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28/01/2022 | FRANCE | N°21PA04316

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 9ème chambre, 28 janvier 2022, 21PA04316


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... ont demandé au tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010, 2011 et 2012.

Par un jugement n° 1600144 du 28 septembre 2018, le tribunal administratif de Melun a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 18PA03566 du 20 décembre 2019, la cour administrative d'appel de Paris a prononcé un non-lieu à statuer à hauteur du dégrèv

ement intervenu en cours d'instance, a déchargé M. et Mme C..., en droits et pénalités, pour ...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. et Mme C... ont demandé au tribunal administratif de Melun de prononcer la décharge, en droits et pénalités, des cotisations supplémentaires d'impôt sur le revenu auxquelles ils ont été assujettis au titre des années 2010, 2011 et 2012.

Par un jugement n° 1600144 du 28 septembre 2018, le tribunal administratif de Melun a rejeté cette demande.

Par un arrêt n° 18PA03566 du 20 décembre 2019, la cour administrative d'appel de Paris a prononcé un non-lieu à statuer à hauteur du dégrèvement intervenu en cours d'instance, a déchargé M. et Mme C..., en droits et pénalités, pour un montant de 7 300 euros, de l'impôt sur le revenu qui leur a été assigné au titre de l'année 2011, a réformé le jugement du tribunal administratif de Melun en tant qu'il était contraire à son arrêt et a rejeté le surplus des conclusions de

M. et Mme C....

Par une décision n° 438745 du 15 juillet 2021, le Conseil d'Etat, statuant au contentieux, a, saisi d'un pourvoi présenté par le ministre de l'action et des comptes publics, annulé l'arrêt de la Cour du 20 décembre 2019 en tant qu'il a déchargé M. et Mme C... A... la somme de 7 300 euros au titre de l'impôt sur le revenu des contribuables de l'année 2011 au motif que le bénéfice industriel et commercial de cette année avait fait l'objet d'une double imposition, et renvoyé l'affaire, dans cette mesure à la Cour.

Procédure devant la Cour après renvoi du Conseil d'Etat :

Avant cassation :

Par une requête et des mémoires enregistrés les 14 novembre 2018, 12 février 2019,

11 avril 2019, 5 juin et 13 juin 2019, M. et Mme C... représentés par Me Guillot et

Me Bourasset, avocats, demandent à la Cour :

1°) d'annuler le jugement du tribunal administratif de Melun du 28 septembre 2018 ;

2°) de prononcer la décharge des impositions litigieuses ;

3°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 893 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- l'administration supporte la charge de la preuve, les factures ayant été produites et la communauté d'intérêts entre le bénéficiaire et le prestataire ne permettant pas de renverser cette charge ;

- la société CJ Tex a confié par contrat à la société CB Tex les fonctions achats de l'entreprise ;

- les prestations relatives aux achats, aux stocks ainsi que les prestations administratives et financières sont effectivement réalisées par la société CB Tex et ne font pas double emploi avec le travail effectué par les salariés de la société CJ Tex ;

- le schéma adopté était rentable ;

- les contrôles antérieurs n'ont donné lieu à aucune remise en cause des factures de la société CJ Tex ;

- l'administration admet implicitement qu'une partie au moins des prestations était assurée par la société CB Tex ;

- à titre subsidiaire, s'il était retenu que la société CB Tex n'avait pas d'activité industrielle, commerciale ou artisanale, il conviendrait d'imposer les sommes en cause au titre de l'impôt sur les sociétés, la société CB TEX ne remplissant alors plus les conditions des articles 8 et 239 bis AA du code général des impôts ;

- il appartenait au service de tirer les conséquences de ses propres constatations ;

- l'imposition mise en recouvrement le 30 avril 2015 n'a pas été imputée sur l'imposition mise en recouvrement le 31 mai 2015 et les cotisations retraites étant déductibles du revenu catégoriel, il y a lieu de prononcer le dégrèvement total des impositions mises à leur charge au titre de l'année 2011 à hauteur des suppléments mis en recouvrement le 30 avril ;

- la contestation du rehaussement relatif aux cotisations retraites est recevable ;

- l'application de la majoration pour manquement délibéré est insuffisamment motivée ;

- l'administration n'apporte pas la preuve de l'intention de M. et Mme C... d'éluder l'impôt.

Par des mémoires en défense, enregistrés les 18 janvier, 4 avril, 24 mai et 17 juin 2019, le ministre de l'action et des comptes publics conclut au rejet de la requête.

Il fait valoir que :

- la contestation relative aux cotisations retraite est irrecevable ;

- les moyens soulevés par M.et Mme C... ne sont pas fondés.

Après cassation :

Par des mémoires, enregistrés le 23 août et 9 novembre 2021, le ministre chargé des comptes publics conclut au rejet de la requête de M. et Mme C....

Il fait valoir que l'absence de double imposition au titre de l'année 2011 doit être confirmée par la Cour.

Par un mémoire, enregistré le 5 octobre 2021, M. et Mme C..., représentés par Me Guillot et Me Bourasset, avocats, demandent à la Cour :

1°) de prononcer, à titre principal, la décharge ou, à titre subsidiaire la réduction des impositions litigieuses ;

2°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 2 893 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- le revenu imposable de l'année 2011 dans la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux doit être limité à 14 769 euros, montant fixé par la proposition de rectification du 10 décembre 2014 ;

- l'imposition mise en recouvrement le 30 avril 2015 doit nécessairement être imputée sur l'imposition définitive mise en recouvrement le 31 mai 2015, sauf à créer une double imposition ;

- la compensation doit s'appliquer à hauteur de l'imposition correspondant à la déduction des versements d'épargne retraite s'élevant à 12094 euros ;

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de général des impôts et le livre des procédures fiscales ;

- le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Boizot,

- et les conclusions de M. Sibilli, rapporteur public.

Considérant ce qui suit :

1. M. et Mme C... se sont vu notifier deux séries de redressements, d'une part, le 13 décembre 2013, par la direction spécialisée du contrôle fiscal d'Ile-de-France qui a tiré les conséquences du contrôle de la société CB Tex, société ayant opté pour le régime des sociétés de personnes dont M. C... est gérant et associé à hauteur de 50 % des parts, en imposant entre ses mains, notamment au titre de l'année 2011, des bénéfices industriels et commerciaux initialement exonérés au titre du régime de faveur de l'article 44 octies du code général des impôts, objet d'un avis d'imposition supplémentaire émis le 31 mai 2015 (n° 50106), et, d'autre part, le 10 décembre 2014, par la direction départementale des finances publiques du Val-de-Marne qui, à la suite d'un contrôle sur pièces, a inclus dans la base d'imposition des requérants la somme de 14 769 euros, initialement déclarée mais non imposée par suite d'une erreur du service, au titre de leurs bénéfices industriels et commerciaux de l'année 2011, et a porté de 60 572 à 197 972 euros, par avis d'imposition du 30 avril 2015, le montant de leurs revenus de capitaux mobiliers, à raison de revenus réputés par la société CJ Tex, autre société dont M. C... est gérant et associé à hauteur de 50 % des parts. Ils ont contesté ces impositions supplémentaires devant le tribunal administratif de Melun qui a rejeté leur demande. Par un arrêt du 20 décembre 2019, la cour administrative d'appel de Paris a déchargé M. et Mme C..., en droits et pénalités, pour un montant de 7 300 euros, de l'impôt sur le revenu qui leur a été assigné au titre de l'année 2011, à raison d'une double imposition résultant de la non-prise en compte, par l'avis d'imposition du 30 mai 2015, des bénéfices industriels et commerciaux initialement imposés à raison de la base d'imposition mentionnée de 14 769 euros, et a rejeté le surplus de la demande. Par une décision n° 438745 du 15 juillet 2021, le Conseil d'Etat a, sur pourvoi du ministre de l'action et des comptes publics, annulé l'arrêt du 20 décembre 2019 en tant qu'il a déchargé M. et Mme C..., en droits et pénalités, pour un montant de 7 300 euros, de l'impôt sur le revenu qui leur a été assigné au titre de l'année 2011, et renvoyé l'affaire devant la Cour.

En ce qui concerne la remise en cause par l'administration fiscale de l'exonération prévue par les dispositions de l'article 44 octies du code général des impôts :

2. Par l'arrêt précité du 20 décembre 2019, la Cour a, d'une part, retenu l'existence d'une double imposition concernant les bénéfices industriels et commerciaux initialement déclarés par M. C... et le redressement résultant de la proposition de rectification du 13 décembre 2013 mentionnée au point 1 du présent arrêt, et, d'autre part, rejeté le surplus des conclusions des requérants concernant notamment la remise en cause par l'administration fiscale de l'exone´ration pre´vue par les dispositions pre´cite´es de l'article 44 octies du code ge´ne´ral des impo^ts, en considérant que les prestations qui e´taient facture´es par la socie´te´ CB Tex n'avaient pas e´te´ effectivement re´alise´es par cette dernière et qu'elles ne reve^taient pas, par suite, un caracte`re d'activité industrielle et commerciale susceptible d'ouvrir droit au régime de faveur en cause. Cet arrêt est devenu définitif sur ce point, dès lors que le Conseil d'Etat, saisi d'un pourvoi du ministre, n'a renvoyé l'affaire à la cour administrative d'appel de Paris, par sa décision du 15 juillet 2021, que dans la mesure où

celle-ci, dans son arrêt du 20 décembre 2019, avait considéré que M. et Mme C... avaient fait l'objet d'une double imposition suite à la détermination définitive de leur revenu imposable au titre de l'année 2011 en conséquence de la proposition de rectification adressée le 13 décembre 2013 par la direction de contrôle fiscal d'Ile-de-France, l'avis d'imposition du 31 mai 2015 ne prenant pas en compte l'imposition supplémentaire mise en recouvrement le 30 avril 2015 à la suite du contrôle sur pièces fiscal effectué par la direction départementale des finances publiques du Val-de-Marne, et avait déchargé en conséquence M. et Mme C..., en droits et pénalités, pour un montant de 7 300 euros, de l'impôt sur le revenu qui leur avait été assigné au titre de l'année 2011. En outre, M. et Mme C... n'ont introduit, devant le Conseil d'Etat, aucun pourvoi incident relatif au surplus du dispositif de l'arrêt de la Cour du 20 décembre 2019. Dès lors, la Cour, qui a épuisé sa compétence à cet égard, ne saurait faire droit à une nouvelle demande de décharge desdites impositions présentées par M. et Mme C... dans leur mémoire enregistré le 5 octobre 2021.

En ce qui la double imposition au titre de l'année 2011 :

3. Dans un mémoire enregistré le 12 février 2019, M. et Mme C... ont fait valoir, d'une part, que les compléments d'imposition à l'impo^t sur le revenu mis en recouvrement au titre de l'anne´e 2011 les 30 avril et 31 mai 2015 incluaient les be´ne´fices industriels et commerciaux d'un montant de 14 769 euros de´clare´s initialement mais non pris en compte pour le calcul de l'impo^t sur les revenus 2011, de sorte que ce montant se trouvait impose´ deux fois et qu'il convenait de re´duire à due concurrence les compléments d'imposition mis en recouvrement le 31 mai 2015. Par décision du 4 avril 2019, postérieure à l'introduction de la requête, le directeur régional des finances publiques d'Ile-de-France et du département de Paris a prononcé le dégrèvement, en droits et pénalités, à concurrence d'une somme de 7 703 euros, de l'impôt sur le revenu auquel

M. et Mme C... ont été assujettis au titre de l'année 2011.

4. D'autre part, M. et Mme C... se prévalent de ce que l'avis d'imposition du 31 mai 2015 ne prendrait pas en compte les impositions mentionnées dans l'avis d'imposition du 30 avril 2015. S'il résulte effectivement de l'instruction que le montant mis en recouvrement le 31 mai 2015, en conséquence de la proposition de rectification adressée aux contribuables le 12 décembre 2013 par la direction de contrôle fiscal d'Ile-de-France Est, est calculé déduction faite des cotisations primitives d'impôt sur le revenu établies pour la même année et mises en recouvrement le 31 juillet 2012, et ne prend pas en compte l'imposition supplémentaire mise en recouvrement le 30 avril 2015, à la suite d'un contrôle fiscal effectué par la brigade patrimoniale de la direction départementale des finances publiques du Val-de-Marne et ayant donné lieu à une proposition de rectification établie le 10 décembre 2014, cet avis d'imposition ne détermine pas de manière définitive le revenu imposable pour l'année 2011 des requérants mais prend seulement en considération les rappels mis en recouvrement suite aux rectifications notifiées par la direction de contrôle fiscal d'Ile-de-France. A cet égard, il ressort de l'avis d'imposition émis le 31 mai 2015 que celui-ci reprend, s'agissant des revenus de capitaux mobiliers, la somme initialement déclarée de 60 572 euros, portée à 197 972 euros par l'avis d'imposition du 30 avril 2015. En conséquence, aucune double imposition ne résultant de l'avis d'imposition du 31 mai 2015, c'est à juste titre que l'administration fiscale a seulement déduit de l'impôt ainsi établi les cotisations primitives.

En ce qui concerne la compensation :

5. Aux termes de l'article L. 203 du livre des procédures fiscales : " Lorsqu'un contribuable demande la décharge ou la réduction d'une imposition quelconque, l'administration peut, à tout moment de la procédure et malgré l'expiration des délais de prescription, effectuer ou demander la compensation dans la limite de l'imposition contestée, entre les dégrèvements reconnus justifiés et les insuffisances ou omissions de toute nature constatées dans l'assiette ou le calcul de l'imposition au cours de l'instruction de la demande ". Aux termes de l'article L. 205 du même livre : " Les compensations de droits prévues aux articles L. 203 et L. 204 sont opérées dans les mêmes conditions au profit du contribuable à l'encontre duquel l'administration effectue une rectification lorsque ce contribuable invoque une surtaxe commise à son préjudice ou lorsque la rectification fait apparaître une double imposition. ". Il revient au contribuable d'apporter, à l'appui de sa demande de compensation, la justification de l'existence d'une double imposition.

6. Il résulte de l'instruction que si, par la proposition de rectification du 10 décembre 2014 mentionnée, l'administration a notamment remis en cause la déduction du revenu global de versements d'épargne-retraite à hauteur de 12 094 euros, il ressort également de l'avis d'imposition de M. et Mme C... pour les revenus de l'année 2011 établi le 31 mai 2015 à la suite du contrôle diligenté par la direction de contrôle fiscal d'Ile-de-France que le vérificateur, après avoir déterminé le revenu imposable des intéressés, a notamment déduit la somme de 12 094 euros mentionnée dans la rubrique charges déductibles - autres qui correspond aux versements d'épargne retraite en litige. En conséquence, les versements d'épargne retraite à hauteur de 12 094 euros n'ont donc pas, contrairement à ce que soutiennent les requérants, fait l'objet d'une nouvelle imposition le 31 mai 2015 mais ont été au contraire déduits des bases imposables des requérants.

7. Comme il a été indiqué au point 6 du présent arrêt, les versements de cotisations d'épargne retraite n'ont pas fait l'objet d'une double imposition. Dans ces conditions, leur demande de compensation doit être rejetée.

8. Il résulte de tout ce qui précède que M. et Mme C... ne sont pas fondés à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Melun a rejeté leur demande. Doivent être rejetées, par voie de conséquence, leurs conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

D E C I D E :

Article 1er : La requête présentée par M. et Mme C... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. et Mme C... et au ministre de l'économie, des finances et de la relance.

Copie en sera adressée à la direction spécialisée de contrôle fiscal d'Ile-de-France (Division juridique).

Délibéré après l'audience du 10 janvier 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Carrère, président de chambre,

- M. Simon, premier conseiller,

- Mme Boizot, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe de la Cour, le 28 janvier 2022.

La rapporteure,

S. BOIZOTLe président,

S. CARRERE

La greffière,

C. DABERT

La République mande et ordonne au ministre de l'économie, des finances et de la relance en ce qui le concerne, ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA04316


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 9ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA04316
Date de la décision : 28/01/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Analyses

19-04-02-01-08 Contributions et taxes. - Impôts sur les revenus et bénéfices. - Revenus et bénéfices imposables - règles particulières. - Bénéfices industriels et commerciaux. - Calcul de l'impôt.


Composition du Tribunal
Président : M. CARRERE
Rapporteur ?: Mme Sabine BOIZOT
Rapporteur public ?: M. SIBILLI
Avocat(s) : GUILLOT

Origine de la décision
Date de l'import : 08/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-01-28;21pa04316 ?
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