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03/02/2022 | FRANCE | N°21PA04340

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 1ère chambre, 03 février 2022, 21PA04340


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 6 août 2020 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2107137/1-3 du 7 juillet 2021 le tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 29 juillet 2021, Mme C..., représenté

e par Me de Sousa, demande à la Cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle prov...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme B... C... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 6 août 2020 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2107137/1-3 du 7 juillet 2021 le tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 29 juillet 2021, Mme C..., représentée par Me de Sousa, demande à la Cour :

1°) de l'admettre au bénéfice de l'aide juridictionnelle provisoire ;

2°) de désigner un interprète en langue russe ;

3°) d'annuler le jugement du 7 juillet 2021 par lequel le tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête ;

4°) d'annuler l'arrêté du 6 août 2020 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, et lui a fait obligation de quitter le territoire français ;

5) d'enjoindre au préfet de police, de lui délivrer un titre de séjour, ou, à titre subsidiaire, de procéder au réexamen de sa situation, dans le délai de quinze jours à compter de la décision à intervenir, et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 50 euros par jour de retard ;

6°) de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1000 euros à verser à son conseil au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991.

Elle soutient que :

- l'arrêté contesté est insuffisamment motivé et sa situation personnelle n'a pas été examinée ;

- l'arrêté est entaché d'une erreur de droit au regard des dispositions du 10° de l'article L. 511-4-10° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnait les stipulations de l'article 2 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- il est entaché d'une erreur manifeste d'appréciation de sa situation personnelle.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 décembre 2021, le préfet de police, conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens invoqués ne sont pas fondés.

Mme C... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris du 6 septembre 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de Mme Renaudin,

- et les observations de Me De Sousa, avocat de Mme C....

Considérant ce qui suit :

1. Mme C..., ressortissante géorgienne, née en 1962, entrée en France en mars 2017, a sollicité un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur. Par un arrêté du 6 août 2020, le préfet de police a refusé la délivrance de ce titre, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de destination. Mme C... a contesté cet arrêté devant le tribunal administratif de Paris, lequel par un jugement du 7 juillet 2021, dont elle fait appel, a rejeté sa requête.

Sur la demande d'admission provisoire à l'aide juridictionnelle :

2. Par une décision du 6 septembre 2021, le bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris a admis Mme C... au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale. Par suite, il n'y a pas lieu d'accorder à Mme C... le bénéfice d'une admission provisoire à l'aide juridictionnelle.

Sur la désignation d'un interprète :

3. Aucune disposition applicable, ni aucun principe ne prévoit ou n'exige qu'un étranger qui conteste par voie d'appel un refus de séjour assorti d'une obligation de quitter le territoire et d'une décision fixant le pays de renvoi, bénéficie d'un interprète. Les conclusions présentées devant la cour par Mme C... tendant à la désignation d'un interprète en langue russe, ne peuvent dès lors qu'être rejetées.

Sur les conclusions à fin d'annulation de la décision contestée :

4. En premier lieu, l'arrêté contesté comporte dans ses visas et ses motifs les considérations de droit et de fait sur lesquelles il se fonde et qui permettent de vérifier que l'administration préfectorale a procédé à un examen de la situation particulière de Mme C... au regard des stipulations et des dispositions législatives et réglementaires applicables. Il a pris en compte sa situation privée et familiale en mentionnant qu'elle était veuve et sans enfants. A... mentionnant, au sujet de sa demande pour soins à laquelle la décision se réfère, que, si l'étranger peut avoir accès à un traitement approprié dans son pays d'origine, il ne peut bénéficier d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, sauf circonstance humanitaire exceptionnelle et qu'il lui appartient, pour l'examen de sa situation, de transmettre à l'autorité administrative, les éléments de sa situation personnelle, il s'en déduit que le préfet a nécessairement examiné la situation personnelle de Mme C... au regard des soins nécessaires à son état de santé et d'une éventuelle mesure de régularisation et ne s'est pas estimé lié par l'avis émis par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII). Cet arrêté n'avait pas à mentionner les preuves de l'existence de traitements appropriés dans le pays d'origine de l'intéressée. En application des dispositions du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et d'asile, la décision portant obligation de quitter le territoire français, prise sur le fondement des dispositions du 3° du I de cet article L. 511-1, soit lorsque la délivrance d'un titre de séjour a été refusé à l'étranger, n'a pas à faire l'objet d'une motivation distincte de celle du refus de titre de séjour. Par suite, la requérante n'est pas fondée à soutenir que l'arrêté contesté serait insuffisamment motivé ou entaché d'un défaut d'examen de sa situation.

5. En deuxième lieu, aux termes de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. (...) ".

6. Par un avis du 1er juillet 2020, le collège de médecins de l'OFII, a estimé que l'état de santé de Mme C... nécessitait une prise en charge médicale dont le défaut pouvait entrainer des conséquences d'une exceptionnelle gravité, mais qu'eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans son pays d'origine, elle pouvait y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Il est constant que Mme C... souffre d'une " connectivite mixte associant une sclérodermie, un lupus et un syndrome de Sjögren, associée à une atteinte arthromyalgique inflammatoire et un acrosyndrome sévère ". Mme C... soutient qu'elle ne pourra avoir accès aux soins dans son pays et se prévaut à cet égard d'un certificat du 18 décembre 2020 du praticien qui la suit à l'hôpital Avicenne, au demeurant postérieur à la décision contestée, qui indique que sa " pathologie est extrêmement invalidante et nécessite une prise en charge spécifique qui n'est pas disponible dans son pays d'origine (Géorgie) ". Toutefois, Mme C... a produit au dossier un certificat du 2 décembre 2016 d'un médecin d'un centre de rhumatologie en Géorgie, indiquant que la patiente y a été suivie en ambulatoire pour l'ensemble de ses pathologies qui ont été diagnostiquées en 2007. Si ce certificat mentionne également " qu'à cause du manque d'argent, elle ne peut pas subir un traitement médical approprié " et si Mme C... soutient qu'elle n'a aucune ressource financière lui permettant d'accéder aux médicaments, il ressort du rapport, qu'elle a également versé au dossier, sur la situation du système de santé en Géorgie, qu'il existe un programme de suivi spécifique pour les personnes vulnérables, notamment en fonction de leur faible niveau de ressources, couvrant la quasi-totalité des frais médicaux, y compris le remboursement de 24 médicaments et de ceux nécessaires à certaines pathologies prioritaires. Mme C... n'apporte aucun élément précis pour démontrer que le traitement médicamenteux qu'elle suit, lui serait, malgré ces conditions, inaccessible. Si Mme C... a également versé au dossier un certificat médical du praticien hospitalier qui la suit, du 24 septembre 2021, faisant état de ce que le traitement qu'elle a reçu en Géorgie par corticothérapie, était inadapté à son état de santé, cette circonstance ne démontre pas l'inexistence de soins appropriés à sa pathologie en Géorgie. Par suite, les éléments produits par Mme C... ne sont pas de nature à remettre en cause l'avis du collègue de médecins de l'OFII du 1er juillet 2020 selon lequel elle sera en mesure de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans son pays d'origine, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé en Géorgie. Le moyen tiré de la méconnaissance des dispositions précitées de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile doit être écarté.

7. En troisième lieu, si Mme C... fait valoir qu'elle n'a plus de famille en Géorgie, et qu'elle a un neveu en France, il ne ressort pas des pièces du dossier qu'elle aurait noué des liens privés et familiaux d'une particulière intensité auxquels la décision contestée aurait porté une atteinte excessive, ni ne démontre son intégration dans la société française. Dans ces conditions, si le préfet s'est abstenu d'exercer son pouvoir de régularisation, la décision contestée n'est pas entachée d'erreur manifeste d'appréciation.

8. En quatrième lieu, aux termes de l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, alors en vigueur : " Ne peuvent faire l'objet d'une obligation de quitter le territoire français : (...) / 10° L'étranger résidant habituellement en France si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé du pays de renvoi, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié (...) ".

9. Le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté pour les mêmes motifs que ceux énoncés au point 6 du présent arrêt, Mme C... ne démontrant pas qu'elle ne pourrait avoir accès aux soins dans son pays, ni ne démontrant que son retour y aggraverait les troubles psychologiques dont elle fait état, dont la gravité n'est, au demeurant, pas justifiée par les pièces du dossier.

10. En dernier lieu, Mme C... qui n'établit pas qu'elle ne pourrait pas effectivement bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé en Géorgie, quand bien même elle allègue que son pays connaît une grave crise politique, n'est pas fondée à soutenir qu'un retour y serait contraire au droit de toute personne à la vie protégée par les stipulations de l'article 2 de la convention européenne des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

11. Il résulte de tout ce qui précède que Mme C... n'est pas fondée à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par voie de conséquence, ses conclusions à fin d'injonction et d'astreinte ainsi que celles présentées sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et de l'article 37 de la loi du 10 juillet 1991, ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Il n'y a pas lieu de statuer sur la demande d'admission provisoire de Mme C... au bénéfice de l'aide juridictionnelle.

Article 2 : La requête de Mme C... est rejetée.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme B... C... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 13 janvier 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Lapouzade, président de chambre,

- M. Diémert, président-assesseur,

- Mme Renaudin, première conseillère.

Rendu public par mise à disposition au greffe le 3 février 2022.

La rapporteure,

M. RENAUDINLe président,

J. LAPOUZADE

La greffière,

Y. HERBER

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA04340


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 1ère chambre
Numéro d'arrêt : 21PA04340
Date de la décision : 03/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : M. LAPOUZADE
Rapporteur ?: Mme Mathilde RENAUDIN
Rapporteur public ?: Mme GUILLOTEAU
Avocat(s) : DE SOUSA

Origine de la décision
Date de l'import : 15/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-02-03;21pa04340 ?
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