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01/02/2022 | FRANCE | N°20PA01944

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 01 février 2022, 20PA01944


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... a demandé au Tribunal administratif de Melun de reconnaître l'illégalité de la décision par laquelle l'institut de formation en soins infirmiers (IFSI) des Hôpitaux de Saint-Maurice a mis fin à sa formation, d'ordonner à cet IFSI de produire les éléments expliquant la situation de blocage dans laquelle elle se trouve afin qu'elle puisse s'inscrire dans un autre institut, d'ordonner à l'IFSI de lui verser une somme globale de

56 710 euros en réparation des préjudices qu'elle estime

avoir subis et de mettre à la charge de cet institut une somme de 1 500 euros en...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme C... B... a demandé au Tribunal administratif de Melun de reconnaître l'illégalité de la décision par laquelle l'institut de formation en soins infirmiers (IFSI) des Hôpitaux de Saint-Maurice a mis fin à sa formation, d'ordonner à cet IFSI de produire les éléments expliquant la situation de blocage dans laquelle elle se trouve afin qu'elle puisse s'inscrire dans un autre institut, d'ordonner à l'IFSI de lui verser une somme globale de

56 710 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis et de mettre à la charge de cet institut une somme de 1 500 euros en application des dispositions de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Par un jugement n° 1810404 du 12 juin 2020, le Tribunal administratif de Melun a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 28 juillet 2020, Mme B..., représentée par

Me Gozlan, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Melun du 12 juin 2020 ;

2°) de " reconnaitre l'illégalité de la décision de suspension " prise par l'IFSI JB Pussin ;

3°) d'ordonner à l'IFSI JB Pussin de produire les éléments expliquant " la situation de blocage " de Mme B... afin de lui permettre de s'inscrire dans un autre IFSI ;

4°) d'ordonner à l'IFSI JB Pussin de lui verser une somme de 26 400 euros au titre des salaires non perçus, une somme de 20 000 euros en réparation de son préjudice moral, une somme de 10 000 euros en réparation de son préjudice financier, et une somme de 310 euros au titre des frais de scolarité qu'elle a acquittés.

5°) de mettre à la charge de l'IFSI JB Pussin une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- l'IFSI ne pouvait l'exclure au motif qu'elle aurait omis d'indiquer dans son dossier qu'elle était en congé accident du travail alors qu'aucun document ne prévoyait ce type de déclaration, qui n'était pas exigible ;

- cette exclusion a eu lieu sans saisine préalable du conseil de discipline ou d'un conseil pédagogique ;

- cette exclusion est illégale dès lors que rien ne s'opposait à ce qu'elle poursuive sa formation à l'IFSI tout en étant en congé maladie ;

- à cause de cette exclusion de l'IFSI elle a été licenciée de la clinique Clinea ;

- la décision de l'IFSI a créé une situation de blocage l'empêchant de s'inscrire dans un autre IFSI ;

- le tribunal ne pouvait rejeter sa demande pour défaut de liaison du contentieux alors que sa demande préalable, qui tendait à sa réintégration, devait être regardée aussi comme une demande indemnitaire, et qui n'avait pas nécessairement à être chiffrée ;

- elle subit un important préjudice tant matériel, compte tenu notamment des salaires non perçus, que moral, du fait de son attachement à son métier et de l'impossibilité de trouver un autre emploi.

Par un mémoire en défense, enregistré le 23 novembre 2021, les Hôpitaux de

Saint-Maurice, représentés par Me Lesné, demandent à la Cour :

1°) de rejeter la requête, à titre principale pour irrecevabilité, ou, à titre subsidiaire, comme non fondée ;

2°) de mettre à la charge de Mme B... une somme de 1 500 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Ils soutiennent que :

- la requête est irrecevable dès lors qu'elle se borne à reprendre la demande de première instance, en méconnaissance de l'article R. 411-1 du code de justice administrative ;

- la demande de première instance était irrecevable faute de demande indemnitaire préalable ;

- les moyens de la requête ne sont pas fondés.

Par une ordonnance du 29 novembre 2021, la clôture d'instruction a été fixée au

29 décembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu le code de justice administrative.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Labetoulle,

- et les conclusions de Mme Mach, rapporteure publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., épouse A..., aide-soignante exerçant ses fonctions au sein du centre hospitalier Henri Mondor depuis le 1er avril 2008, a été placée en arrêt de travail à la suite d'un accident de service, du 4 septembre 2016 au 10 juillet 2017, puis en congé maladie du

11 juillet 2017 au 10 juillet 2018. Pendant cette période, elle a intégré l'institut de formation en soins infirmier (IFSI) des Hôpitaux de Saint-Maurice le 5 septembre 2016, afin d'y préparer le diplôme d'État d'infirmier. Alors qu'elle s'apprêtait à y commencer sa troisième année de formation, la directrice de cet IFSI a, par courrier du 17 septembre 2018, mis fin à sa formation au motif qu'elle avait dissimulé sa situation administrative au moment de son inscription. Par deux courriels puis un courrier, en date respectivement des 24 septembre 2018, 3 et 12 octobre 2018, Mme B... a sollicité sa réintégration. Celle-ci, toutefois, a été implicitement refusée, ce qui a conduit la clinique Clinea, auprès de laquelle elle devait exercer ensuite ses fonctions, à prononcer son licenciement. Elle a, dès lors, saisi le tribunal administratif de Melun d'une demande par laquelle elle demandait à cette juridiction de reconnaître l'illégalité de la décision de l'institut de formation en soins infirmiers (IFSI) des Hôpitaux de Saint-Maurice de mettre fin à sa formation, d'ordonner à cet institut de formation de produire les éléments expliquant la situation de blocage dans laquelle elle se trouvait afin qu'elle puisse s'inscrire dans un autre institut, et de lui ordonner également de lui verser une somme globale de 56 710 euros en réparation des préjudices qu'elle estime avoir subis. Analysant cette demande comme une requête indemnitaire, le tribunal l'a rejetée pour défaut de liaison du contentieux en l'absence de demande préalable d'indemnisation, par un jugement du 12 juin 2020 dont elle interjette appel.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article R. 421-1 du code de justice administrative, dans sa rédaction applicable : " La juridiction ne peut être saisie que par voie de recours formé contre une décision, et ce, dans les deux mois à partir de la notification ou de la publication de la décision attaquée./ Lorsque la requête tend au paiement d'une somme d'argent, elle n'est recevable qu'après l'intervention de la décision prise par l'administration sur une demande préalablement formée devant elle. (...) ".

3. Or, il ressort des pièces du dossier que, dans ses courriels à la directrice de l'IFSI en date des 24 septembre 2018 et 3 octobre 2018, et dans son courrier du 12 octobre 2018, la requérante sollicitait exclusivement sa réintégration en troisième année de sa formation, sans qu'une telle demande puisse, contrairement à ce qu'elle soutient, être assimilée à une demande indemnitaire. De même, son courrier du 22 octobre suivant tendait uniquement à se voir accorder un entretien. Par ailleurs, Mme B... n'établit ni même n'allègue avoir, postérieurement à l'introduction de sa demande devant le tribunal administratif de Melun, procédé à la régularisation de celle-ci en formant une demande indemnitaire auprès des hôpitaux de Saint-Maurice dont dépend l'IFSI J.B Pussin. Dès lors, en l'absence de liaison du contentieux, sa demande ne pouvait qu'être rejetée comme irrecevable, comme l'ont jugé à bon droit les premiers juges.

4. Par ailleurs, le juge administratif, lorsqu'il rejette une demande pour irrecevabilité, n'est pas tenu de se prononcer sur le bien-fondé des conclusions qu'elle contient. Dès lors, à supposer que Mme B... doive être regardée comme soulevant un moyen tiré de ce que le tribunal, bien que rejetant sa demande en raison du défaut de liaison du contentieux, aurait dû néanmoins l'examiner au fond, un tel moyen ne peut qu'être rejeté.

5. Il résulte de tout ce qui précède, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la recevabilité de la requête d'appel, que Mme B... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Sur les conclusions tendant à ce qu'il soit enjoint à l'IFSI JB Pussin " de produire les éléments expliquant " la situation de blocage " de Mme B... épouse A... afin qu'elle puisse s'inscrire dans un autre IFSI " :

6. Aux termes de l'article L.911-1 du code de justice administrative : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne une mesure d'exécution dans un sens déterminé, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision, cette mesure assortie, le cas échéant, d'un délai d'exécution./ La juridiction peut également prescrire d'office cette mesure ". Aux termes de l'article L. 911-2 du même code : " Lorsque sa décision implique nécessairement qu'une personne morale de droit public ou un organisme de droit privé chargé de la gestion d'un service public prenne à nouveau une décision après une nouvelle instruction, la juridiction, saisie de conclusions en ce sens, prescrit, par la même décision juridictionnelle, que cette nouvelle décision doit intervenir dans un délai déterminé. /La juridiction peut également prescrire d'office l'intervention de cette nouvelle décision ". En dehors des cas prévus par ces dispositions, il n'appartient pas au juge administratif d'adresser des injonctions à l'administration. Or, le présent arrêt, qui rejette les conclusions indemnitaires de Mme B..., n'implique pas qu'il soit enjoint à l'IFSI JB Pussin de produire quelques documents que ce soit. Par suite, les conclusions tendant à ce que soit prononcée une telle injonction ne peuvent qu'être rejetées.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

7. Ces dispositions font obstacle à ce que soit mise à la charge des Hôpitaux de

Saint-Maurice la somme demandée par Mme B... au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de

Mme B... la somme demandée par les Hôpitaux de Saint-Maurice sur le même fondement.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de Mme B... est rejetée.

Article 2 : Les conclusions des Hopitaux de Saint-Maurice présentées au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme C... B... et aux Hôpitaux

de Saint-Maurice

Délibéré après l'audience du 18 janvier 2022 à laquelle siégeaient :

- M. Célérier, président de chambre,

- M. Niollet, président-assesseur,

- Mme Labetoulle, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er février 2022

La rapporteure,

M-I. LABETOULLELe président,

T. CELERIER

La greffière,

K. PETIT

La République mande et ordonne au ministre des solidarités et de la santé en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 20PA01944


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA01944
Date de la décision : 01/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Plein contentieux

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: Mme Marie-Isabelle LABETOULLE
Rapporteur public ?: Mme MACH
Avocat(s) : CABINET HOUDART

Origine de la décision
Date de l'import : 08/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-02-01;20pa01944 ?
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