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17/03/2022 | FRANCE | N°20PA04318

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 17 mars 2022, 20PA04318


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Paris l'annulation de l'arrêté du 8 juillet 2020 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2011920 du 3 décembre 2020, le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du préfet de police du 8 juillet 2020, a enjoint au préfet de police de délivrer une carte de séjour à M. A...

dans le délai de trois mois à compter de la notification du jugement et a mis à la charge...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Paris l'annulation de l'arrêté du 8 juillet 2020 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi.

Par un jugement n° 2011920 du 3 décembre 2020, le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du préfet de police du 8 juillet 2020, a enjoint au préfet de police de délivrer une carte de séjour à M. A... dans le délai de trois mois à compter de la notification du jugement et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Procédure devant la Cour :

Par une requête sommaire et un mémoire ampliatif, enregistrés le 31 décembre 2020 et le 25 février 2021, le préfet de police demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2011920 du 3 décembre 2020 du tribunal administratif de Paris ;

2°) de rejeter la demande présentée par M. A... devant le tribunal administratif de Paris.

Il soutient que :

- l'arrêté contesté ne méconnaît pas les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- les autres moyens soulevés en première instance par M. A... ne sont pas fondés.

Par un mémoire en défense, enregistré le 17 mai 2021, M. A..., représenté par Me Ferdi-Martin, conclut au rejet de la requête du préfet de police et à ce qu'une somme de 1 500 euros soit mise à la charge de l'Etat en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Il fait valoir qu'aucun des moyens soulevés par le préfet de police n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé la rapporteure publique, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de M. Aggiouri a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., ressortissant sénégalais né le 11 septembre 1982, a sollicité la délivrance d'un titre de séjour sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 8 juillet 2020, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, l'a obligé à quitter le territoire français dans le délai de trente jours et a fixé le pays de renvoi. Par un jugement du 3 décembre 2020, le tribunal administratif de Paris a annulé cet arrêté, a enjoint au préfet de police de délivrer une carte de séjour à M. A... dans le délai de trois mois à compter de la notification du jugement et a mis à la charge de l'Etat une somme de 1 000 euros au titre de l'article L. 761-1 du code de justice administrative. Le préfet de police relève appel de ce jugement.

Sur la légalité de l'arrêté du préfet de police du 8 juillet 2020 :

2. Aux termes des dispositions alors codifiées au 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : / 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. La condition prévue à l'article L. 313-2 n'est pas exigée. La décision de délivrer la carte de séjour est prise par l'autorité administrative après avis d'un collège de médecins du service médical de l'Office français de l'immigration et de l'intégration, dans des conditions définies par décret en Conseil d'Etat. Les médecins de l'office accomplissent cette mission dans le respect des orientations générales fixées par le ministre chargé de la santé [...] ".

3. Le refus de titre opposé par le préfet de police à M. A... est fondé sur l'avis émis le 5 juin 2020 par le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII), lequel relève que si l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge médicale, le défaut de celle-ci ne devrait pas entraîner pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Pour annuler cette décision comme méconnaissant les dispositions alors codifiées au 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, les premiers juges ont relevé, d'une part, que le traitement médical qui est prescrit à M. A..., qui souffre d'une schizophrénie paranoïde, lui est absolument nécessaire, sous risque de passage à l'acte, d'autre part, que ce traitement n'était pas effectivement disponible au Sénégal. Toutefois, l'arrêté attaqué est fondé, ainsi qu'il a été dit précédemment, non pas sur la disponibilité au Sénégal d'un traitement adapté à l'état de santé de M. A..., mais sur l'appréciation selon laquelle le défaut de prise en charge médicale ne devrait pas entraîner, pour lui, des conséquences d'une exceptionnelle gravité. Dès lors, l'absence de disponibilité, au Sénégal, d'un traitement adapté à l'état de santé de M. A... est sans incidence sur la légalité de l'arrêté contesté. En revanche, il ressort des pièces du dossier que M. A..., suivi depuis au moins 2013 en milieu hospitalier et qui été depuis lors hospitalisé sous contrainte à plusieurs reprises, fait l'objet d'un traitement par injection mensuelle de Zypadhera, ainsi qu'en atteste un certificat médical du 14 janvier 2020, qui indique que l'introduction de cette thérapeutique a permis une " stabilisation de son état clinique " et que son état de santé, aux termes du certificat médical adressé au médecin de l'OFII, en date du 18 février 2020, justifie " des soins à vie ", le praticien faisant état de la " nécessité absolue du traitement ", et, à défaut de traitement, du " risque de passage à l'acte ". Par suite, c'est à tort que le préfet de police a estimé que le défaut de prise en charge médicale ne devrait pas entraîner, pour M. A..., de conséquences d'une exceptionnelle gravité.

4. Il résulte de ce qui précède que le préfet de police n'est pas fondé à se plaindre de ce que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a annulé l'arrêté du 8 juillet 2020.

Sur l'injonction prononcée par les premiers juges :

5. Eu égard à l'illégalité entachant l'arrêté du 8 juillet 2020, qui n'implique pas nécessairement que le préfet de police délivre un titre de séjour à M. A..., le préfet de police est fondé à soutenir que c'est à tort que le tribunal administratif de Paris lui a enjoint de délivrer un titre de séjour à l'intéressé. En l'espèce, l'illégalité entachant cet arrêté implique seulement que le préfet de police réexamine la situation de M. A.... Il y a lieu, en application de l'article L. 911-2 du code de justice administrative, d'enjoindre au préfet de police d'y procéder, dans le délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt. Par suite, le jugement attaqué doit être réformé dans cette mesure.

Sur les frais liés aux instances :

6. D'une part, c'est à bon droit, eu égard aux circonstances de l'espèce, que les premiers juges ont mis à la charge de l'Etat le versement à M. A... B... la somme de 1 000 euros sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

7. D'autre part, il n'y a pas lieu, dans les circonstances de l'espèce de mettre à la charge de l'Etat la somme demandée par M. A..., au titre de l'instance d'appel, sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

DÉCIDE :

Article 1er : L'article 2 du jugement n° 2011920 du 3 décembre 2020 du tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : Il est enjoint au préfet de police de procéder au réexamen de la situation de M. A... dans le délai de trois mois à compter de la notification du présent arrêt.

Article 3 : Le surplus des conclusions de la requête du préfet de police est rejeté.

Article 4 : Les conclusions présentées par M. A... devant la Cour sur le fondement de l'article L. 761-1 du code de justice administrative sont rejetées.

Article 5 : Le présent arrêt sera notifié au ministre de l'intérieur, à M. A... et au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 17 février 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Vinot, présidente de chambre,

- Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure,

- M. Aggiouri, premier conseiller.

Rendu public par mise à dispositions au greffe, le 17 mars 2022.

Le rapporteur,

K. AGGIOURILa présidente,

H. VINOT

La greffière,

F. DUBUY-THIAM

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 20PA04318 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 20PA04318
Date de la décision : 17/03/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-01-03 Étrangers. - Séjour des étrangers. - Refus de séjour.


Composition du Tribunal
Président : Mme VINOT
Rapporteur ?: M. Khalil AGGIOURI
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : REDILEX AVOCATS FERDI-MARTIN PREIRA

Origine de la décision
Date de l'import : 29/03/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-03-17;20pa04318 ?
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