La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

04/02/2022 | FRANCE | N°21PA01038

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 04 février 2022, 21PA01038


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 7 août 2019 par lequel le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2008084/6-2 du 26 janvier 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 28 février 2021, Mme B..., re

présentée par Me Tigoki, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2008084/6-2 du 26 jan...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 7 août 2019 par lequel le préfet de police a refusé de renouveler son titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2008084/6-2 du 26 janvier 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 28 février 2021, Mme B..., représentée par Me Tigoki, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2008084/6-2 du 26 janvier 2021 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler, pour excès de pouvoir, l'arrêté du préfet de police du 7 août 2019 ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer le titre de séjour sollicité ou, à défaut, de réexaminer sa situation et de lui délivrer pendant cet examen une autorisation provisoire de séjour ;

4°) de mettre les dépens à la charge de l'Etat.

Elle soutient que :

- la décision de refus de séjour méconnaît le 6° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors qu'elle est mère d'un enfant français ;

- elle méconnaît pour les mêmes motifs l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ainsi que l'article 3-1 de la convention de New York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant ;

- la décision portant obligation de quitter le territoire français est entachée d'incompétence, le préfet de police s'étant à tort estimé tenu de la prononcer ;

- elle méconnaît l'article L. 511-4 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ainsi que l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et l'article 3-1 de la convention de New York du 26 janvier 1990 relative aux droits de l'enfant.

Par un mémoire en défense, enregistré le 24 juin 2021, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par Mme B... ne sont pas fondés.

Mme B... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le Tribunal judiciaire de Paris du 25 mars 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- la convention internationale relative aux droits de l'enfant ;

- le code civil ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Hamon a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., de nationalité sénégalaise, s'est mariée en 2013 avec un ressortissant français et, en conséquence, est entrée en France le 10 septembre 2015, munie d'un visa de long séjour. A l'expiration de son visa, et après la séparation des époux, elle a demandé la délivrance d'un titre de séjour en qualité de parent d'un enfant français né le 4 juin 2012. Mme B... fait appel du jugement par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de l'arrêté du 7 août 2019 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer ce titre de séjour et assorti ce refus d'une obligation de quitter le territoire français en fixant le pays de destination pour son éloignement.

Sur les conclusions aux fins d'annulation :

2. Aux termes de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " 1. Toute personne a droit au respect de sa vie privée et familiale, de son domicile et de sa correspondance. / 2. Il ne peut y avoir ingérence d'une autorité publique dans l'exercice de ce droit que pour autant que cette ingérence est prévue par la loi et qu'elle constitue une mesure qui, dans une société démocratique, est nécessaire à la sécurité nationale, à la sûreté publique, au bien-être économique du pays, à la défense de l'ordre et à la prévention des infractions pénales, à la protection de la santé ou de la morale, ou à la protection des droits et libertés d'autrui. ". Par ailleurs l'article 3-1 de la convention internationale relative aux droits de l'enfant stipule que : " Dans toutes les décisions qui concernent les enfants, qu'elles soient le fait des institutions publiques ou privées de protection sociale, des tribunaux, des autorités administratives ou des organes législatifs, l'intérêt supérieur de l'enfant doit être une considération primordiale. ". Il résulte de ces stipulations, qui peuvent être utilement invoquées à l'appui d'un recours pour excès de pouvoir, que, dans l'exercice de son pouvoir d'appréciation, l'autorité administrative doit accorder une attention primordiale à l'intérêt supérieur des enfants dans toutes les décisions les concernant. Elles sont applicables non seulement aux décisions qui ont pour objet de régler la situation personnelle d'enfants mineurs mais aussi à celles qui ont pour effet d'affecter, de manière suffisamment directe et certaine, leur situation.

3. Il est constant qu'à la date de la décision attaquée, Mme B... était mère d'un enfant français, né le 4 juin 2012 et reconnu par son époux le 16 juillet 2012, et d'un second enfant né le 10 octobre 2015, reconnu par son père, qui est de nationalité française, le 29 août 2019. Ce second enfant est également de nationalité française depuis sa naissance dès lors que son père était français à cette date. Si Mme B... ne peut, compte tenu de son niveau de ressources, contribuer à l'entretien de son premier enfant qui vit avec son père, il ressort toutefois des pièces du dossier qu'à la date de la décision attaquée elle vit avec son second enfant dont elle assure la garde, l'éducation et l'entretien. Dans ces circonstances particulières, Mme B... est fondée à soutenir que le refus de lui délivrer un titre de séjour porte atteinte tant à sa vie privée et familiale qu'à l'intérêt supérieur de ses deux enfants. Dès lors, et sans qu'il soit besoin d'examiner les autres moyens de la requête, Mme B... est fondée à demander l'annulation du refus de séjour qui lui a été opposé ainsi que, par voie de conséquence, des décisions par lesquelles le préfet de police lui a fait l'obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination pour son éloignement.

Sur les conclusions à fin d'injonction :

4. Eu égard au motif d'annulation de l'arrêté attaqué ci-dessus retenu et alors qu'il ne résulte pas de l'instruction que des éléments de fait ou de droit nouveaux justifieraient que l'autorité administrative oppose une nouvelle décision de refus, le présent arrêt implique nécessairement que cette autorité délivre à Mme B... un titre de séjour mention " vie privée et familiale ". Par suite il y a lieu d'enjoindre au préfet de police de délivrer ce titre dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt. Dans les circonstances de l'espèce, il n'y a toutefois pas lieu d'assortir cette injonction d'une astreinte.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2008084/6-2 du 26 janvier 2021 du Tribunal administratif de Paris et l'arrêté du préfet de police du 7 août 2019 sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de délivrer à Mme B... une carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... au ministre de l'intérieur et au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 11 janvier 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- Mme Hamon, présidente assesseure,

- Mme Jurin, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 4 février 2022.

La rapporteure,

P. HAMONLe président,

C. JARDINLa greffière,

C. BUOTLa République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA01038


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA01038
Date de la décision : 04/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03-04 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour. - Motifs.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: Mme Perrine HAMON
Rapporteur public ?: M. SEGRETAIN
Avocat(s) : TIGOKI

Origine de la décision
Date de l'import : 15/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-02-04;21pa01038 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award