permettant d'établir que l'association Christian A..., qui ne s'était pas déclarée auprès d'un centre de formalités des entreprises, n'avait souscrit aucune déclaration annuelle de résultat et sur laquelle elle n'exerçait aucun contrôle, exerçait une telle activité et que M. A... en retirait ses seuls revenus. L'association Christian A... n'est dès lors pas fondée à soutenir que les conditions tendant à l'application de l'article L. 188 C du livre des procédures fiscales n'étaient pas remplies, les dispositions de cet article s'appliquant aux procédures judiciaires, y compris lorsqu'elles sont en cours d'instruction.

En ce qui concerne la taxe sur la valeur ajoutée déductible :

12. Aux termes de l'article 271 du code général des impôts : " I. 1. La taxe sur la valeur ajoutée qui a grevé les éléments du prix d'une opération imposable est déductible de la taxe sur la valeur ajoutée applicable à cette opération. / 2. Le droit à déduction prend naissance lorsque la taxe déductible devient exigible chez le redevable. / (...). / II. 1. Dans la mesure où les biens et les services sont utilisés pour les besoins de leurs opérations imposables, et à la condition que ces opérations ouvrent droit à déduction, la taxe dont les redevables peuvent opérer la déduction est, selon le cas : a) Celle qui figure sur les factures établies conformément aux dispositions de l'article 289 et si la taxe pouvait légalement figurer sur lesdites factures ; / (...) ".

13. L'association Christian A... soutient être fondée à demander la déduction de la TVA ayant grevé ses dépenses de publicité ainsi que ses frais bancaires au titre des années 2014 et 2015 en litige. Toutefois, il résulte de l'instruction, ainsi que le relève l'administration sans être sérieusement contredite, qu'aucun montant de TVA n'a été porté sur les factures correspondantes. Dans ces circonstances, l'association n'est pas fondée à solliciter une déduction de TVA au titre de ces dépenses.

En ce qui concerne les charges déductibles :

14. Aux termes de l'article 39 du code général des impôts : " 1. Le bénéfice net est établi sous déduction de toutes charges, celles-ci comprenant, sous réserve des dispositions du 5, notamment : /1° Les frais généraux de toute nature, les dépenses de personnel et de main-d'œuvre, le loyer des immeubles dont l'entreprise est locataire. / (...). /5. Sont également déductibles les dépenses suivantes : / (...) ; / b. Les frais de voyage et de déplacements exposés par ces personnes ; / c. Les dépenses et charges afférentes aux véhicules et autres biens dont elles peuvent disposer en dehors des locaux professionnels ; / (...) ; / f. Les frais de réception, y compris les frais de restaurant et de spectacles. / (...). / Les dépenses ci-dessus énumérées peuvent également être réintégrées dans les bénéfices imposables dans la mesure où elles sont excessives et où la preuve n'a pas été apportée qu'elles ont été engagées dans l'intérêt direct de l'entreprise. / (...) ". Si, en vertu des règles gouvernant l'attribution de la charge de la preuve devant le juge administratif, applicables sauf loi contraire, il incombe, en principe, à chaque partie d'établir les faits qu'elle invoque au soutien de ses prétentions, les éléments de preuve qu'une partie est seule en mesure de détenir ne sauraient être réclamés qu'à celle-ci. Il appartient, dès lors, au contribuable, pour l'application des dispositions précitées du code général des impôts, de justifier tant du montant des charges qu'il entend déduire du bénéfice net défini à l'article 38 du code général des impôts que de la correction de leur inscription en comptabilité, c'est-à-dire du principe même de leur déductibilité. Le contribuable apporte cette justification par la production de tous éléments suffisamment précis portant sur la nature de la charge en cause, ainsi que sur l'existence et la valeur de la contrepartie qu'il en a retirée. Dans l'hypothèse où le contribuable s'acquitte de cette obligation, il incombe ensuite au service, s'il s'y croit fondé, d'apporter la preuve de ce que la charge en cause n'est pas déductible par nature, qu'elle est dépourvue de contrepartie, qu'elle a une contrepartie dépourvue d'intérêt pour le contribuable ou que la rémunération de cette contrepartie est excessive.

15. L'association Christian A... soutient que le loyer de l'appartement au sein duquel elle a fixé son siège social est déductible à hauteur de 50 % du loyer mensuel versé à la Régie immobilière de la Ville de Paris. L'administration fait, toutefois, valoir que si le siège social de l'association a bien été fixé au domicile de M. et Mme A..., il ne comporte aucun espace dédié à son activité, le site Internet de l'association étant, au demeurant, géré depuis l'ordinateur personnel de M. A... et les rendez-vous pris par ce dernier se déroulant tous à l'extérieur de son domicile. Si l'association requérante allègue que " toute l'organisation administrative de l'association (...) se fait depuis le siège social " et qu'elle dispose " d'un bureau dédié, avec un ordinateur, une imprimante et des armoires de classement des archives, documents publicitaires et administratifs de l'association ", elle ne produit aucun élément en appel, pas plus qu'elle ne l'avait fait en première instance, à l'appui de cette argumentation. La déduction des frais d'assurance du siège social ne peut, pour les mêmes motifs, qu'être écartée.

16. L'association requérante soutient que les frais de réception et de représentation, pour lesquels elle a remis à l'administration un tableau Excel consignant l'ensemble de ces dépenses, doivent être admises en déduction dès lors qu'elle est en représentation permanente auprès des institutions. Toutefois, elle ne produit pas ce tableau, ni d'ailleurs de pièces justificatives qui établiraient non seulement l'existence et la nature des dépenses engagées mais également qu'elles auraient été exposées dans l'intérêt de l'association. Et elle n'invoque pas utilement la doctrine administrative BOI-BIC-CHG-10-20-20-20140519 §50 selon laquelle " La déduction des frais de voyage, de réception et de représentation des chefs d'entreprise ne doit pas être refusée systématiquement pour le seul motif que le montant de ces frais n'est pas justifié par la production de documents formant preuve certaine lorsque les sommes comptabilisées au titre de ces frais correspondent effectivement à des dépenses d'ordre professionnel et ne sont pas excessives eu égard à la nature et à l'importance de l'exploitation ainsi qu'à toutes autres circonstances propres à chaque cas particulier ", faute pour elle d'entrer dans les prévisions de cette doctrine dès lors qu'en tout état de cause les dépenses dont elle demande la déduction n'ont pas été comptabilisées par elle en l'absence de toute déclaration.

17. Enfin l'association Christian A... demande que les frais de stationnement, de carburant et d'entretien liés au véhicule dont elle soutient avoir fait l'acquisition et qui est utilisé par M. A... pour les besoins de son fonctionnement, pour effectuer les trajets entre son siège social et le lieu où se déroulent les stages et se rendre à diverses manifestations en lien avec le thème du handicap, soient admis en déduction. S'il résulte de l'instruction, et ce n'est pas contesté, que dans le cadre du recours hiérarchique, l'administration a, par souci de réalisme économique, retenu, sur la base du barème kilométrique, les trajets entre le domicile de M. A... et le lieu où se déroulent les stages, l'association ne produit aucun élément de nature à justifier la réalité du surplus des frais engagés ainsi que leur caractère professionnel. L'association ne peut, en outre, utilement se prévaloir, sur le fondement de l'article L. 80 A du livre des procédures fiscales, de la réponse ministérielle à M. B... du 2 avril 1978 qui, en se bornant à recommander à l'administration de ne pas exclure systématiquement les dépenses de stationnement qui ne peuvent être justifiées par des documents formant preuve certaine, ne comporte aucune interprétation formelle de la loi fiscale. Pour les mêmes motifs, l'association Christian A... n'est pas fondée à soutenir que les frais d'assurance du véhicule dont elle soutient être propriétaire, sans d'ailleurs l'établir, et dont elle ne justifie pas dans le cadre de la présente instance, devraient être déduits de son résultat au titre des deux années en litige.

Sur les pénalités :

18. Aux termes de l'article 1728 du code général des impôts : " 1. Le défaut de production dans les délais prescrits d'une déclaration ou d'un acte comportant l'indication d'éléments à retenir pour l'assiette ou la liquidation de l'impôt entraîne l'application, sur le montant des droits mis à la charge du contribuable ou résultant de la déclaration ou de l'acte déposé tardivement, d'une majoration de : / (...) ; b. 40 % lorsque la déclaration ou l'acte n'a pas été déposé dans les trente jours suivant la réception d'une mise en demeure, notifiée par pli recommandé, d'avoir à le produire dans ce délai ; / (...) ".

19. Il résulte de l'instruction que les impositions en litige au titre des années 2014 et 2015 ont été soumis à la seule pénalité de 40 % prévue par les dispositions précitées du b. du 1. de l'article 1728 du code général des impôts, à défaut pour l'association d'avoir déposé ses déclarations de taxe sur la valeur ajoutée et de résultat dans les trente jours suivant la réception des mises en demeure qui lui ont été adressées. L'association requérante n'invoque dès lors pas utilement sa bonne foi, laquelle serait, en tout état de cause, sans incidence sur l'application des dispositions précitées.

20. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin d'examiner la recevabilité de la requête, que l'association Christian A... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté ses demandes. Il y a lieu, par voie de conséquence, de rejeter sa requête d'appel en toutes ses conclusions, y compris celles tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DECIDE :

Article 1er : La requête de l'association Christian A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à l'association Christian A... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée au chef des services fiscaux chargé de la direction de contrôle fiscal d'Ile-de-France.

Délibéré après l'audience du 13 octobre 2021, à laquelle siégeaient :

- Mme Brotons, président de chambre,

- M. Platillero, président-assesseur,

- Mme Bonneau-Mathelot, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 27 octobre 2021.

Le rapporteur,

S. BONNEAU-MATHELOTLe président,

I. BROTONS

Le greffier,

I. BEDR

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

6

N° 20PA02609


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 2ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA02609
Date de la décision : 27/10/2021
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : Mme BROTONS
Rapporteur ?: Mme Sonia BONNEAU-MATHELOT
Rapporteur public ?: Mme JIMENEZ
Avocat(s) : DESCOUBES

Origine de la décision
Date de l'import : 02/11/2021
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2021-10-27;20pa02609 ?
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