La jurisprudence francophone des Cours suprêmes


recherche avancée

15/02/2022 | FRANCE | N°21PA00894

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 6ème chambre, 15 février 2022, 21PA00894


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 4 janvier 2021 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné.

Par un jugement n° 2101248/8 du 15 février 2021, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 20 février 2021, e

t un mémoire complémentaire, enregistré le 17 mars 2021, M. B..., représenté par Me Ben Lakhal, demand...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 4 janvier 2021 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné.

Par un jugement n° 2101248/8 du 15 février 2021, le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 20 février 2021, et un mémoire complémentaire, enregistré le 17 mars 2021, M. B..., représenté par Me Ben Lakhal, demande à la Cour :

1°) d'annuler ce jugement du Tribunal administratif de Paris du 15 février 2021 ;

2°) d'annuler l'arrêté du 4 janvier 2021 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il sera éloigné ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de procéder au réexamen de sa demande et de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour dans un délai de quinze jours à compter de la notification de la décision à intervenir, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 200 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il soutient que :

- l'arrêté litigieux méconnaît l'article L. 511-1, 6°, du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que la décision de l'OFPRA ne lui a pas été notifiée ;

- il méconnaît l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales compte tenu du risque de subir des traitements inhumains et dégradants en cas de retour dans son pays d'origine.

Par un mémoire en défense, enregistré le 28 janvier 2022, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient que les moyens soulevés par M. B... sont infondés.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Ont été entendus au cours de l'audience publique :

- le rapport de M. Pagès ;

- et les observations de Me Ben Lakhal pour M. B....

Considérant ce qui suit :

1. M. B..., ressortissant tunisien, né le 16 juin 1990, a fait l'objet d'un arrêté en date du 4 janvier 2021 par lequel le préfet de police l'a obligé à quitter le territoire français, lui a refusé l'octroi d'un délai de départ volontaire et a fixé le pays de destination vers lequel il sera éloigné. M. B... relève appel du jugement du 15 février 2021 par lequel le magistrat désigné par le président du Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur les conclusions à fin d'annulation et sans qu'il soit besoin d'examiner l'autre moyen de la requête:

2. Aux termes du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " I. - L'autorité administrative peut obliger à quitter le territoire français un étranger non ressortissant d'un Etat membre de l'Union européenne, d'un autre Etat partie à l'accord sur l'Espace économique européen ou de la Confédération suisse et qui n'est pas membre de la famille d'un tel ressortissant au sens des 4° et 5° de l'article L. 121-1, lorsqu'il se trouve dans l'un des cas suivants : (...) 6° Si la reconnaissance de la qualité de réfugié ou le bénéfice de la protection subsidiaire a été définitivement refusé à l'étranger ou si l'étranger ne bénéficie plus du droit de se maintenir sur le territoire français en application des articles L. 743-1 et L. 743-2 , à moins qu'il ne soit titulaire d'un titre de séjour en cours de validité.. / (...)". Aux termes de l'article L. 743-1 du même code, dans sa rédaction alors applicable : " Le demandeur d'asile dont l'examen de la demande relève de la compétence de la France et qui a introduit sa demande auprès de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides bénéficie du droit de se maintenir sur le territoire français jusqu'à la notification de la décision de l'office ou, si un recours a été formé, dans le délai prévu à l'article L. 731-2 contre une décision de rejet de l'office, soit jusqu'à la date de la lecture en audience publique de la décision de la Cour nationale du droit d'asile, soit, s'il est statué par ordonnance, jusqu'à la date de la notification de celle-ci. L'attestation délivrée en application de l'article L. 741-1, dès lors que la demande d'asile a été introduite auprès de l'office, vaut autorisation provisoire de séjour et est renouvelable jusqu'à ce que l'office et, le cas échéant, la cour statuent ". Aux termes de l'article R. 723-19 de ce code : " I. - La décision du directeur général de l'office est notifiée à l'intéressé par lettre recommandée avec demande d'avis de réception. (...) III.- La date de notification de la décision de l'office et, le cas échéant, de la Cour nationale du droit d'asile qui figure dans le système d'information de l'office et est communiquée au préfet compétent (...) au moyen de traitements informatiques fait foi jusqu'à preuve du contraire (...) ".

3. En l'espèce, la décision attaquée est fondée sur les dispositions précitées du 6° du I de l'article L. 511-1 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile et il ressort des mentions de la fiche " TelemOfpra n° 18-10-08001 que la décision de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides rejetant la demande d'asile de l'intéressé, qui a été prise le

22 octobre 2020, a été notifiée à M. B... le 24 octobre 2020, et que le pli n'a pas été retiré. Ce dernier conteste toutefois en avoir reçu notification et invoque une erreur d'identité du destinataire. Il produit à cette fin un message de l'OFPRA, reçu sur son portable le

20 janvier 2021, lui indiquant que l'office a statué sur sa demande d'asile et que cette décision lui est envoyée par lettre recommandée, et une lettre de son avocat du 26 janvier 2021, reçue le

28 janvier, demandant à l'OFPRA la production de l'accusé de réception de sa décision, restée sans réponse. Il appartient dès lors au préfet de police de produire des éléments de preuve supplémentaires, en particulier une copie du pli qui serait revenu à l'OFPRA. Or, le préfet de police n'en apporte pas. Par suite, en l'état du dossier, M. B... est fondé à soutenir que l'arrêté attaqué méconnaît l'article L. 511-1 6° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile pour défaut de preuve de notification de la décision de l'OFPRA et à en demander, pour ce motif, l'annulation.

4. Il résulte de ce qui précède que M. B... est fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Sur les conclusions à fin d'injonction:

5. Le présent arrêt implique nécessairement que l'administration réexamine la situation administrative de M. B.... Il y a donc lieu, en vertu de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, d'enjoindre au préfet de police de procéder à ce réexamen, en délivrant à l'intéressé une autorisation provisoire de séjour, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt, sans qu'il soit nécessaire en l'espèce d'assortir cette injonction d'une astreinte.

Sur les conclusions tendant à l'application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative :

6. Il y a lieu, dans les circonstances de l'espèce, de mettre à la charge de l'Etat une somme de 1 500 euros au titre des frais exposés par M. B... et non compris dans les dépens.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2101248/8 du 15 février 2021 du Tribunal administratif de Paris et l'arrêté du 4 janvier 2021 du préfet de police pris à l'encontre de M. B... sont annulés.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de réexaminer la situation administrative de

M. B..., en lui délivrant une autorisation provisoire de séjour, dans un délai de deux mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : L'Etat versera la somme de 1 500 euros à M. B... au titre de l'article

L. 761-1 du code de justice administrative.

Article 4 : Le surplus des conclusions de la requête est rejeté.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié à M. A... B..., au ministre de l'intérieur et au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 1er février 2022 à laquelle siégeaient :

- M. Célérier, président de chambre,

- M. Niollet, président assesseur,

- M. Pagès, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 15 février 2022.

Le rapporteur,

D. PAGES

Le président,

T. CELERIER

La greffière,

Z. SAADAOUI

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne et à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

2

N° 21PA00894


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 6ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA00894
Date de la décision : 15/02/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : M. CELERIER
Rapporteur ?: M. Dominique PAGES
Rapporteur public ?: Mme MACH
Avocat(s) : BEN LAKHAL

Origine de la décision
Date de l'import : 22/02/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-02-15;21pa00894 ?
Association des cours judiciaires suprmes francophones
Organisation internationale de la francophonie
Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie. Juricaf est un projet de l'AHJUCAF, l'association des Cours suprêmes judiciaires francophones. Il est soutenu par l'Organisation Internationale de la Francophonie.
Logo iall 2012 website award