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13/04/2022 | FRANCE | N°21PA01033

France | France, Cour administrative d'appel de Paris, 7ème chambre, 13 avril 2022, 21PA01033


Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 15 octobre 2020 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2019039/1-3 du 3 février 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 26 février 2021, Mme B..., représent

e par

Me Bonte, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2019039/1-3 du 3 février 2021 d...

Vu la procédure suivante :

Procédure contentieuse antérieure :

Mme A... B... a demandé au Tribunal administratif de Paris d'annuler l'arrêté du 15 octobre 2020 par lequel le préfet de police a rejeté sa demande de titre de séjour, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et a fixé le pays de destination.

Par un jugement n° 2019039/1-3 du 3 février 2021, le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Procédure devant la Cour :

Par une requête, enregistrée le 26 février 2021, Mme B..., représentée par

Me Bonte, demande à la Cour :

1°) d'annuler le jugement n° 2019039/1-3 du 3 février 2021 du Tribunal administratif de Paris ;

2°) d'annuler pour excès de pouvoir l'arrêté du 15 octobre 2020 du préfet de police ;

3°) d'enjoindre au préfet de police de lui délivrer une carte de séjour dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard ;

4°) à titre subsidiaire, d'enjoindre au préfet de police de réexaminer sa situation dans un délai de trente jours à compter de la notification de l'arrêt, sous astreinte de 100 euros par jour de retard et, dans l'attente, de lui délivrer un récépissé avec une autorisation provisoire de séjour et de travail ;

5°) de mettre à la charge de l'Etat la somme de 2 000 euros en application de l'article L. 761-1 du code de justice administrative.

Elle soutient que :

- le Tribunal a méconnu le principe du contradictoire en clôturant l'instruction avant l'expiration du délai qui lui avait été imparti pour répliquer au mémoire en défense du préfet de police ;

- l'arrêté en litige est entaché d'un défaut de motivation ;

- il est entaché d'erreur manifeste d'appréciation eu égard à sa situation personnelle ;

- il méconnaît les dispositions des articles L. 313-14 et L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- il méconnaît les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales.

Par un mémoire en défense, enregistré le 20 septembre 2021, le préfet de police conclut au rejet de la requête.

Il soutient qu'aucun des moyens soulevés par la requérante n'est fondé.

Vu les autres pièces du dossier.

Vu :

- la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ;

- le code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile ;

- le code des relations entre le public et l'administration ;

- le code de justice administrative.

Le président de la formation de jugement a dispensé le rapporteur public, sur sa proposition, de prononcer des conclusions à l'audience.

Les parties ont été régulièrement averties du jour de l'audience.

Le rapport de Mme Hamon a été entendu au cours de l'audience publique.

Considérant ce qui suit :

1. Mme B..., ressortissante burkinabaise née le 27 septembre 1995 à Ouagadougou, est entrée en France le 23 juillet 2016, selon ses déclarations. Le 25 septembre 2020, elle a sollicité son admission au séjour sur le fondement de l'article L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile. Par un arrêté du 15 octobre 2020, le préfet de police a rejeté sa demande, l'a obligée à quitter le territoire français dans un délai de trente jours et fixé le pays de destination pour son éloignement. Mme B... fait appel du jugement du 3 février 2021 par lequel le Tribunal administratif de Paris a rejeté sa requête tendant à l'annulation de cet arrêté.

Sur la régularité du jugement :

2. Aux termes de l'article R. 611-26 du code de justice administrative : " Sauf lorsqu'il est fait application de l'article R. 611-8, la section ou la chambre fixe le délai dans lequel les mémoires doivent être produits ". Aux termes de l'article R. 613-1 du même code : " Le président de la formation de jugement peut, par une ordonnance, fixer la date à partir de laquelle l'instruction sera close. Cette ordonnance n'est pas motivée et ne peut faire l'objet d'aucun recours ".

3. Il ressort des pièces du dossier que par une ordonnance du 16 décembre 2020, prise sur le fondement de l'article R. 776-11 du code de justice administrative et notifiée à Mme B... le 17 décembre 2020, le Tribunal administratif de Paris a fixé la clôture de l'instruction au 4 janvier 2021 et la date de l'audience publique au 20 janvier 2021. Toutefois, par un courrier du 29 décembre 2020, le mémoire en défense produit par le préfet de police a été communiqué à la requérante, en fixant le délai qui lui était laissé pour répliquer à un mois, ce qu'elle a fait par un mémoire du 15 janvier 2021. Le Tribunal a néanmoins maintenu la date de l'audience au 20 janvier 2021 et n'a pas tenu compte de cette production au motif qu'elle était parvenue au greffe postérieurement à la clôture de l'instruction.

4. Le tribunal administratif ne pouvait, sans avoir préalablement informé Mme B... de ce que le délai qui lui était imparti pour produire ne s'étendait pas au-delà de la date initialement fixée pour la clôture de l'instruction, effectivement maintenir cette clôture de l'instruction ainsi que la date de l'audience à une date à laquelle le délai qu'il avait imparti à la requérante pour produire n'était pas expiré. Par suite, Mme B... est fondée à soutenir que le jugement attaqué est entaché d'irrégularité, et à demander son annulation.

5. Il y a lieu de se prononcer immédiatement par la voie de l'évocation sur la demande présentée par Mme B... devant le Tribunal administratif de Paris.

Sur la légalité de l'arrêté attaqué :

6. En premier lieu, cet arrêté vise les dispositions dont il fait application, et notamment les articles L. 313-11 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Il précise que Mme B..., entrée en France le 23 juillet 2016 selon ses déclarations, a sollicité le 25 septembre 2020 son admission au séjour sur le fondement du 7° de l'article L. 313-11 susmentionné. L'arrêté indique également que la requérante ne remplit pas les conditions prévues à cet article en ce qu'elle n'établit pas de l'intensité de sa vie privée et familiale en France ni du fait qu'elle serait dépourvue d'attaches au Burkina Faso. Enfin cet arrêté précise qu'ainsi, il n'est pas porté une atteinte disproportionnée au droit au respect de la vie privée et familiale de Mme B.... Dès lors, l'arrêté indique les considérations de fait et de droit qui le fondent, et n'est pas insuffisamment motivé.

7. En deuxième lieu, Mme B..., qui déclare être entrée en France le 23 juillet 2016, soutient que sa mère, dont l'état de santé s'est dégradé suite à un accident en date du 22 novembre 2018, nécessite sa présence pour l'aider dans ses tâches quotidiennes, sa sœur, qui réside également au foyer, n'étant pas en capacité d'assister sa mère au quotidien. Elle fait également valoir qu'elle n'a plus de famille au Burkina Faso en ce qu'elle est éloignée de son père et que son autre sœur réside au Québec, et qu'ayant effectué une formation en CAP accompagnant éducatif petite enfance et ainsi que du bénévolat pour une association, elle atteste de son insertion et de l'intensité de sa vie privée et familiale en France. Il ressort toutefois des pièces du dossier, et notamment d'une expertise médicale du 21 décembre 2019, que l'état de santé de la mère de la requérante était consolidé dès le 22 novembre 2019, soit près d'un an avant l'édiction de l'arrêté contesté, et que celle-ci avait pu reprendre une activité professionnelle dès le 1er mars de la même année. La requérante n'établit donc pas que sa présence soit nécessaire pour assister sa mère au quotidien, ni au surplus que sa sœur, étudiante, ne serait pas en mesure d'apporter son assistance. Ainsi la requérante, célibataire sans charge de famille et qui est entrée en France au plus tôt à l'âge de 21 ans, n'établit pas que l'arrêté porte une atteinte disproportionnée au droit au respect de sa vie privée et familiale et méconnaît, de ce fait, les stipulations de l'article 8 de la convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales. Pour les mêmes motifs, elle n'est pas plus fondée à soutenir que le préfet aurait entaché son arrêté d'une erreur manifeste dans l'appréciation de sa situation personnelle.

8. En troisième lieu, aux termes de l'article L. 313-14 du code de l'entrée et du séjour des étrangers et du droit d'asile : " La carte de séjour temporaire mentionnée à l'article L. 313-11 ou la carte de séjour temporaire mentionnée aux 1° et 2° de l'article L. 313-10 peut être délivrée, sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, à l'étranger ne vivant pas en état de polygamie dont l'admission au séjour répond à des considérations humanitaires ou se justifie au regard des motifs exceptionnels qu'il fait valoir, sans que soit opposable la condition prévue à l'article L. 313-2 ". Aux termes de l'article L. 313-11 du même code : " Sauf si sa présence constitue une menace pour l'ordre public, la carte de séjour temporaire portant la mention " vie privée et familiale " est délivrée de plein droit : (...) / 7° A l'étranger ne vivant pas en état de polygamie, qui n'entre pas dans les catégories précédentes ou dans celles qui ouvrent droit au regroupement familial, dont les liens personnels et familiaux en France, appréciés notamment au regard de leur intensité, de leur ancienneté et de leur stabilité, des conditions d'existence de l'intéressé, de son insertion dans la société française ainsi que de la nature de ses liens avec la famille restée dans le pays d'origine, sont tels que le refus d'autoriser son séjour porterait à son droit au respect de sa vie privée et familiale une atteinte disproportionnée au regard des motifs du refus, sans que la condition prévue à l'article L. 313-2 soit exigée. L'insertion de l'étranger dans la société française est évaluée en tenant compte notamment de sa connaissance des valeurs de la République ".

9. Il ressort des éléments rappelés au point 7 que Mme B... ne remplit pas les conditions lui permettant de se voir octroyer de plein droit un titre de séjour " vie privée et familiale " sur le fondement des dispositions du 7° de l'article L. 313-11 précité, ni, en tout état de cause, celles prévues à l'article L. 313-14 précité du même code. Par suite, le moyen tiré de la méconnaissance de ces dispositions doit être écarté.

10. Il résulte de tout ce qui précède que Mme B... n'est pas fondée à demander l'annulation de l'arrêté du 15 octobre 2020 du préfet de police. Par voie de conséquence, ses conclusions à fins d'injonction et d'astreinte, ainsi que celles présentées sur le fondement des articles L. 761-1 du code de justice administrative, ne peuvent qu'être rejetées.

DÉCIDE :

Article 1er : Le jugement n° 2019039/1-3 du 3 février 2021 du Tribunal administratif de Paris est annulé.

Article 2 : La demande présentée par Mme B... devant le Tribunal administratif de Paris et le surplus des conclusions de sa requête d'appel sont rejetés.

Article 3 : Le présent arrêt sera notifié à Mme A... B... et au ministre de l'intérieur.

Copie en sera adressée au préfet de police.

Délibéré après l'audience du 29 mars 2022, à laquelle siégeaient :

- M. Jardin, président de chambre,

- Mme Hamon, présidente assesseure,

- Mme Jurin, première conseillère,

Rendu public par mise à disposition au greffe le 13 avril 2022.

La rapporteure,

P. HAMONLe président,

C. JARDIN

Le greffier,

C. MONGIS

La République mande et ordonne au ministre de l'intérieur en ce qui le concerne ou à tous huissiers de justice à ce requis en ce qui concerne les voies de droit commun contre les parties privées, de pourvoir à l'exécution de la présente décision.

N° 21PA01033 2


Synthèse
Tribunal : Cour administrative d'appel de Paris
Formation : 7ème chambre
Numéro d'arrêt : 21PA01033
Date de la décision : 13/04/2022
Type d'affaire : Administrative
Type de recours : Excès de pouvoir

Analyses

335-03-01-02 Étrangers. - Obligation de quitter le territoire français (OQTF) et reconduite à la frontière. - Légalité externe. - Motivation.


Composition du Tribunal
Président : M. JARDIN
Rapporteur ?: Mme Perrine HAMON
Rapporteur public ?: M. SEGRETAIN
Avocat(s) : BONTE

Origine de la décision
Date de l'import : 19/04/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant URN:LEX : urn:lex;fr;cour.administrative.appel.paris;arret;2022-04-13;21pa01033 ?
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