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01/04/2022 | FRANCE | N°21PA01372

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 5ème chambre, 01 avril 2022, 21PA01372


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 24 août 2020 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné à l'issue de ce délai.

Par une ordonnance n° 2015495 du 1er décembre 2020, le président de la 6ème section du tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 16 mars 2021, M. A..., représenté par...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

M. C... A... a demandé au tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 24 août 2020 par lequel le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloigné à l'issue de ce délai.

Par une ordonnance n° 2015495 du 1er décembre 2020, le président de la 6ème section du tribunal administratif de Paris a rejeté cette demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête enregistrée le 16 mars 2021, M. A..., représenté par Me Paulhac, demande à la Cour :

1°) d'annuler l'ordonnance n° 2015495 du 1er décembre 2020 du président de la 6ème section du tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler l'arrêté du 24 août 2020 du préfet de police ;

3°) à titre principal, d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour temporaire mention " vie privée et familiale " dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour, sous astreinte de 15 euros par jour de retard ;

4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de police de procéder au réexamen de sa situation dans un délai d'un mois à compter de la notification de l'arrêt à intervenir et, dans l'attente, de lui délivrer une autorisation provisoire de séjour l'autorisant à travailler ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat le versement à Me Paulhac de la somme de 1 500 euros sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi n°91-647 du 10 juillet 1991.

Il soutient que :

En ce qui concerne la décision portant refus de renouvellement de son titre de séjour :

- elle a été signée par une autorité incompétente ;

- elle a été prise sur le fondement d'un avis médical qui est irrégulier, en ce qu'il ne s'est pas prononcé sur tous les éléments essentiels à son édiction, en ce qu'il été rendu tardivement, en ce que le caractère collégial de l'avis n'est pas démontré, en ce que le préfet n'apporte pas la preuve que le médecin rapporteur ne siégeait pas dans le collège des médecins de l'OFII qui a rendu l'avis, et en ce que l'authenticité des signatures apposées sur l'avis, le cas échéant électroniquement, n'est pas démontrée ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 313-11-11° du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

- elle a été prise sur le fondement d'une décision illégale portant refus d'un titre de séjour.

En ce qui concerne la décision fixant le pays d'éloignement :

- elle a été prise sur le fondement d'une décision illégale portant obligation de quitter le territoire français ;

- elle méconnaît les dispositions de l'article L. 513-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile dès lors que le préfet de police n'a pas procédé à un examen sérieux de sa situation personnelle au regard des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense enregistré le 22 novembre 2021, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par M. A... n'est fondé.

M. A... a été admise au bénéfice de l'aide juridictionnelle totale par une décision du bureau d'aide juridictionnelle près le tribunal judiciaire de Paris du 12 février 2021.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ;

- le code de justice administrative.

La présidente de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Vrignon-Villalba a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. M. A..., né le 17 novembre 1964 à Gharbeya (Egypte), a sollicité la délivrance d'une carte de séjour mention " vie privée et familiale " sur le fondement du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 24 août 2020, le préfet de police a refusé de lui délivrer un titre de séjour, lui a fait obligation de quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays à destination duquel il pourra être éloignée à l'issue de ce délai. M. A... relève appel de l'ordonnance du 1er décembre 2020 par laquelle le président de la 6ème section du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande tendant à l'annulation de cet arrêté.

En ce qui concerne la décision portant refus de délivrance d'un titre de séjour :

2. Aux termes des dispositions alors codifiées à l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) 11° A l'étranger résidant habituellement en France, si son état de santé nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait avoir pour lui des conséquences d'une exceptionnelle gravité et si, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il ne pourrait pas y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. (...) ". Aux termes des dispositions alors codifiées à l'article R. 313-2 du même code : " Pour l'application du 11° de l'article

L. 313-11, le préfet délivre la carte de séjour au vu d'un avis émis par un collège de médecins à compétence nationale de l'Office français de l'immigration et de l'intégration. / L'avis est émis dans les conditions fixées par arrêté du ministre chargé de l'immigration et du ministre chargé de la santé au vu, d'une part, d'un rapport médical établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration et, d'autre part, des informations disponibles sur les possibilités de bénéficier effectivement d'un traitement approprié dans le pays d'origine de l'intéressé (...) ". Et aux termes de l'article R. 313-23 du même code : " Le rapport médical mentionné à l'article R. 313-22 est établi par un médecin de l'Office français de l'immigration et de l'intégration à partir d'un certificat médical établi par le médecin qui suit habituellement le demandeur ou par un médecin praticien hospitalier inscrits au tableau de l'ordre, dans les conditions prévues par l'arrêté mentionné au deuxième alinéa de l'article R. 313-22. (...) / Le collège à compétence nationale, composé de trois médecins, émet un avis dans les conditions de l'arrêté mentionné au premier alinéa du présent article. La composition du collège et, le cas échéant, de ses formations est fixée par décision du directeur général de l'office. Le médecin ayant établi le rapport médical ne siège pas au sein du collège. (...) / L'avis est rendu par le collège dans un délai de trois mois à compter de la transmission du certificat médical. (...) ".

3. En premier lieu, la décision attaquée a été signée par Mme D..., attachée d'administration de l'Etat, adjointe à la cheffe du 9ème bureau, qui disposait d'une délégation de signature à cette fin, consentie par un arrêté du 16 juin 2020, régulièrement publié au bulletin municipal official de la Ville de Paris. Par suite, le moyen tiré de l'incompétence du signataire de la décision attaquée manque en fait et doit être écarté.

4. En deuxième lieu, la décision attaquée a été prise après que le collège de médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration a estimé, dans un avis émis le 9 juillet 2018, que si l'état de santé de M. A... nécessite une prise en charge médicale dont le défaut pourrait entraîner des conséquences d'une exceptionnelle gravité, eu égard à l'offre de soins et aux caractéristiques du système de santé dans le pays dont il est originaire, il peut y bénéficier effectivement d'un traitement approprié. Cet avis comprenait, dans le respect du secret médical, tous les éléments dont le préfet avait besoin pour apprécier la situation de M. A.... Il a été rendu de façon collégiale, comme en attestent les signatures manuscrites des docteurs Tretout, Baril et Fargeas, ainsi que la mention " Après en avoir délibéré, le collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration émet l'avis suivant ", qui fait foi jusqu'à preuve du contraire. M. A... n'apporte aucun élément de nature à remettre en cause cette mention.

5. Il ressort par ailleurs des pièces du dossier que le rapport médical sur l'état de santé de M. A... prévu à l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile a été établi par un premier médecin, le docteur B..., qui n'a pas siégé au sein du collège des médecins ayant émis l'avis.

6. En outre, la circonstance que l'avis du collège des médecins de l'OFII aurait été rendu, en méconnaissance des dispositions alors codifiées à l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile, plus de trois mois après la transmission à l'Office français de l'immigration et de l'intégration des éléments médicaux concernant l'intéressé n'est pas de nature à entacher cet avis d'irrégularité dans la mesure où, d'une part, le délai imparti par les dispositions de l'article R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile n'est pas prescrit à peine de nullité et, d'autre part, le requérant ne démontre pas que son état médical aurait changé depuis la transmission de ces éléments.

7. Enfin, dans la mesure où il ne ressort pas des pièces du dossier que l'avis aurait fait l'objet d'un procédé de signature électronique, le requérant ne peut davantage invoquer la méconnaissance des dispositions du deuxième alinéa de l'article 1367 du code civil ou du décret du 28 septembre 2017 relatif à la signature électronique. En tout état de cause, le requérant n'apporte aucun élément de nature à faire douter de ce que l'avis, dont les mentions font foi jusqu'à preuve du contraire, a bien été rendu par ses auteurs. Il s'ensuit que cet avis a été émis dans le respect des dispositions des articles R. 313-22 et R. 313-23 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile.

8. En troisième lieu, pour refuser de délivrer à M. A... un titre de séjour, le préfet de police s'est fondé sur l'avis du collège des médecins de l'Office français de l'immigration et de l'intégration qui, ainsi qu'il a été dit au point 4, a relevé que si l'état de santé de l'intéressé nécessite une prise en charge dont le défaut pourrait entrainer pour elle des conséquences d'une exceptionnelle gravité, il peut cependant bénéficier d'un traitement approprié dans son pays d'origine. Pour contester l'appréciation de sa situation au regard des conditions posées par les dispositions précitées du 11° de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile à laquelle s'est ainsi livrée l'autorité préfectorale, M. A... produit essentiellement des ordonnances et compte-rendu d'hospitalisation qui attestent de la gravité de son état de santé, mais sans se prononcer sur leur disponibilité en Egypte. Si M. A... produit également un certificat médical du cardiologue qui le suit, en date du 28 août 2019, qui indique que le niveau de prise en charge auquel M. A... pourrait prétendre en Egypte ne lui permet pas de financer les examens et la thérapeutique médicale dont il a besoin, ce certificat, au demeurant postérieur à la décision attaquée, n'est pas de nature à remettre en cause l'avis porté par le collège de médecins de l'OFII quant à la disponibilité des soins en Egypte. Par ailleurs, les informations générales sur le système de santé en Egypte, qui montrent le poids croissant du secteur privé dans ce pays, ne sont pas suffisantes pour démontrer que M. A... ne pourrait pas y bénéficier d'un traitement approprié à son état de santé, pour des raisons financières. M. A... n'est, dès lors, pas fondé à soutenir que le préfet de police, en lui refusant la délivrance d'un titre de séjour, a méconnu les dispositions du 11° de l'article L. 313-11 précité.

En ce qui concerne la décision portant obligation de quitter le territoire français :

9. Il résulte de ce qui précède que le moyen tiré de ce que la décision portant obligation de quitter le territoire français reposerait sur un refus de séjour illégal doit être écarté.

En ce qui concerne la décision fixant le pays d'éloignement :

10. En premier lieu, il résulte de ce qui a été dit précédemment que le moyen tiré, par voie d'exception, de l'illégalité, de la décision portant obligation de quitter le territoire français doit être écarté.

11. En second lieu, aux termes de l'article L. 513-3 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La décision fixant le pays de renvoi constitue une décision distincte de la mesure d'éloignement elle-même (...) ". Par ailleurs, aux termes des stipulations de l'article 3 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales : " Nul ne peut être soumis à la torture ni à des peines ou traitements inhumains ou dégradants ".

12. La décision attaquée relève que M. A... " n'établit pas être exposé à des peines ou traitements contraires à la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales en cas de retour dans son pays d'origine ou dans son pays de résidence habituelle, où il est effectivement admissible ". Elle est donc suffisamment motivée. Par ailleurs, il ne ressort, pas des pièces du dossier que le préfet de police n'aurait pas procédé à un examen approfondi de sa situation, en particulier au regard des risques que M. A... pourrait encourir en cas de retour dans son pays d'origine. Enfin, à supposer même que M A... ait entendu soulever ce moyen, il ressort de ce qui a été dit au point 8 ci-dessus que le moyen tiré de la méconnaissance des stipulations de l'article 3 de la convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales doit être écarté.

13. Il résulte de tout ce qui précède que M. A... n'est pas fondé à soutenir que c'est à tort que, par le jugement attaqué, le président de la 6ème section du tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par suite, ses conclusions à fins d'annulation doivent être rejetées de même que, par voie de conséquence, ses conclusions à fins d'injonction et celles présentées sur le fondement des dispositions combinées de l'article L. 761-1 du code de justice administrative et du deuxième alinéa de l'article 37 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991.

DÉCIDE :

Article 1er : La requête de M. A... est rejetée.

Article 2 : Le présent arrêt sera notifié à M. C... A... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet police de Paris.

Délibéré après l'audience du 17 mars 2022, à laquelle siégeaient :

- Mme Vinot, présidente de chambre,

- Mme Vrignon-Villalba, présidente assesseure,

- M. Aggiouri, premier conseiller.

Rendu public par mise à disposition au greffe, le 1er avril 2022.

La rapporteure,

C. VRIGNON-VILLALBALa présidente,

H. VINOT

La greffière,

A. MAIGNAN

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21PA01372 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 5ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA01372
Date de la décision : 01/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Composition du Tribunal
Président : Mme VINOT
Rapporteur ?: Mme Cécile VRIGNON-VILLALBA
Rapporteur public ?: Mme LESCAUT
Avocat(s) : PAULHAC

Origine de la décision
Date de l'import : 12/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-04-01;21pa01372 ?
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